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Décisions

CA Douai, 1re ch. sect. 1, 13 janvier 2014, n° 13-02787

DOUAI

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Cyrille

Défendeur :

Boutiflat

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Merfeld

Conseillers :

Mmes Metteau, Doat

Avocat :

Me Grillet

TI Valenciennes, du 15 nov. 2012

15 novembre 2012

Le 24 janvier 2012 Monsieur Patrice Boutiflat a vendu à Madame Laure Cyrille un véhicule Volkswagen modèle Golf mis en circulation le 15 juillet 1999.

Par acte d'huissier du 4 septembre 2012 Madame Cyrille a fait assigner Monsieur Boutiflat devant le Tribunal d'Instance de Valenciennes pour voir constater que le véhicule est affecté d'un vice caché et obtenir la restitution du prix de vente de 3 600 euros, le remboursement de frais d'immatriculation, de diagnostic et d'expertise ainsi que la condamnation de Monsieur Boutiflat au paiement d'une somme de 1 500 euros à titre de dommages-intérêts.

Monsieur Boutiflat ne s'est pas présenté devant le tribunal.

Par jugement du 15 novembre 2012 le tribunal a :

- condamné Monsieur Boutiflat à payer à Madame Cyrille la somme de 1 500 euros à titre de dommages-intérêts,

- débouté Madame Cyrille de ses autres demandes,

- condamné Monsieur Boutiflat aux dépens et à verser à Madame Cyrille une somme de 400 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile .

Madame Cyrille a relevé appel de ce jugement le 14 mai 2013.

Elle demande à la cour de l'infirmer et, statuant à nouveau, de faire droit à son action rédhibitoire et en conséquence de condamner Monsieur Boutiflat à lui payer la somme de 3 760,62 euros soit 3 600 en remboursement du prix de vente du véhicule, 99,50 euros pour les frais d'immatriculation et 61,12 euros pour les frais de diagnostic du moteur.

Subsidiairement elle demande la condamnation de Monsieur Boutiflat à lui verser la somme de 3 760,62 euros à titre de dommages-intérêts pour défaut de conformité.

Elle se porte en outre demanderesse d'une somme de 492,75 euros pour frais d'expertise amiable et d'une indemnité de 1 500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile .

Elle demande à la cour de dire que Monsieur Boutiflat devra récupérer à ses frais le véhicule après paiement complet de la condamnation mise à sa charge.

Elle déclare qu'elle a acquis le véhicule de Monsieur Boutiflat le 24 janvier 2012 au prix de 3 600 euros, que sur le chemin du retour elle a constaté que de la fumée blanche sortait du pot d'échappement, que le garagiste auquel elle a confié le véhicule lui a annoncé qu'il était affecté de différents problèmes techniques, que son assureur a fait diligenter une expertise, que régulièrement convoqué Monsieur Boutiflat ne s'est pas présenté, que l'expert a déposé son rapport le 3 mai 2012 concluant que le véhicule était atteint de vices techniques importants déjà présents lors de la vente et qu'en outre le kilométrage affiché au compteur était erroné.

Elle invoque à titre principal les dispositions des articles 1641, 1644 et 1645 du Code civil soutenant qu'il ressort très clairement du rapport d'expertise que le véhicule est entaché d'un vice caché en raison non seulement des désordres relevés mais également du kilométrage réel qui ne correspond pas à celui affiché au compteur et indiqué sur le certificat de vente. Elle ajoute qu'il ne peut être contesté que Monsieur Boutiflat connaissait l'existence du vice caché en ce qui concerne le dysfonctionnement mécanique puisque dès la prise de possession du véhicule une fumée blanchâtre s'est dégagée du pot d'échappement.

Subsidiairement elle invoque le défaut de conformité du véhicule.

Elle soutient qu'elle subit un préjudice complémentaire du fait de l'immobilisation du véhicule depuis le 24 janvier 2012.

Monsieur Boutiflat n'a pas constitué avocat. Il a été assigné le 9 août 2013 selon les dispositions de l'article 659 du Code de procédure civile, avec signification de la déclaration d'appel et des conclusions de l'appelante. Les conclusions de l'appelante lui ont été à nouveau signifiées selon les mêmes modalités par acte du 5 septembre 2013.

SUR CE :

1°) sur la garantie des vices cachés

Attendu que selon l'article 1641 du Code civil le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus ;

que l'article 1642 ajoute que le vendeur n'est pas tenu des vices apparents dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même ;

Attendu qu'il incombe à l'acquéreur d'apporter la preuve du vice caché et de ses différents caractères ; qu'il doit établir que la chose vendue est atteinte d'un vice :

- inhérent à la chose et constituant la cause technique des défectuosités,

- présentant un caractère de gravité de nature à porter atteinte à l'usage attendu de la chose,

- existant antérieurement à la vente,

- n'étant, au moment de la vente, ni apparent, ni connu de lui.

Attendu que Monsieur Auvinet, expert désigné par l'assureur de Madame Cyrille, a constaté à la mise en route du véhicule qu'une fumée grisâtre importante était visible à l'échappement, que le moteur émettait un bruit mécanique anormal, que le véhicule présentait un dysfonctionnement du circuit de refroidissement et que les injecteurs de gasoil fuient ;

qu'il a ensuite procédé à un diagnostic dans les ateliers du garage Auto Avenir Relais et a constaté que le raccordement des durits d'eau au radiateur d'huile est inexistant et que le bocal de réserve de liquide de refroidissement est fissuré empêchant toute mise sous pression ; qu'il a en outre indiqué que le diagnostic informatique réalisé sur le moteur a révélé un dysfonctionnement de l'injecteur pilote et un dysfonctionnement de la sonde de température du moteur, ces deux dysfonctionnements mettant en défaut la régulation du débit de gasoil nécessaire au bon fonctionnement du moteur ; qu'il a également relevé que la jauge de niveau d'huile du moteur était cassée;

qu'il a conclu qu'il s'agit de vices techniques importants déjà présents avant la vente ;

que cependant, ainsi que le tribunal l'a relevé, l'expert reste muet sur le caractère caché des désordres pour l'acquéreur, qui conditionne pourtant l'application de la garantie prévue par l'article 1641 du Code civil ;

Attendu que Madame Cyrille a déclaré dans son assignation et ses conclusions devant la cour avoir constaté sur le chemin du retour vers son domicile après avoir acquis le véhicule que de la fumée blanchâtre sortait de l'échappement de façon persistante, ce qui est révélateur, selon l'expert d'un dysfonctionnement du système d'injection ;

que cette fumée blanchâtre qui est apparue dès que l'expert a mis le véhicule en marche pouvait être perçue de la même façon par l'acheteur à qui il appartenait de faire un essai du véhicule avant de l'acquérir, s'agissant d'un véhicule d'occasion dont la première mise en circulation remonte au 15 juillet 1999, soit douze ans avant la vente ;

Attendu en outre que l'expert a noté au paragraphe "historique du véhicule" que le 10 janvier 2012 un contrôle technique a été édité ; que le tribunal a relevé que le procès-verbal de contrôle technique n'a pas été produit par Madame Cyrille ; que celle-ci écrit dans ses conclusions que ce document est produit en cause d'appel ; que toutefois cette pièce n'a pas été remise à la cour et ne figure d'ailleurs pas sur le bordereau de communication de pièces annexé aux conclusions de l'appelante ;

que Madame Cyrille n'apporte pas la preuve qui lui incombe du caractère caché des désordres relevés par l'expert ;

Attendu que l'inexactitude du kilométrage figurant au compteur du véhicule vendu, s'il constitue un manquement aux spécifications contractuelles, relève du défaut de conformité et non de la garantie des vices cachés ;

Attendu qu'il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Madame Cyrille de sa demande sur le fondement des dispositions des articles 1641 et suivants du Code civil ;

2°) sur le défaut de conformité

Attendu qu'en application de l'article 1604 du Code civil le vendeur est tenu de livrer une chose conforme aux caractéristiques convenues ;

Attendu que Monsieur Auvinet, expert, a noté dans son rapport que le kilométrage apparaissant sur le compteur du véhicule, soit 125 199 km au jour de son examen est erroné puisque d'après les informations relevées sur le logiciel Elsa Pro le véhicule a subi une réparation le 28 mai 2007 à 198 847 kilomètres ;

Mais attendu qu'il est expressément indiqué sur le certificat de vente établi le 24 janvier 2012 et signé par le vendeur, Monsieur Boutiflat et l'acquéreur, Madame Cyrille que le kilométrage de 123 500 km inscrit au compteur ne pouvait être garanti ; qu'il en résulte que ce kilométrage n'est pas une caractéristique convenue entre les parties et que dès lors aucun défaut de conformité ne peut être reproché à Monsieur Boutiflat de ce chef ;

Attendu que Madame Cyrille doit donc être déboutée de ses demandes en restitution du prix du véhicule et remboursement des frais d'immatriculation, de diagnostic moteur et d'expertise ; qu'il y a lieu à confirmation ;

Attendu que l'article 562 du Code de procédure civile dispose que l'appel ne défère à la cour que la connaissance des chefs du jugement qu'il critique expressément ou implicitement et de ceux qui en dépendent ; qu'il en résulte que la cour ne peut aggraver le sort de l'appelant sur son seul appel et en l'absence d'appel incident de l'intimé ; que la condamnation de Monsieur Boutiflat au paiement de la somme de 1 500 euros à titre de dommages-intérêts, de celle de 400 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens doit donc être maintenue ;

Attendu que Madame Cyrille qui succombe en son recours supportera les dépens d'appel et sera déboutée de sa demande complémentaire en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel ;

Par ces motifs : LA COUR statuant par défaut, Confirme le jugement, Condamne Madame Laure Cyrille aux dépens d'appel, La déboute de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel.