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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 11, 28 novembre 2014, n° 13-04354

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Beauchamp Entreprises (SAS)

Défendeur :

Missyl (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Touzery-Champion

Conseillers :

Mme Prigent, M. Richard

Avocats :

Mes Gary, Guerit, Grappotte-Benetreau, Landart

T. com. Bordeaux, du 1er févr. 2013

1 février 2013

La société Beauchamp Entreprises a interjeté appel du jugement prononcé le 1er février 2013 par le Tribunal de commerce de Bordeaux qui l'a déboutée de toutes ses demandes formulées à l'encontre de la société Missyl et condamnée à verser la somme de 1 000 € au visa de l'article 700 du Code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 17 septembre 2014, la société Beauchamp demande à la cour de condamner la société Missyl à lui verser la somme de 13 118 € avec intérêts au taux légal à compter du 2 août 2011 et la somme de 4 000 € au visa de l'article 700 du Code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions de la société Missyl en date du 2 août 2013 tendant à voir :

- à titre principal :

confirmer le jugement

condamner la société Beauchamp à verser la somme de 3 000 € au visa de l'article 700 du Code de procédure civile,

- à titre subsidiaire, dire que le préavis applicable ne pourrait être que de 3 mois,

- à titre infiniment subsidiaire, juger que le préjudice ne pourra être indemnisé que sur la base d'un préavis de 3 mois soit les sommes de 1 361 € au titre de la perte de marge et de 5 027 € au titre des charges de restructuration.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Considérant que la société Beauchamp Entreprises grossiste en petit électroménager fournit depuis septembre 2006 la société Missyl qui gère un supermarché Intermarché à Capvern Les Bains (65) comme le démontre l'ouverture du compte client auprès de la société Missyl en date du 27 septembre 2006 ;

Que la société Missyl changeait d'actionnaires et de dirigeant début janvier 2011 ;

Considérant que le 18 avril 2011 la société Beauchamp adressait un courrier à la société Missyl pour lui indiquer que "lors de sa visite hebdomadaire, notre collaborateur a été informé oralement par le personnel en charge de la gestion du linéaire de petit électroménager de votre volonté de mettre fin brutalement et sans préavis écrit à ces quatre années de collaboration" ;

Considérant que par courrier du 29 avril 2011, la direction de la société Missyl faisait savoir à la société Beauchamp "qu'aucune décision concernant l'entreprise Beauchamp n'a été prise car je n'ai pas eu le temps matériel d'approfondir notre relation, les informations que vous me faites paraître sont inexactes et de nature à gravement entachées (sic) nos relations" ;

Considérant que malgré ce courrier d'apaisement, la société Missyl ne passera plus aucune commande à la société Beauchamp ;

Considérant que la société Missyl soutient que c'est la société Beauchamp qui est à l'origine de la rupture pour ne s'être plus manifestée à partir d'avril 2011 ;

Considérant que la société Missyl a adressé le 9 décembre 2011 un courrier pour proposer à la société Beauchamp un rendez-vous le lundi 16 janvier 2012 que celle-ci avait accepté sous réserves de négociations compte tenu de la rupture des relations depuis février 2011 ;

Que la société Beauchamp a adressé les 5 et 6 mars 2012 une proposition de commande à la société Missyl qui n'a pas donné suite ;

Considérant qu'il est ainsi établi que la rupture des relations commerciales établies est imputable à la société Missyl même si celle-ci a tenté de créer une situation tendant à faire endosser la responsabilité de la rupture à la société Beauchamp ;

Qu'en effet l'argument selon lequel l'employé qui a déclaré oralement que la société Missyl entendait mettre fin à la relation commerciale n'avait pas le pouvoir d'engager la société et a donc été licencié est inopérant dès lors que celui-ci était en période d'essai; que d'ailleurs, ledit employé, en période d'essai n'a certainement pas pris la liberté d'informer la société Beauchamp d'une telle décision sans en référer au minimum à la direction si tant est que ce ne soit pas celle-ci qui lui ait demandé d'en informer la société Beauchamp ;

Considérant que la cour relève à la lecture des différents jugements versés aux débats prononcés par le Tribunal de commerce de Bordeaux courant 2012 que la méthode utilisée par les exploitants des magasins Intermarché, certes indépendants les uns des autres, était identique en ce qu'elle consistait sans adresser le moindre courrier de rupture à ne plus passer de commande ;

Considérant que cette manière d'agir particulièrement déloyale et ne répondant pas aux exigences de l'article L. 442-6 du Code de commerce a causé un préjudice à la société Beauchamp ;

Qu'en effet l'article L. 442-6 5° dispose que la rupture des relations commerciales établie doit être précédée d'un préavis qui doit tenir compte de la durée de la relation commerciale et doit être établie par écrit ;

Considérant que la cour retiendra l'évaluation du préjudice établie par le cabinet d'expertise Berton et associé qui a remis deux documents : "Attestation" et "Note Relative à la Détermination du Préjudice", qui sont explicites, calculant la marge brute et retenant le chiffre d'affaires moyen des trois années précédant la rupture ;

Que le préjudice a été calculé sur le chiffre d'affaires moyen de 43 907 € pondéré par un taux de marge brute nette de 21,53 %, et correspond à la perte de marge de 6 mois d'activité nécessaire pour adapter la société à la nouvelle situation soit la somme de 4 610 € ; que l'expert a calculé en outre le préjudice lié aux charges de restructuration pour la somme de 8 508 €, le chiffre d'affaires moyen étant pondéré par un taux de 19,38 % ;

Considérant que dans ces conditions, la société Missyl sera condamnée à payer à la société Beauchamp Entreprises la somme de 13 118 € avec intérêts au taux légal à compter du 2 août 2009 ;

Qu'il sera fait application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Par ces motifs : Statuant contradictoirement, Infirme le jugement en toutes ses dispositions. A nouveau, Condamne la société Missyl à payer à la société Beauchamp Entreprises la somme de 13 118 € à titre de dommages intérêts avec intérêt au taux légal à compter du 2 août 2009, Condamne la société Missyl à payer la somme de 4 000 € au visa de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la société Missyl aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés par les avocats dans les termes de l'article 699 du Code de procédure civile.