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Décisions

Cass. com., 7 octobre 2014, n° 13-20.390

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Lapeyre (SA)

Défendeur :

Le Dunc, JCLD Print (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Mouillard

Avocat général :

M. Mollard

Avocats :

SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, SCP Baraduc, Duhamel, Rameix

T. com. Paris, 13e ch., du 26 sept. 2011

26 septembre 2011

LA COUR : - Statuant tant sur le pouvoi principal formé par la société Lapeyere que sur le pourvoi incident relevé par la société JCLD Print et M. Le Dunc ; - Sur le moyen unique, pris en sa première branche, du pourvoi principal : - Vu l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ; - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Le Dunc, typographe, a été embauché en 1969 par la société d'imprimerie UCI, qui avait pour seul client la société Lapeyre, dont elle éditait le catalogue, puis en a acheté les parts en 1972 ; que le 1er janvier 1997, la société Lapeyre a signé avec la société UCI un contrat qui précisait qu'il était conclu en considération de la personne de son dirigeant, M. Le Dunc, et qu'il pourrait être résilié sans préavis ou indemnité si ce dernier perdait cette qualité, sauf dans l'hypothèse où il resterait maître d'œuvre des activités Lapeyre ; que pour les besoins du développement du catalogue Lapeyre, M. Le Dunc s'est rapproché de la société Mundocom, filiale du Groupe Publicis, qui a racheté la société UCI et l'a engagé comme directeur général adjoint ; que les relations se sont poursuivies au cours des années 2000 entre la société Lapeyre et la société Mundocom ; qu'en octobre 2006, après avoir procédé à un appel d'offres, la société Lapeyre a retenu la société Come Back Graphic associés, avec laquelle elle a conclu une "convention de collaboration" pour la réalisation de ses catalogues à compter du 1er novembre 2006, pour une durée de trois ans, renouvelable par tacite reconduction à défaut de dénonciation six mois avant l'échéance du terme ; que le 16 juillet 2007, la société Come Back Graphic associés a conclu un contrat d'assistance technique avec la société JCLD Print, créée par M. Le Dunc qui venait de quitter la société Mundocom, les prestations confiées concernant exclusivement le suivi de la fabrication des catalogues Lapeyre et le contrat précisant que la société Lapeyre avait demandé à la société Come Back Graphic associés d'avoir recours aux services du "prestataire" et qu'il viendrait à expiration en même temps que l'accord de collaboration avec la société Lapeyre ; que le 30 juin 2009, la société Lapeyre a notifié à la société Come Back Graphic associés qu'elle mettrait fin à leur collaboration à la fin de l'année ; que M. Le Dunc, faisant valoir qu'il travaillait sur le catalogue Lapeyre depuis 1969, et la société JCLD Print, ajoutant n'avoir été créée que pour favoriser la poursuite de cette mission, ont fait assigner la société Lapeyre en paiement de dommages-intérêts pour rupture brutale d'une relation commerciale établie ;

Attendu que pour condamner la société Lapeyre à payer des dommages-intérêts à M. Le Dunc, l'arrêt retient que l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce vise un rapport économique entre, d'une part, un commerçant, d'autre part, un prestataire de service ou fournisseur de biens et que ce texte n'exige pas qu'il existe un lien direct entre le commerçant à l'origine de la rupture et l'agent économique qui s'en prétend victime, mais suppose seulement l'existence d'un courant d'affaires d'une certaine intensité, portant sur un objet spécifique, traduisant un savoir-faire du partenaire pour satisfaire aux besoins de son client lui permettant d'anticiper pour l'avenir une certaine continuité du flux d'affaires ; qu'il retient que tel est le cas de M. Le Dunc qui, bénéficiant de la confiance renouvelée de la société Lapeyre, a consacré toute sa vie professionnelle à la confection du catalogue de cette société et a tiré l'essentiel de ses revenus de cette activité, peu important qu'il ait entretenu cette relation comme salarié de son cocontractant, dirigeant de celui-ci ou dirigeant d'une entreprise sous-traitante de celui-ci ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'une relation commerciale établie s'entend d'échanges commerciaux conclus directement entre les parties, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et attendu que la cassation sur le moyen unique du pourvoi principal entraîne par voie de conséquence, en vertu de l'article 624 du Code de procédure civile, la cassation sur le moyen unique du pourvoi incident ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen unique du pourvoi principal : casse et annule, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 avril 2013, entre les parties, par la Cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Paris, autrement composée.