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Décisions

CA Versailles, 12e ch., 18 novembre 2014, n° 12-02825

VERSAILLES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Usines Applications Poly Expansés Holding (SA)

Défendeur :

Alstom Holdings (SA), Alstom Switzerland Ltd (SA), Alstom (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Rosenthal

Conseillers :

Mme Calot, M. Leplat

Avocats :

Mes Pedroletti, Lewisch, Degroote, Dupuis, Filzi

T. com. Nanterre, du 4 avr. 2012

4 avril 2012

EXPOSÉ DU LITIGE

Selon la société par actions simplifiée UAPE Holding Usines Applications Poly Expansés, ci-après désignée la société UAPE, un accord oral est intervenu le 14 avril 2004 entre le groupe Alstom et elle-même aux termes duquel elle introduirait Alstom auprès du gouvernement russe et lui apporterait et céderait légalement sa clientèle et ses marchés en Russie.

Suite à cet accord, Alstom aurait signé, les 24 et 28 avril 2004, avec les ministres des gouvernements de la Fédération de Russie et la société UAPE, plusieurs agréments contractuels et officiels relatifs à des marchés s'inscrivant dans le cadre de marchés antérieurs bénéficiant de garanties de la banque d'Etat russe.

Alstom aurait finalement abandonné les projets, et la société UAPE affirme, que de ce fait, Alstom l'a gravement discréditée auprès des pouvoirs publics russes.

C'est dans ces circonstances que par actes d'huissier signifiés à personne morale, le 11 juin 2010, à la société anonyme Alstom Holding et à la société anonyme Alstom, et le 18 juin 2010 à la société Alstom Switzerland Ltd, la société UAPE les a assignées devant le Tribunal de commerce de Nanterre, aux fins de, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

1) sur le fondement de la responsabilité contractuelle ou subsidiairement sur le fondement de la responsabilité délictuelle et de l'article L. 442-6 du Code de commerce,

Les voir condamnées solidairement à lui verser la somme de 70 350 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait des contrats signés et perdus par Alstom en avril 2004 et avril 2005, et sa clientèle détournée et détruite à cette occasion par Alstom,

2) sur le fondement de la responsabilité délictuelle

Les voir condamnées solidairement à lui payer 30 000 000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice qu'elle a également subi en raison du grave discrédit auprès des autorités russes,

Les voir condamnées solidairement à 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens

Par jugement avant dire droit du 4 mai 2011, le Tribunal de commerce de Nanterre a :

Ordonné à la société UAPE de communiquer à Alstom dans les deux mois de la signification de la décision :

- La traduction en entier en langue française par un traducteur assermenté de toute pièce en langue étrangère, qu'elle soit utilisée en totalité ou seulement en partie,

- Un seul bordereau récapitulatif de l'ensemble des pièces communiquées avec une unique numérotation

Le défaut de communication d'une seule pièce dans les conditions ci-dessus rappelées conduisant à son rejet,

Rejeté, à ce stade de la procédure, les demandes de communication de pièces formulées par UAPE,

Renvoyé les parties à l'audience de procédure du 14 juin 2011 pour premières conclusions au fond.

Par deuxième jugement avant dire droit du 11 janvier 2012, le Tribunal de commerce de Nanterre a :

Retenu le bordereau chronologique de pièces d'UAPE du 27 décembre 2011 à l'exception de la pièce n° 53, jusqu'à ce que cette pièce fasse l'objet d'une traduction jurée, à la condition expresse qu'UAPE communique aux sociétés Alstom et au tribunal au plus tard le 15 janvier 2012, ledit bordereau, dûment complété par la correspondance des différentes numérotations des pièces listées, résultant des bordereaux successivement communiqués,

Rejeté en l'état de la procédure la demande formulée par UAPE de communication des contrats signés par Alstom en Russie en 2010 et 2011,

Rappelé aux parties le calendrier de procédure ci-après

24 janvier 2012 conclusions au fond d'Alstom en réponse à celles d'UAPE

14 février 2012 plaidoiries des parties sur le fond,

Dit qu'il statuerait sur les autres demandes ultérieurement.

Par jugement entrepris du 4 avril 2012, le Tribunal de commerce de Nanterre a :

Dit le visa de l'article L. 442-6 du Code de commerce mal fondé et s'est déclaré compétent pour statuer dans la présente affaire,

Débouté UAPE de toutes ses demandes,

Débouté Alstom de ses demandes reconventionnelles,

Condamné UAPE à payer à chacune des défenderesses la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, déboutant pour le surplus,

Condamné UAPE aux dépens.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu l'appel interjeté le 16 avril 2012 par la société UAPE ;

Vu les dernières écritures en date du 2 septembre 2014 par lesquelles la société UAPE, demande à la cour de :

vu l'article 378 du Code de procédure civile

vu les articles 16, 78, 79 du Code de procédure civile

vu les articles L. 442-6-I-5° et D. 442-3 du Code de commerce

Vu l'article 4 du Code de procédure pénale

vu le décret n° 2009-1384 du 11 novembre 2009

vu l'article 1382 et 1384 du Code civil

vu les contrats authentiques signés avec les Républiques du Nord-Caucase

Vu la sommation de communiquer de la société UAPE qui n'a pas été suivie d'effet

AVANT DIRE DROIT

A titre principal

Ordonner un sursis à statuer, ou en tout cas, un renvoi dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice dans l'attente du résultat des deux procédures pénales en cours suites aux plaintes déposées par la société IBC et par la société UAPE qui ont un lien direct avec l'appel en cours

A titre subsidiaire

Déclarer l'appel de la société UAPE recevable

AU FOND

A titre principal

Annuler le jugement entrepris pour non-respect du contradictoire

A titre subsidiaire

Sur le fondement de sa compétence

Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré le Tribunal de commerce de Nanterre compétent pour juger d'une instance fondée pour partie sur l'article L. 442-6 du Code de commerce.

Reformant le jugement entrepris sur ce point :

Déclarer la Cour d'appel de Versailles incompétente à devoir juger d'une instance fondée à titre principal sur l'article L. 442-6 du Code de commerce.

Dans le cas où la cour se déclarerait compétente, sur le fondement des articles 1134 et suivants du Code civil et encore plus subsidiairement sur le fondement des articles 1382 et suivants du Code civil

Infirmer le jugement

Ordonner la communication par Alstom sous astreinte de 1 000 euros par jour des contrats signés en 2010 entre Alstom et les autorités russes ayant le même objet que ceux de 2004 et 2005

Reformant le jugement entrepris sur ce point

Constater que la prescription étant de 5 ans, il ne peut être reproché à l'appelant une action tardive de la société UAPE, UAPE ayant légitimement attendu pendant une période inférieure à 5 ans une action des autorités russes

Constater que la société Alstom Holdings en avril 2004 a signé avec les autorités russes, le Partenaire PPP UAPE Holding et la société russe CMP-IBC, 4 contrats authentiques d'agréments de projets

Constater que parmi ces 4 contrats signés, l'abandon unilatéral de 3 de ces contrats explique qu'en état de quasi-faillite, Alstom ne pouvait - ainsi qu'il est avéré - alléguer par écrits une intention sérieuse de respecter de bonne foi ses engagements contractés, impliquant la réalisation des projets, si ce n'est celle de les utiliser à d'autres fins

Constater que la société UAPE a remis 230 pièces alors que la société Alstom n'en a pas remis une seule.

Constater que la société UAPE a cédé légalement ses droits de maîtrise d'œuvre des projets PPP à Alstom Holdings dans le cadre des Contrats Authentiques (21-22-23-24 ) signés à Rostov les 24 et 28 avril 2004 et 13 avril 2005 avec les gouvernements de la Fédération de Russie

Constater que les sociétés signataires des contrats authentiques étaient en quasi-faillite annoncée

Constater que la réitération de la société Alstom en 2005 visant dans ces conditions les 2 Contrats authentiques (21 - 22) résignés avec UAPE, les gouvernements des Républiques de l'Ossétie du Nord et du Dagestan, CMP-IBC impliquaient une instrumentalisation à d'autres fins notoirement avérée par leur abandon unilatéral

Constater la validité des 2 autres contrats (23-24) abandonnés unilatéralement, - jamais résiliés à ce jour et a fortiori impliquant les projets détournés des contrats authentiques signés en 2004

Constater que la société Alstom a réitéré ses engagements portés en 2004 en signant des nouveaux contrats en 2005 (ci-après : les Contrats de 2005)

Constater l'abandon unilatéral par Alstom des contrats de 2004 et des contrats de 2005 jamais dénoncés à ses cocontractants, alors qu'ils étaient renouvelables par tacite reconduction

Constater que l'aveu tardif d'Alstom implique la reconnaissance préméditée de ses agissements

Constater les protestations et mises en garde transmises par UAPE à Alstom tout au long de l'exercice 2006

Constater le détournement des projets du Contrat (23) signé en 2004 avec UAPE - les autorités russes-CMP IBC découverts fin année 2010 et 2011 et annoncés par Alstom, à Moscou, à la Presse Internationale

Dire et Juger que la société Alstom ne pouvait abandonner unilatéralement les Contrats de 2004 et les Contrats de 2005, sans les avoir résiliés préalablement, et que cette rupture fautive doit lui être imputée

Condamner solidairement les sociétés Alstom Holding, Alstom SA et Alstom Switzerland Ltd, à verser à la société "UAPE Usines Applications Poly Expansés" ayant pour nom commercial "UAPE", la somme de 70 350 000 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice qu'elle a subi, en liaison avec les contrats signés et abandonnés par Alstom en avril 2004 et avril 2005, et la clientèle de la société UAPE détournée et détruite à cette occasion par Alstom

Condamner solidairement les sociétés Alstom Holding, Alstom SA et Alstom Switzerland Ltd, à verser à la société "UAPE Usines Applications Poly Expansés" ayant pour nom commercial UAPE, la somme de 49 050 000 euros (3 % de 1 635 000 000 euros) de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant de la rupture unilatérale des contrats de 2004-2005

A TITRE TRÈS SUBSIDIAIRE

Constater que Alstom a violé la notion de relations pré-contractuelles installée avec UAPE en amont de la signature des contrats.

Ordonner par serment décisoire, la comparution de Monsieur W (Pdg Alstom), Monsieur X, Monsieur Y, et de Monsieur Z, principaux protagonistes au sein d'Alstom impliqués dans la cause des projets de 2004-2005

EN TOUT ETAT DE CAUSE

Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société UAPE à verser au titre de l'article 700 du Code de procédure civile la somme de 5 000 euros à chaque société intimée,

Reformant le jugement entrepris sur ce point

Condamner solidairement les sociétés Alstom Holdings, Alstom SA et Alstom Switzerland Ltd, à verser chacune à la société "UAPE Usines Applications Poly Expansés" ayant pour nom commercial UAPE, la somme de 50 000 euros au titre de l'article 700 du NCPC ainsi qu'aux entiers dépens.

Rejeter les demandes des sociétés intimées en toutes fins qu'elles comportent.

Vu les dernières écritures en date du 3 septembre 2014 au terme desquelles la société Alstom Holding, la société Alstom et la société Alstom Switzerland Ltd, demandent à la cour de :

Vu les articles 6, 9, 15,132 et 564 du Code de procédure civile,

Vu les articles L. 442-6 et D. 442-3 du Code du commerce,

Vu les articles 1147 et 1382 du Code civil,

Déclarer irrecevable l'appel formé par la société UAPE Holding Usines Applications Poly Expansés à l'encontre du jugement rendu le 4 avril 2012 par le Tribunal de commerce de Nanterre,

Subsidiairement :

Confirmer le jugement du Tribunal de commerce en ce qu'il a débouté la société UAPE de ses demandes

Sur les demandes reconventionnelles des concluantes :

Reformer le jugement du Tribunal en ce qu'il a débouté les sociétés Alstom Holding, Alstom et Alstom Switzerland Ltd de leurs demandes au titre de l'atteinte portée à leur crédit et à leur notoriété et pour procédure abusive,

Condamner la société UAPE Holding Usines Applications Poly Expansés à verser à chacune des sociétés Alstom Holding, Alstom et Alstom Switzerland la somme de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts pour atteinte à l'image, au crédit et à la notoriété,

En tout état de cause :

Débouter intégralement UAPE Holding Usines Applications Poly Expansés de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions.

Condamner la société UAPE Holding Usines Applications Poly Expansés à verser à chacune des sociétés Alstom Holding, Alstom et Alstom Switzerland la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

Condamner la société UAPE Holding Usines Applications Poly Expansés à payer à chacune des sociétés Alstom Holding, Alstom et Alstom Switzerland Ltd la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

La condamner aux entiers dépens.

Dire que les dépens pourront être directement recouvrés par la SCP Lissarague Dupuis Bocon-Gibod Lexavoué Paris-Versailles, conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du Code de procédure civile, renvoie aux conclusions déposées par elles et soutenues à l'audience.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l'appel de la société UAPE :

Le tribunal, dans son jugement du 4 avril 2012, a soulevé d'office la question de sa compétence au regard des dispositions de l'article L. 442-6 du Code de commerce, en indiquant qu'UAPE fonde sa demande non seulement sur la responsabilité contractuelle ou subsidiairement sur la responsabilité délictuelle, mais aussi s'appuie sur l'article L. 442-6 du Code de commerce au titre de la rupture brutale de relations commerciales sans argumenter sur ce fondement ;

Qu'Alstom soutient qu'il n'y a eu aucune rupture brutale, les relations s'étant espacées, puis ayant cessé ;

Que dans ses conclusions tant écrites qu'orales, UAPE n'invoque qu'incidemment et ne justifie pas la rupture brutale de ses relations commerciales par Alstom, mais s'appuie sur le non-respect de ses engagements par cette dernière envers d'autres parties signés ensemble, ce qui serait constitutif d'un préjudice pour elle-même ;

Qu'en conséquence que même si les conclusions visent l'article L. 442-6 du Code de commerce, ce fondement ne peut être retenu et le tribunal se déclarera compétent dans la présente affaire.

Au visa des articles L. 446-2 I 5° et D. 442-3 du Code de commerce, qui attribuent compétence, sur le ressort territorial de la Cour d'appel de Versailles, au Tribunal de commerce de Paris et la Cour d'appel de Paris pour connaître, notamment, de la rupture brutale des relations commerciales, les sociétés intimées soulèvent l'irrecevabilité de l'appel de la société UAPE, estimant que, n'ayant pas de pouvoir juridictionnel, elle ne peut renvoyer l'examen de l'affaire devant la Cour d'appel de Paris.

Pour sa part, au visa des mêmes articles, la société UAPE qui a introduit son instance devant le Tribunal de commerce de Nanterre postérieurement à l'entrée en vigueur du décret n° 2009-1384 du 11 novembre 2009, ayant institué l'article D. 442-3 du Code de commerce, soutient l'incompétence de la cour pour connaître des demandes qu'elle forme au titre des dispositions de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce et lui demande, son appel étant déclaré recevable, à titre subsidiaire, si elle n'annule pas le jugement, de se déclarer incompétente pour connaître de la rupture brutale de la relation contractuelle, qui devra être renvoyée à la connaissance de la Cour d'appel de Paris.

Bien que l'article 122 du Code de procédure civile fasse une énumération non limitative des fins de non-recevoir, celles-ci ne sauraient toutefois empiéter sur le champ des exceptions d'incompétence, définies aux articles 75 et suivants du même Code.

Tant l'article 75 du Code de procédure civile qui ouvre l'exception d'incompétence aux parties, que l'article 92 de ce code, qui donne pouvoir au juge, sous certaines conditions, de la prononcer d'office, ne saurait priver aucune juridiction de son pouvoir juridictionnel de statuer sur pareille exception.

Contrairement à ce qu'indiquent les intimées, la cour conserve donc son pouvoir juridictionnel en la matière.

Il résulte de tout ceci que la fin de non-recevoir soulevée par la société Alstom Holding, la société Alstom et la société Alstom Switzerland Ltd doit être rejetée et l'appel de la société UAPE déclaré recevable.

Sur l'annulation du jugement :

Au visa de l'article 16 du Code de procédure civile, la société UAPE forme une demande d'annulation du jugement entrepris, le tribunal ayant soulevé d'office la question de sa compétence, en référence à l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce sans avoir invité les parties à en débattre.

Les intimées lui opposent une fin de non-recevoir liée à son défaut d'intérêt à agir à solliciter la nullité d'un jugement qui a déclaré compétente la juridiction qu'elle a elle-même saisie. Elles ajoutent, qu'en tout état de cause, le juge a invité les parties à s'expliquer sur ce point lors de l'audience du 14 février 2012, le conseil de la société UAPE ayant estimé que le Tribunal de commerce de Nanterre qu'il avait saisi était bien compétent pour connaître du litige et que, de surcroît, en matière de procédure sans représentation obligation, comme c'est le cas devant le tribunal de commerce, selon l'article 853 du Code de procédure civile, les moyens soulevés d'office par le juge sont présumés, sauf preuve contraire, avoir été débattus contradictoirement à l'audience.

En matière de nullité d'un jugement, l'article 460 du Code de procédure civile prescrit que celle-ci ne peut être demandée que par les voies de recours prévues par la loi, ce qui implique le caractère subsidiaire de l'appel aux fins de nullité, lorsqu'aucune autre voie de recours n'est ouverte, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Dans ces conditions, la demande d'annulation du jugement formée par la société UAPE sera rejetée.

Sur la compétence de la cour :

Reprenant l'argumentaire développé pour contrer l'irrecevabilité de son appel, soulevé par les intimées, la société UAPE, au visa des articles L. 446-2 I 5° et D. 442-3 du Code de commerce, qui attribuent compétence, sur le ressort territorial de la Cour d'appel de Versailles, au Tribunal de commerce de Paris et la Cour d'appel de Paris pour connaître, notamment, de la rupture brutale des relations commerciales, demande le renvoi de l'examen de l'affaire devant la Cour d'appel de Paris.

La société Alstom Holding, la société Alstom Holding et la société Alstom Switzerland Ltd font quant à elles valoir que les conditions de l'article L. 446-2 I 5° du Code de commerce ne sont pas réunies, les relations de la société UAPE avec Alstom ne constituant pas des relations commerciales établies au sens des dispositions de cet alinéa, la société UAPE étant dans l'incapacité de dater la rupture et ne s'étant plainte d'aucune rupture brutale pendant six à sept ans.

Il n'en demeure pas moins que tant en première instance qu'en cause d'appel, l'action de la société UAPE est fondée, à titre principal, sur les dispositions de l'article L. 446-2 I 5° du Code de commerce et que celles d'ordre public de l'article D. 442-3 du même Code donnent à la seule Cour d'appel de Paris compétence pour connaître des décisions rendues en la matière par les tribunaux de commerce compétents pour en juger. La Cour de Versailles, ne peut donc examiner si les conditions d'application de l'article L. 446-2 I 5° sont remplies sans outrepasser sa compétence et se trouve donc tenue de se dessaisir au profit de la Cour d'appel de Paris, sans possible disjonction de l'affaire, qu'aucune des parties ne demande par ailleurs, ni examen des demandes formées à titre subsidiaire par la société UAPE ou à titre reconventionnel par la société Alstom Holding, la société Alstom Holding et la société Alstom Switzerland Ltd.

Sur l'article 700 du Code de procédure civile :

Il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs : LA COUR, statuant par arrêt contradictoire, Déclare recevable l'appel de la société par actions simplifiée UAPE Holding Usines Applications Poly Expansés, Rejette la demande d'annulation du jugement du Tribunal de commerce de Nanterre du 4 avril 2012 formée par la société par actions simplifiée UAPE Holding Usines Applications Poly Expansés, Fait Droit à l'exception d'incompétence soutenue par la société par actions simplifiée UAPE Holding Usines Applications Poly Expansés au visa de l'article D. 442-3 du Code de commerce, Déclare la Cour d'appel de Versailles incompétente, Ordonne son dessaisissement au profit de la Cour d'appel de Paris, Dit que le dossier sera transmis par le greffe en application de l'article 97 du Code de procédure civile au greffe de la Cour d'appel de Paris, Laisse à la charge de chacune des parties ses frais irrépétibles, Condamne la société par actions simplifiée UAPE Holding Usines Applications Poly Expansés aux dépens.