CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 29 octobre 2014, n° 13-24680
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Joly, ADL (EURL)
Défendeur :
Auvence (SAS), Coff (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Cocchiello
Conseillers :
Mme Nicoletis, M. Douvreleur
Avocats :
Mes Fisselier, Benoit, Cussac
Rappel des faits et de la procédure
I. La société Auvence déploye une activité dans le conseil en gestion de patrimoine. Elle était anciennement dénommée Coff (ou Centre d'Optimisation fiscale) puis OBI (Organisation Business and investissement). Elle propose des produits immobiliers de défiscalisation. Elle est dirigée par MM. Desage et Inquel. La société Coff, filiale à 100 % de la société Auvence, a été créée le 16 mars 2007 avec un début d'activité au premier mars 2007.
Par contrat de location-gérance en date du premier avril 2007, la société Auvence a confié à la société Coff l'exploitation de la branche d'activité de commercialisation de ses produits ainsi que l'exploitation du réseau Coff. Puis, en septembre 2007, la société Auvence lui a cédé cette branche d'activité.
II. Monsieur Joly qui travaillait dans le secteur de l'automobile a souhaité créer son entreprise. Il a été intéressé par le "concept Coff". Le 11 avril 2006, un document d'information pré-contractuelle (DIP) était adressé à Monsieur Joly.
Le 29 mai 2006, Monsieur Joly signait avec la société Auvence un contrat de réservation sur la zone de Lille dans le but de créer une agence Coff. Monsieur Joly a versé alors une somme de 30 000 euro.
Il lui était remis un business plan sur cinq ans le 9 septembre 2006. Le 10 octobre 2006 un contrat de franchise est signé entre la société Auvence et Monsieur Joly, pour l'exploitation d'une agence Coff dans la ville de Lille.
Monsieur Joly payait un droit d'entrée de 50 000 euro et complétait alors son versement initial de 30 000 euro.
Le 14 novembre 2006, il signait un bail pour exploiter le concept dans des locaux à Lille. Il concluait en décembre 2006 des contrats de prêt pour 107 000 euro.
En janvier 2007, Monsieur Joly créait la société à responsabilité limitée ADL dont il est le seul associé et qui s'est substituée à lui dans l'exploitation de l'agence Coff.
III. La société ADL signait le 18 octobre 2007, avec la société Auvence un " protocole de résiliation de contrat de franchise " et régularisait avec la société Coff, un "contrat de licence d'enseigne et de partenariat commercial", moyennant un droit d'entrée de 35 000 euro. Une somme de 15 000 euro lui était alors restituée sous forme d' "indemnité de modification de contrat suite à la régularisation du protocole de contrat de franchise".
Estimant enregistrer des pertes, la société ADL décidait de fermer son agence Coff et d'engager la présente procédure à l'encontre des sociétés Auvence et Coff.
C'est dans ces conditions que la société ADL a fait assigner à bref délai le premier août 2008 les sociétés Auvence et Coff.
Par jugement rendu le 4 juin 2009, le Tribunal de commerce de Paris a :
- débouté les sociétés Coff et Auvence de leurs demandes tendant à voir constater que les règles procédurales en matière de procédure à bref délai n'ont pas été respectées par Monsieur Joly Jérôme et la société ADL et à voir écarter des débats les pièces n° 32 à 45 communiquées par Monsieur Joly et la société ADL,
- débouté M. Jérôme Joly et la société ADL de toutes leurs demandes à l'encontre des sociétés Coff et Auvence,
- débouté les sociétés Coff et Auvence de toutes leurs demandes à l'encontre de M. Jérôme Joly et la société ADL,
- Condamné in solidum M. Jérôme Joly et la société ADL à payer aux sociétés Coff et Auvence prises ensemble la somme de 5 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- Condamné in solidum M. Jérôme Joly et la société ADL aux dépens.
Vu l'appel de ce jugement interjeté le 12 décembre 2011 par Monsieur Jérôme Joly et l'EURL ADL,
Vu les conclusions signifiées le 12 décembre 2011 par la société ADL et M. Jérôme Joly, et les conclusions signifiées le 8 janvier 2010 par la société Auvence et la société Coff,
Par un arrêt en date du 9 mai 2012, la Cour d'appel de Paris a :
- confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- rejeté le surplus des demandes des parties,
- dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel,
- condamné in solidum, les appelants au paiement des dépens d'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.
Un pourvoi était formé par M. Jérôme Joly et la société ADL contre cet arrêt.
Par un arrêt du 10 décembre 2013, la Cour de cassation a cassé et annulé, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 mai 2012 par la Cour d'appel de Paris aux visas des articles L. 330-3 et R. 330-1 du Code de commerce, des articles 1134, 1110, 1116, 1184 du Code civil, remis en conséquence la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et les renvoie devant la Cour d'appel de Paris, autrement composée et condamné les sociétés Auvence et Coff aux dépens sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par conclusions signifiées le 28 août 2014 auxquelles il convient de se référer pour un exposé plus ample des motifs, la société ADL et M. Jérôme Joly demandent à la cour de :
- Infirmer le jugement du 4 juin 2009 en intégralité, sauf en ce qu'il a débouté les sociétés Auvence et Coff de leurs demandes à l'encontre de Monsieur Jérôme Joly et de la société ADL
- Débouter les sociétés Auvence et Coff de toutes leurs demandes,
A titre principal :
- Juger Monsieur Joly et la société ADL recevables à solliciter la nullité du contrat de franchise du 10 octobre 2006,
- Juger que le consentement de Monsieur Joly et de la société ADL a été vicié lors de la signature du contrat du 10 octobre 2006,
- Juger que ledit contrat était dépourvu de cause,
- Juger que le contrat de franchise du 10 octobre 2006 est nul et de nul effet,
Subsidiairement :
- Juger que le consentement des appelants a été vicié lors de la conclusion du protocole de résiliation du 18 octobre 2007,
- Juger que les sociétés Auvence et Coff ont gravement manqué à leurs obligations contractuelles,
- Juger que la résiliation anticipée du contrat du 10 octobre 2006 est intervenue aux torts et griefs exclusifs des sociétés Auvence et Coff,
En tout état de cause :
- Condamner solidairement les sociétés Auvence et Coff à payer à la société ADL les sommes de :
- 270 151 euro au titre du préjudice économique direct,
- 317 814,29 euro au titre de la perte de résultat,
- 45 866 euro au titre de la perte de la valeur sur fonds de commerce,
- Condamner solidairement les sociétés Auvence et Coff à payer à Monsieur Joly les sommes de :
- 226 000 euro au titre du remboursement du compte courant d'associé de Monsieur Joly,
- 45 000 euro à titre de dommages et intérêts en réparation de l'absence totale de rémunération pendant l'exécution du contrat de franchise,
- Condamner solidairement les sociétés Auvence et Coff à verser à chacun des concluants la somme de 15 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP AFG, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Par conclusions du premier septembre 2014 auxquelles il convient de se référer pour un exposé plus ample des motifs, la société Auvence et la société Coff demandent à la cour de :
- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Monsieur Joly et la société ADL de leur demande de voir prononcer la nullité du contrat de franchise, du protocole de résiliation et du contrat de licence ou la résiliation du contrat de franchise ou du contrat de licence aux torts des sociétés Auvence et/ou Coff,
- l'Infirmer en ce qu'il n'a pas constaté la résiliation du contrat de licence aux torts de Monsieur Joly et de la société ADL,
- Confirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Paris le 4 juin 2009, sauf en ce qu'il a débouté les sociétés Coff et Auvence de toutes leurs demandes à l'encontre de Monsieur Jérôme Joly et de la société ADL,
- Constater les inexécutions contractuelles commises par la société ADL et Monsieur Joly.
En conséquence,
- Résilier le contrat de licence aux torts exclusifs de la société ADL et de Monsieur Joly,
- Condamner la société ADL et Monsieur Joly conjointement et solidairement à payer à la société Coff la somme de 15 200 euro au titre de dommages et intérêts pour inexécutions contractuelles,
- Rejeter l'intégralité des demandes formulées par la société ADL et Monsieur Joly, plus particulièrement constaté que la société ADL est irrecevable en sa demande visant à l'indemnisation de la perte de résultat,
- Condamner conjointement et solidairement la société ADL et Monsieur Joly à payer la somme de 10 000 euro à chacune des sociétés Auvence et Coff sur les fondements de l'article 700 du Code de procédure civile,
- Condamner conjointement et solidairement la société ADL et Monsieur Joly aux entiers dépens.
Sur ce,
I Sur la nullité du contrat de franchise du 10 octobre 2006 :
Considérant que les appelants soutiennent que la société ADL a été trompée sur la rentabilité du concept Coff et a reçu une information précontractuelle insuffisante et mensongère, qu'ils font état, ensuite, du défaut de cause et d'objet du contrat,
1) Considérant qu'ils rappellent que la franchise doit procurer un avantage concurrentiel, que la rentabilité est un élément déterminant du consentement à investir dans le concept Coff, qu'ils exposent au visa des articles 1109, 1110 et 1116 du Code civil que le consentement a été vicié par des prévisions irréalistes, fantaisistes, peu sérieuses qui leur ont été fournies avant la signature du contrat de franchise, qu'ils contestent avoir commis la moindre faute de gestion, rappellent avoir été félicités pour le travail fourni en fin d'année 2007, exposent que la non-détention de la "carte T" n'explique pas le faible chiffre d'affaires lequel résulte de l'absence de conseils, de formation, de suivi, d'assistance et réaffirment que le concept n'était pas rentable,
Considérant ensuite qu'ils exposent que l'information précontractuelle des articles L. 330-3 et R. 330-1 du Code de commerce était inexacte et insuffisante, voire mensongère, que les dirigeants de la société Coff, MM. Desage et Inquel, n'avaient pas le diplôme dont ils faisaient état et l'expérience professionnelle requise pour la gestion de patrimoine, que les comptes annuels du franchiseur qui ne se présente pas sous son vrai nom, n'ont pas été communiqués, que les comptes sociaux des membres du réseau, leur adresse ne sont pas communiqués, qu'aucune présentation de l'état local du marché n'est fournie sinon une trame vierge, que leur consentement a été vicié par ces agissements,
Considérant que les sociétés intimées rappellent que le manquement reproché au franchiseur doit avoir des conséquences dolosives, qu'elles soutiennent que le DIP adressé bien avant la signature du contrat de franchise était complet et fournissait les renseignements prévus par la loi, que tout particulièrement, le réseau d'exploitants était présenté, avec liste et adresses, que les comptes sociaux du franchiseur ont été fournis et que la loi ne fait pas obligation de communiquer les comptes des filiales, qu'un document d'étude du marché local a été présenté, que les mentions relatives aux diplômes des dirigeants résultent d' une "erreur de plume" sans incidence sur le consentement,
Considérant encore qu'elles soutiennent que le "business plan" sur cinq ans a été établi avec sérieux et est cohérent au regard des performances des consultants, par rapport aux succursales Coff de Bordeaux et de Paris-Saint-Cloud et confirmé par le chiffre d'affaires des concurrents, que le marché de Lille ne révélait aucun paramètre particulier ou aucune difficulté qui aurait pu minorer les prévisions par rapport à Paris ou Bordeaux ; qu'elles exposent qu'elles n'ont pu anticiper la crise financière des "subprime" de 2007-2008 ; qu'elles soulignent n'être soumises à aucune obligation de résultat, n'avoir donné aucune garantie sur la rentabilité ; qu'elles soutiennent que l'échec de la société ADL est causé par le défaut de détention de la carte immobilière, par sa propre carence, par l'insuffisance de prospection et l'absence de réflexion sur ses qualités personnelles,
Considérant que le compte d'exploitation prévisionnel doit être établi de manière sérieuse, sur la base d'informations sincères et vérifiées et ne doit pas être exagérément optimiste ; que le business plan que Monsieur Joly critique lui a été adressé avant la signature du contrat, le 9 septembre 2006 ; qu'en l'espèce, il s'avérait devoir réaliser par le franchisé la première année un chiffre d'affaires de 469 200 euro, la seconde année 500 200 euro, la troisième année 673 200 euro, la quatrième année 841 500 euro et la cinquième année 1 119 200 euro, pour des résultats de 97 626 euro, 193 501 euro, 255 684 euro, 310 602 euro et 239 490 euro ; que dès lors que le concept était développé depuis peu, ces chiffres, nonobstant les difficultés financières invoquées par les intimées en fin d'année 2007 et en 2008 étaient peu réalistes ; que la comparaison faite avec l'agence Coff Bordeaux n'était pas pertinente alors que l'exploitation de cette agence, dans un cadre autre que celui de la franchise, était le fait de personnes ayant une expérience importante dans le domaine de la défiscalisation ; que la comparaison avec les chiffres d'affaires d'entreprises concurrentes n'était pas non plus pertinente alors que ces entreprises n'étaient pas spécialisées dans les seuls investissements immobiliers avec défiscalisation ; que le caractère irréaliste est vérifié ensuite par les chiffres d'affaires des autres franchisés notamment de Rennes et La Rochelle ; que l'expérience professionnelle de Monsieur Joly ne pouvait lui permettre de déceler la surévaluation des résultats, s'agissant ici d'exploiter un concept dans un domaine qui lui était totalement étranger ; que si le franchiseur n'a pas une obligation de garantie des chiffres qu'il annonce, il doit toutefois les établir loyalement sauf à vouloir tromper le candidat sur la réalité du concept et les résultats escomptés,
Considérant au surplus que l'article L. 330-3 du Code de commerce dispose que "toute personne qui met à la disposition d'une autre personne un nom commercial, une marque ou une enseigne, en exigeant d'elle un engagement d'exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l'exercice de son activité, est tenue, préalablement à la signature de tout contrat conclu dans l'intérêt commun des deux parties, de fournir à l'autre partie un document donnant des informations sincères, qui lui permette de s'engager en connaissance de cause" ;
Considérant que, selon les dispositions de l'article L. 330-3 du Code de commerce, le document d'information précontractuelle (DIP), "dont le contenu est fixé par décret, précise notamment, l'ancienneté et l'expérience de l'entreprise, l'état et les perspectives de développement du marché concerné, l'importance du réseau d'exploitants, la durée, les conditions de renouvellement, de résiliation et de cession du contrat ainsi que le champ des exclusivités" ; qu'en vertu du 4° de l'article R. 330-1 du Code de commerce, les informations sur l'entreprise du franchiseur "permettant d'apprécier l'expérience professionnelle acquise par l'exploitant ou par ses dirigeants " sont complétées par une "présentation de l'état général et local du marché et des perspectives de développement de ces produits" et que doivent être également annexés " les comptes annuels des deux derniers exercices" ; qu'en vertu du 5° de ce même texte, le franchiseur doit donner une " présentation du réseau d'exploitants qui comporte :
a) la liste des entreprises qui en font partie avec l'indication, pour chacune d'elles du mode d'exploitation convenu,
b) l'adresse des entreprises établies en France avec lesquelles la personne qui propose le contrat est liée par des contrats de même nature que celui dont la conclusion est envisagé..."
Considérant, selon le document versé aux débats (pièce 3) que le franchiseur a adressé avant la signature du contrat de franchise un DIP à Monsieur Joly qui comportait :
* pour ce qui concerne l'expérience des dirigeants, MM. Desage "Président Coff" et Inquel "Directeur Général Coff", une présentation de ceux-ci selon laquelle ils étaient "titulaires d'un DESS de gestion de patrimoine de l'Université de Clermont-Ferrand", alors que la société ADL rapporte la preuve que ces dirigeants n'en sont pas titulaires,
* pour ce qui concerne le réseau, une indication selon laquelle le réseau Coff créé en 1996 comprend un "espace investisseur Coff" situé à Saint-Cloud, un "espace investisseur Coff" situé à Bordeaux, indique qu'" après une exploitation dans le cadre d'un "espace investisseur Coff" pilote, ce réseau s'est successivement développé sous la forme de la franchise" et qu'"actuellement, ce réseau ne comprend pas de franchisés ou d'autres succursales",
* pour ce qui concerne la présentation de l'état général et local du marché, une description de l'état général du marché et des perspectives de développement du marché de la défiscalisation, qu'une annexe 3 intitulée "Foyers fiscaux en France" donne une "image de la taxation des revenus de l'année 2003 à la date du 31 décembre 2004, une situation qui reflète l'ensemble des déclarations d'impôts sur le revenu 2003 taxées tout au long de l'année 2004 ainsi que les impositions supplémentaires suite à contrôle fiscal et les dégrèvements accordés au cours de l'année 2004" pour toutes les régions du territoire ; que l'annexe 4 intitulé "trame d'état du marché local" ne fournit aucune indication sur le marché local,
* pour ce qui concerne les comptes sociaux, l'annexe 1 "bilans sociétés exercice 2005" précise : "La période de clôture de l'exercice des sociétés Coff SAS, Coff Paris et Coff Aquitaine est fixée dans les statuts au 31 mars de chaque année en conséquence de quoi l'information sur l'exercice 2005 sera fournie dès réception des bilans sociétés de l'exercice 2005" ; qu'à cet égard, il ne convient pas, comme le font les intimées, de faire état des éléments contenus dans le DIP remis avant la signature du contrat de licence qui présente des éléments plus approfondis,
Considérant qu'en l'espèce, les termes de l'article R. 330-1 5° du Code de commerce sont respectés ; que toutefois, pour le surplus, l'état du marché local n'est pas renseigné, les comptes sociaux annuels des deux derniers exercices ne sont pas fournis, qu'il n'est pas ainsi satisfait aux exigences de l'article R. 330-1 4° ; que les deux manquements ne permettent pas au candidat d'avoir une connaissance complète de l'entreprise dans laquelle il s'engage, d'avoir les moyens de connaître les perspectives de développement de son entreprise sur le secteur géographique réservé ;
Considérant également que le franchiseur a donné des indications fausses et ne résultant pas d'une "erreur de plume" sur les diplômes des dirigeants, alors que leur expérience professionnelle très succinctement décrite et que la rédaction du "rappel historique du réseau" est pour le moins curieuse ; qu'alors que le réseau de franchise était manifestement en cours de constitution, ces mensonges permettaient de faire croire que les dirigeants avaient les capacités requises nécessaires au succès du réseau, étaient déterminants du consentement,
Considérant que le business plan irréaliste, le mensonge sur la qualification universitaire des dirigeants, le tout associé à des renseignements succincts ou inexistants, ont vicié le consentement de Monsieur Joly qui ne se serait pas déterminé sinon à conclure un tel contrat ; que le contrat de franchise doit être annulé pour dol,
2) Considérant ainsi que les autres causes d'annulation du contrat invoquées par les appelants ne seront pas examinées,
* Sur les conséquences de la nullité :
1) Considérant que la société ADL demande l'allocation de dommages-intérêts pour le préjudice économique direct (270 151 euro), pour "une perte de chance de contracter avec un autre partenaire dans des conditions plus avantageuses" (perte de résultat (317 814, 29 euro) et perte de valeur sur le fonds de commerce (45 866 euro)),
Considérant que la victime de manœuvres dolosives peut demander, outre l'annulation du contrat, réparation du préjudice subi en raison de la faute dolosive du franchiseur ;
Considérant que les intimées invoquent la faute des appelants, leur mauvaise gestion, l'absence de détention de la "carte T", leur absence d'activité commerciale, à l'origine des mauvais résultats qu'ils ont eus, l'absence de preuve de l'existence de préjudice, l'absence de lien entre la faute et le préjudice,
Considérant tout d'abord que si l'appelante a subi un préjudice "économique direct", celui-ci est constitué comme justement le font remarquer les intimées, par les investissements nécessaires à la mise en place de l'exploitation de la franchise ; qu'en l'espèce, le franchisé indique avoir payé un droit d'entrée, avoir réalisé des investissements des frais d'agencement spécifiques des locaux ainsi que le lui imposaient les dispositions contractuelles, l'acquisition de matériel informatique, pour 40 770 euro ; que toutefois, la somme payée pour le droit d'entrée fait partie des restitutions consécutives à l'annulation du contrat, et il doit être ici observé que partie du droit d'entrée a été restitué et que le surplus a été conservé pour le droit d'entrée au titre du contrat de licence ; que les investissements réalisés ont permis à la société ADL de poursuivre son activité après la fin du contrat de franchise dans le cadre du contrat de location d'enseigne et d'autres activités ; que dès lors l'appelante ne justifie pas le réalité du préjudice invoqué,
Considérant qu'il est fait état dans les écritures de la perte de chance de contracter à des conditions plus avantageuses avec un tiers ainsi que la perte de chance de réaliser des gains si le franchisé avait pu "exploiter son activité dans des conditions normales avec un autre partenaire", qu'il est fait état également de "gain manqué" ; que le franchisé ne justifie d'aucun élément rapportant la preuve qu'il existait pour lui une chance de contracter avec un tiers, que d'autres solutions plus intéressantes auxquelles il a préféré renoncer pour signer le contrat de franchise annulé, lui auraient permis d'avoir un développement "normal" ; qu'il ne justifie pas non plus qu'il a manqué un gain de 258 000 euro, alors qu'il prend pour hypothèse le chiffre d'affaires prévisionnel proposé par le franchiseur qu'il considère irréaliste, alors qu'il a contesté toute rentabilité du concept Coff, en grevant ce chiffre des charges inhérentes à l'exploitation et en l'affectant d'une décote ; qu'il sera débouté de sa demande ;
Considérant enfin pour ce qui concerne la perte de chance concernant la valeur que le fonds de commerce aurait pu avoir, notamment grâce au développement d'une clientèle, qu'il apparaît également que l'existence de ce préjudice n'est pas rapportée, étant observé que la société précise avoir continué son activité en cessant de proposer les produits Coff ;
2) Considérant que Monsieur Joly explique avoir subi un préjudice en raison de l'absence de rémunération pendant la durée de l'exécution du contrat entre le mois de janvier 2007 et le mois de juillet 2008, et avoir avancé des fonds à la société ADL sous forme de crédit en compte courant (226 000 euro),
Considérant que Monsieur Joly ne peut réclamer des dommages-intérêts en réparation d'un préjudice qui correspondrait à des rémunérations qu'il pouvait attendre de l'exploitation de la franchise ; que par ailleurs s'il a apporté à la société qu'il dirige des fonds en compte courant qui s'élèvent, selon les documents comptables, à la somme de 225 866 euro au 31 mars 2013, il ne justifie pas avoir eu une créance sur la société à la fin de l'exécution du contrat de franchise en octobre 2007 ; qu'il sera débouté de sa demande,
II Sur la résiliation du contrat de licence :
Considérant que la société Coff reproche à la société ADL et à Monsieur Joly de ne pas avoir exécuté leurs obligations nées du contrat de licence, de n'avoir pas obtenu une carte d'agent immobilier, de s'être abstenus de communiquer le chiffre d'affaires et de payer spontanément les redevances, d'avoir été absents aux formations Coff et de ne pas avoir réalisé le chiffre d'affaires minimum,
Considérant que les appelants exposent que les intimées ont commis de graves manquements, ne leur transmettant pas un savoir-faire rentable, ne les assistant pas techniquement et commercialement, qu'ils reprochent également aux intimées de ne pas avoir respecté l'article 4 du Code européen de déontologie de la franchise en acceptant le dossier de Monsieur Joly qui ne pouvait obtenir la "Carte T" nécessaire à la commercialisation de produits immobiliers ; que les appelants contestent les reproches qui leurs sont faits, absence de carte T, non communication du chiffre d'affaires et paiement de redevances, mais ne demandent toutefois pas à titre principal dans le dispositif de leurs écritures la résiliation de ce contrat,
Considérant que le contrat signé par les parties imposait au licencié de s'engager à suivre une formation, initiale et continue, d'adopter le matériel informatique préconisé par Coff pour rationaliser son activité, de respecter le manuel opératoire et la marque, de signaler toute atteinte à la marque à Coff, de respecter l'enseigne, de respecter la législation en vigueur, verser une redevance proportionnelle de 5 % hors taxe du chiffre d'affaires hors taxe réalisé, de respecter les objectifs définis d'un commun accord chaque année,
Considérant que le contrat signé par les parties précisait que la société Coff devait assister le licencié lors de l'implantation et de la formation initiale, soit le conseiller pour établir un prévisionnel d'exploitation, assurer sa formation initiale, l'accompagner pendant les douze premiers mois par un animateur, qu'il devait mettre à sa disposition la centrale de référencement qu'il avait créée, créer une adresse e-mail et mettre à sa disposition un code d'accès extranet, lui transmettre régulièrement par tous moyens des informations sur la commercialisation des produits, avoir une politique permanente de recherche de nouveaux produits, faire des recherches et des mises au point dans le domaine de la communication publicitaire pour l'ensemble de ces éléments, mettre ces éléments à disposition du licencié, mettre en place des formations commerciales,
Considérant que selon les pièces versées aux débats, il apparaît que la société ADL a été titulaire de la "carte T" à compter du 4 mars 2008 ; qu'elle n'a pas déclaré son chiffre d'affaires lequel s'est avéré "quasi-nul" ; qu'elle a informé la société Coff le 28 décembre 2008 de ce qu'elle avait "pris le parti de ne plus exécuter les obligations du contrat de licence", a résilié le bail commercial des lieux dans lesquels elle exploitait ainsi qu'il résulte des constatations faites par l'huissier le 13 janvier 2009 ; que de son côté, la société Coff a suivi la société ADL de façon aussi "chaotique" qu'elle l'avait suivie au cours de l'exécution du contrat de franchise en raison du départ ou du licenciement ou de l'incompétence des interlocuteurs-animateurs sur la courte période d'exécution du contrat, qu'elle a de même fourni une assistance succincte par des mails laconiques et n'a assuré aucune assistance promotionnelle au cours de l'exécution du contrat ; que par ailleurs, c'est en toute connaissance de cause des difficultés que rencontrait Monsieur Joly gérant de la société ADL à obtenir la carte professionnelle d'agent immobilier que le contrat de licence a été signé en octobre 2007, étant précisé que les parties avaient eu pour pratique au cours de l'exécution du contrat de franchise de faire signer les quelques mandats par Coff qui rétrocédait ensuite les commissions à ADL ;
Considérant alors que les manquements reprochés par la société Coff à la société ADL ne sont pas suffisamment graves pour justifier que la résiliation du contrat de licence soit prononcée à ses torts ;
Considérant que les intimées seront déboutées de leurs demandes,
Par ces motifs, LA COUR, infirmant la décision entreprise sur la validité du contrat de franchise, prononce la nullité du contrat de franchise signé par les parties le 10 octobre 2006, déboute les parties pour le surplus de leurs demandes, condamne les sociétés Auvence et Coff à payer à la société ADL et à Monsieur Joly la somme de 10 000 euro au titre de l'indemnité pour frais irrépétibles, condamne les sociétés Auvence et Coff aux entiers dépens.