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Décisions

TUE, 6e ch., 30 avril 2014, n° T-179/09

TRIBUNAL DE L'UNION EUROPÉENNE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Dunamenti Eromu Zrt

Défendeur :

Commission européenne

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Kanninen

Juges :

MM. Berardis (rapporteur), Wetter

Avocats :

Mes Spence, Philippe, Boret

TUE n° T-179/09

30 avril 2014

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

Antécédents du litige

Informations concernant la requérante

1 La requérante, Dunamenti Eromu Zrt, est un producteur d'électricité sur le marché de l'électricité hongrois, qui exploite une centrale électrique située environ à 30 km au sud de Budapest (Hongrie). Il s'agit d'une ancienne entreprise publique qui a été privatisée au milieu des années 90. Elle est détenue, à environ 75 %, par Electrabel SA, faisant à présent partie elle-même du groupe dont GDF Suez SA est la société mère, et, à environ 25 %, par Magyar Villamos Muvek Zrt (ci-après " MVM "), une entreprise publique qui est à la fois active dans la production d'électricité, mais également dans le commerce de gros, la transmission et la revente sur le marché en cause.

2 Le 10 octobre 1995, juste avant sa privatisation, la requérante a conclu un accord d'achat d'électricité avec MVM, qui concernait les unités " blocs F " et " bloc G2 " de sa centrale électrique (ci-après l'" AAE en cause " ou l'" AAE en question "). Cet accord, qui est entré en vigueur en 1996, devait durer, pour ce qui concerne les " blocs F ", fonctionnant au gaz, jusqu'en 2010 et, pour ce qui concerne le " bloc G2 ", équipé d'une turbine à gaz à cycle combinée, jusqu'en 2015.

Accords d'achat d'électricité

3 Comme la requérante, d'autres producteurs d'électricité sur le marché hongrois ont conclu des accords d'achat d'électricité à long terme avec MVM (ci-après les " AAE ").

4 Les AAE se caractérisent principalement par deux éléments. D'une part, ils réservent à MVM la totalité ou la majeure partie de la capacité de production des centrales électriques visées par l'accord.

5 D'autre part, les AAE obligent MVM à acheter auprès de chaque centrale électrique exploitée dans leur cadre une quantité d'électricité minimale déterminée. Ils prévoient ainsi un niveau de prélèvement minimal pour chaque centrale électrique, que MVM est tenue d'acheter chaque année.

6 Les prix ont été fixés dans les AAE comme suit :

- un premier et un second cycle de réglementation des prix, respectivement à partir du 1er janvier 1997 et du 1er janvier 2001, ont d'abord été mis en place ;

- à partir du 1er janvier 2004, la réglementation a prévu la mise en place :

- d'une redevance de capacité pour les capacités réservées, afin de payer la mise à disposition de cette capacité ; cette redevance couvre les coûts fixes et le coût du capital et est acquittée par MVM ;

- d'une redevance d'électricité pour payer le prélèvement minimal prévu, laquelle redevance couvre les coûts variables ; cependant, si MVM n'achète pas cette quantité minimale fixée, elle est alors tenue de payer les coûts des combustibles.

7 Les AAE conclus lors de la période 1995-1996, qui constituent sept des dix AAE examinés par la Commission, y compris l'AAE en cause, faisaient partie intégrante du processus de privatisation des centrales électriques. Ils ont été partiellement modifiés par les parties après la privatisation.

Marché de l'électricité hongrois

8 Le marché de l'électricité hongrois a connu trois régimes consécutifs.

9 Le premier régime, en vigueur du 31 décembre 1991 au 31 décembre 2002, s'articulait autour d'un acheteur unique, à savoir MVM. En effet, les producteurs d'électricité ne pouvaient vendre directement l'énergie qu'audit acheteur unique et lui seul était en droit de fournir l'électricité aux distributeurs régionaux. Conformément à loi hongroise XLVIII de 1994, relative à la production, au transport et à la fourniture d'électricité (ci-après la " première loi sur l'énergie électrique "), cet acheteur unique était tenu d'assurer la sécurité de l'approvisionnement énergétique de la Hongrie en observant le principe du moindre coût.

10 Le deuxième régime, en vigueur du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2007, a été mis en place par la loi de 2001. Dans le cadre de ce régime, un secteur de service public, représentant environ 70 % de la production d'électricité, coexistait avec un secteur concurrentiel, représentant environ 30 % de ladite production. Dans le premier secteur, MVM était le seul grossiste tandis que, dans le second secteur, d'autres opérateurs intervenaient également, MVM opérant seulement pour écouler les quantités excédentaires achetées dans le cadre des AAE et non demandées dans le secteur de service public.

11 Le troisième régime, en vigueur à compter du 1er janvier 2008, a été mis en place par la loi de 2007. Il a notamment aboli le secteur de service public.

Adhésion de la Hongrie à l'Union européenne

12 Le traité entre le Royaume de Belgique, le Royaume de Danemark, la République fédérale d'Allemagne, la République hellénique, le Royaume d'Espagne, la République française, l'Irlande, la République italienne, le Grand-Duché de Luxembourg, le Royaume des Pays-Bas, la République d'Autriche, la République portugaise, la République de Finlande, le Royaume de Suède, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord (États membres de l'Union européenne) et la République tchèque, la République d'Estonie, la République de Chypre, la République de Lettonie, la République de Lituanie, la République de Hongrie, la République de Malte, la République de Pologne, la République de Slovénie, la République slovaque relatif à l'adhésion de la République tchèque, de la République d'Estonie, de la République de Chypre, de la République de Lettonie, de la République de Lituanie, de la République de Hongrie, de la République de Malte, de la République de Pologne, de la République de Slovénie et de la République slovaque à l'Union européenne (JO 2003, L 236, p. 17) a été signé par la Hongrie le 16 avril 2003 et est entré en vigueur le 1er mai 2004 (ci-après le " traité d'adhésion ").

Procédure devant la Commission

13 Par lettre du 31 mars 2004, la Commission des Communautés européennes a reçu des autorités hongroises une notification concernant le décret gouvernemental n°183/2002 (VIII.23.) fixant les modalités relatives à la définition et à la gestion des " coûts échoués " conformément à la procédure (ci-après la " procédure du mécanisme provisoire ") visée à l'annexe IV, chapitre 3, paragraphe 1, sous c), de l'acte d'adhésion à l'Union européenne de la République tchèque, de la République d'Estonie, de la République de Chypre, de la République de Lettonie, de la République de Lituanie, de la République de Hongrie, de la République de Malte, de la République de Pologne, de la République de Slovénie et de la République slovaque, et aux adaptations des traités sur lesquels est fondée l'Union européenne (JO 2003, L 236, p. 797, ci-après l'" acte d'adhésion "). Le décret gouvernemental notifié régit le système de compensation des coûts supportés par MVM en tant que grossiste en électricité. La Commission a enregistré la notification en cause sous la référence HU 1/2004.

14 Par la suite, les autorités hongroises et la Commission ont échangé un certain nombre de lettres officielles concernant la mesure notifiée. La Commission a également reçu des observations de tiers.

15 Par lettre du 13 avril 2005, les autorités hongroises ont retiré la notification concernant le décret gouvernemental n° 183/2002 (VIII.23.). Le 4 mai 2005, conformément au règlement (CE) nº 659-1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d'application de l'article [88 CE] (JO L 83, p. 1), la Commission a, d'office, enregistré, sous la référence NN 49/2005, un dossier d'aide d'État concernant les AAE.

16 Par lettre datée du 24 mai 2005, la Commission a adressé une demande d'informations complémentaires aux autorités hongroises. Après avoir reçu la réponse de la Hongrie et avoir recueilli des informations complémentaires, la Commission a, par lettre du 9 novembre 2005, notifié à la Hongrie sa décision d'ouvrir la procédure prévue à l'article 88, paragraphe 2, CE, concernant les aides d'État C 41/2005.

17 La lettre informant la Hongrie de la décision d'ouverture en raison des doutes quant à la compatibilité de l'AAE en cause avec le marché commun, accompagnée d'un résumé de cette décision invitant toutes les parties intéressées à présenter leurs observations, a été publiée au Journal officiel de l'Union européenne du 21 décembre 2005 (JO C 324, p. 12). À la suite de cette publication, la Commission a reçu les observations notamment des autorités hongroises et des producteurs hongrois d'électricité, dont la requérante. En effet, cette dernière a déposé ses observations par lettre du 13 février 2006.

Décision attaquée

18 Le 4 juin 2008, la Commission a adopté la décision 2009-609-CE concernant les aides d'État C 41/05 accordées par la Hongrie dans le cadre d'accords d'achat d'électricité (JO 2009, L 225, p. 53, ci-après la " décision attaquée ").

19 Après avoir explicité la procédure administrative suivie devant elle, la Commission a effectué une description des AAE, puis a indiqué les motifs justifiant l'ouverture de la procédure concernant l'aide d'État (considérants 1 à 87 de la décision attaquée). Elle a ensuite rappelé les différentes observations déposées devant elle, notamment par la Hongrie et par la requérante (considérants 88 à 150 de ladite décision).

20 En outre, la Commission a procédé à une évaluation des AAE. En premier lieu, elle a indiqué que les autorités hongroises ne lui avaient pas notifié, conformément aux règles de procédure des aides d'État, les éléments contenus dans les AAE et que cette aide constituait donc une aide illégale (considérant 151 de la décision attaquée).

21 En deuxième lieu, la Commission a apporté des éléments de réponse aux observations de certaines parties intéressées et de la Hongrie proposant d'évaluer individuellement les AAE. Selon elle, il convenait d'évaluer conjointement les AAE, sans toutefois que cette approche globale empêchât de tenir compte des divergences existant effectivement entre ces AAE (considérants 152 à 154 de la décision attaquée).

22 En troisième lieu, dans la décision attaquée, la Commission a recherché si les quatre conditions cumulatives pour qu'existe une aide d'État, au sens de l'article 87, paragraphe 1, CE, étaient remplies (considérant 155). À cet égard, dans un premier temps, concernant le moment approprié à prendre en considération pour l'évaluation, elle a estimé qu'elle était tenue d'examiner si les AAE répondaient aux critères de l'existence d'une aide d'État au jour de l'adhésion de la Hongrie à l'Union européenne (considérants 156 à 173). Dans un second temps, elle a vérifié si les AAE permettaient l'existence d'un avantage en faveur des producteurs d'électricité (considérants 174 à 276), le caractère sélectif de cet avantage (considérants 277 à 283), si les AAE impliquaient le transfert de ressources d'État (considérants 284 à 318) et l'existence d'une distorsion de concurrence et les effets sur les échanges entre les États membres (considérants 319 à 340).

23 En quatrième lieu, s'interrogeant sur l'applicabilité des AAE après l'adhésion de la Hongrie à l'Union, la Commission a considéré que ceux-ci étaient des mesures réputées applicables après ladite adhésion (considérants 341 à 366 de la décision attaquée).

24 En cinquième lieu, la Commission a évalué si les AAE constituaient une aide nouvelle, par opposition à une aide existante, et en a déduit que les AAE constituaient une aide nouvelle (considérants 367 à 381 de la décision attaquée).

25 En sixième lieu, en réponse aux observations soumises, la Commission a estimé que l'abrogation d'accords de droit privé valablement conclus ne portait pas atteinte aux principes de sécurité juridique et de proportionnalité (considérants 382 à 387 de la décision attaquée).

26 En septième lieu, la Commission a effectué une étude de compatibilité de l'aide d'État en cause au traité CE et en a conclu qu'elle était incompatible (considérants 388 à 436 de la décision attaquée).

27 En huitième lieu, la Commission a analysé la question du remboursement de l'aide d'État en cause (considérants 437 à 467 de la décision attaquée).

28 En conclusion, la Commission a constaté que les AAE fournissaient une aide d'État illégale au sens de l'article 87, paragraphe 1, CE aux producteurs d'énergie électrique hongrois et que cette aide d'État était incompatible avec le marché commun. Elle a ajouté que l'aide d'État relative aux AAE était constituée par l'obligation de MVM d'acheter une certaine capacité et une certaine quantité minimale garantie d'énergie électrique à un prix couvrant les coûts fixes, variables et de capital pendant une partie importante de la durée de vie des unités de production et qui garantissait un retour sur investissement aux producteurs. Dès lors, elle a indiqué qu'il y avait lieu de supprimer ladite aide (considérants 468 à 470 de la décision attaquée).

29 Le dispositif de la décision attaquée se lit comme suit :

" Article premier

1. L'obligation d'achat établie par les [AAE] à long terme conclus entre [MVM] et [la requérante ainsi que six autres producteurs d'électricité hongrois] contient une aide d'État en faveur des producteurs d'énergie électrique selon l'article 87[, paragraphe 1, CE].

2. L'aide d'État évoquée [au paragraphe 1] est incompatible avec le marché commun.

3. La Hongrie supprime l'attribution de l'aide d'État mentionnée [au paragraphe 1] dans un délai de six mois à compter de la réception de la présente décision.

Article 2

1. La Hongrie doit faire rembourser par les bénéficiaires l'aide mentionnée à l'article [1er].

[...]

Article 3

1. Dans un délai de deux mois suivant la notification de cette décision, la République de Hongrie informe la Commission des mesures déjà réalisées et prévues en vue de se conformer à cette décision. Elle l'informe en particulier des progrès réalisés en vue de la réalisation de la simulation de marché nécessaire aux fins d'établir le montant à rembourser, des détails de la [méthode] employée. Elle fournit également une description détaillée des données vouées à être utilisées dans cette simulation.

[...]

Article 4

1. La Hongrie calcule le montant précis de l'aide à rembourser sur la base d'une simulation appropriée du marché de gros de l'énergie électrique tel que celui-ci aurait fonctionné si aucun des [AAE à] long terme mentionné à l'article [1er, paragraphe 1,] n'avait été en vigueur après le 1er mai 2004.

2. Dans un délai de six mois à compter de la notification de la présente décision, la Hongrie calcule selon la méthode mentionnée [au paragraphe 1] les montants à rembourser et soumet à la Commission les informations pertinentes concernant cette simulation, notamment les résultats de la simulation et une description détaillée des méthodes et données utilisées pour exécuter cette simulation.

Article 5

La Hongrie fait en sorte que l'aide mentionnée à l'article [1er] soit remboursée dans un délai de dix mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 6

Le destinataire de cette décision est la République de Hongrie. "

Procédure et conclusions des parties

30 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 28 avril 2009, la requérante a introduit le présent recours.

31 La requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal :

- annuler la décision attaquée et chacune des dispositions opérationnelles du dispositif dans la mesure où elles la concernent ;

- à titre subsidiaire, annuler les articles 2 et 5 de la décision attaquée en ce qu'ils ordonnent la récupération auprès d'elle d'un montant excédant l'aide que la Commission aurait dû considérer comme incompatible avec le marché commun ;

- condamner la Commission aux dépens.

32 La Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal :

- rejeter le recours comme partiellement irrecevable et partiellement non fondé ;

- à titre subsidiaire, rejeter le recours comme non fondé ;

- condamner la requérante aux dépens.

33 Par ailleurs, en réponse aux demandes de la requérante, figurant dans le cadre de la requête ainsi que dans son dispositif, visant, d'une part, à la nomination d'un expert et à la présentation par ce dernier d'un rapport au Tribunal et, d'autre part, à la production de certains documents, la Commission, dans le mémoire en défense déposé au greffe du Tribunal le 7 octobre 2009, a indiqué qu'il y avait lieu de rejeter toutes ces demandes.

34 La procédure écrite a été clôturée le 17 février 2010.

35 Par lettre du 15 septembre 2010, la requérante a transmis au Tribunal une copie de la décision C (2010) 2532 final de la Commission, du 27 avril 2010, autorisant le régime d'aides destiné à compenser les coûts échoués encourus par les producteurs d'électricité signataires des AAE. Cette décision se réfère à la résiliation des AAE par la loi hongroise LXX, approuvée par le Parlement le 10 novembre 2008 (ci-après la " loi hongroise LXX de 2008 "), avec effet au 31 décembre 2008, ainsi qu'à la décision attaquée considérant, à compter du 1er mai 2004, l'aide contenue dans les AAE comme incompatible avec le marché commun et prévoyant la récupération du montant de cette aide.

36 Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 6 décembre 2010, conformément à l'article 64 du règlement de procédure, la requérante a demandé l'adoption de mesures d'organisation de la procédure invitant la Commission à produire des documents auxquels celle-ci se réfère dans la duplique, relatifs aux communications écrites et verbales entre celle-ci et MVM au cours de la procédure administrative ayant précédé l'adoption de la décision attaquée. La Commission a déposé ses observations sur cette demande au greffe du Tribunal par lettre du 6 janvier 2011.

37 Par lettre déposée au greffe du Tribunal également le 6 décembre 2010, conformément à l'article 65, sous d), du règlement de procédure, la requérante a demandé l'adoption d'une mesure d'instruction visant à la nomination d'un expert afin que celui-ci élabore un rapport notamment sur la validité des critiques émises par elle dans sa requête quant à la méthode de récupération préconisée par la décision attaquée. La Commission a déposé ses observations sur cette demande au greffe du Tribunal par lettre du 6 janvier 2011.

38 Par lettre déposée au greffe du Tribunal toujours le 6 décembre 2010, la requérante a indiqué ne pas souhaiter que l'audience dans la présente affaire soit, même sans ordonnance formelle de jonction, fixée en même temps que les audiences dans les affaires, en cours au moment du dépôt de cette lettre, Pannon Hoeromu/Commission (T-352-08), Alpiq Csepel/Commission (T-370-08), AES-Tisza/Commission (T-468-08) et Budapesti Eromu/Commission (T-182-09). S'agissant de ces affaires, portant sur des recours introduits par d'autres producteurs hongrois d'électricité contre la décision attaquée, elle a suggéré au Tribunal de tenir des audiences consécutives, mais séparées. Par décision du Tribunal du 17 janvier 2012, la présente affaire a été attribuée à la sixième chambre et le président de cette chambre a été désigné en qualité de juge rapporteur. Par décision du Tribunal du 21 septembre 2012, un nouveau juge rapporteur a été désigné.

39 Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 23 avril 2012, la requérante a demandé la réouverture de la procédure écrite et l'autorisation de déposer une nouvelle offre de preuve, à savoir l'arrêt Budapesti Eromu/Commission, précité, afin de lui permettre de présenter des observations écrites sur ce dernier. Par cette même lettre, la requérante a renouvelé sa demande de désignation d'un expert, déjà effectuée en date du 6 décembre 2010.

40 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (sixième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale.

41 Conformément à l'article 64 du règlement de procédure, dans le cadre de mesures d'organisation de la procédure, le Tribunal a invité les parties, par lettre du 7 février 2013, à déposer leurs observations sur l'arrêt Budapesti Eromu/Commission, précité, au regard des moyens et arguments développés dans le cadre du présent recours. Les observations des parties ont été déposées au greffe du Tribunal, le 19 février 2013, pour la Commission, et, le 1er mars 2013, pour la requérante.

42 À cet égard, se référant notamment à ses écrits présentés au cours de la procédure écrite, la Commission a indiqué, pour chacun des moyens soulevés, les raisons pour lesquelles le présent recours, comme dans l'affaire Budapesti Eromu/Commission, précitée, devrait être rejeté. Dans le cadre de ses observations, la requérante a avancé que, contrairement aux circonstances existant dans cette dernière affaire, en l'espèce, d'une part, l'AAE en question, conclu avant la privatisation de sa centrale électrique, avait été évalué dans le prix de la privatisation et avait donc été entièrement remboursé à l'État en tant que partie intégrante de la privatisation. Partant, il n'aurait jamais constitué une aide d'État au sens de l'article 87, paragraphe 1, CE. La requérante a avancé que, d'autre part, les achats réels effectués auprès d'elle par MVM auraient excédé l'obligation de prélèvement minimal. Enfin, il serait extrêmement important d'apprécier la validité et la justesse des principes fixés par la Commission concernant le scénario alternatif.

43 La Commission a déposé une lettre en date du 22 avril 2013 au greffe du Tribunal, afin d'apporter un nouvel élément de preuve en réponse à l'argument de la requérante, invoqué dans ses écrits, se référant à l'article 10 du traité sur la charte de l'énergie, signé à Lisbonne, le 17 décembre 1994 (JO L 380, p. 24). Dans ladite lettre, elle s'est référée à une décision, rendue le 30 novembre 2012, par le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI), relative à une procédure introduite par Electrabel, actionnaire majoritaire de la requérante, contre la Hongrie. Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 7 mai 2013, la requérante a émis des observations s'agissant de cette lettre, notamment en ce qui concerne l'absence d'impact de la décision du CIRDI sur le présent recours.

44 Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 22 avril 2013, la Commission a transmis des observations sur le rapport d'audience. Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 10 mai 2013, la requérante a également fait valoir ses observations sur ledit rapport.

45 Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal à l'audience du 15 mai 2013. Par ailleurs, lors de l'audience, le Tribunal a interrogé la Commission concernant son premier chef de conclusions, visant à rejeter le recours comme partiellement irrecevable et partiellement non fondé. En réponse, la Commission a indiqué ne plus contester la recevabilité du présent recours. Partant, le Tribunal a ainsi pris acte de ce que les conclusions de la Commission devaient s'entendre comme visant à rejeter le recours comme non fondé.

En droit

46 À l'appui du recours, la requérante invoque quatre moyens, tirés de ce que, premièrement, la Commission a erronément constaté l'existence d'une aide d'État au sens de l'article 87, paragraphe 1, CE, deuxièmement, à supposer que les accords conclus en 1995 lui accordent une aide d'État , la Commission n'aurait pas dû la considérer comme une aide nouvelle à partir du 1er mai 2004, sinon comme une aide existante, au sens de l'article 88, paragraphe 1, CE, troisièmement, la Commission a commis plusieurs erreurs quant à la compatibilité de l'aide d'État avec le marché commun et, quatrièmement, la légalité de l'ordre de récupération de l'aide prétendument illégale et incompatible avec le marché commun est contestable. En outre, elle apporte une série d'observations quant à certaines affirmations contenues dans la décision attaquée qu'elle souhaite critiquer en particulier. La Commission conteste toutes les allégations de la requérante.

47 Le Tribunal estime opportun d'examiner ensemble les premier et deuxième moyens avant d'examiner successivement les troisième et quatrième moyens.

Sur le premier moyen, tiré d'une violation de la notion d'aide d'État au sens de l'article 87, paragraphe 1, CE, et sur le deuxième moyen, tiré de ce que la Commission aurait dû qualifier les mesures en cause d'aide existante, au sens de l'article 88, paragraphe 1, CE

48 À l'appui des deux premiers moyens, la requérante soulève en substance quatre griefs. Le premier grief est invoqué à l'encontre de la constatation par la Commission de l'existence d'une aide d'État, de la qualification de cette aide d'aide nouvelle ainsi que de la date pertinente retenue pour l'évaluation de l'aide contenue dans l'AAE en cause. Le deuxième grief porte sur l'analyse de la Commission concernant l'application du critère de l'opérateur privé en économie de marché et la position de MVM, en tant qu'acteur du marché, au moment de l'adhésion de la Hongrie à l'Union. Le troisième grief est tiré d'une violation du principe de protection de la confiance légitime et du principe de sécurité juridique. Le quatrième grief est tiré d'une appréciation erronée des spécificités de l'AAE en cause.

Sur le premier grief, invoqué à l'encontre de la constatation par la Commission de l'existence d'une aide d'État, de la qualification de cette aide d'aide nouvelle ainsi que de la date pertinente retenue pour l'évaluation de l'aide contenue dans l'AAE en cause

49 La requérante soutient que la Commission a erronément constaté l'existence d'une aide d'État au sens de l'article 87, paragraphe 1, CE. Selon elle, la Commission a erronément conclu qu'une mesure telle que l'AAE en cause, qui ne constituait pas une aide au sens de l'article 87, paragraphe 1, CE, pouvait ultérieurement, à l'adhésion d'un État à l'Union, être convertie en une aide à laquelle cette disposition s'applique. Contrairement à ce qu'il ressortirait des considérants 158 à 160 de la décision attaquée, ni l'annexe IV, chapitre 3, paragraphe 1, sous c), de l'acte d'adhésion, ni l'article 1er, sous b), v), et sous c), du règlement n° 659-1999 ne permettrait à la Commission de requalifier des AAE d'aide à partir du 1er mai 2004. La requérante estime que, à supposer que les aides conférées par les AAE lui accordent une aide d'État , la Commission n'aurait pas dû considérer la mesure en cause comme une aide nouvelle à partir du 1er mai 2004, sinon comme une aide existante, au sens de l'article 88, paragraphe 1, CE. Dans ses observations déposées au greffe du Tribunal le 1er mars et le 10 mai 2013, mentionnées respectivement aux points 41 et 44 ci-dessus, et ainsi qu'elle l'a fait remarquer de nouveau au cours de l'audience, la requérante a avancé que l'AAE en question, conclu avant la privatisation de sa centrale électrique, avait été évalué dans le prix de la privatisation et avait donc été entièrement remboursé à l'État en tant que partie intégrante de la privatisation. Partant, il n'aurait jamais constitué une aide d'État au sens de l'article 87, paragraphe 1, CE.

50 Il y a lieu de rappeler que, si la Hongrie a adhéré à l'Union le 1er mai 2004, elle a officiellement déposé sa demande d'adhésion le 31 mars 1994 et que l'accord européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d'une part, et la République de Hongrie, d'autre part (JO 1993, L 347, p. 2, ci-après l'" accord européen incluant la Hongrie "), signé le 16 décembre 1991, est entré en vigueur le 1er février 1994. Quant à l'AAE en cause, il a été conclu le 10 octobre 1995.

51 L'article 62, paragraphe 1, sous iii), de l'accord européen incluant la Hongrie prévoit l'incompatibilité, dans la mesure où elle est susceptible d'affecter les échanges entre la Communauté et la Hongrie, de toute aide publique qui fausse ou menace de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions. Le paragraphe 2 de cet article énonce que toute pratique contraire est évaluée sur la base des critères découlant de l'application de l'article 87 CE. Le paragraphe 3 dudit article ajoute que, dans un délai de trois ans à compter de l'entrée en vigueur dudit accord, le conseil d'association, composé, d'une part, de membres du Conseil et de membres de la Commission et, d'autre part, de membres du gouvernement hongrois, adopte les réglementations nécessaires à la mise en œuvre des paragraphes 1 et 2. Au paragraphe 4 du même article, il est prévu que, aux fins de l'application des dispositions du paragraphe 1, sous iii), les parties conviennent que, pendant les cinq premières années suivant l'entrée en vigueur dudit accord, toute aide publique octroyée par la Hongrie est évaluée en tenant compte du fait que ce pays est considéré comme étant une zone identique aux zones de la Communauté visées à l'article 87, paragraphe 3, sous a), CE.

52 En l'espèce, la Commission ne conteste pas la constatation de la requérante selon laquelle, en dépit de ce qui était prévu à l'article 62, paragraphe 3, de l'accord européen incluant la Hongrie, le conseil d'association mentionné au point 51 ci-dessus n'a pas adopté de réglementation pour la mise en œuvre, notamment, du paragraphe 1, sous iii), de cet article. Il est également vrai, comme le soutient la requérante, que l'article 62, paragraphe 2, dudit accord ne se réfère qu'aux règles matérielles d'évaluation d'une aide et non aux règles de procédure, contenues à l'article 88 CE. Toutefois, comme le fait valoir la Commission à juste titre, la décision attaquée n'apprécie pas la compatibilité de l'AAE en cause avec ledit accord européen, mais avec les règles en matière d'aides d'État applicables au 1er mai 2004.

53 Dès lors, même si, au moment où l'AAE en cause a été conclu, la Hongrie n'était tenue d'harmoniser que ses règles matérielles d'évaluation d'aides d'État en conformité avec l'article 87 CE, il n'en demeure pas moins, d'une part, que l'accord européen incluant la Hongrie était précis quant à l'obligation faite à la Hongrie de respecter les règles fondamentales en matières d'aides d'État dans les années précédant son adhésion à l'Union et, d'autre part, que, avec le traité d'adhésion entré en vigueur le 1er mai 2004, l'acquis communautaire en matières d'aides d'État, incluant les règles matérielles comme les règles d'application, était devenu obligatoire en Hongrie.

54 D'ailleurs, afin d'assurer l'adhésion de la Hongrie à l'Union dans les meilleures conditions, l'annexe IV, chapitre 3, de l'acte d'adhésion a prescrit des règles particulières pour les aides existant dans cet État, indépendamment du fait qu'elles ont été prises en conformité avec les dispositions légales nationales en vigueur avant ladite adhésion. En effet, les nouveaux États membres de l'Union ont accepté d'introduire dans cet acte des dispositions spécifiques en vertu desquelles toutes les mesures d'aides applicables après leur adhésion à l'Union et conclues après le 10 décembre 1994 devaient être notifiées à la Commission et examinées par elle sur la base de l'acquis communautaire. Comme la Commission le constate à juste titre au considérant 166 de la décision attaquée, la question du moment pertinent de l'évaluation doit donc être examinée au regard de l'acte susmentionné.

55 L'annexe IV, chapitre 3, paragraphe 1, de l'acte d'adhésion énonce que les mesures étatiques mises à exécution avant l'adhésion, mais qui, d'une part, sont toujours applicables après celle-ci et qui, d'autre part, à la date de l'adhésion, respectent les quatre critères cumulatifs de l'article 87, paragraphe 1, CE, sont soumises aux règles spécifiques établies à ladite annexe soit en tant qu'aides existantes au sens de l'article 88, paragraphe 1, CE, lorsqu'elles relèvent de l'une des trois catégories mentionnées par ladite annexe, soit en tant qu'aides nouvelles à la date de l'adhésion aux fins de l'application de l'article 88, paragraphe 3, CE, lorsqu'elles ne relèvent pas de l'une de ces trois catégories (arrêt Budapesti Eromu/Commission, précité, point 50).

56 Les trois catégories d'aides existantes, mentionnées ci-dessus, visées par l'annexe IV de l'acte d'adhésion sont les suivantes :

- les aides mises à exécution avant le 10 décembre 1994 ;

- les aides énumérées dans l'appendice de ladite annexe ;

- les aides examinées par l'autorité chargée de la surveillance des aides publiques du nouvel État membre avant la date d'adhésion et jugées compatibles avec l'acquis, et à l'égard desquelles la Commission n'a pas soulevé d'objections en raison de doutes sérieux quant à la compatibilité des mesures avec le marché commun, en vertu de la procédure du mécanisme provisoire visée au paragraphe 2.

57 Le paragraphe 1, deuxième alinéa, du même point précise bien que toutes les mesures encore applicables après la date d'adhésion qui constituent une aide publique et ne satisfont pas aux conditions susvisées sont considérées comme des aides nouvelles à la date en question aux fins de l'application de l'article 88, paragraphe 3, CE.

58 L'annexe IV, chapitre 3, paragraphe 2, de l'acte d'adhésion prévoit une procédure de mécanisme provisoire, à savoir qu'il pose le cadre juridique relatif à l'étude des aides. Lorsqu'un nouvel État membre souhaite que la Commission examine une aide dans le cadre de la procédure visée au paragraphe 1, sous c), dudit chapitre, il communique régulièrement à la Commission une série d'informations. Selon le paragraphe 3 de ce chapitre, toute décision de la Commission de soulever des objections à l'égard d'une mesure au sens du paragraphe 1, sous c), du même chapitre, est considérée comme équivalant à une décision d'ouvrir la procédure formelle d'examen au sens du règlement nº 659-1999.

59 En l'espèce, en premier lieu, il est constant que l'AAE en cause a été conclu après le 10 décembre 1994. À ce titre, il ne constitue donc pas une aide existante au sens de l'article 88, paragraphe 1, CE. Ensuite, il est à noter que l'AAE en question ne figure pas dans l'appendice de l'annexe IV de l'acte d'adhésion. Par conséquent, il ne constitue pas non plus une aide existante à ce titre. Enfin, comme la Commission le souligne justement, il est à remarquer que l'AAE en cause n'a pas été examiné ni approuvé dans le cadre du mécanisme provisoire, visé à l'annexe IV, chapitre 3, point 1, sous c), de l'acte susmentionné.

60 Dès lors, il y a lieu de considérer que l'AAE en cause, encore applicable après la date d'adhésion de la Hongrie à l'Union, constitue une aide nouvelle au sens de l'annexe IV de l'acte d'adhésion. Au regard des dispositions de cette annexe, applicables dans les circonstances de l'espèce, cette considération vaut nonobstant la jurisprudence de l'Union, citée par la requérante, selon laquelle constituent notamment des aides existantes les aides instituées avant l'entrée en vigueur du traité ou l'adhésion de l'État membre concerné à l'Union (voir arrêt du Tribunal du 15 juin 2000, Alzetta e.a./Commission, T-298-97, T-312-97, T-313-97, T-315-97, T-600-97 à T-607-97, T-1-98, T-3-98 à T-6-98 et T-23-98, Rec. p. II-2319, point 142, et la jurisprudence citée). En effet, les rédacteurs de l'acte d'adhésion entendaient retenir une telle approche, d'où la définition claire et précise en ce qui concerne la qualification d'une aide existante et celle d'une aide nouvelle dans ledit acte (arrêt Budapesti Eromu/Commission, précité, point 60).

61 En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient la requérante et au vu de ce qui a été exposé aux points 50 à 53 ci-dessus, il est constant que la date pertinente pour statuer sur la question de savoir si une mesure est compatible avec le marché commun ne saurait être la date de conclusion de l'AAE en cause, ni même toute autre date antérieure à la date d'adhésion de la Hongrie à l'Union (arrêt Budapesti/Commission, précité, point 62). Ladite date constituant celle précisément à compter de laquelle l'acquis communautaire et les règles en matière d'aides d'État qui en font partie sont devenus obligatoires pour le nouvel État membre de l'Union, la question de savoir si l'AAE en cause constituait une aide compatible à la date de sa conclusion est donc dépourvue de pertinence. Les arguments soulevés par la requérante à cet égard doivent ainsi être rejetés.

62 En troisième lieu, la Commission a conclu à juste titre, aux considérants 156 à 173 de la décision attaquée, qu'une mesure qui ne constituait pas une aide au sens de l'article 87, paragraphe 1, CE pouvait le devenir ultérieurement, par exemple à compter de la date d'adhésion d'un État à l'Union. En effet, il ressort l'annexe IV, chapitre 3, de l'acte d'adhésion que les États membres de l'Union avant le 1er mai 2004 voulaient protéger le marché intérieur contre les mesures contenant une aide d'État, instaurées dans les pays candidats avant leur adhésion à l'Union et pouvant potentiellement fausser la concurrence, en les soumettant, à compter du 1er mai 2004, au régime des aides nouvelles si elles ne relevaient pas des exceptions précisément énumérées dans l'annexe elle-même. Contrairement à ce qu'affirme la requérante, la question de savoir si l'AAE en cause constituait effectivement une aide d'État avant l'adhésion de la Hongrie à l'Union n'a donc aucune incidence sur sa qualification d'aide d'État à compter de la date d'adhésion.

63 Comme le souligne la Commission, les critères de l'aide d'État revêtent, par définition, un caractère dynamique, puisqu'ils sont liés à la protection de la concurrence sur le marché commun. De la sorte, lorsque les États membres de l'Union conviennent d'apporter un changement majeur aux caractéristiques juridiques et économiques de ce marché, comme dans le cas d'une adhésion d'un État à l'Union, les conditions ayant précédé ce changement ne peuvent être prolongées sans limite temporelle.

64 De plus, le fait qu'une mesure qui n'était pas initialement une aide d'État puisse le devenir par la suite se déduit de l'annexe IV de l'acte d'adhésion et a été admis dans le règlement nº 659-1999.

65 En particulier, le libellé même de l'annexe IV de l'acte d'adhésion laisse clairement entendre qu'une mesure qui n'était pas considérée comme étant une aide d'État, lorsqu'elle a été mise en place, peut en devenir une par la suite. Ladite annexe comporte les dispositions ayant servi de base juridique à l'évaluation, sous l'angle du droit applicable aux aides d'État, des mesures mises à exécution avant la date d'adhésion d'un État à l'Union, mais toujours applicables après ladite date. C'est donc à cette date qu'une mesure encore applicable après la même date doit être évaluée au vu des quatre conditions énoncées à l'article 87, paragraphe 1, CE. Toute autre conclusion aurait pour conséquence de vider de son sens l'objectif voulu par les auteurs du traité d'adhésion (arrêt Budapesti Eromu/Commission, précité, point 54).

66 Par ailleurs, au regard de l'article 1er, sous b), v), première phrase, du règlement n° 659-1999, constitue une aide existante " toute aide qui est réputée existante parce qu'il peut être établi qu'elle ne constituait pas une aide au moment de sa mise en vigueur, mais qui est devenue une aide par la suite en raison de l'évolution du marché commun et sans avoir été modifiée par l'État membre ". Selon la deuxième phrase de cette même disposition " [l]es mesures qui deviennent une aide [à la suite de] la libéralisation d'une activité par le droit communautaire ne sont pas considérées comme [étant] une aide existante après la date fixée pour la libéralisation ". Partant, il peut être envisagé, dans certaines circonstances, que le respect des quatre conditions prévues par l'article 87, paragraphe 1, CE puisse être apprécié à un autre moment que celui de l'entrée en vigueur d'une mesure donnée (arrêt Budapesti Eromu/Commission, précité, point 55).

67 En quatrième lieu, au soutien de son argumentation relative au caractère " inacceptable " de la qualification d'aide d'État, au sens de l'article 87, paragraphe 1, CE, de l'aide contenue dans l'AAE en cause, la requérante prétend qu'il existe une violation du principe de loyauté des transactions commerciales. Selon elle, en considérant, dans la décision attaquée, l'AAE en cause comme une aide d'État à compter du 1er mai 2004 alors que cet accord avait fait partie intégrante du processus de sa privatisation et avait permis à l'État hongrois de dégager des liquidités substantielles, la Commission permettrait à l'État hongrois de tirer les bénéfices d'une transaction commerciale sans satisfaire en retour à ses propres obligations. Dans sa réponse à la mesure d'organisation de la procédure mentionnée aux points 41 et 42 ci-dessus, ainsi que lors de l'audience, elle a encore insisté à cet égard, en indiquant que l'AAE en question, conclu avant la privatisation de sa centrale électrique, avait été évalué dans le prix de ladite privatisation et avait donc été entièrement remboursé à l'État en tant que partie intégrante de cette privatisation.

68 Cependant, les arguments énoncés au point 67 ci-dessus, se fondant en substance sur les circonstances de la privatisation opérée au milieu des années 90, doivent être rejetés au regard de la période pertinente pour l'évaluation des AAE qui débute à compter du 1er mai 2004. En effet, la procédure en l'espèce et la possibilité de qualifier d'aide d'État, au sens de l'article 87, paragraphe 1, CE, l'avantage conféré par les AAE à la requérante porte uniquement sur ladite période, soit presque une décennie après le processus de privatisation. Dès lors, est dénuée de pertinence l'argumentation de la requérante se fondant sur la circonstance que la cession des participations dans le cadre de la privatisation de sa centrale électrique aurait prétendument eu lieu au prix du marché et que le prix payé pour cette privatisation aurait ainsi couvert l'AAE en cause, de telle sorte qu'il ne saurait exister d'aide d'État au sens de l'article 87, paragraphe 1, CE.

69 Comme l'a affirmé la Commission à juste titre au considérant 185 de la décision attaquée, le changement d'actionnariat s'est opéré avant la date à partir de laquelle doit être examinée l'existence d'une aide d'État au sens de l'article 87, paragraphe 1, CE. Il appartenait donc à la Commission d'évaluer seulement si, à compter du 1er mai 2004, la requérante avait bénéficié d'un avantage conféré par les AAE, dans la mesure où lesdits accords reposaient sur l'obligation pour MVM d'acheter des capacités réservées de production d'électricité, ainsi qu'une quantité minimale d'électricité, au prix couvrant les frais fixes et les frais variables.

70 Il convient, dès lors, de rejeter comme inopérante l'argumentation développée par la requérante en ce qui concerne le processus de privatisation, et notamment le prétendu remboursement de l'aide contenue dans l'AAE en cause du fait de la privatisation de celle-ci, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la jurisprudence débattue entre les parties à cet égard lors de l'audience (arrêts de la Cour du 20 septembre 2001, Banks, C-390-98, Rec. p. I-6117 ; du 8 mai 2003, Italie et SIM 2 Multimedia/Commission, C-328-99 et C-399-00, Rec. p. I-4035 ; du 29 avril 2004, Allemagne/Commission, C-277-00, Rec. p. I-3925, et conclusions de l'avocat général M. Tizzano sous cet arrêt, Rec. p. I-3930).

71 Outre la circonstance que de nombreux producteurs européens se sont retrouvés dans une situation semblable à celle de la requérante, il convient de rappeler que la principale raison d'être de la méthode d'analyse des aides d'État liées à des coûts échoués est justement de permettre aux États membres de l'Union d'accorder des aides aux producteurs d'électricité qui ont investi dans des centrales électriques avant la libéralisation du marché de l'électricité, en vue de compenser, en raison de la libéralisation et des conséquences qui en découlent, le coût des investissements réalisés qu'ils ne vont pas pouvoir récupérer pendant la durée d'exploitation des centrales électrique concernées.

72 Cependant, encore faut-il que les autorités compétentes de l'État concerné aient mis en place un mécanisme de compensation des coûts échoués et qu'elles l'aient notifié à la Commission. Or, il ressort du considérant 27 de la décision attaquée que, à la date d'adoption de celle-ci, les autorités hongroises n'avaient toujours pas mené à bien le processus de notification requis en ce qui concerne les coûts échoués. Dès lors, la constatation selon laquelle, à la date de l'adoption de la décision attaquée, il a été ordonné de mettre fin à l'aide contenue dans les AAE alors que les autorités hongroises n'avaient pas encore mis en place un mécanisme garantissant aux producteurs la récupération de leurs coûts échoués éligibles ne permet pas de considérer que la Commission a violé le principe de loyauté des transactions commerciales.

73 Il convient, dès lors, de rejeter le premier grief soulevé par la requérante.

Sur le deuxième grief, portant sur l'analyse de la Commission concernant l'application du critère de l'opérateur privé en économie de marché et la position de MVM, en tant qu'acteur du marché, au moment de l'adhésion de la Hongrie à l'Union

74 Selon la requérante, la Commission n'a pas constaté que l'AAE en question avait octroyé à la requérante une aide lors de la conclusion dudit accord ou à un tout autre moment avant l'adhésion de la Hongrie à l'Union, le 1er mai 2004. À cet égard, elle se réfère à sa communication aux États membres relative à l' application des articles [87 CE] et [88 CE] et de l' article 5 de la directive 80-723-CEE de la Commission aux entreprises publiques du secteur manufacturier (JO 1993, C 307, p. 3, ci-après la " communication de 1993 "), à la jurisprudence de l'Union ainsi qu'à la décision 2009-287-CE de la Commission, du 25 septembre 2007, concernant l'aide d'État accordée par la Pologne dans le cadre d'accords d'achat d'électricité à long terme et l'aide d' État que la Pologne prévoit d'accorder dans le cadre de compensations versées en cas de résiliation volontaire d'un accord d'achat d'électricité à long terme (JO 2009, L 83, p. 1).

75 De plus, la requérante développe son argumentation en se fondant plus précisément sur l'implication de l'application du critère de l'investisseur privé en économie de marché au cas d'espèce. La conclusion de l'AAE en question aurait constitué une condition essentielle et une transaction préalable à une privatisation commercialement nécessaire, faisant partie intégrante d'une restructuration du marché de l'électricité au milieu des années 90. Par ailleurs, la requérante estime que, en tout état de cause, MVM aurait souhaité, pour des raisons purement commerciales, conclure un AAE dans les mêmes conditions, à compter du 1er mai 2004, les AAE étant encore nécessaires à cette date. À cet égard, elle fait observer que la Commission aurait dû étudier les rapports annuels de MVM de 2005 et de 2006.

76 À titre liminaire, il convient de rappeler que le critère de l'opérateur privé en économie de marché trouve application dans l'hypothèse dans laquelle l'État ne fait, en réalité, que se comporter comme le ferait tout opérateur privé agissant dans des conditions normales de marché. Dans une telle circonstance, il n'existe alors pas d'avantage lié à l'intervention de l'État, car l'entité bénéficiaire aurait pu en principe tirer les mêmes bénéfices du simple fonctionnement du marché (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 13 décembre 2011, Konsum Nord/Commission, T-244-08, non publié au Recueil, point 62, et Budapesti Eromu/Commission, précité, point 67).

77 Premièrement, la Commission n'ayant pas commis d'erreur en prenant la date d'adhésion de la Hongrie à l'Union comme date à laquelle a débuté la période pertinente pour l'évaluation de l'AAE en cause, il convient de rejeter l'argument de la requérante selon lequel le critère de l'opérateur privé en économie de marché doit être analysé en fonction du contexte économique prévalant à la date de conclusion des AAE. De plus, au regard de ce qui a été exposé aux points 68 à 70 ci-dessus, l'argumentation de la requérante, réitérée lors de l'audience, se fondant sur la circonstance que la conclusion de l'AAE en question constituait une transaction préalable à sa privatisation ne saurait prospérer.

78 Certes, la communication de 1993, notamment son point 28, se réfère " au moment où la décision d'investissement [ou de] financement a été prise " pour l'examen de l'application du critère de l'opérateur privé en économie de marché. Il n'en reste pas moins que, en réalité, la raison soutenue par la Commission audit point est qu'il " est hors de question que [cette dernière] utilise après coup sa connaissance des faits pour décider " de l'existence d'un avantage. Cela ne saurait pour autant être interprété, dans le contexte spécifique d'une adhésion d'un État membre comme en l'espèce, en ce sens qu'il convient d'analyser le critère de l'opérateur privé en économie de marché à la date de conclusion des AAE, et non à la date d'évaluation pertinente de l'aide en cause.

79 La requérante ne saurait davantage se fonder sur la décision 2009-287. À titre liminaire, concernant l'utilisation, dans l'argumentation, de décisions relatives à des aides d'État pour contester la validité d'une autre décision du même type, il a été jugé que chaque cas d'aide d'État doit être apprécié séparément par le Tribunal, de sorte que les décisions citées par la requérante qui concernent des cas spécifiques et n'ont aucun rapport avec la décision attaquée ne peuvent être pertinentes pour l'appréciation du Tribunal (arrêt du Tribunal du 1er juillet 2009, KG Holding e.a./Commission, T-81-07 à T-83-07, Rec. p. II-2411, point 201).

80 En tout état de cause, si, au considérant 160 de la décision 2009-287, il est indiqué que doit être examiné l'état de la situation au moment de l'entrée en vigueur de la mesure considérée, la Commission ajoute toutefois immédiatement, aux considérants 161 à 163 de ladite décision, que les quatre conditions pour retenir l'existence d'une aide doivent être appréciées conformément aux dispositions du traité d'adhésion et donc, en conséquence, au jour de l'adhésion de la Pologne à l'Union.

81 Deuxièmement, s'agissant de la mise en œuvre du critère de l'opérateur privé en économie de marché par la Commission, critiqué par la requérante, il convient de rappeler que l'appréciation, par la Commission, de la question de savoir si une mesure satisfait à ce critère implique une appréciation économique complexe. La Commission, lorsqu'elle adopte un acte impliquant une telle appréciation, jouit dès lors d'un large pouvoir d'appréciation, et le contrôle juridictionnel se limite à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation, de l'absence d'erreur de droit, de l'exactitude matérielle des faits retenus et de l'absence d'erreur manifeste dans l'appréciation de ces faits ainsi que de l'absence de détournement de pouvoir. En particulier, il n'appartient pas au Tribunal de substituer son appréciation économique à celle de l'auteur de la décision (arrêt Budapesti Eromu/Commission, précité, point 65 ; voir également, en ce sens, ordonnance de la Cour du 25 avril 2002, DSG/Commission, C-323-00 P, Rec. p. I-3919, point 43 ; arrêt du Tribunal du 17 décembre 2008, Ryanair/Commission, T-196-04, Rec. p. II-3643, point 41).

82 Cependant, si le juge de l'Union reconnaît à la Commission une marge d'appréciation en matière économique ou technique, cela n'implique pas qu'il doit s'abstenir de contrôler l'interprétation, par la Commission, de données de cette nature. En effet, dans le respect des arguments avancés par les parties, le juge de l'Union doit, notamment, non seulement vérifier l'exactitude matérielle des éléments de preuve invoqués, leur fiabilité et leur cohérence, mais également contrôler si ces éléments constituent l'ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier une situation complexe et s'ils sont de nature à étayer les conclusions qui en sont tirées (arrêt de la Cour du 2 septembre 2010, Commission/Scott, C-290-07 P, Rec. p. I-7763, point 65, et arrêt Budapesti Eromu/Commission, précité, point 66).

83 En l'espèce, il ressort des considérants 177 à 236 de la décision attaquée que, afin d'évaluer l'existence d'un avantage, la Commission a étudié l'application du critère de l'opérateur privé en économie de marché. La Commission a pris pour référence un opérateur de marché soumis aux mêmes obligations et ayant les mêmes opportunités que MVM et qui est confronté aux mêmes conditions juridiques et économiques que celles prévalant en Hongrie au cours de la période examinée.

84 La Commission a ainsi estimé, aux considérants 177 et 180 à 190 de la décision attaquée, qu'elle devait examiner si, dans les circonstances existant au moment de l'adhésion de la Hongrie, un opérateur de marché aurait accordé aux producteurs d'électricité une garantie semblable à celle prévue dans les AAE, à savoir l'obligation pour MVM d'acheter des capacités réservées de production d'électricité, ainsi qu'une quantité minimale d'électricité, au prix couvrant les frais fixes et les frais variables. Ainsi que cela ressort du considérant 194 de ladite décision, elle a donc recherché dans quelle mesure, en l'absence d'AAE, un opérateur de marché agissant uniquement sur une base commerciale et chargé de fournir aux opérateurs régionaux une quantité d'électricité suffisante aurait offert ou non des garanties semblables à celles prévues par les AAE.

85 Aux fins de cette analyse, la Commission a utilisé son rapport final, du 10 janvier 2007, sur le secteur de l'électricité en Europe [SEC (2006) 1724] (ci-après le " rapport de la Commission de 2007 "). Elle a ainsi identifié et décrit les principales pratiques des acteurs commerciaux sur les marchés européens de l'électricité et a évalué si les AAE étaient conformes à ces pratiques ou s'ils offraient aux producteurs d'électricité des garanties qu'un acheteur agissant sur une base exclusivement commerciale n'accepterait pas. La comparaison des AAE avec la pratique commerciale habituelle portait sur l'obligation d'achat stipulée dans les AAE par rapport aux principales caractéristiques de contrats que l'on retrouve sur le marché de l'électricité, notamment les contrats " à terme " et " spot ", les contrats comprenant des " droits de tirage ", les contrats à long terme conclus avec les grands utilisateurs finals (considérants 191 à 215 de la décision attaquée).

86 Cette approche doit être approuvée. En effet, afin d'évaluer le comportement d'un opérateur s'efforçant de se procurer un certain volume d'électricité dans les meilleures conditions commerciales possibles, il y a lieu d'examiner tous les arrangements contractuels qui sont susceptibles de régir un tel achat (arrêt Budapesti Eromu/Commission, précité, point 69).

87 Or, comme le soutient la Commission au considérant 209 de la décision attaquée, les AAE comportent moins de risques pour les producteurs d'électricité que les contrats " spot ", qui sont généralement des contrats relatifs au jour suivant, lesquels sont conclus le jour qui précède la livraison effective et qui comportent donc notamment un élément d'incertitude majeur pour ce qui est de la rémunération des coûts fixes et de capital ainsi que du taux d'utilisation des capacités de production. En effet, sur les marchés " spot ", les échanges d'électricité se fondent sur des prix marginaux garantissant uniquement la couverture des coûts à court terme et non celle de tous les coûts fixes et de capital. Étant donné l'impossibilité de stocker l'électricité après la production, de façon rentable, aucune garantie n'existe en ce qui concerne le taux d'utilisation de la capacité de production.

88 Tel est également en partie le cas pour les contrats " à terme ", dont les prix sont fixés à l'avance. Ainsi que cela résulte notamment du considérant 210 de la décision attaquée, de façon générale, ces contrats " à terme " se caractérisent par une obligation pour le producteur de fournir à un prix déterminé à l'avance une quantité d'électricité définie pendant une période d'un an débutant au maximum six ans après la signature du contrat. Ces contrats ne garantissent donc pas aux producteurs une couverture de tous les coûts fixes et de capital, car les coûts de production peuvent augmenter en cas d'augmentation des coûts du combustible. L'évolution du coût du combustible pour les contrats " à terme " est donc supportée par les producteurs et non, comme en l'espèce, par MVM. Par ailleurs, même si, pour les contrats " à terme ", eu égard à la durée plus longue de ces contrats, l'incertitude en ce qui concerne le taux d'utilisation des capacités de production est moindre que pour les contrats " spot ", de tels contrats ne couvrent, toutefois, qu'une période limitée par rapport à la durée de vie des unités de production. Il résulte de cette comparaison que la combinaison " réservation de capacités d'électricité à long terme, garantie d'achat minimum et mécanisme de fixation des prix couvrant les coûts fixes et de capital " telle qu'établie par les AAE ne correspond pas aux contrats habituels conclus sur les marchés de gros européens.

89 En effet, par rapport aux contrats " spot " et " à terme ", les AAE comportent moins de risques pour les producteurs en leur offrant une sécurité du point de vue, d'une part, de la rémunération des coûts fixes et de capital et, d'autre part, du taux d'utilisation des capacités de production.

90 Quant aux " droits de tirage ", mentionnés au considérant 214 de la décision attaquée, la différence essentielle existant entre cette forme d'accord et les AAE réside dans le fait que ces droits ne sont généralement assortis d'aucune obligation d'achat minimal.

91 De même, la Commission a pu conclure, au considérant 215 de la décision attaquée, que les contrats d'achat " à long terme conclus par les grands utilisateurs " étaient beaucoup plus avantageux pour l'acheteur que les AAE ne l'étaient pour MVM, dès lors, d'une part, que le prix fixé dans ces contrats, qui n'est normalement pas indexé sur des paramètres tels que les coûts de combustibles, n'était pas déterminé de manière à couvrir les coûts fixes et de capital et, d'autre part, que ces contrats étaient conclus pour une durée nettement inférieure à celle des AAE.

92 Dès lors, à l'issue de son examen, la Commission est parvenue, à juste titre, à la conclusion que, en raison de leur structure, les AAE confèrent aux producteurs une garantie supérieure à celle des accords commerciaux habituels (considérant 217 de la décision attaquée).

93 La Commission a ensuite, à juste titre, mis en exergue les conséquences prévisibles des AAE pour les autorités publiques, à savoir que, si MVM était en mesure de s'approvisionner en électricité en des quantités suffisantes pour satisfaire la demande du secteur de service public sur une longue durée, cependant, les autorités publiques ne disposaient d'aucune garantie sur le niveau du prix à payer pour l'électricité au cours de cette période, les AAE ne protégeant pas contre la fluctuation des prix résultant principalement de la fluctuation des prix des combustibles. De plus, comme l'a souligné la Commission, la réservation de capacité à long terme et le prélèvement minimal obligatoire dont elle s'accompagne privent les autorités publiques de la possibilité de bénéficier de prix plus attractifs proposés par d'autres producteurs (voir, notamment, considérants 218 à 220 et 221 à 234 de la décision attaquée).

94 Il s'ensuit que la Commission a conclu à juste titre, au considérant 235 de la décision attaquée, que les avantages dont les autorités publiques bénéficiaient par le biais des AAE n'incluaient pas la protection contre une hausse du prix des combustibles, que tout opérateur attendrait d'un accord à long terme. Un opérateur prudent avec des considérations purement commerciales n'aurait pas accepté de tels effets et aurait conclu d'autres types d'accords conformes à la pratique commerciale habituelle.

95 Les considérations qui viennent d'être énoncées ne sauraient être remises en cause par les allégations de la requérante se fondant sur le contenu des rapports annuels de MVM de 2005 et de 2006. Certes, comme la requérante le soutient, MVM indique, dans son rapport annuel de 2005, que " les AAE de long terme exercent un rôle clé afin de maintenir le rôle de l'entreprise en tant que leader du marché". Il n'en reste pas moins que, ultérieurement dans ledit rapport annuel, MVM déclare que " l'entreprise a consenti des efforts considérables pour modifier les AAE de long terme afin de spécifier des conditions plus favorables, ceci toutefois, en raison de l'attitude adverse des entreprises énergétiques, n'ayant pu que faciliter une adaptation flexible sous les conditions prévues par les AAE ". En outre, concernant le rapport annuel de MVM de 2006, la requérante se borne à indiquer qu'il contient des observations semblables à ce qu'elle allègue concernant le rapport annuel de MVM de 2005, sans toutefois apporter de précisions à cet égard.

96 Enfin, doit être écartée la critique de la requérante à l'encontre de la Commission, formulée dans le cadre de sa demande de mesure d'organisation de la procédure déposée au greffe du Tribunal le 6 décembre 2010 et mentionnée au point 36 ci-dessus. En substance, la requérante fait valoir que, au point 23 de la duplique, la Commission a indiqué que " [r]ien dans les commentaires présentés par MVM au cours de la procédure formelle d'examen [...] ne montr[ait] que MVM [avait] explicitement déclaré que le maintien des AAE après 2004 servait ses propres intérêts commerciaux ", alors que la décision attaquée ne mentionnerait pas la position défendue par MVM dans ses observations présentées au cours de la procédure formelle d'examen. À cet égard, en réponse à une question du Tribunal formulée lors de l'audience, la Commission a informé le Tribunal que, au cours de la procédure formelle d'examen, MVM avait soumis de brèves observations et que, dans ces observations, celle-ci n'avait indiqué nulle part que maintenir les AAE en vigueur aurait été dans son intérêt. Cette constatation n'est pas de nature, toutefois, à remettre en cause la conclusion à laquelle la Commission est parvenue au considérant 217 de la décision attaquée selon laquelle, en raison de leur structure, les AAE confèrent aux producteurs une garantie supérieure à celle des accords commerciaux habituels.

97 Au vu de ce qui précède, il y a lieu de considérer que la Commission a correctement examiné l'AAE en cause sous l'angle du critère de l'opérateur privé en économie de marché, ainsi que la position de MVM, en tant qu'acteur du marché, à l'égard de l'AAE en cause au moment de l'adhésion de la Hongrie à l'Union.

98 Par conséquent, le deuxième grief doit être rejeté comme non fondé.

Sur le troisième grief, tiré d'une violation du principe de protection de la confiance légitime et du principe de sécurité juridique

99 La requérante soutient que le fait qu'une mesure, qui ne constituait nullement l'octroi d'une aide, puisse être traitée comme si ladite mesure " devenait " une aide d'État, au sens de l'article 87, paragraphe 1, CE, aurait comme conséquence une violation du principe de sécurité juridique. De plus, invoquant l'application dudit principe et du principe de protection de la confiance légitime, qui constituent, selon elle, des principes fondamentaux du droit communautaire ne pouvant être supplantés ni par le règlement n° 659-1999 ni par l'acte d'adhésion, elle affirme que, conformément à l'article 10 du traité sur la charte de l'énergie, la Commission était tenue d'assurer la protection juridique des investissements réalisés dans le secteur de l'énergie. Par ailleurs, elle fait valoir que la Commission aurait dû respecter son obligation de coopération loyale à l'égard de la Hongrie avant d'ouvrir la procédure prévue à l'article 88, paragraphe 2, CE.

100 Il convient de rappeler que le droit de se prévaloir de la confiance légitime suppose la réunion de trois conditions cumulatives. Premièrement, des assurances précises, inconditionnelles et concordantes, émanant de sources autorisées et fiables, doivent avoir été fournies à l'intéressé par l'administration. Deuxièmement, ces assurances doivent être de nature à faire naître une attente légitime dans l'esprit de celui auquel elles s'adressent. Troisièmement, les assurances données doivent être conformes aux normes applicables (voir arrêts du Tribunal du 30 juin 2005, Branco/Commission, T-347-03, Rec. p. II-2555, point 102, et la jurisprudence citée ; du 23 février 2006, Cementbouw Handel & Industrie/Commission, T-282-02, Rec. p. II-319, point 77, et du 30 juin 2009, CPEM/Commission, T-444-07, Rec. p. II-2121, point 126).

101 Quant au principe de sécurité juridique, il exige que les règles du droit de l'Union soient claires et précises, afin que les intéressés puissent s'orienter dans des situations et des relations juridiques relevant de l'ordre juridique de l'Union (ordonnance du Tribunal du 17 octobre 2012, Régie Networks et NRJ Global/Commission, T-340-11, non encore publiée au Recueil, point 30 et la jurisprudence citée).

102 D'une part, la requérante ne prétend à aucun moment avoir reçu quelque assurance que ce soit quant à la nature de l'aide contenue dans l'AAE en cause. Le traité sur la charte de l'énergie, signé notamment par les Communautés européennes et la Hongrie, et ratifié par celles-ci respectivement le 16 décembre 1997 et le 1er avril 1998, et notamment son article 10, portant sur la promotion, la protection et le traitement des investissements dans ce secteur, ne saurait constituer en aucun cas une assurance précise, inconditionnelle et concordante pouvant avoir fait naître à l'égard de la requérante une quelconque attente légitime quant à la compatibilité de l'AAE en question avec les règles du droit de l'Union en matière d'aides d'État.

103 Dès lors, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la pertinence de la décision, citée au point 43 ci-dessus, rendue le 30 novembre 2012 par le CIRDI, à laquelle s'est référée la Commission et que la requérante a considéré comme étant dénuée d'impact sur le présent recours, il y a lieu de considérer que la requérante ne saurait invoquer la violation du principe de protection de la confiance légitime en se fondant sur le traité sur la charte de l'énergie, et notamment son article 10.

104 En tout état de cause, le bénéficiaire d'une aide illégale, mise à exécution sans notification préalable à la Commission, comme cela est le cas en l'espèce, ne peut avoir de confiance légitime dans la régularité de l'octroi de celle-ci (arrêts de la Cour du 24 novembre 1987, RSV/Commission, 223-85, Rec. p. 4617, point 17 ; du 10 juin 1993, Commission/Grèce, C-183-91, Rec. p. I-3131, point 18, et du 11 novembre 2004, Demesa et Territorio Histórico de Álava/Commission, C-183-02 P et C-187-02 P, Rec. p. I-10609, point 51). En outre, comme le souligne la Commission, la possibilité pour ce dernier d'invoquer des circonstances exceptionnelles, qui ont légitimement pu fonder sa confiance dans le caractère régulier de cette aide, ne peut jouer un rôle qu'aux fins de s'opposer à un éventuel remboursement de ladite aide.

105 D'autre part, ainsi que cela a déjà été indiqué aux points 50 à 54 ci-dessus, dans le cas d'une adhésion d'un État à l'Union, un changement majeur est apporté aux caractéristiques juridiques et économiques d'un marché et, dans ce contexte, une mesure peut devenir une aide d'État incompatible, sans que cela porte atteinte à la confiance légitime de l'intéressé ou au principe de sécurité juridique. À cet égard, les règles contenues dans l'accord européen incluant la Hongrie, dans le traité d'adhésion ainsi que dans l'acte d'adhésion, concernant les règles matérielles comme les règles de procédure du droit de l'Union en matière d'aides d'État, sont claires et précises.

106 En outre, la requérante allègue que la Commission avait connaissance de l'existence des AAE bien avant l'adhésion de la Hongrie à l'Union, car celle-ci avait eu connaissance de la loi sur l'énergie électrique de 2001, citée au point 10 ci-dessus, entrée en vigueur le 1er janvier 2003, laquelle mentionnait expressément les AAE. Elle se réfère également à la lettre envoyée à la Commission le 31 mars 2004, dans le cadre de la procédure du mécanisme provisoire, en vue de l'approbation d'un programme de compensation des coûts échoués par MVM, dans laquelle les autorités hongroises mentionnaient expressément les AAE.

107 À supposer même que la Commission ait eu connaissance de l'existence des AAE et de l'AAE en cause quelques années avant l'adhésion de la Hongrie à l'Union, étant donné ce qui a été exposé aux points 50 à 54 ci-dessus, la question de l'existence et de la compatibilité de l'aide avec le marché commun ne s'est posée qu'à compter de la date d'adhésion, de telle sorte que les autorités hongroises étaient tenues de communiquer à la Commission les informations relatives aux AAE dans le cadre de la procédure du mécanisme provisoire. Or, il ressort du dossier que, en ce qui concerne spécifiquement les AAE et, en particulier, l'AAE en cause, les autorités hongroises n'ont procédé à aucune notification, de telle sorte que ces AAE constituent une aide qui doit être considérée comme illégale. Les autorités hongroises n'ayant pas procédé à la notification des AAE et ayant, par ailleurs, retiré leur notification concernant le décret gouvernemental n°183-2002, c'est à bon droit que la Commission a, d'office, enregistré un dossier d'aide d'État les concernant afin de procéder à un examen préliminaire de cette aide illégale, au regard des doutes qu'elle avait quant à l'existence d'une aide d'État contenue dans ces AAE.

108 Dans ces circonstances, la requérante ne saurait en aucun cas valablement reprocher à la Commission d'avoir eu connaissance de ce que la notification initiée par les autorités hongroises en date du 31 mars 2004 dans le cadre du mécanisme provisoire, concernant le décret gouvernemental n° 183-2002, avait besoin d'être complétée afin de permettre à la Commission d'examiner les AAE et d'avoir manqué à cet égard à son obligation de coopération loyale.

109 Il résulte de ce qui précède que ne saurait prospérer l'argumentation de la requérante relative à une violation des principes de protection de la confiance légitime et de sécurité juridique. Il y a donc lieu de rejeter le troisième grief.

Sur le quatrième grief, tiré d'une appréciation erronée des spécificités de l'AAE en cause

110 La requérante prétend que la Commission a erronément critiqué certains points spécifiques de l'AAE en cause, à savoir l'obligation de prélèvement minimal prévue par l'AAE en cause, le rendement garanti fondé sur le recouvrement des frais fixes, le rendement garanti fondé sur le recouvrement des coûts variables, ainsi que la garantie d'un certain niveau de rendement. Elle affirme également que la décision attaquée comportait diverses appréciations erronées quant à l'existence d'un avantage en ce qui la concerne. Dans la réplique, elle fait valoir que la Commission s'est appuyée à tort sur l'arrêt Italie et SIM 2 Multimedia/Commission, précité.

111 S'agissant de l'obligation de prélèvement minimal, la requérante soutient que, depuis 2004, MVM lui a régulièrement acheté des quantités supérieures à celle à laquelle celle-ci était tenue en vertu de l'obligation de prélèvement minimal. Dès lors, contrairement à ce qu'il ressort de la décision attaquée, cette obligation ne saurait poser de difficultés. Elle maintient sa position à cet égard dans sa réponse à la mesure d'organisation de la procédure mentionnée aux points 41 et 42 ci-dessus, ainsi que lors de l'audience.

112 Certes, dans la requête, la requérante apporte des éléments allant dans le sens de ce qu'elle soutient. Il n'en reste pas moins que, même à supposer que l'obligation de prélèvement minimal n'ait pas contraint MVM à acheter à la requérante des quantités d'électricité supérieures à ses besoins commerciaux, il est établi que l'obligation de MVM relative au prélèvement minimal, combinée avec l'obligation de réservation d'une capacité de production d'électricité et un mécanisme de fixation de prix couvrant les coûts fixes, le coût du capital et les coûts variables, va au-delà des pratiques commerciales habituelles sur les marchés européens de l'électricité. Par ailleurs, comme le souligne, à juste titre, la Commission, le fait que MVM ait acheté nettement plus que le prélèvement minimal obligatoire certaines années ne signifie pas que le risque structurel associé à l'obligation d'acheter, globalement, davantage d'électricité que nécessaire pour couvrir ses besoins ait été inexistant durant toute la période examinée.

113 Par ailleurs, la requérante ne contredit pas le raisonnement développé aux considérants 218 à 234 de la décision attaquée, en ce qui concerne le contexte du marché en raison du processus de libéralisation à compter de 2003, à savoir la diminution des besoins de MVM dans le secteur de service public et la hausse croissante de la demande sur le secteur concurrentiel.

114 En outre, il y a lieu de relever que le gouvernement hongrois, pour compenser la situation qui pouvait amener MVM à revendre le surplus de l'énergie achetée dont elle n'avait pas besoin pour satisfaire à ses obligations d'approvisionnement dans le secteur de service public, a adopté le décret gouvernemental n° 183-2002, cité au point 13 ci-dessus. Ce décret gouvernemental prévoyait que MVM pouvait, en cas d'échec de la renégociation des AAE avec les producteurs, vendre son surplus d'électricité sur le secteur concurrentiel par le biais d'enchères publiques. Le gouvernement hongrois lui remboursait ensuite la différence entre le prix d'achat payé par elle pour cette électricité et le prix de vente obtenu. Dès lors, il ne saurait être exclu qu'un grossiste comme MVM, qui devait satisfaire une demande dont la fluctuation dans le temps était plutôt imprévisible, ait subit une contrainte en étant dans l'obligation d'acheter pendant une longue période des quantités minimales d'électricité.

115 S'agissant du recouvrement des coûts fixes et du coût du capital garanti par la redevance de capacité, la requérante explique qu'il était prévu par la première loi sur l'énergie électrique et que l'insertion d'un tel élément était pertinente étant donné la situation du marché à l'époque et la position d'acquéreur unique de MVM. Elle ajoute que, sans ces garanties visant à couvrir le coût du capital, il n'aurait pas été attrayant pour les producteurs d'électricité d'investir. Elle conteste également la référence de la Commission à l'arrêt Italie et SIM 2 Multimedia/Commission, précité, qui, selon elle, n'étaye pas la position adoptée dans la décision attaquée.

116 Pour rejeter cet argument et répondre aux prises de position des parties quant à l'arrêt Italie et SIM 2 Multimedia/Commission, précité, il suffit de rappeler qu'il n'y a pas lieu de revenir sur le processus de privatisation de la requérante qui a eu lieu au milieu des années 90 et sur la question de savoir dans quelle mesure l'AAE en cause était une transaction préalable à ce processus, ni même sur la situation existant sur le marché de l'électricité à cette date, correspondant à la date d'adoption de la première loi sur l'énergie électrique.

117 En effet, il convient seulement d'examiner si l'AAE en cause constituait une aide d'État en faveur de la requérante au 1er mai 2004, en tenant compte de la situation existant à cette date, à savoir que cet AAE lie la requérante avec MVM. Par ailleurs, il y a lieu de relever que la requérante ne réfute pas, dans le cadre de son argumentation, l'avantage que constitue l'insertion des garanties visant à couvrir le coût du capital au regard de ce qui existe sur les marchés concurrentiels.

118 S'agissant du recouvrement des coûts variables garanti par la redevance d'électricité, la requérante prétend que la redevance d'électricité qui couvre les coûts variables ne donne pas lieu à une aide d'État, car ce n'est que si le prix payé à un producteur couvre ses coûts variables, y compris les coûts de combustible, que ce producteur choisira d'exploiter sa centrale électrique. Elle rappelle aussi que l'intégration de cette redevance à l'AAE était nécessaire pour la privatisation de sa centrale électrique.

119 L'argument de la requérante reposant sur la nécessité d'intégrer cette redevance pour mener le processus de privatisation doit être rejeté pour les mêmes raisons que celles énoncées au point 116 ci-dessus. De plus, nonobstant la garantie de recouvrement des coûts variables prévue dans l'AAE en cause, il est constant, comme le fait valoir la Commission à juste titre, que, dans le secteur concurrentiel, des contrats à long terme prévoyant à la fois un prélèvement minimal obligatoire et un système de prix couvrant les frais tant fixes et du capital que variables, conclus sans intervention de l'État, par un acheteur doté de caractéristiques semblables à celles de MVM et dans un contexte réglementaire et économique comparable à celui prévalant en Hongrie pendant la période examinée, ne se trouvent pas. Ainsi, en réalité, au regard de chacune des caractéristiques de l'AAE en cause, mais surtout de leur combinaison et de la structure tout entière de cet AAE, il apparaît que la requérante a été déchargée des risques normalement supportés par les producteurs d'électricité sur un marché concurrentiel.

120 S'agissant de l'argument de la requérante relatif à ce que la garantie d'un certain niveau de rendement de l'investissement était nécessaire, car elle constituait une condition essentielle pour la privatisation, il convient également de le rejeter dès lors que cela n'affecte en rien la question de l'existence de l'aide à la date d'adhésion de la Hongrie à l'Union.

121 Le quatrième grief doit, par conséquent, être rejeté.

122 Enfin, il convient d'examiner une série d'observations soumises par la requérante à la fin de la requête, visant à critiquer certaines affirmations contenues dans la décision attaquée, dans la mesure où celles-ci semblent pouvoir être rattachées à l'examen du premier moyen.

123 En ce qui concerne le considérant 21 de la décision attaquée, la requérante ne saurait reprocher à la Commission de ne pas avoir répondu à une lettre, datée du 27 février 2008, dont elle était seulement en copie et qui était destinée aux autorités hongroises. En tout état de cause, d'une part, même si la requérante a demandé aux autorités hongroises des clarifications sur le contenu des demandes de renseignements de la Commission, en mettant cette dernière en copie de sa demande, et n'a reçu aucune réponse à cet égard et, d'autre part, même à supposer que l'énonciation des faits effectuée audit considérant soit trompeuse, il y a lieu de considérer que de telles circonstances ne sont pas de nature à invalider la légalité de ladite décision et l'appréciation des aides contenues dans les AAE qui y est exposée.

124 S'agissant du considérant 68 de la décision attaquée, la requérante conteste la description selon laquelle la " redevance de capacité [servait aux] réservations de capacité [...], indépendamment de l'utilisation effective de la centrale électrique ", en arguant du fait que les " blocs F " de sa centrale électrique joueraient un rôle d'équilibrage de charge. Cependant, d'une part, il y a lieu de constater, comme la requérante le reconnaît elle-même, que ces unités ne fonctionnaient pas uniquement pour les seuls services d'équilibrage de charge. D'autre part, l'AAE en cause ne concernait pas seulement les " blocs F ", mais également le " bloc G " de sa centrale électrique. Enfin, il ressort expressément des considérants 103, 192, 203 à 206, 216 et 455 de ladite décision que la Commission a tenu compte du fait qu'une partie des capacités réservées dans le cadre des AAE était destinée à la fourniture des services auxiliaires d'équilibrage de charge, lorsque les centrales électriques étaient techniquement en mesure de les assurer.

125 La requérante conteste ensuite les considérants 148 et 226 de la décision attaquée, portant sur les tentatives de renégociation des AAE entamées par MVM avec les producteurs d'électricité, dont elle. Cependant, aucun des éléments indiqués par la requérante ne remet en cause le contenu des AAE. En tout état de cause, même à supposer que soit avérée l'allégation de la requérante selon laquelle MVM ne souhaitait pas renégocier les AAE et l'a fait contre son gré, les conclusions de la Commission ne seraient pas pour autant erronées, notamment pour les raisons exposées aux points 83 à 92 ci-dessus.

126 Le considérant 219 de la décision attaquée, qui évoque la protection offerte aux producteurs d'électricité contre les fluctuations du prix du combustible, est également critiqué par la requérante. Selon elle, aucun producteur ne fait fonctionner sa centrale électrique si le prix de l'électricité ne couvre pas ses coûts de combustible, à moins qu'il ne soit tenu de le faire par contrat. Cette critique doit être rejetée pour les mêmes raisons que celles invoquées aux points 86 à 95 ci-dessus, desquels il ressort clairement que, dans des conditions commerciales normales, tout producteur s'attendrait au minimum à partager les risques associés aux variations de coût du combustible.

127 Ensuite, s'agissant du considérant 223 de la décision attaquée et du tableau 7 s'y rattachant, il y a lieu de relever que la requérante avance qu'il ne peut être tiré aucune conclusion des chiffres figurant dans ce tableau, lequel ne présenterait aucune utilité pour les objectifs pertinents en l'espèce. Toutefois, si la requérante conteste ce tableau, elle ne remet nullement en question la conclusion indiquée au considérant susmentionnée, à savoir que, entre 2003 et 2006, les quantités vendues dans le secteur de service public ont baissé de 25 %.

128 La requérante s'interroge ensuite sur la fiabilité des chiffres utilisés dans la décision attaquée au regard du considérant 227 et du tableau 8 de ladite décision, relatifs aux trois premières ventes aux enchères réalisées par MVM. Selon elle, contrairement à ce qui aurait pu être attendu, il existerait une différence de prix entre les chiffres de 2003 et ceux de 2004, dans ce tableau, en ce qui concerne les prix moyens annuels dans les AAE, à savoir, respectivement, 11,3 et 11,7 forints hongrois (HUF)/kWh, et les chiffres de ces mêmes années, dans le tableau 7, en ce qui concerne les prix moyens dans le secteur de service public, à savoir, respectivement, 19 et 21,1 HUF/kWh. Cependant, il convient de relever la note en bas de page relative aux chiffres concernés du tableau 7, qui explique que ces prix proviennent des prix administrés, lesquels dépendent du niveau de consommation. Par ailleurs, en réponse à une question posée à cet égard lors de l'audience, la Commission a expliqué que les prix figurant dans le tableau 7 de la décision attaquée concernaient le marché de la vente au détail, alors que ceux apparaissant dans le tableau 8 de cette décision avaient trait au marché de gros. Il s'ensuit que la critique de la requérante ne porte donc pas sur des valeurs comparables.

129 Concernant les allégations de la requérante relatives au considérant 243 et aux tableaux 10 et 11 figurant dans la décision attaquée, à titre liminaire, il y a lieu de constater que la requérante ne remet pas en cause les données qui y sont présentées. Il y a lieu également de constater que si sont analysées, d'une part, les données concernant des prix moyens de l'électricité vendue par la requérante à MVM dans le cadre de l'AAE en cause entre 2004 et 2006, indiqués dans la requête, ces données ayant été expurgées du tableau 10 susmentionné, et, d'autre part, les données concernant les prix moyens de l'électricité vendue par les producteurs nationaux, hors AAE, sur le marché libre entre 2004 et 2006, figurant dans le tableau 11 susmentionné, il est alors possible de tirer les mêmes conclusions que celles que la Commission tire aux considérants 245 à 251 de ladite décision, à savoir que les prix pratiqués dans le cadre des AAE étaient effectivement supérieurs aux prix les plus élevés constatés sur le marché concurrentiel.

130 De plus, la requérante s'élève contre la présence, parmi les producteurs nationaux du marché concurrentiel indiqués dans le tableau 11 de la décision attaquée, de son unité " G1 ", spécialisée dans la production de vapeur qui génère de l'électricité à titre de sous-produit, et dont la production varie de manière imprévisible en fonction des besoins dictés par un utilisateur industriel à un moment donné. Toutefois, il ressort dudit tableau et des notes en bas de page insérées dans ce tableau que, afin de donner un élément de comparaison adéquat, la Commission a présenté des données concernant des producteurs nationaux vendant une quantité relativement importante d'électricité, la plupart des producteurs figurant dans ce tableau ayant vendu plus, voire parfois beaucoup plus, que 100 000 MWh d'électricité par année. La Commission a d'ailleurs indiqué, concernant un producteur, ne pas donner le prix moyen de l'électricité qu'il avait vendu en 2006, la quantité vendue cette année-là étant inférieure à 1000 MWh. Or, la requérante ne remet pas en cause la pertinence de ce critère, pas plus qu'elle ne conteste que ladite unité constituait, à cet égard, un producteur important. La requérante ne saurait donc arguer que l'inclusion des chiffres concernant cette unité est trompeuse.

131 Par ailleurs, la requérante conteste le considérant 249 de la décision attaquée. Elle prétend que la Commission n'a pas tenu compte de la manière spécifique dont est fixé le prix de l'électricité vendue par les " blocs F " de sa centrale électrique, laquelle joue un rôle d'équilibrage de charge. Elle explique le prix élevé de l'électricité vendue à MVM provenant de ladite centrale électrique par l'usage flexible que cette dernière faisait de cette centrale électrique.

132 À cet égard, aux considérants 245 à 247 de la décision attaquée, la Commission a constaté que la requérante et six autres producteurs facturaient leur électricité, dans le cadre de l'AAE, à un prix moyen de 10 à 100 % ou de 15 à 135 % plus cher que le prix le plus élevé pratiqué sur le marché concurrentiel. Elle a ensuite souligné que ces calculs étaient basés sur des données relatives aux prix moyens, c'est-à-dire qu'ils ne distinguaient pas les prix des produits " charge minimale ", " base " ou " pointe ". Elle a alors approfondi son analyse en s'intéressant aux produits " pointe ", tels que l'électricité vendue par les " blocs F " de la requérante, dont les prix sont normalement plus élevés que les produits " base ". Dans le cadre de son analyse, elle a comparé les prix des produits " pointe " résultant de la vente d'électricité des " blocs F " de la requérante avec ceux des produits " pointe " résultant de la vente aux enchères de capacités par MVM sur le marché concurrentiel entre 2004 et 2006. Elle a constaté que les premiers étaient supérieurs aux seconds.

133 La requérante prétend que cette analyse est entachée d'une erreur, car l'usage fait par MVM des " blocs F " a eu un effet considérable sur le prix payé par cette société. Toutefois, d'une part, la requérante ne conteste pas les chiffres donnés par la Commission et il n'y a rien de trompeur dans le fait qu'ils soient inclus. D'autre part, au regard des chiffres apportés par la requérante dans la requête, concernant les prix de l'électricité provenant des " blocs F ", si MVM en avait fait un usage différent, il y a lieu de relever que ces prix, même inférieurs à ceux pratiqués concernant les " blocs F " entre 2004 et 2006, demeurent cependant toujours égaux ou supérieurs au prix le prix le plus élevé pratiqué sur le marché concurrentiel.

134 En outre, s'agissant des critiques de la requérante sur l'utilisation des données concernant les prix, il y a lieu de constater que les considérants 241 à 253 de la décision attaquée, relatifs à la comparaison des prix effectivement pratiqués dans les AAE avec ceux pratiqués sur le segment du marché de gros non couvert par les AAE, soit le secteur concurrentiel, répondent de manière exhaustive aux observations présentées par les parties intéressées.

135 Aux considérants 237 à 240 de la décision attaquée, la Commission rappelle sans commettre d'erreur que le prix effectivement payé dans le cadre des AAE est une des conséquences de ces accords, mais qu'il ne constitue pas l'essentiel de l'avantage conféré par les AAE. Les AAE confèrent ainsi un avantage économique aux producteurs, qu'ils aient ou non donné lieu, à un moment donné, à des prix supérieurs à ceux du marché. Dès lors, d'éventuelles imprécisions dans ladite décision quant à la présentation des données concernant les prix pratiqués dans le cadre des AAE et sur le segment concurrentiel ne sauraient être de nature à invalider la décision attaquée.

136 Il s'ensuit que les observations de la requérante visant à critiquer certaines affirmations contenues dans la décision attaquée doivent également être écartées.

137 Il résulte de tout ce qui précède que les premier et deuxième moyens doivent être rejetés comme non fondés.

Sur le troisième moyen, tiré de ce que la Commission a commis plusieurs erreurs quant à l'examen de la compatibilité de l'aide d'État avec le marché commun

138 Le troisième moyen se divise en deux branches, la première étant relative à une erreur de la Commission en ce que celle-ci a considéré l'aide contenue dans l'AAE en cause comme une aide au fonctionnement et non comme une aide à l'investissement pour laquelle s'applique l'article 87, paragraphe 3, sous a), CE, la seconde étant relative à la question de la récupération des coûts échoués.

139 À titre liminaire, il convient de relever que, contrairement à ce que soutient la Commission dans le mémoire en défense, il ne ressort aucunement de la requête que la requérante soulève des arguments tirés d'une violation de l'obligation de motivation concernant la mise en œuvre de l'article 87, paragraphe 3, sous a), CE.

140 Concernant la première branche du moyen, au soutien de son argumentation selon laquelle l'aide contenue dans l'AAE en cause ne constitue pas une aide au fonctionnement et la Commission a commis une erreur à cet égard au considérant 396 de la décision attaquée, la requérante fait valoir que la redevance de capacité ne peut constituer une telle aide, parce que ladite redevance ne sert pas à financer une forme quelconque de production, mais est uniquement destinée à assurer que cette capacité est installée et utilisable. Cette redevance constituerait donc uniquement une incitation à investir et à recouvrer des coûts d'investissement antérieurs. Par ailleurs, pour souligner la prétendue erreur de la Commission dans le cadre de l'appréciation de la compatibilité de l'AAE en cause avec le marché commun, en faisant valoir l'application de l'article 87, paragraphe 3, sous a), CE, la requérante relève que la Commission a admis, au considérant 392 de la décision attaquée, que l'ensemble du territoire de la Hongrie pouvait être considéré comme une région visée à cet article.

141 Il convient de rappeler que la Commission a adopté, en 1998, les lignes directrices concernant les aides d'État à finalité régionale (JO C 74, p. 9), qui étaient applicables au moment de l'adhésion de la Hongrie à l'Union, avant d'adopter, en 2006, les lignes directrices concernant les aides d'État à finalité régionale pour la période 2007-2013 (JO C 54, p. 13), qui étaient applicables pour la période postérieure au 1er janvier 2007 (ci-après, prises ensemble, les " deux lignes directrices concernant les aides d'État à finalité régionale "). La règle générale de ces lignes directrices est que les aides d'État accordées pour la couverture d'investissements peuvent être autorisées, alors que tel n'est pas le cas pour une aide au fonctionnement.

142 En vertu de la jurisprudence, une aide au fonctionnement constitue une aide qui vise à libérer une entreprise des coûts qu'elle aurait dû normalement supporter dans le cadre de sa gestion courante ou de ses activités normales (voir arrêt du Tribunal du 20 octobre 2011, Eridania Sadam/Commission, T-579-08, non publié au Recueil, point 41, et la jurisprudence citée).

143 En l'espèce, contrairement à ce que prétend la requérante, pour qualifier l'aide contenue dans les AAE, y compris dans l'AAE en cause, il n'appartenait pas à la Commission de tenir compte uniquement de la redevance de capacité. Comme le fait justement remarquer la Commission, les AAE constituent de manière indistincte un mécanisme complexe, où la redevance de capacité ne représente qu'une partie des obligations de MVM. Toutes les spécificités des AAE sont essentielles et la Commission ne pouvait effectuer une séparation entre les différents éléments des AAE aux fins de l'appréciation de la compatibilité de l'aide d'État avec le marché commun au titre de l'article 87, paragraphe 3, CE. Or, l'obligation contenue dans les AAE d'acheter des quantités minimales d'électricité, qu'elles soient nécessaires ou pas, couvre des dépenses courantes effectuées par les producteurs et ne peut être considérée à l'évidence que comme une aide au fonctionnement.

144 La Commission n'a donc pas commis d'erreur au considérant 396 de la décision attaquée en considérant que l'aide contenue dans les AAE ne pouvait être considérée comme une aide à l'investissement.

145 De plus, il y a lieu de relever que la Commission a étudié de manière approfondie, aux considérants 388 à 408 de la décision attaquée, la question de la compatibilité des AAE avec le marché commun au sens du paragraphe 3, sous a) à c), de l'article 87 CE, en tenant compte des deux lignes directrices concernant les aides d'État à finalité régionale. Or, au soutien de son argumentation selon laquelle l'aide contenue dans l'AAE en cause constituait une aide à l'investissement au titre du paragraphe 3, sous a), de cet article et afin de contester la conclusion de la Commission à cet égard, la requérante ne tente pas de réfuter les motifs concrets qui sont avancés dans la décision attaquée.

146 En particulier, la requérante ne fait même pas valoir que l'aide contenue dans l'AAE en cause pourrait remplir les conditions prévues par les deux lignes directrices concernant les aides d'État à finalité régionale. En effet, elle ne développe aucun argument relatif à ces textes, alors même que ces derniers précisent les catégories de coûts éligibles pour qu'une aide puisse être qualifiée d'aide à l'investissement.

147 Concernant la seconde branche du moyen, la requérante avance des arguments liés à la question de la récupération des coûts échoués. Elle se réfère à cet égard à la législation hongroise, à la décision 2009-287, aux lignes directrices de la Commission concernant l'application de l'article 81, paragraphe 3, CE (JO 2004, C 101, p. 97, ci-après les " lignes directrices relatives à l'application de l'article 81, paragraphe 3, CE "), ainsi qu'à l'article 7, paragraphe 4, du règlement n° 659-1999. Au regard de la méthode d'analyse des aides d'État liées à des coûts échoués exposée au point 71 ci-dessus, plusieurs considérations s'imposent.

148 La première considération tient à ce que la requérante n'est pas en mesure, dans le cadre du présent recours, de contester le système de récupération des coûts échoués mis en place par la loi hongroise LXX de 2008. En effet, comme le fait observer la Commission, s'il est vrai que ladite loi hongroise limite le futur montant de l'aide accordée au titre des coûts échoués aux montants devant être remboursés en vertu de l'ordre de récupération, cette limitation a été décidée par la Hongrie et ne découle pas de la décision attaquée.

149 La deuxième considération porte sur le système qui permet la synchronisation entre le recouvrement des coûts échoués et le remboursement de l'aide incompatible avec le marché commun. Certes, sans préjudice de la jurisprudence rappelée au point 79 ci-dessus, dans la décision 2009-287, portant sur les AAE conclus en Pologne, la Commission n'a ordonné aucun remboursement de l'aide, car elle a effectué une compensation entre, d'une part, le montant des coûts échoués compatibles devant être remboursé par les autorités nationales à l'intéressé et, d'autre part, celui de l'aide découlant des AAE devant faire l'objet d'une récupération par ces mêmes autorités. En effet, les autorités polonaises avaient notifié un régime de compensation des coûts échoués avant que la Commission n'adopte sa décision finale sur les AAE. La Commission avait donc pu, dans une même décision, se prononcer à la fois sur la question des AAE et sur le régime de compensation des coûts échoués.

150 Toutefois, en l'espèce, il ressort de la décision attaquée, et notamment de son considérant 27, que, à la date de l'adoption de ladite décision, les autorités hongroises n'avaient toujours pas mené à bien le processus de notification requis en ce qui concerne les coûts échoués, car elles n'avaient pas soumis à la Commission un mécanisme compensatoire global confirmé par le gouvernement hongrois. Ainsi, il n'était pas possible pour la Commission d'effectuer, dans la décision attaquée, une compensation comme celle effectuée dans sa décision 2009-287.

151 La troisième considération vise à répondre à l'argument de la requérante se référant au rapport de la Commission de 2007. La circonstance que, dans le cadre de ce rapport et des lignes directrices concernant l'application de l'article 81, paragraphe 3, CE, auxquelles se réfère ledit rapport, la Commission déclare qu'il est nécessaire de tenir compte des investissements réalisés par les parties ne saurait en aucun cas avoir pour conséquence, comme le suggère la requérante, de reprocher à la Commission de ne pas avoir considéré l'AAE en cause comme étant compatible avec le marché commun au moins jusqu'à ce que la requérante ait totalement récupéré ses coûts échoués en vertu dudit AAE.

152 D'une part, la requérante n'apporte aucun élément permettant d'étayer son allégation. D'autre part, comme le fait observer la Commission, la question de la récupération des coûts échoués par la requérante auprès des autorités hongroises est dépourvue d'impact sur la qualification de l'aide contenue dans les AAE et dans l'AAE en cause au regard de l'article 87, paragraphe 3, CE. Ainsi, qu'une compensation entre les deux montants à recouvrer soit décidée ou non n'a aucune conséquence sur cette qualification. Partant, l'aide contenue dans l'AAE en cause ayant à juste titre été qualifiée d'aide d'État incompatible avec le marché commun par la Commission, cette dernière n'aurait pu en aucune façon prendre une décision déclarant cette aide compatible avec le marché commun jusqu'au recouvrement des coûts échoués par la requérante.

153 À cet égard, la citation par la requérante de l'article 7, paragraphe 4, du règlement n° 659-1999 est totalement erronée. En effet, cette disposition prévoit simplement que, lorsque la Commission décide de clore la procédure formelle d'examen par une décision positive, à savoir une décision de compatibilité de l'aide avec le marché commun, elle peut assortir cette décision de conditions lui permettant de reconnaître ladite compatibilité de l'aide avec le marché commun et d'obligations lui permettant de contrôler le respect de sa décision. Or, en l'espèce, à aucun moment la Commission n'a considéré que l'aide contenue dans l'AAE en cause était une aide compatible avec le marché commun.

154 En effet, la décision attaquée est claire quant à l'incompatibilité de cette aide avec le marché commun. Par ailleurs, la circonstance que la Commission a indiqué, au point 52 de sa décision C (2007) 3254, du 10 juillet 2007, relative à une aide accordée à un producteur d'électricité hongrois pour la construction d'une nouvelle centrale électrique, qu'elle prévoyait d'adopter une décision finale à la fin de l'année 2007 concernant les AAE conclus sur le marché de l'électricité hongrois, en proposant qu'ils soient amendés, ne pouvait la lier quant au résultat de la décision attaquée faisant l'objet du présent recours.

155 L'argumentation de la requérante selon laquelle, dans la décision attaquée, la Commission a erronément conclu à l'incompatibilité de l'aide contenue dans l'AAE en cause avec le marché commun sans tenir compte du recouvrement des coûts échoués devant être rejetée comme étant non fondée, par voie de conséquence, son argument tiré du caractère disproportionné de la décision attaquée à cet égard doit l'être également.

156 En tout état de cause, il convient de souligner que, en date du 15 décembre 2009, les autorités hongroises ont notifié à la Commission un régime de compensation des coûts échoués en faveur des producteurs d'électricité. Par la décision C (2010) 2532 final, la Commission a autorisé ce régime d'aides en considérant qu'il constituait une aide d'État compatible avec le marché intérieur au sens de l'article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE.

157 Au considérant 68 de cette décision, la Commission a souligné que sa conclusion était fondée sur l'engagement pris par les autorités hongroises de synchroniser le recouvrement des coûts échoués aux producteurs d'électricité avec le remboursement de l'aide d'État contenue dans les AAE, de telle sorte que le gouvernement hongrois, en pratique, n'effectue aucun paiement auxdits producteurs, mais renonce simultanément au remboursement des montants dus en application de la décision attaquée.

158 Dans sa lettre du 15 septembre 2010 transmettant au Tribunal une copie de la décision C (2010) 2535 final, la requérante a souligné que le montant visant à compenser ses coûts échoués d'électricité était supérieur à celui qu'elle devait rembourser pour l'aide contenue dans l'AAE en cause et que la différence en sa défaveur était d'environ 84 millions d'euros. Toutefois, la circonstance que la requérante ne puisse pas recouvrer la différence entre ces deux montants ne résulte pas de ladite décision, mais de l'article 5, deuxième phrase, de la loi hongroise LXX de 2008, susmentionnée, décidée par les autorités hongroises.

159 Il résulte des considérations qui précèdent que les arguments développés par la requérante dans la seconde branche du troisième moyen doivent être rejetés.

160 Le troisième moyen doit donc être rejeté comme non fondé.

Sur le quatrième moyen, tiré de l'illégalité de l'ordre de récupération de l'aide

161 À l'appui du quatrième moyen, la requérante conteste la légalité de l'ordre de récupération de l'aide prétendument illégale et incompatible. Elle soulève à cet égard plusieurs griefs, tous contestés par la Commission.

162 Premièrement, la requérante invoque l'article 14, paragraphe 1, du règlement n° 659-1999, au soutien de son argumentation selon laquelle l'ordre de récupération était contraire au " principe général reposant sur le respect des attentes légitimes " et au principe de sécurité juridique.

163 L'article 14, paragraphe 1, du règlement n° 659-1999 énonce que, en cas de décision négative concernant une aide illégale, soit une décision d'incompatibilité avec le marché commun, la Commission décide que l'État membre concerné prend toutes les mesures nécessaires pour récupérer l'aide auprès de son bénéficiaire. Cette disposition ajoute que l'institution n'exige pas la récupération de l'aide si, ce faisant, elle allait à l'encontre d'un principe général de droit communautaire.

164 Cependant, le grief tiré d'une violation du principe de protection de la confiance légitime et du principe de sécurité juridique a été rejeté pour les raisons développées aux points 100 à 109 ci-dessus dans le cadre des premier et deuxième moyens. Au regard des considérations exposées auxdits points, ainsi que de celle figurant au point 152 ci-dessus, tenant à l'absence d'impact de la question de la récupération des coûts échoués sur la qualification d'une aide d'État, il convient de rejeter tous les arguments avancés par la requérante dans le cadre de son premier grief.

165 Deuxièmement, s'agissant des critiques de la requérante portant sur le contexte dans lequel la Hongrie doit calculer le montant de la prétendue aide devant être récupérée, il convient de rappeler que, en vertu de la jurisprudence de la Cour, citée par ailleurs au considérant 446 de la décision attaquée, aucune disposition du droit de l'Union n'exige que la Commission, lorsqu'elle ordonne la restitution d'une aide déclarée incompatible avec le marché commun, fixe le montant exact de l'aide à restituer. Il suffit, en effet, que la décision de la Commission comporte des indications permettant à son destinataire de déterminer lui-même, sans difficultés excessives, ce montant (arrêts de la Cour du 12 octobre 2000, Espagne/Commission, C-480-98, Rec. p. I-8717, point 25, et du 12 mai 2005, Commission/Grèce, C-415-03, Rec. p. I-3875, point 39). De plus, le dispositif d'un acte est indissociable de sa motivation et doit être interprété, si besoin est, en tenant compte des motifs qui ont conduit à son adoption (arrêts de la Cour du 15 mai 1997, TWD/Commission, C-355-95 P, Rec. p. I-2549, point 21, et du 29 avril 2004, Italie/Commission, C-298-00 P, Rec. p. I-4087, point 97).

166 Ainsi, lorsque, dans la décision attaquée, l'article 4, paragraphe 1, prévoit que " [l]a Hongrie calcule le montant précis de l'aide à rembourser sur la base d'une simulation appropriée du marché de gros de l'énergie électrique ", cela signifie que la mise en œuvre et l'exercice d'une " simulation appropriée ", telle qu'énoncée dans le dispositif, doivent s'effectuer à la lumière des orientations détaillées et des principes applicables fournis par la Commission dans les motifs de la décision attaquée.

167 Troisièmement, la requérante conteste le recours par la Commission à une simulation de marché pour le calcul des montants à rembourser. Plus spécifiquement, elle critique la méthode utilisée concernant trois aspects, pour lesquels l'institution substituerait la spéculation à un examen.

168 À titre liminaire, il convient de rappeler que l'obligation pour l'État de supprimer une aide considérée par la Commission comme étant incompatible avec le marché commun vise au rétablissement de la situation antérieure. La Cour a déclaré que cet objectif est atteint lorsque les bénéficiaires ont restitué la somme versée au titre de l'aide illégale, perdant ainsi l'avantage dont ils avaient bénéficié sur le marché par rapport à leurs concurrents, et lorsque la situation antérieure au versement de l'aide est rétablie (voir arrêt de la Cour du 17 juin 1999, Belgique/Commission, C-75-97, Rec. p. I-3671, points 64 et 65, et la jurisprudence citée ; arrêt Budapesti Eromu/Commission, précité, point 107).

169 À cet égard, il est vrai que le recours à une simulation de marché, comme celle effectuée en l'espèce afin de calculer le montant à récupérer, peut impliquer des hypothèses et un certain degré d'incertitude. Cependant, ainsi que l'indique sans commettre d'erreur la Commission, cette simulation était appropriée dans le cas d'espèce pour procéder à un tel calcul.

170 Au considérant 444 de la décision attaquée, la Commission a, à juste titre, expressément noté que le calcul exact du montant de l'aide d'État octroyée aux bénéficiaires était complexe étant donné qu'il dépendait essentiellement du prix et de la quantité d'électricité qui aurait pu être produite et vendue sur le marché de gros hongrois entre le 1er mai 2004 et la date d'expiration des AAE dans l'hypothèse où, pendant la période en question, aucun AAE n'aurait été en vigueur. Il s'agissait donc d'effectuer une simulation des conditions qui auraient prévalu sur le marché de gros de l'électricité en l'absence d'AAE à compter du 1er mai 2004. Dans ce cadre, les considérants 447 à 465 de la décision attaquée fournissent des orientations détaillées et les principes applicables pour calculer la somme à rembourser.

171 Or, à cet égard, la requérante ne saurait mettre en doute l'appréciation de la Commission en reprenant en substance son argumentation, qui a fait l'objet du deuxième grief invoqué à l'appui des premier et deuxième moyens, selon laquelle les AAE répondaient aux intérêts commerciaux de MVM, même après le 1er mai 2004. En effet, il y a lieu de relever que, dans le cadre de son argumentation, la requérante avance qu'il n'est pas évident que MVM ait eu un intérêt à la résiliation des AAE et ajoute que, en cas de résiliation des AAE, MVM, qui a toujours acheté une quantité d'électricité supérieure à l'enlèvement minimal, n'aurait pas réduit ses achats. Elle reproche aussi à la Commission de ne pas avoir pris en considération l'opinion de MVM quant aux prix de l'électricité et à la structure du marché en cas d'absence des AAE.

172 Pour rejeter ces arguments, il convient de renvoyer aux considérations énoncées précédemment dans le cadre de l'examen du deuxième grief, invoqué à l'appui des premier et deuxième moyens. Dès lors que les AAE n'étaient pas conformes aux types d'accord conclus dans la pratique commerciale habituelle, c'est sans commettre d'erreur que la Commission, dans le cadre de la simulation d'un marché où il n'existerait pas d'aide d'État incompatible, a pu partir de l'hypothèse de l'absence des AAE sur ce marché à compter du 1er mai 2004, et non, comme le suggère la requérante, de l'hypothèse dans laquelle les AAE auraient seulement été amendés à compter de cette date.

173 De plus, quant aux objections formulées par la requérante en ce qui concerne la quantité d'électricité que MVM aurait achetée aux producteurs d'électricité en l'absence des AAE, il convient de rappeler, comme cela ressort du point 112 ci-dessus, que l'obligation relative au prélèvement minimal va plus loin que ce qui peut être trouvé sur les marchés européens de l'énergie et le fait que MVM ait acheté plus que le prélèvement minimal obligatoire certaines années ne rend pas inexistant le risque structurel associé à l'obligation d'acheter, globalement, davantage d'électricité que nécessaire pour couvrir ses besoins, lesquels sont liés à la demande dans le secteur de service public. Cette caractéristique des AAE étant critiquable et ayant d'ailleurs participé à la qualification de l'aide contenue dans l'AAE en cause d'aide d'État incompatible avec le marché commun, il y a lieu de valider une simulation de marché qui part de l'hypothèse que l'entreprise publique achète une quantité d'électricité destinée à couvrir les besoins du secteur susmentionné.

174 Enfin, la requérante critique le fait que la Commission n'ait pas tenté de déterminer le point de vue de MVM ou du Magyar Energetikai és Közmu-szabályozási Hivatal (l'Office de l'énergie hongrois) sur le niveau de prix et sur la structure du marché s'il avait été mis fin aux AAE à compter du 1er mai 2004. Selon elle, la Commission n'a donc pas procédé à un examen diligent et impartial du dossier.

175 Dans les cas où la Commission dispose d'un pouvoir d'appréciation afin d'être en mesure de remplir ses fonctions, le respect des garanties conférées par l'ordre juridique de l'Union dans les procédures administratives revêt une importance fondamentale. Parmi ces garanties figure, notamment, l'obligation pour l'institution compétente d'examiner, avec soin et impartialité, tous les éléments pertinents du cas d'espèce et de motiver de façon suffisante ses décisions (voir arrêt du Tribunal du 22 octobre 2008, TV 2/Danmark e.a./Commission, T-309-04, T-317-04, T-329-04 et T- 336-04, Rec. p. II-2935, point 179, et la jurisprudence citée).

176 Dans le cadre du contrôle des aides d'État, il convient de rappeler que, si l'État membre doit, en vertu du devoir de coopération loyale prévu à l'article 10 CE, coopérer avec la Commission en lui fournissant les éléments lui permettant de se prononcer sur la nature d'aide d'État de la mesure en cause, il n'en demeure pas moins que la Commission est, quant à elle, soumise, dans l'intérêt d'une bonne administration des règles fondamentales du traité relatives aux aides d'État, à une obligation d'examen diligent et impartial et que cette obligation lui impose, notamment, d'examiner avec soin les éléments qui lui sont fournis par l'État membre (voir arrêt TV 2/Danmark e.a./Commission, précité, point 183, et la jurisprudence citée).

177 De plus, si la Commission décide d'ordonner la récupération d'un montant déterminé, elle doit, conformément à son obligation d'examen diligent et impartial d'un dossier dans le cadre de l'article 88 CE, déterminer, d'une façon aussi précise que les circonstances de l'affaire le permettent, la valeur de l'aide dont l'entreprise a bénéficié (voir arrêt du Tribunal du 29 mars 2007, Scott/Commission, T-366-00, Rec. p. II-797, point 95, et la jurisprudence citée).

178 En l'espèce, il ressort des considérants 447 à 465 de la décision attaquée, concernant le calcul du montant à rembourser, que la Commission a procédé à un examen soigné et précis des éléments du dossier pour déterminer le niveau des prix et la structure du marché de l'électricité en l'absence des AAE au 1er mai 2004. Elle a ainsi répondu à son obligation de diligence au sens de la jurisprudence mentionnée aux points 175 à 177 ci-dessus. Par ailleurs, il ne saurait être reproché à la Commission un quelconque manque d'impartialité en ne tentant pas de connaître l'opinion de MVM ou de l'Office de l'énergie hongrois aux fins de la simulation du marché de l'électricité pour le calcul du montant à récupérer. La requérante n'apporte d'ailleurs à cet égard aucun élément concret permettant de considérer que la Commission était tenue, dans un souci d'impartialité, de consulter, par quelque manière que ce soit, l'une ou l'autre des entités susmentionnées concernant la méthode à retenir pour procéder à la simulation du marché. En tout état de cause, le règlement n° 659-1999 ne prévoit pas de consultation particulière des tiers, en dehors de la procédure formelle d'examen, en ce qui concerne les instructions fournies à l'État membre pour le calcul des montants remboursables.

179 Quatrièmement, la requérante critique la décision attaquée en ce que l'existence d'un avantage a été établie par référence aux pratiques commerciales standard d'autres États membres, alors que la simulation de marché effectuée ignore ces mêmes pratiques commerciales. Elle porte ensuite une observation sur la conclusion provisoire des autorités hongroises après leur simulation, selon laquelle l'AAE n'aurait conféré en réalité aucun avantage à la requérante.

180 La critique de la requérante doit être rejetée dans la mesure où cette dernière n'indique pas les caractéristiques des marchés de l'électricité des autres États membres qui ne sont pas reflétées dans la simulation de marché. En l'absence d'autres éléments permettant d'éclaircir et d'étayer cette allégation, il convient de la rejeter. Quant à la seconde observation de la requérante, il suffit de constater que la requérante a transmis, par lettre du 15 septembre 2010, une copie de la décision C (2010) 2535 final, dans laquelle il apparaît, dans le tableau n° 1, que le montant de l'aide contenue dans l'AAE en cause est évalué à environ 476 millions d'euros.

181 Cinquièmement, la requérante expose une série d'erreurs quant à la méthode utilisée pour quantifier l'aide prétendument contenue dans l'AAE en cause.

182 En premier lieu, la simulation de marché évaluerait la prétendue aide en se fondant sur la différence entre les recettes réellement perçues par la requérante et celles hypothétiques dans le scénario alternatif, sans tenir compte de la différence de coûts supportés par la requérante qui y est liée. Selon la requérante, si elle avait vendu moins d'électricité dans ledit scénario, les coûts qu'elle aurait supportés auraient été proportionnellement moins importants.

183 Dans ses observations déposées au greffe du Tribunal le 1er mars 2013, ainsi que lors de l'audience, concernant la méthode de remboursement, la requérante a réitéré sa critique à l'encontre de l'absence de prise en considération, dans le cadre du scénario alternatif, du coût du combustible. Selon elle, contrairement aux faits de l'espèce dans l'arrêt Budapesti Eromu/Commission, précité, le coût du gaz en ce qui la concerne serait élevé et sa prise en compte, aboutissant à procéder à une différence de bénéfices et non de recettes, serait nécessaire et aurait des conséquences sur le montant de l'aide à récupérer. Cela ressortirait d'un rapport, annexé au dossier, datant du mois de décembre 2008 et transmis aux autorités hongroises, effectué par des experts économiques, intitulé " Methodology for the calculation of State Aids - A Study for the Hungarian Energy Office ". Elle fait observer que la première évaluation du montant de l'aide à récupérer effectuée par ces experts, reposant sur une différence de bénéfices, aurait d'ailleurs abouti à ce que ce montant soit négatif, alors que tel ne serait pas le cas s'agissant de la seconde évaluation effectuée par ces mêmes experts, reposant sur une différence de recettes.

184 Concernant le calcul du montant à rembourser, au considérant 442 de la décision attaquée, la Commission est partie, à juste titre, de la prémisse selon laquelle les avantages découlant des AAE étaient de loin supérieurs à l'éventuel écart positif entre les prix des AAE et les prix pouvant être atteints sur le marché en absence d'AAE. Elle a cependant considéré, au considérant 443 de cette décision, qu'il n'était pas possible de calculer exactement la valeur globale de l'ensemble des conditions rattachées aux obligations d'achat à long terme de MVM pour la période débutant le 1er mai 2004. Ainsi que cela a été indiqué au point 170 ci-dessus, elle a expliqué, au considérant 444 de ladite décision, les raisons pour lesquelles le calcul exact du montant de l'aide d'État accordée aux bénéficiaires était très compliqué. En conséquence, elle a décidé de limiter son ordre de récupération à l'écart éventuel entre les recettes des centrales électriques opérant dans le cadre du régime des AAE et les recettes auxquelles les centrales électriques auraient pu accéder pendant la période susmentionnée en l'absence d'AAE.

185 Comme la requérante le soutient à juste titre, force est de constater que la méthode retenue dans la décision attaquée pour le calcul du montant à rembourser repose dès lors sur une différence de recettes et non une différence de bénéfices, de sorte que n'entre pas en ligne de compte le coût du combustible, qui serait pourtant susceptible d'être moins élevé dans le scénario alternatif que dans le scénario réel, et pourrait ainsi conduire à ce que le montant de l'aide à récupérer soit largement inférieur à celui découlant de la mise en œuvre de ladite méthode.

186 Toutefois, l'approche suivie par la Commission, qui a été confirmée dans l'arrêt Budapesti Eromu/Commission, précité, doit également être approuvée dans le cas d'espèce.

187 Ainsi que cela a été indiqué au point 168 ci-dessus, il convient de rappeler que l'objectif poursuivi par la Commission lorsqu'elle exige la récupération d'une aide incompatible avec le marché intérieur est de faire perdre à son bénéficiaire l'avantage dont il avait bénéficié sur le marché par rapport à ses concurrents.

188 Or, l'existence d'un avantage économique doit, en l'espèce, conformément au principe de l'opérateur privé en économie de marché, être appréciée au regard du comportement de l'entreprise publique conférant l'avantage examiné, et non au regard du comportement du bénéficiaire de cet avantage. Dès lors, comme le Tribunal l'a confirmé dans l'arrêt Budapesti Eromu/Commission, précité, cet avantage se présente comme la différence entre les montants que MVM aurait, dans des conditions normales de marché, payés pour l'achat de l'électricité dont elle avait besoin et les montants qu'elle a effectivement payés pour l'électricité achetée, qu'elle en ait eu besoin ou non (arrêt Budapesti Eromu/Commission, précité, point 115).

189 Même à supposer que, comme l'a indiqué la requérante lors de l'audience et ainsi que cela ressort du rapport des experts mentionné au point 183 ci-dessus, ces derniers aient indiqué que " il fa[llait] en fait comparer les profits sous le scénario historique et le scénario alternatif, et calculer l'aide d'état comme étant la différence entre les profits réalisés sous le régime des AAE et les profits réalisés sous le scénario alternatif ", il convient également de relever que ces derniers ont ajouté que " cela impliqu[ait] une façon plus élaborée pour calculer le montant de l'aide d'État ".

190 À cet égard, comme l'a soutenu la Commission à juste titre, concernant le coût du combustible auquel la requérante fait référence, cela impliquerait d'émettre des hypothèses, dans le cadre du scénario alternatif, sur les conditions contractuelles dans lesquelles la requérante aurait acheté du gaz pour sa centrale électrique. En outre, si l'approche fondée sur une différence de bénéfices devait être suivie et s'il fallait en tirer des conséquences, il serait nécessaire d'examiner tous les coûts, supportés par la société produisant de l'électricité, qui seraient moindres en cas de production et de vente d'électricité inférieures à celles qui auraient existé dans le cadre des AAE, et pas simplement déduire le coût du combustible.

191 Cependant, cela subordonnerait le calcul des montants remboursables à plusieurs hypothèses spéculatives liées au comportement de la requérante, ou à celui des fournisseurs d'électricité, dont il ne saurait être tenu compte. Cette approche impliquerait donc une reconstitution différente du passé en fonction d'éléments hypothétiques tels que les choix, souvent multiples, qui auraient pu être faits par les opérateurs intéressés, d'autant que les choix effectivement opérés avec le bénéfice de l'aide peuvent s'avérer irréversibles. Or, il est à noter qu'une telle approche a été rejetée par la Cour dans l'affaire ayant donné lieu à l'arrêt du 15 décembre 2005, Unicredito Italiano (C-148-04, Rec. p. I-11137, point 118).

192 Dès lors, il y a lieu de considérer que, en l'espèce, la Commission n'a pas commis d'erreur en retenant, dans la décision attaquée, une méthode de remboursement définissant les montants à rembourser comme une différence de recettes et non comme une différence de bénéfices (voir, en ce sens, arrêt Budapesti Eromu/Commission, précité, point 115).

193 Il convient également d'examiner les arguments que la requérante a développés dans la réplique.

194 Tout d'abord, la requérante se réfère à plusieurs décisions de la Commission adoptées dans des affaires d'aides d'État. Il s'agit plus précisément de la décision de la Commission, du 24 janvier 2007, relative à l'aide d'État C 52/2005 (ex NN 88/2005, ex CP 101/2004) octroyée par la République italienne sous forme de subvention à l'achat de décodeurs numériques (JO L 147, p. 1), ainsi que de la décision 2009-287. Or, il suffit de rappeler la jurisprudence exposée au point 79 ci-dessus, selon laquelle de telles décisions ne peuvent être pertinentes pour l'appréciation du Tribunal dans le cadre du présent recours.

195 De plus, à la lumière du principe rappelé dans la jurisprudence exposée au point 79 ci-dessus, selon lequel chaque cas d'aide d'État doit être apprécié séparément par le Tribunal de telle sorte qu'il n'y pas lieu de tenir compte de la pratique décisionnelle de la Commission, doit également être rejeté, par voie de conséquence, l'argument de la requérante qui se réfère aux arguments défendus par cette institution dans le cadre des recours introduits devant le Tribunal dans les affaires P&O European Ferries (Vizcaya) et Diputación Foral de Vizcaya/Commission (arrêt du Tribunal du 5 août 2003, P&O European Ferries (Vizcaya) et Diputación Foral de Vizcaya/Commission, T-116-01 et T-118-01, Rec. p. II-2957).

196 En deuxième lieu, doit également être rejeté l'argument de la requérante selon lequel la décision attaquée est viciée, car son considérant 462 autorise, mais n'exige pas, la déduction par la Hongrie de la différence entre les recettes provenant de la vente à des consommateurs autres que MVM dans le scénario alternatif et les recettes provenant de la vente à ces mêmes consommateurs dans le contexte des AAE.

197 En l'espèce, la requérante craint que la Commission n'ait laissé une marge d'appréciation à la Hongrie avec pour conséquence que cette dernière récupère davantage que le montant réel de l'aide incompatible avec le marché intérieur.

198 Il a été jugé que, lorsque la Commission décide d'ordonner la récupération d'un certain montant, elle doit déterminer, d'une façon aussi précise que les circonstances de l'affaire le permettent, la valeur de l'aide dont l'entreprise a bénéficié. En rétablissant la situation antérieure au versement de l'aide, d'une part, la Commission est tenue de s'assurer que l'avantage réel de l'aide est éliminé et ainsi d'ordonner la récupération de la totalité de l'aide. Elle ne saurait, par souci de clémence pour le bénéficiaire, ordonner la récupération d'une somme inférieure à la valeur de l'aide reçue par ce dernier. D'autre part, la Commission n'est pas habilitée, pour marquer sa désapprobation en ce qui concerne la gravité de l'illégalité, à ordonner la récupération d'un montant supérieur à la valeur de l'aide reçue par le bénéficiaire (arrêt du Tribunal Scott/Commission, précité, point 95).

199 Au regard de la jurisprudence citée au point 165 ci-dessus, il convient également de rappeler que, lorsque la Commission ne fixe pas le montant exact de l'aide à restituer, il suffit qu'elle apporte des indications permettant à son destinataire de déterminer lui-même, sans difficultés excessives, ce montant.

200 Au considérant 462 de la décision attaquée, la Commission a relevé que, dès lors qu'il n'existait pas de capacités réservées au profit de MVM dans le scénario alternatif, cela permettait aux producteurs d'électricité de vendre leur production d'énergie électrique à des consommateurs autres que MVM. Or, dans ces circonstances, elle a reconnu la possibilité que les recettes provenant de ces producteurs soient plus élevées que dans le contexte des AAE et a considéré, en conséquence, que les autorités hongroises pouvaient déduire la différence entre les recettes dans le cas où cette différence était positive.

201 S'il est constant que la Commission a employé les termes " peut déduire " au considérant 462 de la décision attaquée, il n'en reste pas moins que la décision attaquée ne saurait être viciée de ce fait.

202 En effet, il résulte de la lecture de ce considérant que la Commission est partie de la prémisse qu'il était possible que, dans le scénario alternatif, les recettes des producteurs soient plus élevées que dans le contexte des AAE et que c'est dans ce contexte où la différence entre les recettes provenant de la vente aux consommateurs autres que MVM était positive par rapport aux recettes reçues dans le scénario réel que les autorités hongroises pouvaient déduire le montant de cette différence pour le calcul du montant de l'aide à récupérer.

203 En troisième lieu, la requérante prétend que le scénario alternatif est sans rapport avec la situation qui aurait existé en Hongrie après le 1er mai 2004 en l'absence des AAE. Elle critique également le fait que le scénario alternatif se fonde sur une capacité de production qui n'existe que du fait des AAE. Elle affirme ensuite qu'il n'existe aucun marché de l'électricité dans le monde auquel s'appliquent les conditions dudit scénario examiné par la Commission, à savoir un marché sans aucun contrat de fixation des prix. En outre, le scénario alternatif partirait de l'hypothèse erronée d'une absence totale de concurrence sur les prix. Enfin, la méthode utilisée par la Commission aurait pour conséquence d'augmenter à tort le montant de la prétendue aide à récupérer.

204 Il convient de rappeler que, dans les circonstances de l'espèce, le rétablissement de la situation antérieure doit s'entendre en ce sens que le marché de l'électricité hongrois aurait fonctionné en l'absence d'AAE depuis le 1er mai 2004. À cet égard, contrairement à ce que soutient la requérante, la décision attaquée laisse clairement apparaître que la simulation de marché effectuée par la Commission repose effectivement sur un marché dans lequel il n'existerait aucun AAE. En effet, comme il a été indiqué au point 178 ci-dessus, aux considérants 447 à 465 de cette décision, la Commission a procédé à un examen soigné et précis des éléments du dossier pour déterminer quels auraient été, au 1er mai 2004, en l'absence des AAE, le niveau des prix et la structure du marché de l'électricité.

205 De plus, il convient de répondre aux allégations de la requérante selon lesquelles, d'une part, la décision attaquée fait l'impasse sur les contrats de fixation de prix et, d'autre part, le choix, dans le scénario alternatif, de ne pas retenir comme point de référence les contrats à terme a pour conséquence une totale absence de concurrence sur les prix.

206 Il convient de constater que la question de la nature des contrats a été dûment examinée par la Commission aux considérants 449 et 450 de la décision attaquée. Il ressort de ces considérants que la Commission a fait le choix de prendre comme référence les marchés fonctionnant avec des contrats " spot " ou " à court terme " et non les marchés avec des contrats " à terme ". Or, contrairement à ce que soutient la requérante, un tel choix de la Commission n'est pas irréaliste et les arguments de la requérante se référant au rapport de la Commission de 2007 n'apparaissent pas suffisants pour remettre en cause ce choix.

207 En effet, aux points 364 à 366 du rapport de la Commission de 2007, les marchés " spot " et les marchés " à terme " sont clairement identifiés comme étant les marchés d'échange de l'électricité dans l'Union. D'ailleurs, ces deux types de marchés sont minutieusement étudiés et les spécificités de formation des prix ainsi que le volume des échanges sur ces deux marchés sont indiqués respectivement, pour les marchés " spot ", aux points 368 à 372 et 380 à 382 dudit rapport, et, pour les marchés " à terme ", aux points 373 à 376 et 383 à de ce rapport.

208 S'il ressort du rapport de la Commission de 2007 qu'il existe une grande variation, selon les zones géographiques de l'Union, du ratio entre la quantité de produits " spot " ou de produits " à terme " vendue sur leur marché de l'électricité et la consommation domestique d'énergie électrique, une telle variation résulte du cadre mis en place sur le marché de gros de l'électricité en fonction de ces zones géographiques et des stratégies mises au point par les acteurs du marché de l'électricité.

209 Au regard de tels éléments, il ne saurait donc en aucune façon être reproché à la Commission d'avoir pris les marchés " spot " comme référence, et donc les spécificités de fixation des prix existant sur ces marchés, à savoir que la simulation de marché doit être réalisée à partir des coûts marginaux à court terme. La critique de la requérante à cet égard et les arguments qu'elle apporte au soutien de celle-ci doivent donc être rejetés comme non fondés.

210 Au vu des considérations énoncées aux points précédents, la requérante ne saurait affirmer que l'AAE en cause était un contrat d'un type tout à fait courant sur les marchés de l'électricité.

211 En quatrième lieu, doit être rejetée l'allégation de la requérante selon laquelle la méthode utilisée a eu pour conséquence d'augmenter à tort le montant de la prétendue aide, ainsi que les arguments avancés à son soutien en vertu desquels, d'une part, il n'existe pas de violation du droit de l'Union de par l'exécution des AAE et, d'autre part, la requérante pensait promouvoir l'intérêt public européen en contribuant à la modernisation du secteur de l'électricité hongrois. En effet, il ressort des considérations énoncées dans le présent arrêt que les AAE, y inclus l'AAE en cause, constituent une mesure contenant une aide d'État incompatible avec le droit de l'Union.

212 Par ailleurs, la requérante ne saurait arguer du fait que le scénario alternatif se fonde sur une capacité de production qui n'existe que du fait des AAE, car ladite capacité de production résulte des investissements effectués sur le fondement de ces AAE. En effet, il y a lieu de rappeler que la date pertinente à prendre en considération en l'espèce est le 1er mai 2004. Ainsi, la circonstance que la conclusion des AAE soit intervenue dans le cadre d'un processus de privatisation et qu'elle ait encouragé les investissements permettant la capacité de production existante ne peut entrer en ligne de compte pour nier cette capacité de production dans le cadre de la simulation du marché qui aurait existé à compter du 1er mai 2004. De plus, au regard de la jurisprudence mentionnée au point 191 ci-dessus, une telle allégation doit être rejetée. Par ailleurs, cette allégation est plus étroitement liée à la question de la récupération des coûts échoués, telle qu'examinée dans la décision C (2010) 2535 final, laquelle ne fait pas l'objet du présent recours.

213 En cinquième lieu, la requérante allègue que la décision attaquée ne permet pas aux bénéficiaires de la prétendue aide de déterminer eux-mêmes le montant exact dont la récupération est ordonnée.

214 Il y a lieu de rappeler la jurisprudence mentionnée au point 165 ci-dessus selon laquelle, lorsque la Commission ordonne la restitution d'une aide déclarée incompatible avec le marché commun, il suffit que sa décision comporte des indications permettant à son destinataire de déterminer lui-même, sans difficultés excessives, ce montant. Au regard de ce qui vient d'être exposé dans le cadre du quatrième moyen et à la lecture des considérants 447 à 465 de la décision attaquée, il convient de considérer que la Commission a exposé des éléments suffisamment clairs et précis pour permettre à la Hongrie, destinataire de la décision attaquée et à laquelle il incombe de procéder au calcul du montant à rembourser, d'effectuer ce dernier.

215 Ainsi, contrairement à ce que soutient la requérante, la Commission a indiqué, au considérant 447 de la décision attaquée, qu'elle fournissait dans la présente décision des orientations permettant de calculer le montant de l'aide à rembourser. Les arguments de la requérante avancés à cet égard au soutien de son argumentation doivent donc être rejetés. En particulier, même à supposer que, comme le soutient la requérante, la Hongrie ait eu besoin d'un délai de onze mois et de l'assistance de consultants externes pour développer un " modèle " permettant d'effectuer la simulation requise par ladite décision, il ressort de la décision C (2010) 2535 final que, moins de deux ans après l'adoption de la décision attaquée, le montant de l'aide contenue dans les AAE avait été quantifié.

216 En sixième lieu, il convient de répondre à l'argument de la requérante tiré d'une violation des formes substantielles en ce qu'elle n'a pas eu l'opportunité de soumettre des observations sur la méthode de calcul que la Commission avait l'intention d'utiliser. La requérante précise dans le cadre de cet argument que la notification publiée par la Commission en vertu de l'article 88, paragraphe 2, CE ne contenait aucune indication à cet égard et que la Commission aurait donc dû transmettre une notification complémentaire.

217 À titre liminaire, au regard de ce qui a été exposé aux points 167 à 178 ci-dessus, il convient de rejeter la prémisse erronée de la requérante selon laquelle la méthode de calcul est problématique.

218 De plus, comme il a été indiqué au point 178 ci-dessus, le règlement n° 659-1999 ne prévoit pas de consultation particulière des tiers, en dehors de la procédure formelle d'examen, en ce qui concerne les instructions fournies à l'État membre pour le calcul des montants remboursables. En effet, il ressort de la lecture combinée des articles 6, 7 et de l'article 20, paragraphe 1, de ce règlement que le droit des parties intéressées à présenter des observations est reconnu uniquement à la suite d'une décision de la Commission d'ouvrir la procédure formelle d'examen. Les observations reçues sont alors communiquées à l'État membre concerné et toute partie intéressée ayant présenté des observations reçoit une copie de la décision de la Commission de clore la procédure formelle d'examen.

219 Par ailleurs, la jurisprudence de l'Union citée par la requérante à l'appui de son argumentation n'est pas de nature à remettre en cause les considérations qui précèdent.

220 Concernant l'arrêt du Tribunal du 11 mai 2005, Saxonia Edelmetalle et ZEMAG/Commission (T-111-01 et T-133-01, Rec. p. II-1579), certes, son point 50, cité par la requérante, dispose expressément que la décision d'ouvrir la procédure formelle d'examen doit être suffisamment précise pour mettre les parties intéressées en mesure de connaître le raisonnement adopté par la Commission afin de participer de manière efficace à cette procédure, au cours de laquelle elles auront la possibilité de faire valoir leurs arguments. Toutefois, le Tribunal rattache explicitement cette considération à la disposition prévue à l'article 6, paragraphe 1, du règlement nº 659-1999, selon laquelle " [l]a décision d'ouvrir la procédure formelle d'examen récapitule les éléments pertinents de fait et de droit, inclut une évaluation préliminaire, par la Commission, de la mesure [...] visant à déterminer si elle présente le caractère d'une aide, et expose les raisons qui incitent à douter de sa compatibilité avec le marché commun ", et non au raisonnement de la Commission éventuellement adopté pour ce qui concerne le calcul du montant de l'aide.

221 Quant à l'arrêt du Tribunal du 22 février 2006, Le Levant 001 e.a./Commission (T-34-02, Rec. p. II-267, point 97), cité par la requérante, il ne consacre nullement l'obligation pour la Commission de procéder à une notification complémentaire fondée sur l'article 88, paragraphe 2, CE, exposant la méthode à utiliser pour quantifier le montant de l'aide, ni même le droit pour une partie intéressée de présenter ses observations sur une telle notification. Cet arrêt rappelle uniquement, conformément à l'article 6, paragraphe 1, du règlement n° 659-1999, le droit pour une entreprise à l'égard de laquelle la Commission s'apprête à prendre une décision faisant grief en la désignant comme bénéficiaire d'une aide incompatible avec le marché commun de disposer de la possibilité de faire valoir ses observations préalablement à l'adoption d'une telle décision. Or, en l'espèce, il n'est pas contesté que la requérante a bénéficié d'un tel droit en présentant ses observations, en date du 14 février 2006, sur la notification du 9 novembre 2005 effectuée par la Commission. Dès lors, il y a lieu de considérer que la Commission n'a pas violé le principe général de droit de l'Union qui exige que toute personne à l'encontre de laquelle une décision faisant grief peut être prise doit être mise en mesure de faire connaître utilement son point de vue au sujet des éléments retenus à sa charge pour fonder la décision litigieuse.

222 En outre, le calcul des montants remboursables n'incombe pas au bénéficiaire de l'aide, mais à l'État membre concerné, en l'occurrence les autorités hongroises. Or il n'apparaît pas que ces dernières aient déclaré que cette simulation était impossible ou exagérément difficile.

223 Il résulte de tout ce qui précède que le quatrième moyen doit être rejeté.

224 Au vu de tout ce qui précède, le Tribunal étant suffisamment éclairé par les pièces du dossier pour pouvoir statuer, il convient de rejeter, d'une part, la mesure d'instruction demandée dans le troisième chef de conclusions de la requête, visant à ce que la Commission communique au Tribunal des copies de toutes les communications écrites échangées entre elle et les autorités hongroises ainsi que tous les procès-verbaux des réunions et discussions intervenues entre elles, et, d'autre part, la mesure d'instruction demandée dans le quatrième chef de conclusions de la requête ainsi que dans deux lettres déposées au Tribunal respectivement le 6 décembre 2010 et le 23 avril 2012, visant à ce que le Tribunal désigne un expert afin que celui-ci élabore un rapport, notamment sur la validité des critiques émises par la requérante dans sa requête quant à la méthode de récupération préconisée par la décision attaquée.

225 Le recours doit, dès lors, être rejeté dans son entièreté comme étant non fondé, sans qu'il soit besoin de faire droit à la demande de mesure d'organisation de la procédure de la requérante.

Sur les dépens

226 Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner, conformément aux conclusions de la Commission, à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par cette dernière.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1) Le recours est rejeté.

2) Dunamenti Eromu Zrt supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission européenne.