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Décisions

CA Basse-Terre, 2e ch. civ., 22 septembre 2014, n° 13-00285

BASSE-TERRE

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Gaillard

Conseillers :

Mmes Gaudin, Bolnet

T. Mix. com. Pointe-à-Pitre, du 21 déc. …

21 décembre 2012

Vu le jugement rendu le 21 décembre 2012 par le Tribunal mixte de commerce de Pointe à Pitre, Vu la déclaration d'appel du 15 février 2013 de la société à responsabilité limitée Le Golfeur et Monsieur Denis T.,

Vu les ultimes conclusions et le bordereau de communication signifiés et déposés le 7 mai 2014 pour Madame Jocelyne L. et la société Escale,

Vu les ultimes conclusions et le bordereau de communication signifiés et déposées le 17 mars 2014 pour la société à responsabilité limitée Le Golfeur et Monsieur Denis T.,

Vu les conclusions d'incident du 3 avril 2014 aux fins de rejet des écritures signifiées pour Madame Jocelyne L. et la société Escale,

Vu l'ordonnance de clôture du 24 mars 2014,

Vu les conclusions et le bordereau de communication signifiés et déposés le 7 mai 2014 pour Madame Jocelyne L. et la société Escale,

EXPOSE DU LITIGE

Suivant l'extrait du registre du commerce versé aux débats, la société Le Golfeur, créée en date du 10 novembre 1986 entre Monsieur T. et Monsieur V. à parts égales, a pour objet l'importation et la commercialisation de toutes marchandises se rapportant aux activités nautiques et sportives et exploite, à ce titre, un magasin de vente de vêtements de sports haut de gamme ;

Que l'assemblée générale des associés du 30 juin 1991 a désigné Madame L., compagne de Monsieur T., en qualité de gérante alors qu'elle s'occupait de la gestion et de la tenue de la boutique ;

Que courant 1994, Monsieur T. a fait l'acquisition des parts de son associé et s'est retrouvé porteur de 560 parts et a fait donation de 30% des parts à Madame L. qui est devenue porteur de 24 parts ;

Qu'après la séparation du couple en février 2001, la mésentente entre les associés s'est amplifiée ;

Que l'ordonnance du juge des référés du Tribunal de grande instance de Pointe à Pitre rendue le 3 octobre 2003 a désigné Maître Franck M. en qualité de mandataire ad'hoc afin de convoquer l'assemblée générale aux fins de désignation d'un co-gérant ;

Que l'assemblée générale des associés présidée par l'administrateur ad'hoc, réunie le 12 décembre 2003, a désigné Monsieur T. en qualité de co-gérant ;

Il résulte des pièces versées aux débats et des actes de la procédure que Monsieur T. a reproché à Madame L. la création de la société Escale, qu'elle soutient pour sa part n'avoir créé que le 24 octobre 2005 afin d'exploiter une boutique concurrente à proximité de la boutique exploitée par la société Le Golfeur ;

L'assemblée générale des associés réunie le 2 octobre 2003 a décidé la révocation de Madame L. de sa qualité de co-gérant ;

Suivant exploit d'huissier de justice à Pointe à Pitre signifié le 1er juillet 2010, la société Le Golfeur et Monsieur T. ont saisi le Tribunal mixte de commerce de Pointe à Pitre d'une demande contre Madame L., la société Escale et la société Jobea en paiement de diverses sommes à titre de dommages et intérêts en raison des agissements déloyaux ;

Le jugement entrepris a :

- rejeté l'exception d'irrecevabilité soulevée par Madame L. la société Escale et la société Jobea tendant à voir déclarer irrecevables les demandes de Monsieur T. et de la société Le Golfeur au motif de la dissolution de la société Le Golfeur depuis le 31 décembre 2009 ;

- débouté Madame L. de sa demande tendant à voir constater la contradiction d'intérêts entre Monsieur T. et la société Le Golfeur ;

- rejeté la demande de désignation d'un administrateur ad'hoc afin d'administrateur de la société Le Golfeur ;

- débouté Madame L. de sa demande tendant à voir déclarer Monsieur T. irrecevable en sa demande en tant qu'elles sont présentées en compte de tiers ;

- condamné Madame L. à verser à Monsieur T. la somme de 14 000 euros pour la faute commise envers la société Le Golfeur ;

- condamné Madame L. à verser à la société Le Golfeur la somme de 76 233,79 euros,

- condamné Madame L. et la société Escale in solidum à verser à la société Le Golfeur la somme de 17 558,36 euros,

- constaté qu'aucune demande n'est formée à l'encontre de la société Jobea,

- débouté la société Escale et Madame L. et la société Jobea de leurs demandes

Attendu que Monsieur T. demande à la cour, pour l'essentiel, de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que Madame L. et la société Escale a commis une faute engageant sa responsabilité, dire que le paiement par la société Le Golfeur des baux visés par l'expertise constitue une faute de gestion et que la constitution de la société Escale directement concurrente constitue une concurrence déloyale et réformer le jugement sur le montant des préjudices et statuant à nouveau condamner in solidum Madame L. et la société Escale à verser la somme de 1 455 534,10 euros et à Monsieur T. celle de 110 000 euros ; qu'à titre subsidiaire il sollicite une mesure d'expertise complémentaire ;

Attendu que dans le dernier état de leurs écritures, Madame L. et la société Escale demandent à la cour "de réformer la décision entreprise", d'écarter le rapport d'expertise déposé par Madame G. comme étant nul, de constater que ses opérations ne valent pas expertise judiciaire et en écarter les conclusions et de condamner Monsieur T. et la société Le Golfeur au versement de diverses sommes à titre de dommages et intérêts ;

SUR CE, LA COUR

Sur la recevabilité des demandes de la société Le Golfeur, de Monsieur T. et sur le moyen tiré de la contradiction d'intérêts entre Monsieur T. et la société Le Golfeur

Attendu qu'il résulte des pièces versées aux débats et de la procédure que courant août 2010, la société Le Golfeur étant arrivée au terme prévu aux statuts, Monsieur T. a convoqué une assemblée générale extraordinaire afin de décider de la prorogation du terme de la société Le Golfeur pour une durée de 50 ans, ce à quoi s'est opposée Madame L. ;

Que suivant exploit d'huissier de justice signifié le 1er août 2011, la société Le Golfeur et Monsieur T. ont saisi le Tribunal mixte de commerce de Pointe à Pitre d'une demande contre Madame L. en désignation d'un administrateur ad'hoc afin de procéder au vote en vue de la prorogation de la société Le Golfeur ;

Que le jugement du tribunal mixte de commerce rendu le 4 novembre 2011 a déclaré la demande irrecevable ;

Que l'assemblée générale du 17 novembre 2011 a désigné Monsieur T. en qualité de liquidateur de la société Le Golfeur ;

Que l'arrêt de la Cour d'appel de Basse-Terre rendu le 15 octobre 2012, aujourd'hui définitif, a réformé le jugement du 4 novembre 2011 et dit que l'opposition de Madame L. à la prorogation de la société constitue un abus de minorité et condamné Madame L. à verser la somme de 40 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

Que dans le cadre de la présente procédure, Monsieur T. a précisé qu'il agit dans l'intérêt de la société Le Golfeur et invoque des préjudices personnels du fait des fautes commises par son associée Madame L., dans le cadre de sa gérance, et par celle-ci et la société Escale dans la création d'une société concurrente déloyale ;

Attendu que Madame L., qui conclut à la réformation du jugement sans autre précision, ne soutient aucun moyen à l'appui de sa demande de réformation du chef de la recevabilité de l'action tant de Monsieur T. que de la société Le Golfeur en liquidation dont le liquidateur régulièrement désigné est Monsieur T. et n'est pas fondée à relever dans ces conditions l'absence de fondement de la présente action ;

Que c'est par de justes motifs que la cour adopte que le jugement entrepris a rejeté les moyens d'irrecevabilité de l'action de la société Le Golfeur prise en la personne de son liquidateur régulièrement désigné, y compris dans l'action au titre de l'absence de paiement de la TVA et des cotisations sociales dont la société est en tout cas redevable et de celle de Monsieur T., à titre personnel ;

Sur les fautes invoquées à l'encontre de Madame L. et de la société Escale

Attendu que Monsieur T. et la société Le Golfeur soutiennent que dans le cadre de sa gestion de la société Le Golfeur, Madame L. a commis des fautes en ce qu'elle n'a pas tenu une comptabilité et s'est livrée à des détournements de recettes et de stocks au détriment de son associé et de la société et également d'avoir procédé à la création de la société Escale constitutive d'une concurrence déloyale ;

Sur les fautes invoquées à l'encontre de Madame L. dans le cadre de sa gestion

Attendu qu'au soutien de ses demandes Monsieur T. et la société Le Golfeur produisent aux débats l'ordonnance de référé du Tribunal de grande instance de Pointe à Pitre rendue le 8 février 2008 qui a confié à Madame G. une mesure d'expertise comptable avec la mission d'examiner les comptes des exercices 2003, 2004 et 2005 de la société Le Golfeur, déterminer la sincérité du chiffre d'affaires et des stocks mentionnés dans ces comptes, déterminer l'historique et les montants des comptes courants des associés du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2006, de vérifier l'adéquation des décisions des associés et des dirigeants avec les dispositions statutaires et législatives tout particulièrement en matière de conventions réglementées et de déterminer le montant des achats de marchandises pour les gammes femmes enfants et maroquinerie pour les années 2003 2004 et 2005 et en déduire les chiffres d'affaires potentiels ou réalisés correspondants et enfin de comparer les montants ainsi obtenus avec les chiffres d'affaires déclarés ;

Que l'expert a rempli sa mission et a déposé son rapport en date du 10 mars 2010 ;

Que Madame L. soutient que ce rapport est entaché de nullité sur la méthode adoptée par l'expert et d'autre part manque de sérieux en raison d'inexactitudes de date dont deux sont citées ;

Attendu que Madame G. a sollicité de Monsieur T. le soin de réaliser un tableau reprenant l'ensemble des achats de marchandises concernant la gamme femme enfant et la gamme homme, d'autre part, à partir des références des articles afin de reconstituer les chiffres d'affaires des opérations ce à quoi ne s'est pas opposée Madame L. qui a remercié l'expert d'avoir eu la possibilité d'examiner ces pièces librement ;

Qu'ainsi Monsieur T. a remis à l'expert un tableau récapitulatif avec les références et les calculs sur tableau Excel pour pallier l'abstention de Madame L. ;

Que, toutefois, les pièces ainsi constituées à la charge du co-gérant ont été soumises à la discussion contradictoire des parties ;

Que les opérations d'expertise contradictoires menées par Madame G. ont eu lieu sous le suivi du juge du contrôle des mesures d'instruction qui n'a été saisi d'aucun incident du chef d'une violation du contradictoire par Madame L. notamment en ce qui concerne la méthode de l'expert ;

Que l'expert a adressé son pré-rapport et elle a ensuite répondu aux dires des parties qui avaient tout loisir de solliciter des rectifications de détails, des dates si elles s'avéraient inexactes ; que Madame L. s'en est abstenue durant le débat contradictoire devant l'expert n'est pas fondée à soulever les dites irrégularités invoquées a posteriori sans manquer au principe de loyauté des débats';

Que les conclusions du rapport sont claires et précises et il y a lieu de rejeter la demande de nullité du rapport d'expertise, de dire n'y avoir lieu à expertise complémentaire et de confirmer le jugement en qu'il a entériné purement et simplement ses conclusions ;

Sur l'existence d'une faute au titre des obligations du gérant

Attendu que l'expert a relevé l'absence des documents prévus par les articles L 123-12 et suivants du Code de commerce, ce que ne conteste pas la gérante';

Que dans son rapport, l'expert précise, sans être contestée, qu'elle n'a pas reçu les inventaires physiques des exercices clos le 31 décembre 2002, le 31 décembre 2003 et le 31 décembre 2004 ; que l'inventaire produit pour l'exercice clos en 2005 comporte des articles commandés en 2006 ;

Que jusqu'à l'assemblée générale des associés présidée par l'administrateur ad'hoc, réunie le 12 décembre 2003, qui a désigné Monsieur T. en qualité de co-gérant, Madame L. avait, seule, la charge des obligations comptables de la société Le Golfeur ;

Que selon les énonciations du procès-verbal de l'assemblée générale des associés susvisé, Monsieur T. a demandé que la comptabilité de la société soit tenue au siège de la société et Madame L. s'est engagée en indiquant toutefois qu'elle ne souhaite pas une irruption de Monsieur T. à tout moment dans la boutique'; qu'il n'est pas discuté que Madame L. n'a pas remis les documents comptables auxquels elle était assujettie en qualité de gérante à compter de 2003 ;

Que Monsieur T. justifie de réclamations qu'il a adressées à Madame L. afin de recevoir les pièces comptables de la société Le Golfeur ; qu'il est établi que le comptable ne s'adressait qu'à Madame L. pour la comptabilité ; que selon le procès-verbal de l'assemblée générale du 15 octobre 2005, Madame L. n'a remis la comptabilité 2003 qu'à cette date sauf le livre d'assemblée et le livre d'inventaire ;

Que l'expert a procédé à l'examen des périodes pour lesquelles elle a reçu des éléments soit les factures manuelles qu'elle a confronté aux données informatisées de la société notamment pour la période de janvier à août 2005 ; qu'ayant procédé par sondage elle a reconstitué les données manquantes et a constaté une différence de 32 327,75 euros entre les factures manuelles et les données informatisées pour cette période de 8 mois ;

Que comme le relève le premier juge qui note que Madame L. a contesté ce calcul, l'expert a apporté un correctif tenant à la prise en compte des factures réglées par les clients en compte ;

Qu'encore Madame L. soutient que les chèques n'ont pas été pris en compte sans toutefois donner d'autres précisions au-delà d'une somme de 600 euros ;

Que Madame L. ne s'explique pas sur l'encaissement personnel de la somme de 11 920 euros, ce qui a conduit l'expert à considérer qu'elle a encaissé une partie des recettes manquantes ;

Que l'expertise établit également que la marge sur coûts d'achats de marchandises entre 2002 et 2006, non inclus, est située dans une fourchette bien inférieure à celle calculée en moyenne dans des cadres similaires autour de 47,9 % ; que d'ailleurs la marge qui sera réalisée par Monsieur T. à compter de l'exercice de 2007 est de 46,15 % ;

Que selon l'expert cela établit le fait que les ventes n'ont pas été convenablement comptabilisées par rapport aux achats correspondants ;

Que le rapport d'expertise établit en conséquence sans que Madame L. ne produise d'autres éléments contraires en cause d'appel, l'absence de sincérité des inventaires et du chiffre d'affaires ;

Qu'il convient dans ces conditions de confirmer le jugement entrepris qui retient que Madame L. a commis une faute en ce qu'elle n'a pas rempli les obligations qui lui incombaient en sa qualité de gérante sans pouvoir établir la négligence du co-gérant Monsieur T. ;

Sur les détournements d'actifs et le compte courant de Madame L.

Attendu que l'expert relève que Madame L. a souscrit un contrat d'assurance vie à son bénéfice sans avoir recueilli l'accord de l'ensemble des associés à hauteur de la somme de 17 592,75 euros ; que de la même manière, Madame L. a fait supporter à la société Le Golfeur des baux sans que ceux-ci aient été agréés par l'assemblée générale des associés ;

Que de plus, le chiffre d'affaires de la société ont été minorés du fait des détournements opérés par Madame L. ;

Qu'enfin il est établi que la société Le Golfeur a commercialisé pendant plusieurs années la marque Lacoste produits homme femme et enfants ; que des commandes ont été faites en janvier et septembre 2005 ; que toutefois les commandes destinées à être vendues lors de l'hiver 2005 n'ont été commandées que pour la ligne masculine ;

Que l'expert retient que la cessation de la vente pour la société Le Golfeur de ces produits alors que la clientèle avait été constituée n'est pas conforme aux intérêts de la société Le Golfeur mais en revanche entièrement prise dans l'intérêt de la société L'Escale ;

Que Madame L. ne justifie pas que Monsieur T. a donné son accord pour cet état de fait alors même qu'il a manifesté sa contestation par des constats puis en introduisant une action en responsabilité ;

Attendu que les dispositions du jugement qui retiennent les conclusions de l'expert, non remises en question par aucune pièce par Madame L., seront confirmées de ce chef ;

Sur la création de la société Escale

Attendu qu'il n'est pas discuté que Madame L. a créé en date du 25 septembre 2005 une société dénommée Escale immatriculée en date du 24 octobre 2005, dont elle détient 350 parts, ayant pour objet la vente en gros ou en détail de vêtements de sport ;

Qu'il n'est pas justifié que la gérante est sa fille Madame C. porteur de parts soit domiciliée en Guadeloupe ; que de fait Madame L. serait gérante de fait de la société ;

Que son siège social est situé dans la boutique ouverte à proximité de la société Le Golfeur ;

Qu'il est reproché à la société Escale depuis l'ouverture du magasin le 1er décembre 2005 de vendre des produits des marques Lacoste New Man TBS Christmas pour la clientèle féminine ainsi que de la maroquinerie Lacoste alors que de son côté la boutique exploitée par la société Le Golfeur commercialisait les mêmes produits de la gamme Lacoste femmes et enfants ;

Que s'il est exact que Madame L. n'était assujettie à aucune obligation formelle de non concurrence, elle est néanmoins assujettie à une obligation de loyauté à l'égard de la société dont elle est membre ;

Qu'il ressort des pièces produites aux débats et, notamment de l'expertise, que des actifs de la société de la société ne sont pas sincères et des chèques de recettes de la société Le Golfeur ont été encaissés par Madame L. à son profit'; que de plus l'activité de ventes de vêtements de marque Lacoste a été reprise par son magasin alors que dans le même temps ils n'ont plus été vendus par la boutique de la société Le Golfeur sur sa décision unilatérale ; qu'en s'appropriant ces articles au bénéfice de sa propre boutique alors qu'il est établi qu'ils étaient vendus préalablement par la boutique Le Golfeur, étant précisé que ces boutiques sont voisines, Madame L. a privé ladite société de ce contrat alors que les marques ne sont vendues que dans un réseau sélectif de boutiques ;

Qu'ainsi la création de la société Escale par Madame Jocelyne L. gérante associée de la société Le Golfeur accompagné du détournement au profit de la société Escale d'une ligne de vêtements emblématique exploitée depuis plus de 5 ans par la société Le Golfeur sans qu'elle puisse justifier de l'accord de l'associé principal de la société Le Golfeur caractérise la concurrence déloyale ;

Que la cour, contrairement aux énonciations du jugement, retiendra l'existence d'une concurrence déloyale de Madame L. du fait de l'existence de la société Escale ;

Sur le montant des préjudices

Sur la demande de la société Le Golfeur au titre des détournements de recettes et la perte de marge

Attendu que du chef des obligations de gérante de Madame L. et de ses fautes personnelles, en l'absence de tout inventaire et bilans réguliers, le jugement retient que les chiffres d'affaires réalisés sous la gérance de Madame L. sont en moyenne de 400 000 euros de 2002 à 2006 alors même que ces chiffres d'affaires n'ont pas été reconnus sincères pour avoir été sous-évalués, ce qui est établi notamment pour 2005 au vu des factures retrouvées par Monsieur T. ; que les chiffres d'affaires réalisés les années suivantes à compter de 2007 par Monsieur T. sont inférieurs et ne dépassent pas 210 000 euros en moyenne ;

Qu'il est établi que Madame L. a cessé d'approvisionner la société de la ligne femme enfants de Lacoste au profit de la société Escale ; que par ailleurs l'expert évalue à 46,15 % la marge perdue par la société Le Golfeur ;

Que toutefois le chiffre d'affaires ne peut être considéré comme le montant du bénéfice de sorte que le calcul opéré par le premier juge apparaît conforme et sera confirmé ; que de même le calcul opéré pour l'indemnisation de la perte de marge sera confirmé ;

Sur le préjudice de la société Le Golfeur du fait de la concurrence déloyale

Attendu que les chefs de demandes ayant trait à la désorganisation de la société Le Golfeur, le préjudice né du manque à gagner et la perte de la valeur du fonds de commerce du fait de la création de la société Escale et celui sollicité au titre la concurrence déloyale au préjudice de la société Le Golfeur sont liés à la faute retenue au titre de la concurrence déloyale ;

Attendu que les effets de cette concurrence perdureront dans les années à venir ; que la perte de la ligne détournée au profit de la société Escale ne peut être reprise par la société Le Golfeur en raison du caractère sélectif des ventes de la marque Lacoste ;

Attendu en conséquence qu'il convient de fixer à la somme de 500 000 euros le montant des dommages et intérêts pour ces postes de préjudice ;

Sur la solidarité des condamnations

Attendu que la solidarité s'impose entre Madame L. et la société Escale pour l'ensemble des condamnations dès lors que même antérieurement à la création de la société Escale il est établi des détournements des recettes de la société Le Golfeur au profit de Madame L. et que les stocks de la société Le Golfeur ont été vendus par la société Escale ;

Sur les préjudices de Monsieur T.

Attendu qu'il convient de confirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives à l'indemnisation de la minoration des parts sociales en ce que le jugement rejette cette demande ayant déjà été prise en compte par l'arrêt de la Cour d'appel de Basse-Terre du du 15 octobre 2012 ;

Qu'au titre de la perte de dividendes qui est directement liée à la perte de chiffres d'affaires, le jugement a fixé cette perte à la somme de 10 000 euros en considérant que le bénéfice a été minoré du fait des agissements de Madame L. ;

Que Monsieur T. qui sollicite la réformation de ce chef ne justifie pas en quoi son préjudice doit être fixé à un montant supérieur à 50 % comme le retient le premier juge ; que le jugement sera confirmé de ce chef ;

Attendu qu'il y a lieu de rejeter les autres demandes sans objet du fait de la confirmation du jugement et de la réformation du chef de la concurrence déloyale ;

Attendu qu'il sera fait application de l'article 700 du Code de procédure civile conformément au dispositif ;

Par ces motifs LA COUR, Confirme le jugement entrepris à l'exception de ses dispositions relatives au préjudice de la société Le Golfeur, Dit que la création de la société à responsabilité limitée Escale en octobre 2005 par Madame Jocelyne L. constitue une concurrence déloyale fautive à l'encontre de la société Le Golfeur compte tenu de sa proximité, de la position de gérante associée de Madame Jocelyne L. et du détournement au profit de la société Escale d'une ligne de vêtements exploitée depuis plus de 5 ans par la société Le Golfeur à l'insu de l'associé principal de la société Le Golfeur ; Dit que les chefs de demandes ayant trait à la désorganisation de la société Le Golfeur, le préjudice né du manque à gagner et la perte de la valeur du fonds de commerce du fait de la création de la société Escale et celui sollicité au titre la concurrence déloyale au préjudice de la société Le Golfeur sont liés à la faute retenue au titre de la concurrence déloyale ; Condamne in solidum Madame Jocelyne L. et la société à responsabilité limitée Escale à verser à la société à responsabilité limitée Le Golfeur la somme de 500 000 euros à titre de dommages et intérêts pour ces postes de préjudice ; Condamne Madame Jocelyne L. et la société à responsabilité limitée Escale à verser à la société à responsabilité limitée Le Golfeur et à Monsieur Denis T. la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ; Condamne Madame Jocelyne L. et la société à responsabilité limitée Escale aux dépens conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ;