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Décisions

Cass. 1re civ., 14 février 1989, n° 86-13.438

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Union fédérale des consommateurs Que Choisir

Défendeur :

Coopérative d'élevage et de commercialisation de veaux gras, Coopérative des éleveurs de veaux de Vendée, de l'Anjou et du Poitou, Coopérative des éleveurs de veaux du Bocage, Fédération départementale de syndicats d'exploitants agricoles du Lot et Garonne, Fédération départementale de syndicats d'exploitants agricoles, Fédération départementale de syndicats d'exploitants agricoles, Fédération nationale bovine, Association nationale interprofessionnelle du bétail et des viandes, Fédération régionale des groupements de producteurs, élevage et viandes de la région normande

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Ponsard

Rapporteur :

M. Mabilat

Avocat général :

M. Charbonnier

Avocats :

SCP Masse-Dessen, Georges, SCP Delaporte, Briard

Paris, 1re ch. B, du 31 janv. 1986

31 janvier 1986

LA COUR : - Sur le moyen unique, pris en ses trois branches, tel qu'il est formulé au mémoire en demande et reproduit en annexe au présent arrêt : - Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 31 janvier 1986) que l'association dénommée "Union fédérale des consommateurs" (UFC), qui édite une revue mensuelle sous le titre "Que choisir", a publié, dans le n° 203 du 20 février 1985 de ce périodique, un éditorial et un article intitulés respectivement : "Hormones dans le veau-boycott" et "Boycott, le veau aux hormones est revenu, n'en mangez plus" ; que l'éditorial concluait en ces termes : "les pouvoirs publics ont pris leurs responsabilités, prenons les nôtres, boycottons la viande de veau", tandis que l'article se terminait comme suit : "La viande de veau n'est pas indispensable. On peut tout aussi bien la remplacer par le poisson, le mouton, le porc ou la volaille. Boycottons le veau" ; que des sociétés coopératives et des associations d'éleveurs de veaux, ainsi que des syndicats d'exploitants agricoles (Cecoveg et autres), arguant de l'illicéité de ce "boycott", ainsi que de l'urgence et de l'importance du préjudice subi par les quelque 10 000 producteurs de viande de veau en France, ont assigné en référé l'UFC aux fins qu'il lui soit ordonné, sous astreinte, de cesser la publication de tout appel au "boycott" dans la revue "Que choisir" ou dans tout autre journal se référant à l'UFC, ainsi que des mesures de publication de la décision à intervenir ;

Attendu que, pour faire droit à cette demande, la cour d'appel, après avoir rappelé que si l'UFC a pour mission d'informer le public et, par là-même, de dénoncer les abus et les tromperies dont il peut être victime, elle ne saurait cependant excéder la mesure qu'impose une information prudente et avisée, ni recourir à une injuste agression, a retenu qu'en faisant état d'un risque de fraude à la loi du 16 juillet 1974, relative à l'usage vétérinaire de substances anabolisantes et à l'interdiction de diverses autres substances pourtant sanctionnée pénalement en son article 6, cette association avait, d'une manière arbitraire et injuste à l'égard des quelque 8 500 éleveurs de veaux, lancé un appel sans nuance ni objectivité au boycottage de la viande de veau dans le but affiché de faire pression sur les pouvoirs publics et avait, brutalement et sans discernement, engagé une campagne contre la consommation de la viande de veau, relayée par de multiples moyens d'information, laquelle s'est révélée gravement dommageable pour les éleveurs ; qu'après avoir ainsi caractérisé l'existence d'un trouble manifestement illicite causé à la Cecoveg et autres, les juges du second degré ont encore relevé que l'UFC ne pouvait prétendre être affranchie des règles applicables en matière de responsabilité civile ni raisonnablement soutenir qu'un appel au boycottage de la viande de veau ne devait pas être apprécié par référence aux notions de mesure et de prudence, alors que la violation de telles notions constitue une faute au sens de l'article 1382 du Code civil ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a motivé sa décision et répondu aux conclusions invoquées ; que le moyen n'est donc fondé en aucun de ses griefs ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.