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Décisions

Cass. crim., 1 avril 2014, n° 13-83.204

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Louvel

Rapporteur :

Mme Harel-Dutirou

Avocat général :

M. Cordier

Avocats :

SCP Nicolay de Lanouvelle, Hannotin

Riom, ch. corr., du 10 avr. 2013

10 avril 2013

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par M. Cyrille X, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Riom, chambre correctionnelle, en date du 10 avril 2013, qui, pour infractions à la législation sur le démarchage à domicile et pratiques commerciales agressives, l'a condamné à six mois d'emprisonnement avec sursis, 10 000 euros d'amende, trois ans d'interdiction professionnelle, et a prononcé sur les intérêts civils ; - Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-3, alinéa 1er, 388 et 551 du Code de procédure pénale, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué, par confirmation du jugement du Tribunal correctionnel de Cusset, a, sur l'action publique, déclaré M. X coupable des faits qui lui étaient reprochés, notamment des faits de remise d'un contrat non conforme au client lors d'un démarchage à domicile ou dans un lieu non destiné au commerce du bien ou service proposé commis depuis le 1er janvier 2007 et jusqu'au 30 mars 2009 à Lyon Saint-Etienne ;

"aux motifs que, sur le fond, il est reproché, en premier lieu, au prévenu de ne pas avoir respecté le formalisme du démarchage à domicile, en particulier relativement à la faculté de renonciation ; que M. X soutient que le coupon détachable de renonciation était présent au bas des bons de commande, reconnaissant à l'audience, comme il l'avait fait devant les enquêteurs, qu'il n'avait pas mis à jour les mentions de ce document ; qu'en effet, les mentions figurant aux bons de commande et au formulaire détachable de rétractation utilisés par M. X n'étaient pas conformes aux spécifications des articles R. 121-3 et suivants du Code de la consommation ; que les infractions étant caractérisées, c'est à bon droit que le tribunal correctionnel a déclaré le prévenu coupable de l'infraction de remises de contrats non conformes ; que les peines d'emprisonnement avec sursis, d'amende et d'interdiction d'exercer seront purement et simplement confirmées ; que les constitutions de partie civile sont recevables ; que Mme Y, veuve Z, établit, par la production de justificatifs de paiement, son préjudice matériel à hauteur de 9 700 euros, montant au paiement duquel M. X sera condamné à titre de dommages-intérêts ; que le premier juge a fait une exacte appréciation de l'équité en condamnant le prévenu à payer à cette partie civile la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ; que l'équité commande de condamner en outre M. X à lui verser la somme de 1 200 euros pour les frais irrépétibles qu'elle a engagés en cause d'appel ; qu'au vu des éléments du dossier, le préjudice de l'association CLCV peut être évalué à la somme de 1 500 euros, retenue en première instance, que M. X sera condamné à lui verser à titre de dommages-intérêts ; que le premier juge a fait une exacte appréciation de l'équité en condamnant le prévenu à payer à cette partie civile la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ; que l'équité commande de condamner en outre M. X à lui verser la somme de 1 200 euros pour les frais irrépétibles qu'elle a engagés en cause d'appel ;

"1) alors que il n'y a pas de délit sans intention de le commettre ; qu'en retenant au cas présent M. X dans les liens de la prévention du chef du non-respect du formalisme du démarchage à domicile, au seul constat que les mentions figurant au bon de commande et au formulaire détachable de rétractation utilisés par M. X n'étaient pas conformes aux spécifications des articles R. 121-3 et suivants du Code de la consommation, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée aux termes des conclusions d'appel du demandeur, si, nonobstant la référence obsolète à la loi et à la numérotation des articles, corrigée par le demandeur au lendemain de la visite de la DGCCRF, les recommandations légales figurant sur les bons de commande n'étaient pas de nature à informer suffisamment les consommateurs sur la possibilité d'exercer une renonciation, ce qui était de nature à exclure toute intention de la part de M. X d'induire en erreur ses cocontractants quant à la portée de leurs engagements, la cour d'appel, qui a statué par des motifs insuffisants, a privé sa décision de base légale au regard des textes visés par le moyen ;

"2) alors que tout jugement doit être motivé et que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en retenant au cas présent M. X dans les liens de la prévention du chef du non-respect du formalisme du démarchage à domicile, au seul constat que les mentions figurant au bon de commande et au formulaire détachable de rétractation utilisés par M. X n'étaient pas conformes aux spécifications des articles R. 121-3 et suivants du Code de la consommation, sans répondre, ne serait-ce que pour l'écarter, au moyen opérant des conclusions d'appel du demandeur selon lequel le contenu des dispositions légales dont la reproduction était imposée figurait bien sur les bons de commande, nonobstant la référence obsolète à la loi et à la numérotation des articles, ce dont il résultait que le consommateur disposait effectivement des informations que la loi imposait de porter à sa connaissance, la cour d'appel, qui a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions, a privé sa décision de base légale au regard des textes visés par le moyen" ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 § 2 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales, L. 122-11, L. 122-11-1, L. 122-12 et L. 122-13 du Code de la consommation, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué, par confirmation du jugement du tribunal correctionnel de Cusset, a, sur l'action publique, déclaré M. X coupable des faits qui lui étaient reprochés, notamment des faits de mise en œuvre de pratique commerciale agressive commis depuis le 1er janvier 2007 et jusqu'au 30 mars 2009 à Lyon ;

"aux motifs qu'il est reproché également à M. X d'avoir mis en œuvre des pratiques commerciales agressives ; que le prévenu soutient n'avoir contraint aucun client à acheter ses produits, reconnaissant que sa clientèle était âgée et d'autre part qu'il avait seulement souhaité se prémunir, connaissant les risques de la vente à domicile, - en disposant d'une clause de compétence juridictionnelle située en dehors de la région de ses clients, et cela " en cas de contestation pour quelque cause que ce soit ", prévoyant dans le bon de commande qu'il faisait signer et formellement approuver, que ses clients avaient effectué leur achat en toute liberté, qu'ils avaient apprécié la portée de leurs engagements, pu déceler d'éventuelles ruses ou artifices pour se laisser convaincre sans abus de faiblesse ni d'ignorance, leur faisant signer qu'ils avaient pris connaissance du prix et accepté les conditions qui leur étaient proposées ; que le prévenu, qui se présentait auprès de personnes âgées, pour la plupart d'entre elles, de 75 à 90 ans, parfois plus, pour les fournir en produits agricoles à des tarifs extrêmement supérieurs au prix du marché, faisait usage, à leur encontre, d'une contrainte morale de nature à vicier leur consentement et à entraver leurs droits contractuels ; que, ce faisant, il a enfreint l'article L. 122-11 du Code de la consommation, dont les dispositions sont applicables depuis le 5 janvier 2008 ; que M. X ayant poursuivi son activité postérieurement à cette date, le délit de pratiques commerciales agressives qui lui est reproché est donc bien caractérisé ; que les peines prononcées en première instance tiennent compte, d'une part, de ce que le prévenu n'a jamais été condamné et, d'autre part, de ce que, malgré l'enquête et le renvoi devant le tribunal correctionnel, M. X n'a toujours pas décidé d'abandonner ses méthodes de vente ; que les peines d'emprisonnement avec sursis, d'amende et d'interdiction d'exercer seront purement et simplement confirmées ; que les constitutions de partie civile sont recevables ; que Mme Y, veuve Z, établit, par la production de justificatifs de paiement, son préjudice matériel à hauteur de 9 700 euros, montant au paiement duquel M. X sera condamné à titre de dommages-intérêts ; que le premier juge a fait une exacte appréciation de l'équité en condamnant le prévenu à payer à cette partie civile la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ; que l'équité commande de condamner, en outre, M. X à lui verser la somme de 1 200 euros pour les frais irrépétibles qu'elle a engagés en cause d'appel ; qu'au vu des éléments du dossier, le préjudice de l'association CLCV peut être évalué à la somme de 1 500 euros, retenue en première instance, que M. X sera condamné à lui verser à titre de dommages-intérêts ; que le premier juge a fait une exacte appréciation de l'équité en condamnant le prévenu à payer à cette partie civile la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ;

"1) alors qu'un jugement de condamnation doit caractériser l'infraction en tous ses éléments et que l'insuffisance de motivation équivaut à un défaut de motifs ; que sont réputées agressives au sens de l'article L. 122-11-1 du Code de la consommation les pratiques commerciales qui ont pour objet : 1- de donner au consommateur l'impression qu'il ne pourra quitter les lieux avant qu'un contrat n'ait été conclu ; 2- d'effectuer des visites personnelles au domicile du consommateur, en ignorant sa demande de voir le professionnel quitter les lieux ou de ne pas y revenir, sauf si la législation nationale l'y autorise pour assurer l'exécution d'une obligation contractuelle ; 3- de se livrer à des sollicitations répétées et non souhaitées par téléphone, télécopieur, courrier électronique ou tout autre outil de communication à distance ; 4- d'obliger un consommateur qui souhaite demander une indemnité au titre d'une police d'assurance à produire des documents qui ne peuvent raisonnablement être considérés comme pertinents pour établir la validité de la demande ou s'abstenir systématiquement de répondre à des correspondances pertinentes, dans le but de dissuader ce consommateur d'exercer ses droits contractuels ; 5- dans une publicité, d'inciter directement les enfants à acheter ou à persuader leurs parents ou d'autres adultes de leur acheter le produit faisant l'objet de la publicité ; 6- (Abrogé) ; 7- d'informer explicitement le consommateur que s'il n'achète pas le produit ou le service, l'emploi ou les moyens d'existence du professionnel seront menacés ; 8- de donner l'impression que le consommateur a déjà gagné, gagnera ou gagnera en accomplissant tel acte un prix ou un autre avantage équivalent, alors que, en fait, soit il n'existe pas de prix ou autre avantage équivalent, soit l'accomplissement d'une action en rapport avec la demande du prix ou autre avantage équivalent est subordonné à l'obligation pour le consommateur de verser de l'argent ou de supporter un coût ; qu'au cas présent, où pour retenir M. X dans les liens de la prévention du chef de pratiques commerciales agressives, la cour d'appel n'a caractérisé à l'encontre de celui-ci aucune des pratiques visées par l'article L. 122-11 susvisé, la cour d'appel qui a statué par des motifs inopérants a privé sa décision de base légale au regard des textes visés par le moyen ;

"2) alors qu'un jugement de condamnation doit caractériser l'infraction en tous ses éléments et que le recours à des motifs généraux équivaut à un défaut de motifs ; qu'en retenant au cas présent la culpabilité de M. X du chef de pratiques commerciales agressives sans avoir relevé quels auraient été les consommateurs victimes de ces agissements, la cour d'appel qui a statué par des motifs généraux a privé sa décision de base légale au regard des textes visés par le moyen ;

"3) alors qu'un jugement de condamnation doit caractériser l'infraction en tous ses éléments et que le recours à des motifs généraux équivaut à un défaut de motifs ; qu'en se bornant au cas présent, pour retenir M. X dans les liens de la prévention du chef de pratiques commerciales agressives, à relever que les dispositions de l'article L. 122-11 du Code de la consommation étaient applicables depuis le 5 janvier 2008, date d'entrée en vigueur de la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008 qui a créé ce texte, et que M. X avait poursuivi cette activité postérieurement à cette date, sans caractériser de la part du demandeur aucun agissement précis à une date précise depuis le 5 janvier 2008, la cour d'appel, qui a statué par des motifs généraux, a privé sa décision de base légale au regard des textes visés par le moyen" ;

Les moyens étant réunis ; - Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable ; d'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.