Cass. 1re civ., 29 octobre 2014, n° 13-15.850
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
UFC 38 Que Choisir
Défendeur :
Lescene immobilier (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Batut
Avocats :
SCP Boré, Salve de Bruneton, SCP Waquet Farge, Hazan
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 27 mars 2007, l'association Union fédérale des consommateurs de l'Isère (l'UFC) a assigné la société Lescene immobilier (la société) aux fins d'obtenir la suppression de clauses illicites ou abusives contenues dans le contrat de syndic proposé par cette société aux syndicats de copropriétaires ;
Sur le premier moyen : - Attendu que l'UFC, dont la recevabilité à agir n'a pas été contestée, fait grief à l'arrêt de déclarer sans objet la demande d'interdiction de l'usage à l'avenir des clauses contenues dans le contrat de syndic dans ses versions 2006, 2007 et 2008, alors, selon le moyen : 1°) que l'objet du litige est déterminé par les prétentions des parties ; qu'en appel, ces prétentions ainsi que les moyens sur lesquels elles sont fondées doivent être expressément formulées dans les conclusions ; qu'en l'espèce, pour déclarer sans objet la demande d'interdiction de l'usage à l'avenir des clauses contenues dans les contrats de syndic 2006, 2007 et 2008 et statuer comme elle l'a fait sur les demandes réciproques de dommages-intérêts et de publication, après avoir relevé l'imprécision des dernières conclusions de la société sur le sort qu'elle entendait donner aux clauses examinées de ses contrats successifs (version 2006, 2007 et 2008) à savoir leur maintien et la nécessité dans ce cas de statuer sur ces clauses ou la substitution définitive à ces clauses des nouveaux contrats, l'arrêt retient qu'à l'audience de la cour d'appel, le conseil de la société a précisé qu'elle abandonnait l'usage des clauses contenues dans les contrats de syndic de 2006, 2007 et 2008 et soumettait à la cour d'appel la version du 3 janvier 2011 de son nouveau contrat de syndic ; qu'en se déterminant ainsi, par une référence à des débats oraux à l'encontre des écritures des parties, la cour d'appel a violé les articles 4 et 954 du Code de procédure civile ; 2°) que l'action des associations agréées de défense des consommateurs en cessation et interdiction de tout agissement illicite au regard notamment de la directive du 5 avril 1993 sur les clauses abusives, ne perd pas son objet du seul fait qu'une clause abusive ou illicite a été supprimée, à la date à laquelle la juridiction statue, par le professionnel du modèle de contrat qu'il proposait aux consommateurs en ce qu'elle permet, en consacrant à l'égard de tous ce caractère abusif et illicite, de faire effectivement cesser l'agissement poursuivi au profit des consommateurs ayant conclu le contrat comprenant la clause litigieuse qui peut être encore en cours, et de faire interdire définitivement tout nouvel usage d'une telle clause ; qu'en l'espèce, la cour d'appel qui s'est fondée sur l'abandon allégué par la société des clauses abusives ou illicites contenues dans ses contrats-types, version 2006, 2007 et 2008 pour statuer comme elle l'a fait, a violé les articles L. 132-1 et L. 421-6 du Code de la consommation, ensemble les articles 6 § 1 et 7 de la directive 93-13-CEE du Conseil du 5 avril 1993 ;
Mais attendu qu'ayant constaté, après s'être référée à des débats oraux non contraires aux écritures des parties pour interpréter les prétentions de la société, que celle-ci ne proposait désormais plus que le contrat de syndic dans sa version 2011, c'est à bon droit que la cour d'appel a déclaré sans objet la demande d'interdiction de l'usage à l'avenir des clauses contenues dans les versions 2006, 2007 et 2008 de ce contrat ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Mais sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du Code de procédure civile : - Vu l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881, ensemble l'article 1382 du Code civil ; - Attendu que les abus de la liberté d'expression prévus et réprimés par la loi du 29 juillet 1881 ne peuvent être réparés sur le fondement de l'article 1382 du Code civil ;
Attendu que l'arrêt accueille la demande de dommages-intérêts formée par la société au titre du droit commun de la responsabilité et motivée par l'atteinte causée à sa réputation et à celle de son gérant par la publication tronquée du jugement entrepris ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les faits, tels que dénoncés par la société, ne pouvaient relever que des dispositions de la loi du 29 juillet 1881, la cour d'appel a violé les textes susvisés, le premier par refus d'application, le second par fausse application ;
Vu l'article L. 411-3 du Code de l'organisation judiciaire ; - Attendu que la prescription édictée par l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881, qui n'a pas été interrompue au regard des dispositions de cette loi, se trouve acquise ;
Par ces motifs : et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen : Casse et Annule, mais seulement en ce qu'il condamne l'UFC 38 à payer à la société Lescene immobilier la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral, l'arrêt rendu le 28 janvier 2013, entre les parties, par la Cour d'appel de Grenoble ; Dit n'y avoir lieu à renvoi ; Constate l'extinction de l'action en diffamation.