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Décisions

CJUE, 2e ch., 17 septembre 2014, n° C-242/13

COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPEENNE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Commerz Nederland NV

Défendeur :

Havenbedrijf Rotterdam NV

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président de chambre :

Mme Silva de Lapuerta

Avocat général :

M. Wathelet

Juges :

MM. da Cruz Vilaça, Arestis, Bonichot, Arabadjiev

Avocats :

Mes Wesseling, Pijnacker Hordijk, Kleinhout

CJUE n° C-242/13

17 septembre 2014

LA COUR (deuxième chambre),

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l'interprétation de l'article 107, paragraphe 1, TFUE.

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d'un litige opposant Commerz Nederland NV (ci-après "Commerz Nederland") à Havenbedrijf Rotterdam NV (ci-après "Havenbedrijf Rotterdam"), entreprise d'exploitation portuaire appartenant entièrement à la commune de Rotterdam (Pays-Bas), au sujet, notamment, de la validité de garanties accordées au nom de Havenbedrijf Rotterdam et en méconnaissance des statuts de cette entreprise, par l'administrateur unique de celle-ci, à Commerz Nederland, afin que cette dernière mette des lignes de crédit à la disposition d'emprunteurs tiers.

Le litige au principal et les questions préjudicielles

3 Par un contrat du 5 novembre 2003, Commerz Nederland a mis à la disposition de RDM Vehicles BV (ci-après "RDM Vehicles") une ligne de crédit de 25 millions d'euros destinée au financement de la fabrication d'un véhicule blindé. Le même jour, le directeur de Gemeentelijk Havenbedrijf Rotterdam (ci-après "GHR"), entreprise d'exploitation portuaire constituant un service de la commune de Rotterdam, a octroyé une garantie par laquelle GHR se portait garant à l'égard de Commerz Nederland du respect par RDM Vehicles des obligations lui incombant au titre du crédit ainsi accordé.

4 Le 1er janvier 2004, l'exploitation portuaire a été intégrée dans Havenbedrijf Rotterdam, dont la commune de Rotterdam était, à la date des faits au principal, l'associé unique.

5 Le 4 juin 2004, l'ancien directeur de GHR et administrateur unique de Havenbedrijf Rotterdam a octroyé, au nom de cette dernière, une garantie au bénéfice de Commerz Nederland, relative au crédit accordé à RDM Vehicles. En échange de cet octroi, Commerz Nederland a renoncé aux droits qu'elle tirait de la garantie accordée par GHR.

6 Il a été remis à Commerz Nederland des "avis juridiques", datés des 10 novembre 2003 et 4 juin 2004, par un cabinet d'avocats, selon lesquels les garanties octroyées au nom de GHR et de Havenbedrijf Rotterdam, au titre du crédit accordé à RDM Vehicles, constituaient "des obligations valides, contraignantes et susceptibles d'exécution" à l'égard du garant.

7 Par des contrats du 27 février 2004, Commerz Nederland a mis à la disposition de RDM Finance I BV (ci-après "RDM Finance I") et de RDM Finance II BV (ci-après "RDM Finance II") des lignes de crédit de respectivement 7,2 millions d'euros et 6,4 millions d'euros, destinées au financement de matériels militaires commandés à RDM Technology BV.

8 Le 2 mars 2004, l'administrateur de Havenbedrijf Rotterdam a octroyé des garanties par lesquelles cette société se constituait garant, à l'égard de Commerz Nederland, du respect des obligations de RDM Finance I et de RDM Finance II, au titre des crédits accordés à ces deux dernières sociétés.

9 Le 3 mars 2004, le cabinet d'avocats mentionné au point 6 du présent arrêt a remis à Commerz Nederland un "avis juridique" comparable à ceux mentionnés au point 6 du présent arrêt.

10 Par des courriers du 29 avril 2004, Commerz Nederland a mis fin aux crédits accordés à RDM Finance I et à RDM Finance II et a demandé le remboursement des soldes restant dus. Faute de paiement, Commerz Nederland a invité Havenbedrijf Rotterdam à lui verser, au titre des garanties octroyées, les sommes de respectivement 4 869,00 euros et 14 538,24 euros, augmentées du montant des créances accessoires. Havenbedrijf Rotterdam n'a pas répondu favorablement à cette demande.

11 Par un courrier du 20 août 2004, Commerz Nederland a mis fin au crédit accordé à RDM Vehicles et a exigé le paiement du solde restant dû. Aucun paiement n'ayant été effectué, Commerz Nederland a demandé à Havenbedrijf Rotterdam de lui verser, au titre de la garantie octroyée, la somme de 19 843 541,80 euros, augmentée du montant des créances accessoires. Havenbedrijf Rotterdam n'a pas non plus accédé à cette demande.

12 Le 20 décembre 2004, Commerz Nederland a introduit un recours contre Havenbedrijf Rotterdam devant le Rechtbank Rotterdam, par lequel elle a réclamé le paiement du montant dû au titre de la garantie accordée par Havenbedrijf Rotterdam aux fins de l'octroi du crédit à RDM Vehicles. Par un jugement du 24 janvier 2007, cette juridiction a rejeté ce recours au motif que cette garantie constituait une mesure d'aide, au sens de l'article 107, paragraphe 1, TFUE, qui aurait dû être notifiée à la Commission européenne, conformément à l'article 108, paragraphe 3, TFUE, et que, en conséquence, ladite garantie était nulle, en vertu de l'article 3:40, paragraphe 2, du code civil néerlandais.

13 Commerz Nederland a interjeté appel de ce jugement devant le Gerechtshof 's-Gravenhage et a complété ses conclusions en demandant également la condamnation de Havenbedrijf Rotterdam au versement des montants dus au titre des garanties accordées par cette dernière société aux fins de l'octroi des crédits à RDM Finance I et à RDM Finance II. Par un arrêt du 1er février 2011, cette juridiction a confirmé le jugement du Rechtbank Rotterdam et a rejeté les demandes de Commerz Nederland, telles qu'elles avaient été modifiées en appel.

14 En particulier, le Gerechtshof 's-Gravenhage a considéré que l'examen des faits au regard des critères posés par l'arrêt France/Commission (C 482/99, EU:C:2002:294) conduisait à la conclusion que l'octroi des garanties en cause au principal devait être imputé aux autorités publiques néerlandaises.

15 À cet égard, le Gerechtshof 's-Gravenhage s'est appuyé sur les circonstances que la commune de Rotterdam détient l'ensemble des actions de Havenbedrijf Rotterdam, que les membres de la direction et du conseil de surveillance de cette entreprise sont désignés par l'assemblée générale des actionnaires et donc par cette commune, que l'échevin en charge du port préside le conseil de surveillance, que les statuts de Havenbedrijf Rotterdam exigent l'accord du conseil de surveillance pour octroyer des garanties telles que celles en cause au principal et que la finalité assignée à Havenbedrijf Rotterdam par ses statuts n'est pas comparable à celle d'une simple entreprise commerciale, compte tenu de la place primordiale assignée à l'intérêt général.

16 Ladite juridiction d'appel en a conclu que la commune de Rotterdam exerce, dans les faits, une forte influence sur Havenbedrijf Rotterdam et que, dès lors, le contexte factuel de l'affaire au principal se distingue de celui de l'affaire ayant donné lieu à l'arrêt France/Commission (EU:C:2002:294). Cette conclusion ne serait pas modifiée par le fait que l'administrateur de Havenbedrijf Rotterdam a agi arbitrairement, en gardant délibérément secrètes les garanties octroyées et en omettant de demander l'accord du conseil de surveillance de cette entreprise.

17 Par ailleurs, le Gerechtshof 's-Gravenhage a écarté l'argument de Commerz Nederland selon lequel les garanties en cause ne conféraient d'avantage ni à RDM Vehicles ni à RDM Finance I non plus qu'à RDM Finance II, dès lors qu'elles avaient été accordées en vertu d'un contrat conclu entre RDM Holding NV et GHR le 28 décembre 2002, par lequel RDM Holding NV s'était engagée à ne pas livrer de technologie relative aux sous-marins à Taïwan, en échange de l'octroi, par GHR, de garanties aux créanciers des sociétés du groupe RDM, pour un montant minimum de 100 millions d'euros (ci-après le "contrat relatif aux sous-marins"). En effet, cet engagement antérieur n'enlèverait pas auxdites garanties leur caractère d'"avantage", au sens de l'article 107, paragraphe 1, TFUE.

18 Commerz Nederland demande à la juridiction de renvoi d'annuler l'arrêt rendu par le Gerechtshof 's-Gravenhage. Elle fait notamment valoir que les circonstances prises en considération par la juridiction d'appel ne sauraient fonder la conclusion selon laquelle la commune de Rotterdam a été impliquée dans la mise en place des garanties en cause au principal. Commerz Nederland rappelle également que, si elle en avait été informée, la commune de Rotterdam n'aurait pas accepté ces garanties, que l'administrateur concerné a dû renoncer aux fonctions qu'il exerçait au sein de Havenbedrijf Rotterdam et qu'il a été pénalement condamné en raison de son attitude dans cette affaire. Enfin, Commerz Nederland conteste l'appréciation à laquelle s'est livrée la juridiction d'appel en ce qui concerne les effets du contrat relatif aux sous-marins sur la qualification d'"avantage" donnée aux garanties en cause au principal.

19 À cet égard, le Hoge Raad der Nederlanden estime que la juridiction d'appel a jugé à bon droit que l'octroi d'une garantie est un acte juridique autonome, même s'il est réalisé en vue de la mise en œuvre d'une obligation contractuelle. Il en serait ainsi, en particulier, dès lors que le contrat relatif aux sous-marins ne précise ni les sociétés pour lesquelles les garanties devaient être accordées ni les montants devant être couverts.

20 S'agissant de l'imputabilité de ces garanties à l'État, la juridiction de renvoi considère que l'arrêt France/Commission (EU:C:2002:294) peut être interprété en ce sens que cette imputabilité dépend du point de savoir s'il est possible de déduire d'un ensemble d'indices que les autorités publiques doivent être considérées comme impliquées dans l'adoption des mesures concernées, étant entendu que cette implication devrait être réelle et factuelle. En l'occurrence, cette interprétation aboutirait à ce que l'octroi desdites garanties ne puisse être imputé à la commune de Rotterdam.

21 Toutefois, l'arrêt France/Commission (EU:C:2002:294) pourrait également être interprété en ce sens qu'il suffit, pour constater l'implication des autorités publiques dans l'adoption de la mesure concernée, qu'il puisse être déduit d'un ensemble d'indices que ces autorités déterminent en règle générale le processus décisionnel se déroulant au sein de l'entreprise publique lors de l'adoption de mesures telles que celles en cause au principal ou exercent effectivement une influence forte et dominante sur ce processus. Le fait que, en l'occurrence, la mesure concernée n'a pas été portée à la connaissance desdites autorités par l'administrateur de l'entreprise publique et que les statuts ont été délibérément méconnus, de telle sorte que les garanties ont été fournies contre la volonté des organes de surveillance ainsi que de la commune de Rotterdam et de l'État, ne constituerait donc pas nécessairement un obstacle à l'imputabilité desdites mesures aux autorités publiques.

22 Dans ces circonstances, le Hoge Raad der Nederlanden a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

"1) L'imputabilité aux autorités publiques - requise pour qualifier une aide d'aide d'État au sens des articles 107 [TFUE] et 108 TFUE - d'une garantie accordée par une entreprise publique est-elle nécessairement exclue dans une situation où cette garantie a été accordée, comme en l'espèce, par l'administrateur (unique) de l'entreprise publique, qui y était certes habilité selon le droit civil, mais qui a agi arbitrairement, a délibérément gardé secret l'octroi de la garantie et a méconnu les statuts de l'entreprise publique en ne demandant pas l'accord du conseil de surveillance, et où il y a en outre lieu de présumer que l'entité publique en cause (en l'espèce la commune de Rotterdam) n'a pas voulu l'octroi de la garantie?

2) Si les circonstances mentionnées ci-dessus n'excluent pas nécessairement l'imputabilité aux autorités publiques, sont-elles alors dépourvues de pertinence pour répondre à la question de savoir si l'octroi de la garantie peut être imputé aux autorités publiques ou le juge doit-il alors procéder à une appréciation à la lumière des autres indices plaidant pour ou contre l'imputabilité aux autorités publiques?"

Sur la demande de réouverture de la procédure orale

23 La procédure orale a été clôturée le 8 mai 2014 à la suite de la présentation des conclusions de M. l'avocat général.

24 Par lettre du 5 juillet 2014, parvenue à la Cour le même jour, Commerz Nederland a demandé à la Cour d'ordonner la réouverture de la procédure orale.

25 À l'appui de cette demande, il est fait valoir que les conclusions de M. l'avocat général, tout d'abord, ont relevé un exposé insuffisant des faits, ensuite, font apparaître un éclairage insuffisant sur les conséquences de l'une des interprétations alternatives proposées par la juridiction de renvoi et, enfin, sont fondées sur des considérations juridiques sur lesquelles les parties à la procédure n'ont pas suffisamment pu échanger leurs points de vue.

26 À cet égard, il convient de relever que la Cour peut, à tout moment, l'avocat général entendu, ordonner la réouverture de la phase orale de la procédure, conformément à l'article 83 de son règlement de procédure, notamment si elle considère qu'elle est insuffisamment éclairée ou encore lorsque l'affaire doit être tranchée sur la base d'un argument qui n'a pas été débattu entre les parties ou les intéressés visés à l'article 23 du statut de la Cour de justice de l'Union européenne (arrêt Royaume-Uni/Conseil, C 431/11, EU:C:2013:589, point 27 et jurisprudence citée).

27 En l'espèce, la Cour, l'avocat général entendu, considère qu'elle dispose de tous les éléments nécessaires pour répondre aux questions posées et que ces éléments ont fait l'objet des débats menés devant elle.

28 Dès lors, la demande de Commerz Nederland tendant à obtenir la réouverture de la procédure orale doit être rejetée.

Sur les questions préjudicielles

29 Par ses questions, qu'il convient d'examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l'article 107, paragraphe 1, TFUE doit être interprété en ce sens que, aux fins de déterminer si des garanties accordées par une entreprise publique sont ou non imputables à l'autorité publique la contrôlant, sont pertinentes les circonstances selon lesquelles, d'une part, l'administrateur unique de ladite entreprise qui a accordé ces garanties a agi irrégulièrement, a délibérément gardé secret leur octroi et a méconnu les statuts de son entreprise et, d'autre part, ladite autorité publique se serait opposée à l'octroi de ces garanties, si elle en avait été informée. La juridiction de renvoi souhaite, en outre, savoir si ces circonstances sont de nature à exclure, dans une situation telle que celle de l'affaire au principal, une telle imputabilité.

30 À titre liminaire, il y a lieu de relever qu'il est constant que, dans l'affaire au principal, l'octroi par Havenbedrijf Rotterdam des garanties couvrant les crédits accordés à RDM Vehicles, à RDM Finance I et à RDM Finance II implique l'engagement de ressources d'État, au sens de l'article 107, paragraphe 1, TFUE, dès lors que ces garanties comportent un risque économique suffisamment concret susceptible d'entraîner des charges pour Havenbedrijf Rotterdam et que cette dernière était entièrement détenue, à la date des faits au principal, par la commune de Rotterdam.

31 S'agissant de l'imputabilité à l'État, au sens de l'article 107, paragraphe 1, TFUE, de l'octroi de ces garanties, il convient de rappeler qu'elle ne saurait être déduite du seul fait que ces dernières ont été accordées par une entreprise publique contrôlée par l'État. En effet, même si l'État est en mesure de contrôler une entreprise publique et d'exercer une influence déterminante sur les opérations de celle-ci, l'exercice effectif de ce contrôle dans un cas concret ne saurait être automatiquement présumé. Il est encore nécessaire d'examiner si les autorités publiques doivent être considérées comme ayant été impliquées, d'une manière ou d'une autre, dans l'adoption de ces mesures (voir, en ce sens, arrêt France/Commission, EU:C:2002:294, points 50 à 52).

32 À cet égard, il ne saurait être exigé qu'il soit démontré, sur le fondement d'une instruction précise, que les autorités publiques ont incité concrètement l'entreprise publique à prendre les mesures d'aide concernées. En effet, l'imputabilité à l'État d'une mesure d'aide prise par une entreprise publique peut être déduite d'un ensemble d'indices résultant des circonstances de l'espèce et du contexte dans lequel cette mesure est intervenue (arrêt France/Commission, EU:C:2002:294, points 53 et 55).

33 En particulier, est pertinent tout indice indiquant, dans le cas concret, ou bien une implication des autorités publiques ou l'improbabilité d'une absence d'implication dans l'adoption d'une mesure, eu égard également à l'ampleur de celle-ci, à son contenu ou aux conditions qu'elle comporte, ou bien l'absence d'implication desdites autorités dans l'adoption de ladite mesure (arrêt France/Commission, EU:C:2002:294, points 56 et 57).

34 À la lumière de cette jurisprudence, il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier si, en l'occurrence, l'imputabilité à l'État des garanties accordées par Havenbedrijf Rotterdam peut être déduite de l'ensemble des indices résultant des circonstances de l'affaire au principal et du contexte dans lequel elles sont intervenues. À cette fin, il y a lieu de déterminer si ces indices permettent d'établir, en l'occurrence, une implication des autorités publiques ou l'improbabilité d'une absence d'implication de celles-ci dans l'octroi de ces garanties.

35 À cet égard, ainsi que l'ont fait valoir notamment Havenbedrijf Rotterdam et la Commission et comme l'a relevé M. l'avocat général aux points 78 et 79 de ses conclusions, l'existence, en l'occurrence, de liens organiques entre Havenbedrijf Rotterdam et la commune de Rotterdam, tels que ceux décrits au point 15 du présent arrêt, tend à établir, en principe, une implication des autorités publiques ou l'improbabilité d'une absence de leur implication dans l'octroi de telles garanties.

36 En outre, il convient de considérer que la circonstance que l'administrateur unique de l'entreprise publique a agi irrégulièrement n'est pas de nature, à elle seule, à exclure une telle implication. En effet, ainsi que l'ont relevé la juridiction de renvoi elle-même et M. l'avocat général aux points 90 et 91 de ses conclusions, l'effectivité des règles en matière d'aides d'État serait considérablement affaiblie si l'application de celles-ci pouvait être écartée en raison du seul fait que l'administrateur d'une entreprise publique a méconnu les statuts de cette dernière.

37 Cela étant, en l'occurrence, la juridiction de renvoi relève que l'administrateur unique de Havenbedrijf Rotterdam a non seulement agi irrégulièrement et méconnu les statuts de cette entreprise, mais qu'il a également délibérément gardé secret l'octroi des garanties en cause au principal, en raison notamment du fait qu'il y a lieu de présumer que l'autorité publique concernée, à savoir la commune de Rotterdam, se serait opposée à l'octroi de celles-ci si elle en avait été informée. Selon la juridiction de renvoi, ces éléments tendraient à démontrer que ces garanties ont été accordées sans implication de la commune de Rotterdam.

38 Il incombe à cette juridiction d'apprécier si lesdits éléments sont, eu égard à l'ensemble des indices pertinents, de nature à établir ou à exclure l'implication de la commune de Rotterdam dans l'octroi desdites garanties.

39 Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre aux questions posées que l'article 107, paragraphe 1, TFUE doit être interprété en ce sens que, aux fins de déterminer si des garanties accordées par une entreprise publique sont ou non imputables à l'autorité publique la contrôlant, sont pertinentes, avec l'ensemble des indices résultant des circonstances de l'affaire au principal et du contexte dans lequel celles-ci sont intervenues, les circonstances selon lesquelles, d'une part, l'administrateur unique de ladite entreprise qui a accordé ces garanties a agi irrégulièrement, a délibérément gardé secret leur octroi et a méconnu les statuts de son entreprise et, d'autre part, cette autorité publique se serait opposée à l'octroi desdites garanties, si elle en avait été informée. Ces circonstances ne sont toutefois pas, à elles seules, de nature à exclure, dans une situation telle que celle en cause au principal, une telle imputabilité.

Sur les dépens

40 La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement.