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Décisions

CA Bordeaux, ch. soc. A, 18 mars 2014, n° 11-07782

BORDEAUX

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Roeygens

Défendeur :

Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Vignau

Conseillers :

Mmes Grandemange, Lauqué

Avocats :

Mes Bellet, Beauge-Gibier

Cons. prud'h. Bergerac, du 15 déc. 2011

15 décembre 2011

Le 24 juin 1995 Monsieur et Madame Roeygens Danielle achetaient un fonds de commerce, un salon de beauté, vente de produits de beauté, soins esthétiques, exploité sous l'enseigne Yves Rocher, appartenant à Monsieur et Madame Gourbat pour la somme de 76 225 euro. (Pièce V de l'appelante).

Le 25 juillet 1995 la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher et Madame Roeygens Danielle passaient un contrat de franchise, d'une durée de cinq ans renouvelable pour exploiter un Centre de Beauté Yves Rocher <adresse>. (Pièce A de Madame Roeygens)

Par lettre du 06-12-1999 la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher notifiait à Madame Roeygens sa volonté de ne pas renouveler le contrat de franchise.

Toutefois, Madame Roeygens ayant souhaité voir se poursuivre les relations commerciales, celles-ci se sont poursuivies, dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée signé le 30 janvier 2007. (Pièce D de l'appelante)

Par lettre recommandée du 22 décembre 2007 Madame Roeygens résiliait le contrat de franchise qui la liait à la société Yves Rocher. (Pièce G)

Les relations contractuelles devaient cesser le 1er juillet 2008.

Madame Roeygens a saisi le Conseil de prud'hommes de Bergerac le 27 avril 2009 après s'être désistée de l'action entreprise, dans un premier temps contre la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher devant le tribunal de commerce.

Par jugement du 15 décembre 2011, cette juridiction a dit que Madame Roeygens ne réunissait pas les conditions fixées par les articles L. 7321-1, L. 7321-2 et L. 7321-3 du Code du travail, dit que Madame Roeygens avait signé avec la société Yves Rocher un contrat de franchise qui ne relèvait pas d'un contrat de travail mais procédait de la gestion ordinaire d'un fonds de commerce dépositaire de l'image d'une marque commerciale librement acceptée, a déclaré irrecevables et infondées les demandes de Madame Roeygens, l'a condamné à payer 2 500 euro à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive à la société de Biologie Végétale Yves Rocher, 2 500 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Madame Roeygens a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Par conclusions déposées au greffe, développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, Madame Roeygens demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris dans toute ses dispositions, de dire que la signature d'un contrat commercial ne peut la priver des droits qu'elle tient à titre individuel des dispositions de l'article L. 7321-2 du Code du travail, de constater que l'activité était exercée personnellement par Madame Roeygens, de dire qu'elle réunit toutes les conditions fixées par les articles L. 7321-2, L. 7321-3 du Code du travail, de constater que la société de Biologie Végétale Yves Rocher porte l'entière responsabilité de la rupture des relations contractuelles. Se déclarer compétent, requalifier la rupture du contrat en licenciement sans cause réelle et sérieuse, de fixer la rémunération référente à la somme de 2 687 euro, de condamner la société de Biologie Végétale Yves Rocher à lui verser : 5 656 euro à titre de rappel de salaire, 65 144 euro à titre d'heures supplémentaires, 8 736 euro au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, 8 064 euro à titre d'indemnité compensatrice de congés payés, 64 488 euro à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de dire que ces condamnations seront assorties des intérêts au taux légal, 8 000 euro en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par conclusions déposées au greffe, développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher demande de confirmer la décision attaquée en toutes ses dispositions, de débouter Madame Roeygens de sa demande de requalification du contrat de location-gérance en contrat de gérante de succursale, relevant des article L. 7321-2 et suivants du Code du travail, de sa requalification du contrat de franchise en contrat de travail, de constater l'absence de tout lien de subordination, à titre subsidiaire de constater le caractère irrecevable et mal fondé de sa demande de rappel de salaire et d'heures supplémentaires, de dire que la rupture s'analyse en une démission, de débouter Madame Roeygens de toutes ses demandes, à titre reconventionnel, la condamner à lui verser 5 000 euro en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et à 3 500 euro pour procédure abusive.

Pour plus ample exposé des circonstances de fait, de la procédure et des prétentions des parties, il convient de se référer au jugement déféré et aux conclusions des parties.

Sur ce, LA COUR :

Sur la demande de la société Yves Rocher tendant à voir écarter les pièces communiquées par Madame Roeygens concernant d'autres relations contractuelles entre Yves Rocher et des tiers.

La cour observe d'une part que ces pièces ont été régulièrement communiquées à la société Yves Rocher et d'autre part que la société Yves Rocher appuie elle-même son argumentation sur des attestations de témoins et des pièces concernant d'autres relations contractuelles, existant entre elle et des tiers à la procédure de Madame Roeygens. En conséquence, la cour rejette cette demande comme étant non fondée.

Sur la requalification du contrat de franchise en contrat de gérante de succursale visé par les articles L. 7321-2 du Code du travail, sollicitée par Madame Roeygens

L'article L. 7321-2 2° du Code du travail dispose qu'est gérant de succursale toute personne dont la profession consiste essentiellement à vendre des marchandises de toute nature qui leur sont exclusivement ou presque exclusivement fournies par une seule entreprise, lorsque ces personnes exercent leur profession dans un local fourni ou agrée par cette entreprise et aux conditions et prix imposés par cette entreprise.

1re condition : essentiellement vendre des marchandises de toute nature qui sont exclusivement ou presque exclusivement fournies par une seule entreprise

En l'espèce, il n'est pas contesté que la Madame Roeygens vendait des marchandises fournies exclusivement par Yves Rocher (la société Yves Rocher reconnait elle-même dans ses conclusions que seule la cire utilisée pour les épilations n'était pas nécessairement fournie par elle).

Il est établi que chaque année d'exploitation, le CA généré par la vente de produits était bien supérieur à celui généré par les soins.

C'est ainsi qu'en 2008 Madame Roeygens a enregistré un chiffre d'affaires de 240 keuro en produits Yves Rocher contre 41 keuro pour les soins.

Ce qui est, d'ailleurs, confirmé par les tableaux établis par la société Yves Rocher, elle-même, (page 18 de ses conclusions) dont il résulte que le chiffre d'affaires annuel de Madame Roeygens était réalisé entre 84,7 % et 86,3 % par la vente de produits Yves Rocher et entre 13,7 % et 15,3 % par l'activité de soins, réalisés exclusivement avec des produits Yves Rocher, activité de soins, également expressément prévue par le contrat de franchise qui précisait que seuls les produits et traitements autorisés par la société Yves Rocher pouvaient être respectivement utilisés et effectués (6.6).

Il s'en déduit que la profession de Madame Roeygens consistait bien essentiellement à vendre des marchandises fournies exclusivement par Yves Rocher et qu'en conséquence le premier critère est rempli.

2e condition : dans un local fourni ou agréé par cette entreprise

La société Yves Rocher reconnait à l'appui de son appel que le fonds de commerce et le local acquis par Madame Roeygens correspondait bien aux normes fixées par elle (franchiseur) et qu'elle avait donc agréé ce local.

Toutefois, dès 1997 ce local n'était plus aux normes "4e génération" fixées par la société Yves Rocher et encore moins en 2004 ou les nouvelles normes de la 5e génération avaient été établies. Raison pour laquelle elle ne pouvait "agréer" le local d'exploitation de Madame Roeygens. L'architecte des bâtiments de France ayant refusé l'autorisation de travaux envisagés par Madame Roeygens pour lui permettre de faire évoluer son local, en vue d'obtenir l'agrément de la société Yves Rocher. Celle-ci fait valoir que ce deuxième critère n'est pas rempli par Madame Roeygens. La société Yves Rocher reconnait que la transformation de ce magasin ne relève pas de l'absence volonté de Madame mais seulement de l'avis de l'architecte des bâtiments de France. Or, en poursuivant la relation contractuelle puis en passant ce contrat à durée indéterminée, Yves Rocher a nécessairement maintenu son agrément pour toute la période contractuelle en conséquence, réforme la décision attaquée.

3e condition : conditions d'exploitation imposées par l'entreprise

Il résulte des pièces produites par Madame Roeygens que la société Yves Rocher fixait les objectifs de l'institut, (pièces K) procédait mois par mois aux évaluations des résultats commerciaux, de la qualité des prestations et services de l'évolution du fichier clients, donnait des instructions nombreuses et détaillées quant aux conditions d'exploitation du fonds : opérations publicitaires, signalétique, agencement et décoration de l'institut, tenues vestimentaires des esthéticiennes, les compétences de l'équipe, la planification de l'emploi du temps, les guides de procédures imposaient à Madame Roeygens de se conformer dans les moindres détails aux instructions de la société Yves Rocher, sans lui laisser de marge de manœuvre dans un quelconque domaine.

Il résulte également des pièces versées que la société Yves Rocher organisait des contrôles réguliers des conditions de travail, du respect des règles d'hygiène et de sécurité, des tarifs, les tenues, de la présentation des produits, afin de vérifier le respect de toutes les consignes données.

La société Yves Rocher ne conteste pas avoir communiqué à Madame Roeygens les grilles de salaire qu'il fallait appliquer aux esthéticiennes et vendeuses de l'institut.

Madame Roeygens référait systématiquement à la société Yves Rocher du nombre de ses salariées, de leur qualification et du salaire de chacune d'elles. Dès lors, la société Yves Rocher ne peut soutenir que Madame Roeygens avait une parfaite maîtrise de la masse salariale et encore moins qu'elle avait une parfaite autonomie dans l'exploitation de son fonds de commerce, au motif que c'était elle qui procédait aux embauches et au licenciement des salariées, prérogatives qui sont habituellement celles d'une directrice de succursale. Dès lors, force est de constater que la troisième condition est également remplie.

4e condition : des prix imposés par cette entreprise

Il résulte des pièces produites par Madame Roeygens (tome V) (tome IV) que les prix fixés par la société Yves Rocher étaient inscrits sur les supports publicitaires, dans des mailings transmis directement à la clientèle et que, dès lors, il est difficile de soutenir comme le fait la société Yves Rocher qu'il s'agissait simplement là, de prix conseillés. La responsable de l'institut était bien obligée de vendre les produits aux prix déterminés et contrôlés par la société Yves Rocher. L'exploitante franchisée n'ayant pas la liberté de fixer les prix de vente des marchandises la quatrième condition est elle aussi remplie.

Aussi réformant la décision attaquée, la cour dit que les conditions visées à l'article L. 7321-2 du Code du travail sont remplies, et en conséquence requalifie la relation contractuelle du contrat de franchise entre Madame Roeygens et la société Yves Rocher, en celui de gérant de succursale. Il s'ensuit que Madame Roeygens titulaire d'un contrat de franchise remplissant les conditions visées à l'article L. 7321-2 du Code du travail, bénéficie des dispositions du Code du travail suivant l'article L. 7321-1 du Code du travail sans qu'il y ait à prouver l'existence d'un lien de subordination.

Sur l'application des dispositions L. 7321-3 du Code du travail

Madame Roeygens demande le bénéfice des dispositions du livre II du travail relatives aux heures supplémentaires et aux congés payés.

Il est constant que ces dispositions ne sont applicables aux gérants de succursale que s'ils établissent que les conditions de travail, d'hygiène et de sécurité dans l'établissement sont fixées par le mandant.

En l'espèce, Madame Roeygens démontre que la société Yves Rocher procédait chaque année à une étude de conformité du centre comprenant le contrôle de tous les éléments intérieurs et extérieurs, comprenant l'hygiène et la sécurité de l'établissement, à des études de qualimétrie permettant de contrôler les paramètres d'exploitation de l'institut, à des études de qualité, la société Yves Rocher imposait le bureau Véritas pour venir contrôler l'installation électrique de l'institut, ses fournisseurs pour contrôler et entretenir les équipements de chauffage, climatisation, ventilation, plomberie, les tenues des employées, les badges, la dératisation. Dès lors, Madame Roeygens démontre qu'elle n'avait aucune autonomie ni liberté en matière de conditions de travail d'hygiène et de sécurité qui étaient toutes fixées par la société Yves Rocher et qu'elle relève bien des dispositions de l'article L 7321-3 du Code du travail.

Sur les demandes formées par Madame Roeygens

Madame Roeygens demande à la cour de fixer sa rémunération de référence à la somme de 2 687 euro qui correspond à la rémunération versée par la société Yves Rocher à ses directrices d'institut. (2 687 euro x 48 mois = 128 976 euro brut).

La société Yves Rocher fait valoir mais sans le démontrer que Madame Roeygens ne peut prétendre à ce salaire, correspondant à la taille d'un d'institut et à un chiffre d'affaires bien supérieur à celui de l'institut de Sarlat.

Madame Roeygens demande un rappel de salaire de 5 656 euro correspondant à la différence entre les sommes qu'elle indique avoir perçu entre le 18 mai 2004 et le 22 juin 2008 : 123 320 euro et celles qu'elle aurait dû percevoir 128 976 euro durant cette période.

Toutefois, il ressort des propres comptes de Madame Roeygens et notamment de l'attestation de son expert-comptable que les prélèvements opérés par de Madame Roeygens durant cette période de référence s'élèvent à 168 222 euro et non à 123 320 euro.

Dès lors, Madame Roeygens ayant perçu durant l'exploitation de son fonds de commerce des sommes supérieures à la rémunération de référence qu'elle revendique en tant que gérante de succursale, ne peut utilement prétendre à un rappel de salaire. Ce d'autant qu'au vu des pièces comptables produites, elle ne démontre nullement avoir dû payer des dettes de l'institut. Dès lors, la déboute de sa demande de rappel de salaire.

Sur le rappel d'heures supplémentaires

Madame Roeygens demande 65 144 euro au titre des heures supplémentaires, aux termes de l'article L. 3171-4 du Code du travail. En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

En l'espèce, Madame Roeygens Danielle fait valoir qu'elle était présente en permanence dans son institut dont l'amplitude horaire était la suivante de 9 heures à 19 heures du mardi au samedi, (5 jours par semaines soit 50 heures) et qu'elle devait en outre consacrer 5 heures minimum par semaine à la tenue de la comptabilité. Elle estime donc son temps de travail à 55 heures par semaine. Pour étayer ses dires, elle produit uniquement les attestations de deux anciennes salariées. Or, en l'espèce la société Yves Rocher rappelle que les heures d'ouverture étaient laissées à la libre appréciation de la franchisée. Elle conteste avoir fixé les conditions de travail ou même que celles-ci aient été soumises à son accord. Elle conteste les attestations produites par Madame Roeygens notamment celle de Madame Legas, qui en contrat de qualification, n'était pas présente tous les jours dans le magasin et encore moins le dimanche. Elle indique que Madame Roeygens se contredit puisque dans un de ses propres courriers elle précise qu'elle n'était pas présente à l'institut depuis deux mois, suite à des problèmes de santé. La société Yves Rocher soutient contrairement à ce que prétend Madame Roeygens qu'elle n'exigeait pas des franchisées ou des locataires gérantes une présence permanente dans l'institut, elle établit d'ailleurs que bon nombre de franchisées pouvaient être responsables de deux, voire trois instituts, en ayant le temps le temps de s'organiser pour les gérer. (Pièces 61-1 à 61-11 de la société Yves Rocher).

Si au vu des éléments assez succincts produits par Madame Roeygens, la cour n'a pas la conviction que Madame Roeygens était en permanence à l'institut ni faisait 55 heures de permanence par semaine, il est évident cependant qu'avec les systèmes excessivement sophistiqués mis en place par la société Yves Rocher pour contrôler l'activité, les conditions de travail, les performances, l'amplitude d'ouverture de l'institut, la société Yves Rocher avait parfaitement connaissance du fait que Madame Roeygens effectuait des heures supplémentaires, c'est si vrai que l'intimée dans ses conclusions reconnait que Madame Roeygens a effectué des heures supplémentaires pour une somme supérieure à 30 000 euro. Aussi au vu des éléments produits par les parties et sans qu'il soit nécessaire de procéder à une expertise, la cour a la conviction que Madame Roeygens a effectué les heures supplémentaires qui sont justifiés à hauteur de 33 240 euro congés payés compris.

Sur la demande compensatrice de congés payés

Madame Roeygens au soutien de son appel, ayant entre trois et quatre salariées en permanence à l'institut n'établit pas qu'elle était dans l'impossibilité de prendre ses congés annuels, les attestations qu'elle produit sont contradictoires et ne permettent pas d'établir contrairement à ce qu'elle le soutient qu'elle ne prenait que deux semaines de congés par an, en conséquence, la cour la déboute de sa demande de dommages et intérêts pour congés payés non pris.

Sur la rupture de la relation contractuelle

Madame Roeygens Danielle a résilié le contrat de franchise par courrier du 22 décembre 2007.

La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail.

Lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de la démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire, d'une démission. Il appartient au salarié d'établir les faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur.

Elle fait valoir que la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher a refusé ses six propositions de transfert de local de l'institut qu'elle lui a proposé sur Sarlat, sans justifier sa décision ; et a refusé de faire droit à sa demande de prendre la direction des instituts de Brive et Trélissac. En conséquence, de quoi elle a été acculée au départ, sans pouvoir vendre sa clientèle ni son fonds de commerce ni pouvoir faire reprendre le contrat de travail de ses salariées qu'elle a été obligée de licencier. Elle estime cette rupture abusive et demande, en conséquence, d'analyser sa démission comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse. La société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher ne conteste pas les faits dénoncés par Madame Roeygens qui ont conduit à son départ sans pouvoir vendre sa clientèle. Ce qui lui a nécessairement causé un préjudice important.

Aussi la cour considère en l'espèce, que la rupture du contrat de franchise est la conséquence directe des manquements imputables à la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher et en conséquence requalifie cette rupture en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Au moment de la rupture Madame Roeygens avait 13 ans d'ancienneté, 61 ans, le fait de ne pas pouvoir vendre sa clientèle du fait la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher. Compte tenu de son âge et du montant très faible de sa pension de retraite, la cour fixe le montant de la réparation de son préjudice à la somme de 35 000 euro de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher est, en outre, condamnée à payer à Madame Roeygens 8 736 euro au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, en prenant comme salaire de référence 2 687 euro au vu des éléments produits par Madame Roeygens relatifs au salaire perçu par une autre directrice Yves Rocher exerçant des fonctions assimilées aux siennes.

En conséquence, la cour réforme la décision attaquée dans toutes ses dispositions.

L'équité commande la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher succombant en cause d'appel de la condamner à payer à Madame Roeygens 1 500 euro en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs : LA COUR, Réforme la décision attaquée dans toutes ses dispositions. Se dit compétent pour statuer sur les demandes de Madame Roeygens. Requalifie la relation contractuelle entre Madame Roeygens et la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher, en gérance de succursale. Dit que la relation contractuelle de la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher et de Madame Roeygens, gérant de succursale, remplit les conditions visées aux articles L. 7321-1, 7321-2, et 7321-3 du Code du travail. Dit que la rupture de cette relation contractuelle s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse. - Fixe la rémunération mensuelle de référence à la somme de 2 687 euro (deux mille six cent quatre-vingt-sept euro) ; - déboute Madame Roeygens de sa demande de rappel de salaires et d'indemnité compensatrice de congés payés. Condamne la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher à verser à Madame Roeygens : - 33 240 euro (trente-trois mille deux cent quarante euro) à titre d'heures supplémentaires, - 35 000 euro (trente-cinq mille euro) de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, - 8 736 euro (huit mille sept cent trente-six euro) au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement. Condamne la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher à verser à Madame Roeygens 1 500 euro (mille cinq cents euro) au titre de l'article 700 du Code de procédure civile. Déboute la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher qui succombe en cause d'appel de ses demandes reconventionnelles. Déboute Madame Roeygens de ses autres demandes. Condamne la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher aux entiers dépens.