CA Poitiers, 2e ch. civ., 2 septembre 2014, n° 13-03526
POITIERS
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
BFG Ltd (Sté)
Défendeur :
JPB Industry (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Jouvenet
Conseillers :
Mme Fauresse, M. Ralincourt
Avocats :
Mes Chalopin, Clerc, Rivalan, Mazaudon
La société JPB Industry, qui a son siège social à Olonne-sur-Mer, est fabricant de machines de co-extrusion destinées au conditionnement de colles thermofusibles (aussi appelées colles Hot-Melts) ; elle produit et installe ses machines dans le monde entier et pour les besoins de son activité, exploite une licence qui lui a été concédée par la société Nordson, propriétaire du brevet.
Le 5 juin 2006, un contrat de prestations de service et de mission commerciale a été régularisée entre la société JPB Industry (anciennement dénommée JPB Créations) et la société de droit anglais BFG Technologies Ltd.
Ce contrat confiait le soin à la société BFG Technologies Ltd d'assurer la promotion et la vente des machines et de créer et développer la clientèle et la prospection sur l'ensemble des marchés existants ou à venir. En contrepartie, il était prévu que la société JPB Industry verse une commission de "8 % de la valeur totale HT du matériel ou bien des services vendus (payable immédiatement après encaissement des sommes mêmes fractionnées (acomptes) par JPB suivant les mêmes conditions d'encaissement des clients". Le taux de commission a été porté à 10 % par avenant à compter du 1er janvier 2007.
Le 6 décembre 2010, la société JPB Industry informait la société BFG Technologies Ltd et M. Stéphane Cousin, qui était missionné par la société BFG Technologies Ltd dans le cadre de l'exécution du contrat passé avec la société JPB Industry, de sa décision de mettre fin au contrat du 1er juin 2006 avec effet immédiat en raison de fautes graves dans le cadre de prestations commerciales à l'égard d'un client mexicain Cyr.
La société BFG Technologies Ltd a saisi le 25 août 2011 le Tribunal de commerce de La Rochelle pour voir dire que le contrat du 1er juin 2006 était un contrat d'agent commercial et pour voir condamner la société JPB Industry à lui verser les indemnités dues au titre de la rupture du contrat d'agent commercial.
Vu le jugement en date du 11 juillet 2013 du Tribunal de commerce de La Rochelle qui :
Rejette la note en délibéré de la société BFG Technologies ainsi que les pièces produites en annexes et la réponse de la société JPB Industry.
Dit et juge que l'assignation délivrée le 25 août 2011 à la requête de la société de droit anglais BFG Technologies Ltd est affectée d'une irrégularité de fond.
En conséquence, prononce la nullité de l'assignation du 25 août 2011.
Dit n'y avoir lieu à statuer sur les demandes indemnitaires formulées dans le cadre de l'instance.
Condamne la société BFG Technologies aux entiers frais et dépens de l'instance, dans lesquels seront compris les frais et taxes y afférents, et notamment ceux de Greffe liquidés à la somme de soixante-neuf euros et quatre-vingt-dix-sept cents (69,97 euro).
Vu la déclaration d'appel de la société BFG Technologies Ltd reçue au greffe le 11 octobre 2013
Vu les conclusions de la société BFG Technologies Ltd transmises par RPVA le 26 mai 2014 demandant à la cour de :
Vu les articles 15 et 16 du CPC, prononcer le rabat de la clôture et admettre les présentes conclusions aux débats ;
Subsidiairement et à défaut, écarter des débats les conclusions de la société JPB Industry du 16 mai 2014,
En toute hypothèse :
Infirmer le jugement rendu le 11 juillet 2013 par le Tribunal de commerce de La Roche-sur-Yon,
Débouter la société JPB Industry de l'ensemble de ses prétentions, fins, conclusions et moyens d'appel,
Les dire autant mal fondés qu'irrecevables, Et statuant de nouveau,
Dire et juger que le délai annal de l'article L. 134-12 du Code de commerce n'est pas un délai de forclusion,
Dire et juger que l'assignation de la société JPB Industry en date du 25 août 2011 est régulière et n'est affectée d'aucun vice de forme ou de fond,
Donner acte à la société BFG Technologies Ltd de ce qu'elle fait élection de domicile au cabinet de la Selarl Atlantic Juris dont le siège social est <adresse> prise en la personne de son associé, Maître Philippe Chalopin, domicilié en cette qualité audit siège.
Dire et juger que le contrat de prestations de service conclu le 1er juin 2006 est un contrat d'agent commercial,
Dire et juger que les règles du contrat d'agent commercial doivent s'appliquer à la rupture de contrat sus-évoquée,
Dire et juger que la société BFG Technologies Ltd n'a commis aucune faute grave et aucun acte de concurrence déloyale à l'encontre de la société JPB Industry,
Dire et juger que la société JPB Industry ne démontre à aucun moment l'existence d'un préjudice lié aux agissements de la société BFG Technologies Ltd,
Constater que la société JPB Industry a rompu le contrat d'agent commercial la liant à la société BFG Technologies Ltd sans respect du délai de préavis obligatoire,
Constater que la lettre de notification de la rupture dont se prévaut la société JPB Industry est signée par une personne dont la nomination en tant que représentant légal était inopposable aux tiers,
Dire et juger en conséquence que cette lettre de notification de la rupture ne peut pas être opposée à la société BFG Technologies Ltd,
Dire et juger, dans ces conditions, que la société JPB Industry ne peut se prévaloir de cette notification pour opposer le dépassement du délai annal de l'article L. 134-12 du Code de commerce par la société BFG Technologies Ltd,
En conséquence,
A titre principal,
Condamner la société JPB Industry à payer à la société BFG Technologies Ltd les indemnités dues au titre de la rupture du contrat d'agent commercial évaluées à 335 680 euro.
A titre subsidiaire,
Constater que la rupture du contrat de la société BFG Technologies Ltd est intervenue de manière abusive,
Dire et juger que la société BFG Technologies Ltd a subi un préjudice du fait de cette rupture abusive consistant en la perte de l'indemnité de fin de contrat et la non-exécution du préavis,
Dire et juger que la société BFG Technologies Ltd doit être indemnisée en conséquence,
Dire et juger que l'action en réparation d'une rupture abusive du contrat n'est pas visée par le délai d'un an prévu par l'article L. 134-12 du Code de commerce,
Condamner en conséquence la société JPB Industry à payer à la société BFG Technologies Ltd des dommages et intérêts au titre de la rupture abusive du contrat s'élevant à 384 633 euro.
En tout état de cause,
Condamner la société JPB Industry à régler à la société BFG Technologies Ltd une indemnité de 7 500 euro sur le fondement de l'article 700 du CPC en cause d'appel,
Ordonner la capitalisation annuelle des intérêts à compter de la date de l'assignation, conformément à l'article 1154 du Code Civil,
Condamner la société JPB Industry aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction pour ceux-là concernant au profit de la Selarl Lexavoué Poitiers, conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.
Vu les conclusions de la société JPB Industry transmises par RPVA le 16 mai 2014 demandant à la cour de :
A titre principal,
Vu les articles 117 et suivants du CPC, l'article L. 134-12 du Code de commerce,
Prendre acte de ce que l'assignation délivrée le 25 août 2011 à la requête de la société de droit anglais BFG Technologies Ltd mentionne qu'elle est "représentée par Monsieur Stéphane Cousin".
Prendre acte de ce que M. Stéphane Cousin n'est pas le représentant légal de la société de droit anglais BFG Technologies Ltd, laquelle est représentée depuis le 22 juin 2010 par M. Stuart Ralph Poppleton, de nationalité britannique, né le 28 juin 1940.
Dire et juger que la société BFG Technologies Ltd n'a pas justifié d'un pouvoir valable, temporaire et spécial confié à M. Stéphane Cousin pour la représenter en justice en vue du paiement de l'indemnité compensatrice visé à l'article L. 134-12 du Code de commerce, et ce avant l'expiration du délai d'un an visé audit article, et,
Dire et juger que l'irrégularité de fond ainsi mise en évidence n'a pas été régularisée par la société BFG Technologies Ltd, avant toute forclusion et expiration du délai d'un an visé à l'article L. 134-12 du Code de commerce,
Dire et juger que la société BFG Technologies Ltd est irrecevable et à défaut mal fondée en sa demande relative à l'inopposabilité de la lettre de rupture du contrat litigieux, alors qu'il s'agit d'une demande nouvelle irrecevable en cause d'appel et que, sur le fond, la société BFG Technologies Ltd avait préalablement eu connaissance du changement d'actionnariat et de représentation légale au sein de la société JPB Industry,
En conséquence, confirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de La Roche-sur-Yon en date du 11 juillet 2013 en ce qu'il a prononcé la nullité de l'assignation du 25 août 2011 et subséquemment jugé irrecevables les demandes, fins et prétentions dirigées contre la société JPB Industry.
A titre subsidiaire, sur le fond et au visa des dispositions applicables en matière de contrat d'agent commercial,
Dire et juger mal fondées la société BFG Technologies Ltd, pour avoir commis une faute grave justifiant la rupture du contrat d'agent commercial la liant à la société JPB Industry, et l'excluant d'un droit à indemnité,
Plus subsidiairement, dire et juger mal fondées la société BFG Technologies Ltd dans le quantum de ses demandes indemnitaires dès lors qu'elles sont calculées sur la base de factures payées à un tiers, la société cadres en mission.
A titre subsidiaire, sur le fond et au visa des dispositions de l'article 1147 du Code civil,
Dire et juger irrecevable la demande formée par la société BFG Technologies Ltd en rupture abusive du contrat dès lors que celle-ci n'a été formée pour la première fois qu'en cause d'appel,
A défaut, sur le fond, débouter la société BFG Technologies Ltd de sa demande, compte tenu de la faute grave qu'elle a pu commettre dans l'exécution du contrat et alors au surplus que l'indemnisation sollicitée ne peut s'apprécier que sous l'angle de la perte de chance,
A titre reconventionnel, dire et juger que la société BFG Technologies a commis des actes de concurrence déloyale en dénigrant la société JPB Industry dans la correspondance adressée le 9 mai 2011 à la société Nordson, propriétaire de la licence de brevet exploitée par la société JPB Industry, et,
Condamner la société BFG Technologies à payer à la société JPB Industry la somme de 45 000 euro à titre de dommages et intérêts.
En tout état de cause,
Condamner la société BFG Technologies à payer à la société JPB Industry la somme de 12 000 euro au titre de l'article 700 du CPC, outre le paiement des entiers dépens de première instance et d'appel.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 19 mai 2014
MOTIFS
En l'absence d'opposition, il convient de reporter l'ordonnance de clôture au jour des plaidoiries.
Sur la nullité de l'assignation
La société JPB Industry expose que l'assignation du 25 août 2011 saisissant le tribunal de commerce mentionne que la société BFG Technologies Ltd demanderesse est représentée par M. Stéphane Cousin, alors que ce dernier n'a jamais été le représentant légal de la société BFG Technologies Ltd et que c'est M. Stuart Poppleton, de nationalité britannique, qui a été désigné à cette fonction le 22 juin 2010 et qu'il s'agit d'une irrégularité de fond entraînant la nullité de l'assignation et de tous les actes subséquents.
Elle soutient que le pouvoir daté du 9 février 2012 produit par l'appelante est inopérant à régulariser ce vice de fond pour les raisons suivantes :
Le pouvoir est établi sur papier libre et sans aucun tampon de la société et rien n'établit que la signature apposée serait celle de M. Poppleton.
Ce pouvoir est donné afin d'obtenir le paiement de "commissions", alors que l'action tend à obtenir le paiement d'une indemnité compensatrice.
L'article L. 134-12 du Code de commerce édicte un délai d'un an pour solliciter une indemnité compensatrice du fait de la rupture du contrat d'agent commercial ; en l'espèce, ce délai annal expirait le 16 décembre 2011 (LRAR de rupture reçue le 16 décembre 2010) et il appartenait à la société BFG Technologies Ltd d'établir un pouvoir au profit de M. Stéphane Cousin avant cette date, de sorte que le pouvoir daté du 9 février 2012 est intervenu, alors que la forclusion était acquise. et ce, alors même que l'assignation avait été délivrée dans le délai d'un an.
La société BFG Technologies Ltd réplique que le délai d'un an est un délai de déchéance, mais pas de forclusion (qui seule entraîne la perte du droit d'agir), que l'exercice du droit à indemnisation par l'agent commercial n'est soumis à aucun formalisme, que la société JPB Industry ne peut valablement soutenir qu'elle n'a pas été informée clairement dans le délai de l'intention de l'agent d'être indemnisé et que par conséquent, la régularisation du vice affectant l'assignation bien qu'intervenue postérieurement est efficiente en application de l'article 121 du Code de procédure civile qui admet la régularisation jusqu'au jour où le juge statue.
La société BFG Technologies Ltd soutient en outre que le point de départ du délai d'un an n'est pas le 16 décembre 2010, mais le 31 mars 2011, date de la fin du préavis dont M. Stéphane Cousin aurait dû bénéficier. Elle observe également que la lettre du 6 décembre 2010 informant de la rupture est signée de M. de Thezy, qui a succédé à M. Maingueneau dans les fonctions de représentant légal de la société JPB Industry, mais dont la nomination n'a été publiée au RCS que le 13 décembre 2010, donc inopposable aux tiers avant cette date, de sorte qu'il n'avait pas le pouvoir de notifier la rupture des relations contractuelles.
S'agissant de l'objet du pouvoir donné à M. Stéphane Cousin, plusieurs pouvoirs sont versés aux débats qui autoriseraient M. Stéphane Cousin à agir en indemnisation.
S'agissant de la forme du pouvoir, les pièces versées en cause d'appel et annexées aux pouvoirs (passeport de M. Poppleton, justification de sa qualité de représentant légal de la société BFG Technologies Ltd) seraient de nature à régulariser un éventuel vice.
Il est constant que M. Cousin n'est pas le représentant légal de La société BFG Technologies Ltd et que l'assignation du 25 août 2011 comportant la mention que La société BFG Technologies Ltd est représenté par M. Cousin est donc affectée d'une irrégularité de fond pour défaut de pouvoir en application de l'article 117 du Code de procédure civile.
La société BFG Technologies Ltd a produit devant la cour un premier pouvoir de M. Stuart Poppleton en date du 9 février 2012, puis deux pouvoirs de celui-ci en date du 24 septembre 2013 confirmant le pouvoir confié à M. Cousin d'agir à compter du 25 août 2011, date de l'assignation, aux fins de recouvrement des commissions strictement entendues, mais aussi de toutes commissions, indemnités compensatrices, indemnités diverses, ledit pouvoir comportant en annexe la copie du passeport de M. Poppleton et les justificatifs de sa qualité de représentant légal de la société BFG Technologies Ltd.
Ces pièces sont de nature à régulariser la nullité initiale, dès lors qu'il est ainsi justifié qu'elles émanent du représentant légal de la personne morale demanderesse dont l'existence juridique n'est pas contestable.
Il est soulevé que ces pouvoirs sont inopérants à avoir régularisé le vice de fond, au motif que le délai d'un an dont dispose l'agent commercial pour solliciter une indemnité compensatrice était expiré le 16 décembre 2011, de sorte que lesdits pouvoirs sont intervenus après l'expiration du délai de forclusion.
Il est en effet de jurisprudence constante que le défaut de pouvoir de celui qui figure au procès comme représentant une personne morale constitue une irrégularité de fond qui ne peut être couverte après l'expiration d'un délai de forclusion.
Mais il convient de rappeler que l'article L. 134-12 du Code de commerce n'assortit d'aucun formalisme particulier les modalités selon lesquelles l'agent commercial notifie au mandant qu'il entend faire valoir ses droits à réparation, qu'il suffit que cette saisine manifeste son intention de réclamer des indemnités. Ainsi, si la société BFG Technologies Ltd a manifesté cette intention par assignation du 25 août 2011, elle aurait pu le faire selon d'autres modalités extra-judiciaires.
Il s'ensuit que cet article n'institue ni un délai de prescription, ni un délai de forclusion, mais une déchéance du droit à réparation.
En conséquence, l'article 121 du Code de procédure civile qui dispose que 'dans tous les cas où elle est susceptible d'être couverte, la nullité ne sera pas prononcée si sa cause a disparu au moment où le juge statue' est applicable, de sorte que les pouvoirs du 24 septembre 2013 ont valablement régularisé le vice affectant initialement l'assignation.
Il convient d'infirmer la décision entreprise sur ce point.
Sur le droit a indemnisation de la société BFG Technologies Ltd
La société JPB Industry reproche notamment à la société BFG Technologies Ltd d'avoir adressé une offre de matériel à un prospect mexicain Cyr à un montant de 70 000 euro, alors que la machine (l'"upgrade" d'une machine S2 E en S5) avait un prix de 140 000 euro et ce, sans accord préalable de la société JPB Industry et au mépris de la politique tarifaire de celle-ci et des instructions données relatives au respect des conditions tarifaires.
Elle considère que le comportement de M. Stéphane Cousin dans les échanges qui ont eu lieu constitue un manquement au devoir de loyauté et rendait impossible le maintien du lien contractuel.
La société BFG Technologies Ltd réplique que des instructions avaient été données par la direction de la société JPB Industry en janvier 2010 pour réduire les marges et modifier les tarifs et que la pression était mise sur les agents commerciaux pour décrocher de nouveaux marchés.
Sur "l'affaire Cyr", elle conteste la présentation faite par l'adversaire et notamment d'avoir fait une offre à 70 000 euro, évoque une offre faite le 29 novembre 2010 à 190 000 euro sur laquelle le dirigeant de la société JPB Industry n'aurait exprimé aucun désaccord et dont le prix pour un matériel pompe non incluse était moins avantageux qu'une autre offre faite la même année à un autre client.
La société BFG Technologies Ltd soutient qu'en réalité, le nouveau dirigeant de la société JPB Industry ne souhaitait plus sous-traiter l'aspect commercial confié à la société BFG Technologies Ltd et a trouvé le moindre prétexte pour se "débarrasser" de la société BFG Technologies Ltd.
Il n'existe pas de discussion sur la qualification de contrat d'agent commercial du contrat liant les parties.
En application de l'article L. 134-13 1° du Code de commerce, le droit à indemnité de l'agent commercial disparaît en cas de faute grave qui est définie comme "celle qui porte atteinte à la finalité commune du mandat d'intérêt commun et rend impossible le maintien du lien contractuel".
Il est établi par les mails échangés et les grilles tarifaires produits aux débats par la société JPB Industry que le 29 novembre 2010, M. Stéphane Cousin a fait une offre à un prospect, la société Cyr, pour un matériel complémentaire dit "upgrade" au prix de 70 000 euro sur une machine nue de 190 000 euro, alors qu'il était tarifé à 140 000 euro et ce, sans l'aval de son mandant, ce qui portait l'ensemble du matériel à la somme de 260 000 euro au lieu de 330 000 euro, soit moins cher qu'une machine toute équipée à l'origine d'un prix de 290 000 euro, alors que l'adaptation d'un upgrade sur une machine nue nécessite une transformation engendrant un coût.
La société BFG Technologies Ltd prétend que la négociation avait été entamée avec la société Cyr dès le début de l'année 2010, qu'une offre avait été faite, par son intermédiaire, par la société JPB Industry au même prix de 70 000 euro pour l'upgrade, à ceci près que l'offre globale s'élevait à 320 000 euro et ne peut donc être considérée comme équivalente.
Si cet élément établit l'existence de relations commerciales entre la société JPB Industry et la société Cyr autorisant la société BFG Technologies Ltd à négocier avec cette dernière, la société BFG Technologies Ltd échoue à démontrer l'accord de son mandant sur une offre manifestement non conforme à la tarification de celui-ci, alors que cette offre, dès lors qu'elle était formée, engageait la société JPB Industry pour le compte de qui elle était faite.
La société BFG Technologies Ltd ne peut utilement arguer d'une nouvelle politique tarifaire à la baisse, de consignes générales pour diminuer les marges et développer les marchés et d'autres offres similaires, dès lors que cela ne la dispensait pas de recueillir l'aval de la société JPB Industry sur un marché précis d'une importance financière non négligeable au regard de l'activité de la société JPB Industry générant un résultat courant de l'ordre de 50 000 euro.
Il entre dans la mission d'un agent commercial de définir en concertation avec son mandant des conditions tarifaires faites à un client susceptibles d'avoir des conséquences financières significatives.
La société JPB Industry fait ainsi la démonstration d'une faute grave en ce qu'elle est à l'origine d'une perte de confiance en son agent justifiant la rupture du lien contractuel et alors même qu'aucun préjudice identifié n'a été subi par la société JPB Industry, la seule démonstration d'une faute grave privant l'agent de son droit à indemnisation.
Il convient en conséquence de débouter la société BFG Technologies Ltd de sa demande à ce titre.
Sur les dommages et intérêts
La société BFG Technologies Ltd fonde sa demande sur la rupture abusive du contrat d'agent commercial.
Les développements ci-dessus sur la démonstration d'une faute grave rendant impossible le maintien du lien contractuel caractérisent l'absence d'abus dans la rupture dudit contrat.
Cette demande sera écartée.
Sur la demande reconventionnelle en concurrence déloyale
La société JPB Industry reproche à la société BFG Technologies Ltd, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, un acte de concurrence déloyale consistant à l'avoir dénigrée auprès de la société Nordson après la rupture du contrat d'agent commercial et d'avoir proposé ses services à celle-ci pour récupérer la licence d'exploitation exclusive du brevet détenue actuellement par la société JPB Industry.
La société BFG Technologies Ltd conteste tout comportement fautif et avoir forcé la main à la société Nordson à qui elle aurait seulement indiqué être à sa disposition pour ses choix futurs d'exploitation de sa licence.
Cette demande repose sur deux courriels, l'un émanant de M. Stéphane Cousin adressé à la société Nordson et l'autre émanant d'un responsable de la société JPB Industry adressé à cette dernière dont les termes sont les suivants :
- "si vous avez à prendre une décision, BFG et son équipe serait prête à reprendre son action de vente" (pour le premier)
-" Jean-Claude,
Je fais suite à notre conversation téléphonique de mardi soir 07 décembre courant, suite à l'appel téléphonique de Stéphane Cousin (BFG) dans la journée de mardi. Bien évidemment, François Xavier de Thézy et Grégory Berthelot préciseront à Nordson les raisons de leurs décisions lors de notre rencontre des 20 et 21 décembre.
Cordialement
Gérard Maingueneau" (pour le second)
Dans le premier courriel, la société BFG Technologies Ltd évoque les circonstances de son départ de la société JPB Industry. Si on peut y déceler une certaine amertume, aucune allégation diffamatoire ou propos de dénigrement n'y sont contenus ; l'offre de service reproduite ci-dessus ne contient pas davantage d'actes de concurrence déloyale susceptibles d'amener la société Nordson à rompre ses relations avec la société JPB Industry.
Le second courriel ne présente pas non plus d'éléments probants pouvant fonder la demande en indemnisation de la société JPB Industry qui sera donc rejetée.
Sur les demandes annexes
Il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais non taxés.
La société BFG Technologies Ltd qui succombe sur la demande principale sera condamnée aux dépens.
Par ces motifs LA COUR, Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la nullité de l'assignation, Statuant à nouveau, Rejette l'exception de nullité de l'assignation, Déboute les parties de l'intégralité de leurs demandes, Condamne la société BFG Technologies Ltd aux dépens d'appel.