CA Chambéry, ch. civ. sect. 1, 8 avril 2014, n° 13-00681
CHAMBÉRY
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Aixam Méga (SAS)
Défendeur :
Bienfait (ès qual.), Sola Automobiles (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Billy
Conseillers :
Mme Caullireau-Forel, M. Leclercq
Avocats :
Mes Cochet-Barbuat, César, SCP Bollonjeon Arnaud Bollonjeon, SCP ABCG
La SAS Aixam Méga fabrique et commercialise des véhicules sans permis.
Elle a conclu le 1er septembre 1997 un contrat de distribution sélective de véhicules neufs de marque Aixam et de pièces de rechange, avec la SARL Sola automobiles.
Un nouveau contrat a été conclu le 21 février 2006.
Le 8 avril 2008, la société Aixam a conclu avec la société Sola automobiles un contrat de distribution sélective de véhicules de marque Méga.
Les relations entre les partenaires se sont dégradées, et par courrier du 8 juillet 2009, la société Sola automobiles a mis fin unilatéralement au contrat de distribution à compter du 30 août 2009.
La société Aixam Méga s'est prévalue de l'article 8 du contrat prévoyant que l'auteur de la résiliation doit respecter un préavis de deux ans.
Par jugement du 27 février 2013, le Tribunal de commerce de Chambéry a :
- déclaré recevable l'action de la société Aixam Méga,
- condamné la société Sola automobiles à lui payer :
la somme de 18 368,19 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice commercial causé par la brusque rupture,
la somme de 7 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du "préjudice d'image".
une indemnité de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
La société Aixam Méga en a interjeté appel.
La société Sola automobile a été mise en redressement judiciaire par jugement du Tribunal de commerce de Nice du 21 novembre 2013 et Mme Stéphanie Bienfait a été désignée pour faire fonction de mandataire judiciaire.
Vu les "conclusions n° 2" de la société Aixam Méga signifiées le 14 février 2014 qui tendent à la réformation du jugement déféré pour voir :
- fixer la créance au passif de la procédure collective de la société Sola automobiles aux sommes suivantes :
309 810 euros en réparation du préjudice subi du fait de la résiliation fautive des contrats de distribution automobile,
50 000 euros en réparation du préjudice d'image,
- confirmer pour le surplus le jugement déféré et y ajoutant, allouer à la société Aixam Méga, la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile pour les frais engagés en cause d'appel, et fixer la créance au passif de la procédure collective à la somme de 9 000 euros sur le même fondement, outre les dépens de première instance et d'appel avec application pour ces derniers de l'article 699 du Code de procédure civile ;
Vu les conclusions de Mme Bienfait ès qualités signifiées le 7 mars 2014 qui tendent à voir :
- débouter la société Aixam Méga de ses demandes,
- la condamner à payer une indemnité de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Vu l'assignation et signification d'acte d'appel et de conclusions à la société Sola automobiles du 28 mai 2013, qui n'a pas constitué avocat ;
Sur ce :
Attendu qu'avant l'ouverture des débats et avec l'accord des parties, les effets de l'ordonnance de clôture ont été reportés à la date de l'audience de façon à rendre recevables les conclusions de Mme Bienfait ;
Attendu qu'il n'apparaît pas que celle-ci dispose du pouvoir de représenter la société Sola automobiles, comme l'indique au surplus l'intitulé de ses conclusions, qui fait apparaître qu'elle agit "en présence" de cette société, qu'elle n'est donc partie à l'instance que comme mandataire judiciaire ;
1 - Sur le préjudice causé par la rupture abusive contrat de distribution sélective
Attendu que les premiers juges ont décidé à juste titre que les reproches formulés par la société Sola automobiles, qui selon elle, justifieraient la rupture des relations contractuelles par application de l'article 10 pour manquement du concédant à l'une de ses obligations essentielles, présentaient un caractère inconsistant ;
Attendu que les premiers juges ont évalué à 612 273 euros le chiffre d'affaires perdu par la société Aixam Méga, qu'ils ont ensuite considéré que le préjudice de cette société était représenté par le bénéfice qu'ils ont évalué à 3 % du chiffre d'affaires ;
Attendu que la société Aixam Méga reprend à son compte l'évaluation faite par les premiers juges, du chiffre d'affaire perdu suite à la rupture du contrat, mais prétend que son préjudice serait représenté par la marge brute qui serait de 50,6 %, qu'il conviendrait en conséquence de fixer celui-ci à 309 810 euros, montant de sa déclaration de créance au passif de la procédure collective (pièce n° 27) ;
Attendu que les parties produisent uniquement le contrat portant la date du 21 février 2006 ;
Attendu que l'obligation de respecter un préavis figurant dans les contrats de distribution sélective est édictée dans l'intérêt exclusif du concessionnaire, puisqu'en effet, le contrat en cause dans la présente instance, autorisait la société Aixam Méga à contracter à tout moment avec d'autres distributeurs ;
Attendu que la demande ne pourrait aboutir que sur le fondement d'une brusque rupture, qu'en l'espèce, la société Aixam Méga a pu mettre en place un nouveau distributeur dès le 31 août 2009, alors que le préavis proposé dans la lettre de rupture s'est exécuté jusqu'à cette date, de sorte qu'elle ne peut invoquer ce fondement ;
Attendu dès lors que la rupture du contrat de distribution dans des conditions contraires à l'article 8 n'a causé aucun préjudice à la société Aixam Méga ;
2 - Sur le préjudice résultant d'une atteinte à l'image de marque
Attendu qu'au soutien de sa demande de dommages-intérêts, la société Aixam Méga soutient que la rupture brutale du contrat de distribution et la disparition de sa marque des marchés niçois et cannois pendant plusieurs mois entraîne une atteinte à cette image ;
Attendu cependant qu'il résulte des explications précédentes que la société Aixam Méga a pu mettre en place un nouveau distributeur avant la fin du préavis donné par la société Sola automobiles ;
Attendu que pour condamner la société Sola automobiles à payer à la société Aixam Méga des dommages-intérêts pour atteinte à son image de marque, les premiers juges se sont fondés sur un mail adressé aux autres distributeurs en admettant toutefois qu'ils n'avaient pu examiner cette pièce ;
Attendu que la société Aixam Méga produit une attestation de M. Touvet selon laquelle celui-ci a reçu un mail du garage Sola automobiles relatant des faits excessivement discourtois, injurieux et probablement non fondés à l'égard du constructeur Aixam Méga d'Aix-les-Bains, que cependant, selon l'attestation de M. Jourda, le gérant de la société Sola automobiles lui aurait transmis la lettre de résiliation de son contrat sans faire aucun commentaire ;
Attendu que le caractère injurieux de cet écrit n'est pas établi par l'attestation de M. Touvet qui ne cite pas les termes du mail qu'il a reçu, que le seul fait d'informer les autres distributeurs du réseau Aixam Méga de la rupture n'est pas de nature à causer une atteinte à l'image de marque de cette société ;
Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire, Constate qu'avant l'ouverture des débats et avec l'accord des parties, les effets de l'ordonnance de clôture ont été reportés à la date de l'audience, Infirme en toutes ses dispositions le jugement déféré et statuant à nouveau, Déboute la société Aixam Méga de ses demandes, Déboute Mme Bienfait de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la société Aixam Méga aux dépens de première instance et d'appel avec application pour ces derniers de l'article 699 du Code de procédure civile.