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Décisions

CA Lyon, 3e ch. A, 20 novembre 2014, n° 13-06596

LYON

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Cor Caroli (SARL)

Défendeur :

Bretton Gaucher (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Tournier

Conseillers :

Mme Homs, M. Bardoux

Avocats :

Mes Rose, Buisson, Marchal, SCP BDMV Avocats

T. com. Saint-Etienne, du 26 juill. 2013

26 juillet 2013

FAITS, PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La SARL Cor Caroli, dite ensuite société Cor et spécialisée dans le commerce en gros d'armes de chasse a signé, le 13 mai 2009, un contrat de concession exclusive de vente avec la SARL Bretton Gaucher, dite ensuite société Bretton, ayant pour activité la fabrication et la vente d'armes de chasse, pour une durée triennale, renouvelable par tacite reconduction, sauf dénonciation six mois avant la date anniversaire.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 27 septembre 2011, la société Bretton a indiqué résilier le contrat au 12 mai 2012. Les parties se sont opposées dans leurs courriers ultérieurs sur la faculté de cette société Bretton de résilier, comme sur les commandes et sur la reprise des stocks.

Après une saisine infructueuse du juge des référés, la société Cor a fait assigner la société Bretton en reprise du stock à hauteur de 105 263,39 euro resté à sa disposition, qu'elle a l'interdiction de commercialiser, sauf à être autorisée à le céder elle-même.

La société Bretton a formé une demande reconventionnelle en indemnisation à hauteur de 195 720 euro.

Par jugement en date du 26 juillet 2013, auquel il est expressément fait référence pour plus de précisions sur les faits, les prétentions et moyens des parties, le Tribunal de commerce de Saint-Etienne a statué ainsi :

"Constate que le montant du stock était contractuellement évalué à la somme de 105 263,39 euro TTC,

Constate que la société Cor Caroli n'a pas honoré sa commande en date du 29 octobre 2012,

Constate la mauvaise foi de la part de la société Cor Caroli dans l'application du contrat de concession,

Condamne la société Bretton Gaucher à payer à la société Cor Caroli la somme de 105 263,39 euro au titre de la valorisation du stock,

Condamne la société Cor Caroli à restituer à la société Bretton Gaucher dans les 8 jours de la signification du jugement le stock litigieux correspondant à la liste établie par l'huissier,

Condamne la société Cor Caroli à payer à la société Bretton Gaucher la somme de 195.720 euro au titre du manque à gagner,

Ordonne la compensation des sommes dues entre les parties au titre de la présente instance,

Déboute la société Cor Caroli de sa demande de dommages et intérêts,

Condamne la société Cor Caroli à verser à la société Bretton Gaucher la somme de 2 500 euro au titre de l'article 700 du CPC,

Dit que les dépens sont à la charge de la société Cor Caroli,

Rejette la demande d'exécution provisoire du jugement,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes".

Par déclaration reçue le 1er août 2013, la société Cor a relevé appel de ce jugement.

Dans le dernier état de ses conclusions (récapitulatives) déposées le 24 février 2014, la société Cor demande à la cour de :

- réformer le jugement entrepris

- constater :

Que la société Bretton Gaucher a résilié le contrat qui la liait à la société Cor Caroli avec effet au 13 mai 2012, que la société Cor Caroli est toujours détentrice d'un stock de produits de la société Bretton Gaucher d'une valeur de 105 263,39 euro TTC,

Que la société Cor Caroli a régulièrement payé ce stock,

Que selon l'article 14 du contrat, cette dernière ne peut plus vendre lesdites marchandises,

Que la société Bretton Gaucher ne lui a pas repris contre paiement ledit stock,

Que la société Bretton Gaucher entend s'accorder d'abusifs délais de paiement en reprenant ledit stock selon son bon vouloir,

Que les manquements de la société Bretton Gaucher sont à l'origine de l'insuffisance de chiffre d'affaires réalisé par la société Cor Caroli,

Qu'en tout état de cause, la société Bretton Gaucher n'a jamais sollicité la résiliation du contrat, ni mis en demeure la société Cor Caroli de remplir ses engagements,

Qu'à ce titre, la société Bretton Gaucher a expressément toléré que la société Cor Caroli n'exécute pas son obligation d'acheter une quantité minimale de marchandises,

- confirmer la condamnation de la société Bretton Gaucher à payer à la société Cor Caroli la somme de 105 263,39 euro TTC au titre de la valorisation du stock et ce, dans un délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision,

- dire et juger qu'ensuite de l'entier paiement du stock, la société Bretton Gaucher viendra récupérer le stock correspondant à la liste établie par constat de Maître Rajon, Huissier de Justice, le 19 juillet 2012,

- autoriser, à défaut pour la société Bretton Gaucher de procéder au paiement du stock dont s'agit par chèque de banque dans un délai d'un mois à compter de la signification de la décision à intervenir, la société Cor Caroli à vendre le stock de produits Bretton Gaucher qu'elle détient,

- dire qu'à l'issue d'un délai d'un an, les comptes seront faits entre les parties,

- condamner la société Bretton Gaucher à payer à la société Cor Caroli la somme de 5 000 euro de dommages et intérêts pour résistance abusive,

- débouter la société Bretton Gaucher de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner la société Bretton Gaucher à payer à la société Cor Caroli la somme de 5.000 euro en vertu des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la société Bretton Gaucher aux entiers dépens.

Invoquant l'article 1134 du Code civil, elle fait valoir que la société Bretton a mis fin au contrat de concession par sa lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 27 septembre 2012, et que le contrat prévoyant la reprise intégrale du stock par le concédant, son adversaire n'est pas fondé à se prévaloir d'une reprise progressive au gré de ses ventes, sollicitant ainsi des délais de paiement.

Dans le dernier état de ses écritures (récapitulatives) déposées le 20 juin 2014, la société Bretton demande à la cour de :

- confirmer la décision entreprise, la réformer partiellement et constater que le montant du stock n'est que de 83 274,86 euro TTC,

- constater la mauvaise foi dans l'application du contrat de la société Cor Caroli, et que Cor Caroli n'a pas honoré la commande de la société Bretton Gaucher,

- constater que le montant de l'absence de commande de Cor Caroli est de 195 720 euro,

- donner acte à la SARL Bretton Gaucher de son offre de racheter le stock au fur et à mesure de ses propres ventes,

- dire recevable et bien fondée la demande reconventionnelle de la SARL Bretton Gaucher,

- condamner la société Cor Caroli au paiement de la somme de 30 000 euro au titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

- condamner la SARL Cor Caroli à régler à la SARL Bretton Gaucher la somme de 10 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner Cor Caroli aux entiers dépens.

Invoquant l'article 1134 du Code civil, elle affirme que la société Cor n'a pas procédé à la commande minimale prévue contractuellement, depuis l'origine, et qu'elle a tenté de reprendre, en vain, le stock après la résiliation opérée par son ancienne partenaire. Elle conteste sa valorisation telle que retenue par les premiers juges, compte tenu d'un avoir de décote en ayant diminué le coût d'acquisition.

Elle prétend que le contrat ne prévoyant pas les conditions de reprise de ce stock, lui permet de le racheter au fur et à mesure de ses ventes.

Elle estime que son préjudice est consécutif aux violations par la société Cor de ses obligations contractuelles, cette dernière n'ayant jamais respecté le chiffre d'affaires minimal annuel de 500 000 euro HT, le manque à gagner s'étant élevé sur les trois années à 466 000 euro HT, un taux de marge brute de 42 % conduisant au montant retenu par les premiers juges.

Elle stigmatise le comportement de son adversaire, tant dans le cadre des rapports contractuels qu'au moment de leur cessation, pour réclamer des dommages et intérêts, cette attitude l'ayant mise dans de grandes difficultés économiques.

Pour satisfaire aux dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, il est expressément renvoyé pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties à la décision entreprise et aux conclusions récapitulatives régulièrement déposées et ci-dessus visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Attendu que les parties ne s'opposent nullement sur le fait qu'il ait été mis fin à leurs relations contractuelles, le litige portant soit sur les suites de cette résiliation, soit sur le respect par elles des stipulations les engageant au cours de leur exécution ;

Qu'il convient, à titre liminaire, d'examiner la commune intention des parties et les termes mêmes du contrat les ayant lié pour apprécier le bien-fondé des prétentions respectives ;

Attendu qu'aux termes de l'article 1134 du Code civil, "les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites" et "doivent être exécutées de bonne foi" ;

Attendu que les parties ont prévu entre elles une distribution exclusive par la société Bretton, l'article 5-7 de la convention signée le 13 mai 2009 stipulant que "Il est convenu expressément que les produits et accessoires livrés restent la propriété du concédant aussi longtemps que leur paiement n'a pas été intégralement payé.

A cet égard ne constitue pas un paiement au sens de la présente disposition, la remise de traite ou de tout autre titre créant une obligation de payer.

Le paiement ne pourra être considéré effectué que lors de l'encaissement effectif du prix par le concédant" ;

Que la société Cor, concessionnaire a souscrit l'obligation suivante au sein de l'article 7 du contrat :

"7.1 : Quota

Pour l'année 2009, le concessionnaire s'engage à réaliser un chiffre d'affaire minimum avec les Produits de 500 000 euro HT en valeur tarif armurier, remise de 22 % diminué (sic) du chiffre réalisé par Bretton Gaucher à la date de la signature du contrat d'exclusivité (ce chiffre étant fixé si prise d'effet du contrat au plus tard le 15 mai 2009).

Pour les années suivantes, la remise sera de 28 % et le chiffre d'affaire sera augmenté chaque année de 15 % environ dans la mesure où le marché sera stable et la législation inchangée. Cette progression permettra d'atteindre sur cinq ans un chiffre d'affaires de 1 000 000 euro HT (si le contrat n'est pas dénoncé - voir Article 6)

Dans le cas de non-progression du chiffre d'affaires, tel que présenté ci-dessus, et pour des raisons indépendantes de la volonté du concessionnaire, un minimum de 550 000 euro devra être commandé au concédant de manière à maintenir un volant d'affaires suffisant au bon fonctionnement du concedant".

Que l'article 14 prévoit les effets de la fin des relations contractuelles et stipule : "En cas de cessation des relations contractuelles, quelle qu'en soit la cause et quel qu'en soit l'auteur, le concessionnaire s'engage à cesser immédiatement la vente des produits.

Le concessionnaire devra notamment ne plus imprimer des documents commerciaux ou autres faisant apparaître le nom des marques concédés, étant précisé que le concessionnaire pourra continuer à écouler son stock de documents commerciaux, catalogues ou autres sur lesquels apparaissent les Marques Bretton et Gaucher.

Les Produits en stocks seront repris par le concédant à leur prix d'achat, tel que celui qui figure sur les factures" ;

Attendu que la société Bretton a pris l'initiative de rompre le contrat le 27 septembre 2011 dans un courrier où elle indique "après avoir analysé les résultats de notre collaboration, il n'est plus possible, aux conditions actuelles de vous maintenir l'exclusivité de nos produits " (pièce 4 de l'appelante) ;

Que cette lettre recommandée avec demande d'avis de réception n'a pas été précédée, au regard des pièces versées aux débats, de quelconques échanges écrits sur le respect ou l'absence de respect des objectifs contractuels ;

Attendu que la société Bretton n'a nullement tenté de se prévaloir des termes de l'article 13 du contrat qui régit les résiliations pour inexécution par l'autre partie de ses propres obligations ;

Attendu que la concession exclusive expirait alors à l'échéance contractuelle des trois années soit le 13 mai 2012, la position affichée par la société Bretton ne lui permettant nullement de se prévaloir d'une quelconque tacite reconduction, le délai contractuel de 5 mois pour l'empêcher ayant été amplement respecté ;

Que les échanges épistolaires ultérieurs ne portaient nullement sur une quelconque reconduction à l'identique mais pouvaient uniquement conduire les parties à changer les termes de leur accord initial ;

Sur les objectifs contractuels de commande

Attendu qu'en l'état des contestations émises par la société Cor sur les chiffres d'affaires avancés par son adversaire au titre des années 2009, 2010 et 2011, il appartient à la société Bretton de faire la preuve d'abord de l'absence de leur réalisation mais aussi d'un préjudice qui résulterait de l'inexécution de ces objectifs ;

Qu'il est également nécessaire de souligner que les parties avaient prévu expressément une réserve sur la stabilité du marché au titre des remises concédées ;

Attendu qu'à aucun moment avant l'engagement du litige devant les juridictions commerciales, la société Bretton n'est venue émettre une quelconque doléance sur l'irrespect des objectifs, et surtout n'a en rien entendu s'en prévaloir pour mettre fin aux relations contractuelles ;

Attendu que la société Bretton procède par pures affirmations sur des chiffrages annuels, et n'a visé aucune pièce pertinente pour appuyer son propos et démontrer sa prétention ;

Attendu qu'aucune des pièces versées aux débats ne permet d'opérer une quelconque vérification des chiffres d'affaires réalisés par la société Cor, alors qu'une annexe à la pièce 79 de la société Cor constitué d'un tableau intitulé "Objectifs contractuel en équivalence : Tarif Armurier et Tarif Grossiste" fait état d'une réalisation en "Equivalent en volume tarif Armurier", seul tarif à utiliser suivant la clause ci-dessus rappelée, d'un montant de 1 587 496,47 euro sur un objectif contractuel de 1 600 000 euro, assorti d'un commentaire "Nous voyons ici la bonne performance de Cor Caroli dans un marché très difficile et orienté sensiblement à la baisse. L'objectif contractuel est atteint, et même dépassé de 4 341 euro en valeur tarif grossiste en cumul sur 3 années" ;

Que ce document est farouchement contesté en sa validité par la société Bretton, mais cette dernière ne tente même pas de présenter à son tour une quelconque récapitulation des chiffres qu'il vise, à l'aide de ses propres chiffrages, notamment en vue d'une comparaison basique des affirmations respectives ;

Que sa pièce 2 dite "justificatif des commandes 2010, 2011 et 2012" uniquement constituée de listing d'articles et de quantités sans aucune mention de prix est radicalement inexploitable, s'agissant d'ailleurs de documents internes à la valeur probante déjà incertaine ;

Attendu qu'une seule attestation bien vague d'un expert-comptable concernant une perte subie par la société Bretton, à hauteur de 20 000 euro au cours de l'année 2012, n'est pas susceptible d'avoir un quelconque impact sur la preuve de l'effectivité du respect des objectifs contractuels ;

Que les bases mêmes de son calcul, comme notamment les chiffres d'affaires réalisés, mais surtout le taux de marge qu'elle applique, ne sont confortées par aucun document pertinent ;

Attendu que la société Bretton avait pour sa part reconnu dans un courriel du 16 mars 2010 (pièce 30 de la société Cor) "nous t'avons fait perdre 120 Keuro de commande en 2009 " alors que de nombreux échanges ultérieurs caractérisent sans équivoque des difficultés récurrentes et maintenues sur le respect des délais de livraison par le fournisseur et encore et surtout sur la qualité et les défauts des armes livrées ;

Attendu qu'en l'absence de toute démonstration des chiffres effectivement réalisés et surtout en l'état des difficultés ayant privé les deux parties d'un courant d'affaires tels que prévu (marché difficile, longueur des livraisons, et défauts) la demande indemnitaire formée par la société Bretton ne pouvait qu'être rejetée en sa totalité ;

Attendu que la décision entreprise doit être infirmée et la société Bretton déboutée de sa demande à hauteur de 195 720 euro ;

Sur les suites de la résiliation du contrat de concession exclusive

Attendu que l'interdiction faite au concessionnaire de continuer à commercialiser les produits livrés par la société Bretton comportait comme corollaire contractuel nécessaire l'obligation de cette dernière de reprendre le stock existant au jour de la fin effective des relations contractuelles ;

Que les termes susvisés de l'article 14 du contrat sont clairs et ne nécessitent aucunement d'être interprétés ;

Attendu que si les conditions matérielles dans lesquelles cette reprise doit être effectuée n'ont pas été incluses dans les clauses écrites, l'exécution de bonne foi des conventions doit conduire à retenir que la commune intention des parties ne pouvait confiner imposer au concessionnaire d'attendre le bon vouloir du concédant pour cette reprise de stock dont l'immédiateté est adossée à celle de l'interdiction de commercialisation ;

Qu'il n'est pas contesté que le stock litigieux ait été intégralement payé ;

Attendu que les premiers juges doivent être confirmés en ce qu'ils ont retenu le chiffrage mis en avant par la société Cor, réalisé sur la base même du contrat et des facturations de la société Bretton, alors même qu'un constat d'huissier a été dressé le 19 juillet 2012, opération à laquelle cette dernière était présente ;

Que cet officier ministériel n'a pas eu à noter de quelconques difficultés soulevées par le représentant de la société Bretton sur le nombre et l'état des armes en stock, son refus final de signature n'étant en rien circonstancié et étayé ;

Attendu que l'avoir de décote mis en avant par la société Bretton ne peut être déduit de cette valorisation que dans la limite où elle justifie de ce qu'il a réduit les paiements de la société Caroli au titre des armes encore en stock au jour de l'effectivité de la résiliation, ce que la société intimée ne tente même pas de faire ;

Que d'ailleurs même la société Bretton n'a aucune certitude sur ce point, car elle indique en page 9 de ses écritures que "cet avoir a été affecté à des armes numérotées qui seraient présentes dans le stock de Cor Caroli" ;

Attendu que la société Bretton ne peut arguer d'une quelconque mauvaise foi de son adversaire qui a refusé de lui livrer une "commande" qu'elle a entendu lui passer, alors que cette opération a été lancée (en octobre 2012) au moment où les relations étaient définitivement rompues et où les difficultés étaient avérées sur cette reprise de stock, la société intimée n'ayant un an auparavant pas hésité à lui proposer un nouveau contrat ne l'obligeant pas à reprendre le stock ;

Attendu que concernant les modalités effectives de reprise de ce stock et de paiement par la société Bretton, l'article 5-7 de la convention prévoyant la nécessité d'un paiement effectif pour effectuer un transfert de la propriété au concessionnaire, comme l'absence manifeste de toute velléité de coopération entre les parties pour l'exécution de cet arrêt, doivent conduire à conditionner la remise des produits en stock à la couverture du paiement de la condamnation ci-dessus confirmée ;

Que la volonté affirmée de la société Bretton, comme l'existence de pertes enregistrées au moins pour l'année 2012, doit motiver par ailleurs que la société Cor soit autorisée, à l'expiration d'un délai d'un mois suivant la signification du présent arrêt et en l'absence de paiement par son adversaire de sa condamnation de procéder elle-même à la commercialisation des produits stockés, à charge cependant pour elle de diminuer la somme ici entérinée de la valeur de facturation du produit commercialisé, sans pouvoir mettre en avant le prix auquel il a été cédé ;

Attendu que les comptes seront ainsi à réaliser entre les parties à l'issue d'un délai d'une année ;

Que compte tenu d'une immobilisation de fonds ayant duré de manière bien trop longue au détriment de la société Cor, il convient de réformer le jugement entrepris en ce sens, les précisions étant faites au dispositif ;

Sur la demande indemnitaire de la société Bretton pour préjudice moral

Attendu que cette société Bretton stigmatise la volonté affichée par son adversaire de lui proposer un rachat de son activité, proposition qui ne peut nullement être présumée fautive, alors qu'elle a la charge de démontrer les agissements fautifs de la société Cor pour espérer recevoir une quelconque indemnisation ;

Que le caractère conflictuel des relations dès les semaines qui ont précédé leur fin effective ne peut pas plus fonder à elle seule l'existence d'une telle responsabilité, la mauvaise foi manifestée par la société Bretton au titre de la reprise du stock la privant de toute pertinence dans son argumentaire sur ces prises de position adverses ;

Attendu que les difficultés manifestes de communication, au travers d'une erreur volontaire ou non d'une adresse électronique du dirigeant de la société Bretton ou des rigidités manifestées de part et d'autre sur les modalités de reprise du stock ne sont pas plus démonstratrices d'un comportement fautif ;

Que par ailleurs la société Bretton procède par pure affirmation sur une volonté de nuire qui se serait manifestée par des "arrachages de scotch" ou par des interdictions de vendre les produits Bretton non établis par de quelconques documents pertinents ;

Attendu que cette demande indemnitaire non soumise aux premiers juges doit être rejetée ;

Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive

Attendu que la dégradation manifeste des relations entre les parties dès le début de l'année 2012, les nombreuses tentatives faites par la société Bretton pour tenter de trouver une issue négociée au litige sur la reprise des stocks, dont une a échoué de peu, ne permettent en rien de caractériser une résistance abusive de la société Bretton ;

Que sur cette demande indemnitaire rejetée par les premiers juges une confirmation s'impose ;

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du Code de procédure civile

Attendu que compte tenu de ce que les parties se sont ingéniées chacune de leur côté à hypothéquer les velléités qui se sont successivement ouvertes à elles pour mettre fin à leur litige, elles doivent chacune garder la charge de leurs propres dépens tant de première instance que d'appel, les termes de l'article 700 du Code de procédure civile ne pouvant recevoir application ;

Que la décision entreprise doit être réformée en ce sens ;

Par ces motifs LA COUR, Vu les conclusions récapitulatives déposées par les parties, Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a, Condamné la société Bretton Gaucher à payer à la société Cor Caroli la somme de 105 263,39 euro au titre de la valorisation du stock, Déboute la société Cor Caroli de sa demande de dommages et intérêts, et statuant à nouveau, Ordonne à la SARL Cor Caroli de restituer à la SARL Bretton Gaucher dans le mois de la signification de cet arrêt le stock litigieux correspondant à la liste établie par Maître Rajon, Huissier de justice, dans son constat du 19 juillet 2012, et ordonne à la SARL Bretton Gaucher de verser préalablement, par l'intermédiaire d'un moyen garantissant l'effectivité du paiement, cette somme de 105 263,39 euro, Dit qu'à l'expiration de ce délai d'un mois, la SARL Cor Caroli est autorisée à procéder à la commercialisation de ce stock, à charge pour elle de déduire, pour chacun des articles son prix facturé et pris en compte dans sa valorisation ici confirmée, pour solde de tout compte, et à le déduire du montant de la condamnation prononcée à l'encontre de la SARL Bretton Gaucher, Dit qu'en cas de commercialisation de tout ou partie du stock litigieux, la SARL Cor Caroli est présumée avoir renoncé alors à toute demande en paiement au titre des ventes ainsi réalisées, les parties devant faire un compte entre elles, à défaut de meilleur accord, dans l'année suivant ce délai d'un mois suivant la signification du présent arrêt, Déboute les parties de toutes leurs autres demandes, Dit que chaque partie garde la charge de ses dépens de première instance et d'appel.