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Décisions

CA Versailles, 12e ch., 6 mai 2014, n° 12-08580

VERSAILLES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Express Food (SARL), Gennevee, Nantes Pizz' (SARL), Saint Malo Pizz' (SARL), Chateaugiron Pizz' (SARL)

Défendeur :

Speed Rabbit Pizza (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Rosenthal

Conseillers :

Mmes Calot, Orsini

Avocats :

Mes Dupuis, Dutto, Guttin, Hatte

T. com. Nanterre, 2e ch., du 16 nov. 201…

16 novembre 2012

Vu l'appel interjeté le 13 décembre 2012 par la société Express Food à l'encontre d'un jugement rendu le 16 novembre 2012 par le Tribunal de commerce de Nanterre qui a :

- constaté que la société Express Food s'est affranchie des obligations qui sont les siennes aux termes des contrats de franchise des 14 septembre 2005,

- dit que la rupture des contrats de franchise est intervenue le 19 août 2011 aux torts exclusifs de la société Express Food et ont été résiliés à cette date,

- condamné la société Express Food à payer à la société Speed Rabbit Pizza la somme de 167 367,62 euros au titre des arriérés de royalties avec intérêts légaux à compter du 23 décembre 2010 sur la somme de 109 615,40 euros et intérêts légaux à compter du 19 juillet 2011 sur la somme de 57 752,22 euros,

- condamné la société Express Food à payer à la société Speed Rabbit Pizza la somme de 150 000 euros à titre de dommages-intérêts,

- débouté la société Speed Rabbit Pizza de sa demande au titre d'une faute délictuelle et contractuelle,

- ordonné à la société Express Food de déposer les enseignes "Speed Rabbit Pizza" et de cesser l'utilisation de toute référence à la franchise "Speed Rabbit Pizza" sur tous supports avec une astreinte de 500 euros par jour de retard, à partir de deux mois après la signification du jugement avec un maximum de 120 jours,

- condamné solidairement la société Express Food et M. Gennevee à payer à la société Speed Rabbit Pizza la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

- débouté les parties de toutes leurs autres demandes ;

Vu les dernières écritures signifiées le16 janvier 2014 par lesquelles la société Express Food demande à la cour de :

- débouter la société Speed Rabbit Pizza de l'ensemble de ses demandes ;

- réformer le jugement en ce qu'il retient la faute de la société Express Food,

- dire et juger que la résiliation unilatérale des contrats de franchise est intervenue aux torts exclusifs de la société Speed Rabbit Pizza ;

- prononcer la mainlevée des oppositions ;

- condamner la société Speed Rabbit Pizza à verser à la société Express Food la somme de 833 706 euros au titre du préjudice subi en raison du paiement de redevances de franchise injustifiées ;

- infirmer les ordonnances de référé des 13 avril 2011 et 21 mars 2012 et condamner la société Speed Rabbit Pizza à restituer à Express food les sommes versées en exécution de celles-ci, soit 109 615,40 euros ;

- condamner la société Speed Rabbit Pizza à verser à la société Express Food les sommes de 15 000 euros au titre du paiement d'un droit d'entrée injustifié, 50 000 euros au titre de l'atteinte à sa réputation, 2 308 108 euros au titre du préjudice d'exploitation et 30 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens dont distraction ;

Vu les dernières écritures signifiées le 18 février 2014 aux termes desquelles la société Speed Rabbit Pizza prie la cour de:

- confirmer le jugement en ce qu'il a constaté que la société Express Food s'est affranchie des obligations qui sont les siennes aux termes des contrats de franchise du 14 septembre 2005, dit que la rupture des contrats de franchise est intervenue le 19 août 2011 à ses torts exclusifs et ont été résiliés à cette date, condamné la société Express Food à payer à la société Speed Rabbit Pizza la somme de 167 367,62 euros outre intérêts et ordonné à la société Express Food de déposer les enseignes Speed Rabbit Pizza et de cesser l'utilisation de toutes références à franchise "Speed Rabbit Pizza" sur tous supports et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard,

- réformer le jugement en ce qui concerne le montant des dommages et intérêts alloués à la société Speed Rabbit Pizza et statuant à nouveau, condamner la société Express Food à payer à la société Speed Rabbit Pizza la somme de 465 226 euros à titre de dommages et intérêts correspondant au montant des royalties qui auraient dû lui être réglées si les contrats avait été exécutés jusqu'en septembre 2015 avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

- infirmer le jugement en ce qu'il s'est déclaré incompétent pour statuer sur les demandes formulées à l'encontre de M. Gennevee et statuant à nouveau, constater que M. Gennevee a engagé sa responsabilité personnelle à l'égard de la société Speed Rabbit Pizza ;

En conséquence,

- condamner M Genevee à payer à la société Speed Rabbit Pizza la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par sa faute délictuelle séparable de son mandat de gérant,

- condamner solidairement la société Express Food et M Genevee à payer à la société Speed Rabbit Pizza la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens et première instance et d'appel.

Sur ce, LA COUR,

Considérant que, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, il est expressément renvoyé au jugement entrepris ainsi qu'aux écritures des parties ; qu'il sera seulement rappelé que :

- la société Speed Rabbit Pizza assure l'exploitation directe et en franchise d'un réseau de plus de 100 points de restauration, de vente à emporter et livraisons à domicile, essentiellement de pizzas sous l'enseigne "Speed Rabbit Pizza" ;

- à partir de 1995, la société Express Food est devenue franchisée de la société Speed Rabbit Pizza et a exploité, à Rennes, jusqu'à 4 fonds de commerce de vente et de livraison rapide de pizzas à domicile ;

- lors de la signature du 4e contrat de franchise, le 14 septembre 2005 à effet du 1er octobre 2005, les trois contrats précédents ont été renouvelés pour une durée de 10 années ;

- dans le cadre de ces contrats de franchise, la société Express Food s'est engagée à verser à la société Speed Rabbit Pizza une redevance mensuelle correspondant à 5 % de son chiffre d'affaires hors taxes, ainsi qu'une redevance publicitaire de 1 % de son chiffre d'affaires hors taxes ;

- la société Express Food, invoquant une baisse de son chiffre d'affaires, n'a pas réglé à la société Speed Rabbit Pizza les factures correspondant aux redevances publicitaires et aux royalties pour la période allant de juin 2010 à mars 2011, soit un total de 109 615,40 euros ;

- après mise en demeure restée infructueuse en date du 23 décembre 2010, la société Speed Rabbit Pizza l'a assignée en référé en paiement de cette somme ;

- par une ordonnance du 13 avril 2011, confirmée par un arrêt du 21 mars 2012, la société Express Food a été condamnée au paiement de cette somme à titre provisionnel ;

- la société Express Food n'a pas repris le paiement des royalties dues au franchiseur au titre des quatre contrats et a, en juillet 2011, procédé à la fermeture de la boutique située <adresse> ;

- par lettre recommandée avec accusé de réception du 19 juillet 2011, visant la clause résolutoire prévue aux contrats, la société Express Food a été mise en demeure de régler la somme de 42 180,52 euros due au titre des royalties et de ré ouvrir la boutique <adresse>, et ce dans un délai de 30 jours ;

- un courriel contenant des critiques à l'égard de la société Speed Rabbit Pizza ayant été transmis à certains franchisés, le franchiseur a engagé différentes procédures judiciaires pour obtenir l'identification de son auteur ;

- par acte du 29 septembre 2011, la société Speed Rabbit Pizza a assigné la société Express Food et M. Gennevee devant le tribunal de commerce aux fins de voir constater la résiliation des quatre contrats de franchise aux torts de la société Express Food par application de la clause résolutoire stipulée aux contrats et d'obtenir la condamnation de cette société au paiement de la somme de 167 367,62 euros au titre des arriérés de royalties et de celle de 465 226 euros à titre de dommages-intérêts, outre sa condamnation solidaire avec M Genevee, auteur présumé du courriel précité, au paiement de la somme de 100 000 euros à titre de dommages-intérêts ;

- c'est dans ces circonstances qu'a été rendu le jugement entrepris ;

Sur la résiliation des contrats de franchise

Considérant que la société Speed Rabbit Pizza sollicite que soit constatée l'acquisition de la clause résolutoire stipulée dans les contrats de franchise, à la date du 19 août 2011, la société Express Food ayant manqué à ses obligations en ne payant pas ses redevances et en fermant unilatéralement l'un de ses magasins et n'ayant pas déféré à la mise en demeure du 19 juillet 2011 lui faisant injonction de mettre fin à ces manquements ;

Qu'elle précise, sur le premier point, que la société Express n'a pas réglé les redevances publicitaires et royalties entre les mois de juin 2010 et mars 2011, qu'elle a été condamnée à ce titre en référé à lui verser la somme de 109 615,40 euros, que par la suite, elle a continué à ne pas payer les sommes contractuellement dues, soit la somme de 57 752,22 euros et qu'il convient dès lors de confirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée au paiement de la somme de 167 367,62 euros ;

Qu'elle conteste chacun des manquements à ses obligations contractuelles allégués par la société Express pour justifier le non-paiement des redevances et rappelle que cette société a exploité la franchise Speed Rabbit Pizza pendant près de 15 ans sans jamais formuler aucun reproche à son encontre ;

Considérant que la société Express Food oppose qu'elle a cessé tout paiement à compter de mars 2010 car elle a réalisé, à cette date, que le réseau était désorganisé et que la société Speed Rabbit Pizza n'assurait aucune prestation pour les franchisés et manquait à ses obligations ; qu'elle fait valoir que le chiffre d'affaires des magasins du réseau a considérablement baissé en 2009 par suite des dysfonctionnements internes au réseau et que, malgré un rapport d'audit établi en mars 2010 à la demande de la société Speed Rabbit Pizza ayant montré les défaillances du réseau, le franchiseur s'est désintéressé du sort de ses franchisés ;

Qu'invoquant l'exception d'inexécution, la société Express Food sollicite que la rupture des contrats soit prononcée aux torts exclusifs du franchiseur ;

Qu'au titre des manquements du franchiseur à ses obligations, elle soutient que la société Speed Rabbit Pizza ne lui a transmis aucun savoir-faire et à tout le moins n'a jamais mis à sa disposition un savoir-faire adapté aux difficultés économiques rencontrées par le réseau à partir de 2009, et qu'elle ne lui a pas dispensé la formation initiale prévue aux contrats, ni fourni un logiciel informatique spécifique ;

Qu'elle invoque les défaillances de la société Speed Rabbit Pizza au regard de son obligation d'assistance technique et de son devoir de collaboration et soutient que le franchiseur s'est abstenu de l'assister alors qu'elle rencontrait des difficultés et sollicitait de l'aide, qu'il n'a visité ses points de vente qu'en juillet 2011, qu'il n'a plus organisé de réunion d'informations à partir de 2009 ni communiqué les chiffres d'affaires des différents points de vente, qu'il n' a jamais respecté son obligation de mise à disposition des franchisés d'un numéro de téléphone unique ; qu'elle ajoute que certains franchisés avaient d'ailleurs créé une association en septembre 2010 dans le but de redynamiser le réseau, association qui dans un courrier du 29 septembre 2010 énumérait les manquements du franchiseur ;

Qu'elle fait valoir s'agissant de la fermeture du point de vente <adresse> que cette fermeture est consécutive aux manœuvres mises en place par la société Speed Rabbit Pizza pour l'empêcher de procéder à la cession de son fonds de commerce et qu'elle ne caractérise pas une faute de sa part ;

Considérant que la société Express Food ne conteste pas le montant de la créance revendiquée par la société Speed Rabbit Pizza au titre des redevances et royalties impayées, soit la somme de 167 367,62 euros mais oppose l'exception d'inexécution en invoquant les manquements de la société Speed Rabbit Pizza à ses obligations contractuelles ;

Considérant qu'il sera, en premier lieu, relevé que les manquements allégués par la société Express Food n'ont été invoqués par elle, pour la première fois, que le 4 avril 2011, soit la veille de l'audience devant le juge des référés devant lequel elle était assignée en paiement des redevances et royalties restées impayées depuis plusieurs mois ; que si la société Express Food précise, dans ses conclusions devant le juge des référés, qu'elle a décidé de "suspendre le paiement des redevances depuis le mois de janvier 2010 pour marquer son désaccord à l'encontre du franchiseur qui ne remplissait plus ses obligations", force est de constater que les courriers qu'elle a adressés à ce dernier en mai, juillet ou octobre 2010 ne font pas état de tels manquements et montrent que la société Express Food souhaitait alors rester dans le réseau ;

Considérant, ensuite, en ce qui concerne les griefs en lien avec la transmission du savoir-faire du franchiseur qu'il n'est pas contesté ni contestable que les contrats de franchise mettent à la charge de la société Speed Rabbit Pizza une obligation de transmission de son savoir-faire ; que c'est cependant en vain que la société Express Food soutient que le franchiseur ne disposerait d'aucun savoir-faire alors que l'existence même d'un réseau depuis une vingtaine d'années qui compte aujourd'hui plus de 100 boutiques témoigne de la réalité de ce savoir-faire qui, au vu des pièces produites, porte sur le lancement, l'approvisionnement, la gestion et la commercialisation des boutiques ;

Que contrairement à ce qui est soutenu, le franchiseur a mis à la disposition de la société Express Food, lors de la signature des contrats du 14 septembre 2005, soit à une date où cette société était un franchisé du réseau depuis presque 10 ans, plusieurs manuels opératoires contenant la description et les modalités des services et prestations mises au point par le franchiseur en matière d'exploitation des points de vente, d'informatique et dans le domaine social ainsi qu'en matière d'hygiène ; que ces documents ainsi que le guide d'hygiène comportent toutes les informations utiles sur les produits, la mise en place des magasins et matérialisent un transfert du savoir-faire de la société Speed Rabbit Pizza à son franchisé ;

Que c'est en vain qu'est allégué un défaut de formation initiale alors que la société Express Food faisait partie du réseau depuis une dizaine d'années lors du renouvellement des contrats en septembre 2005 ; qu'il est justifié de la mise à disposition des franchisés d'un outil informatique spécifique, performant et adapté à leurs besoins ;

Considérant en outre que le grief allégué relatif à la non-adaptation du savoir-faire et au défaut d'assistance apportée par le franchiseur est contredit par les pièces produites dont il résulte que les boutiques de la société Express Food ont été régulièrement visitées, que des comités de marketing se sont tenus mensuellement auxquels étaient conviés les franchisés, que des informations relatives à l'activité et au développement de la franchise et portant sur les nouveautés techniques, l'évolution du réseau par rapport à la concurrence, les actions publicitaires menées ont été communiquées régulièrement aux franchisés ;

Considérant par ailleurs qu'il ne résulte pas des pièces produites que la société Express Food aurait souffert d'un manque d'assistance de la part du franchiseur en 2009 ou 2010 ; qu'il est au contraire établi que les deux parties étaient en contacts fréquents et qu'aucune demande d'aide ou d'assistance n'était formulée par le franchisé ; qu'il apparaît qu'en octobre 2009, la société Express Food faisait part au franchiseur de son désir d'ouvrir une nouvelle boutique et qu'elle discutait en juillet 2010 avec lui d'un projet d'évolution d'une de ses boutiques de Rennes ;

Que contrairement à ce qui est soutenu, le dynamisme du réseau est avéré et attesté par la récompense attribuée par la fédération française de la franchise à un franchisé du réseau en 2011, récompense qu'avait obtenue M. Gennevee en 2007, gérant de la société Express Food ;

Qu'aucun élément de la procédure ne permet de retenir que la société Speed Rabbit Pizza n'aurait pas su adapter son savoir-faire à l'évolution des données économiques ;

Que c'est en vain que la société Express soutient que le manque de rentabilité de ses points de vente démontrerait la défaillance du franchiseur en matière de transfert de son savoir-faire et d'assistance alors qu'elle expliquait, elle-même, les difficultés financières qu'elle rencontrait dans un de ses points de vente par l'arrivée d'un concurrent et par des problèmes avec un membre de son personnel et, dans un autre de ses points de vente, par la transformation de la fréquentation du quartier devenu "un lieu de perdition - drogue - agression" ;

Que les actions judiciaires menées par la société Speed Rabbit Pizza contre ses concurrents potentiels témoignent des efforts du franchiseur pour protéger et favoriser son réseau ;

Que la société Express Food ne peut utilement soutenir que la société Speed Rabbit Pizza aurait "mis en danger" les franchisés en ne les avisant pas d'un courrier de la Direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations portant sur la nécessité de préciser sur les cartes l'origine des viandes bovines servies, la mise en danger alléguée n'étant pas établie ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que les manquements allégués à l'encontre de la société Speed Rabbit Pizza ne sont pas établis ;

Que ni l'existence d'une association créée par certains franchisés ni le "rapport d'audit" établi en mars 2010 sur le réseau ne permettent d'établir la réalité des dysfonctionnements du réseau et des manquements allégués du franchiseur à l'égard de la société Express Food ;

Que la société Express Food n'est dès lors pas fondée à se prévaloir de l'exception d'inexécution pour justifier le non-paiement des redevances et royalties à compter du mois de mars 2010 ;

Que la société Speed Rabbit Pizza qui a adressé à la société Express Food le 19 juillet 2011 une mise en demeure, demeurée sans effet, d'avoir à payer les redevances et royalties impayées est fondée à se prévaloir de l'acquisition au 19 août 2011 de la clause résolutoire prévue à l'article 12-1 des contrats de franchise ;

Que le jugement sera confirmé en ce qu'il a constaté que la société Express Food s'est affranchie des obligations qui sont les siennes aux termes des contrats de franchise des 14 septembre 2005 et a dit que la rupture des contrats de franchise est intervenue le 19 août 2011 aux torts exclusifs de la société Express Food et qu'ils ont été résiliés à cette date ;

Sur les demandes de la société Express Food

Considérant que la société Express Food sollicite une somme de 833 706 euros correspondant au montant des droits d'entrée et redevances qu'elle a versés à la Speed Rabbit Pizza depuis 2005 et pour lesquels elle soutient n'avoir reçu aucune contrepartie, le franchiseur n'ayant pas fourni de prestations, une somme de 50 000 euros en réparation de son préjudice moral résultant de l'atteinte à sa réputation, une somme de 2 308 108 euros représentant une année de chiffre d'affaires, au titre du préjudice que lui aurait occasionné le dysfonctionnement du réseau ; qu'elle sollicite en outre l'infirmation des décisions rendues en référé et la restitution de la somme de somme de 109 615,40 euros versée en exécution de l'ordonnance de référé confirmée en appel ;

Mais considérant qu'il résulte des motifs qui précèdent qu'aucune faute de la société Speed Rabbit Pizza n'est caractérisée, les contrats ayant été au contraire résiliés aux torts exclusifs de la société Express Food ;

Que le dysfonctionnement du réseau n'est pas établi pas plus que ne le sont l'atteinte alléguée à la réputation du franchisé et la réalité du préjudice moral allégué ;

Que les demandes de la société Express Food ne peuvent qu'être rejetées, y compris celle relative à la demande de restitution ;

Considérant que la demande de la société Express Food aux fins de mainlevée de l'opposition ne peut prospérer, l'opposition n'ayant pas été faite sans cause dès lors que la société Speed Rabbit Pizza est titulaire d'une créance dont le caractère certain est confirmé par le présent arrêt ;

Sur les demandes de la société Speed Rabbit Pizza

Considérant que la société Speed Rabbit Pizza sollicite l'application de l'article 12-4 des contrats de franchise aux termes duquel, en cas de résiliation du contrat aux torts et griefs du franchisé ou pour une cause imputable au franchisé, ce dernier devra acquitter à titre de dommages et intérêts forfaitairement évalués une somme égale aux royalties qui auraient du être réglées au franchiseur si le contrat avait été exécuté jusqu'à son terme, ces royalties étant calculées sur la base de la dernière année du chiffre d'affaires réalisé par le franchisé ;

Qu'elle se prévaut des chiffres d'affaires réalisés par la société Express Food en 2010 dans ses quatre points de vente pour réclamer la somme de 465 226 euros au titre des royalties qu'elle aurait dû percevoir si les contrats de franchise s'étaient poursuivis normalement jusqu'à leur terme (52 370 + 110 472 + 154 603 + 147 781) ;

Qu'elle soutient que le tribunal a, à tort, limité le montant de la réparation qui lui était due à la somme de 150 000 euros au motif qu'il s'agissait d'une clause pénale et fait valoir que son préjudice est considérable et que la société Express Food a continué à exploiter 3 points de vente sous sa propre enseigne Pizza in box avant de revendre l'un de ses fonds de commerce à un concurrent, à savoir le réseau "Boîte à pizza" ;

Qu'elle précise que la cession des fonds de commerce de la société Express Food s'est faite moyennant un prix de 800 000 euros et demande l'infirmation du jugement en ce qu'il a réduit le montant de l'indemnisation qui lui est due ;

Considérant que la société Express Food oppose que la société Speed rabbit food n'a subi aucun préjudice, qu'elle s'est réimplantée sur le territoire de Rennes en 2012, qu'elle n'a pas donné son accord à la cession des fonds de commerce à un cessionnaire qui souhaitait les exploiter sous l'enseigne "Speed Rabbit Pizza" et qui aurait par conséquent supporté les sommes qui lui sont réclamées, qu'elle a ainsi elle-même créé son préjudice ;

Considérant qu'il n'est pas contesté ni contestable que les dispositions de l'article 12-1 des contrats de franchise s'analysent en une clause pénale ; que c'est à juste titre que le tribunal a considéré que l'indemnité contractuelle prévue par ces dispositions, en cas de manquement du franchisé à ses obligations, était manifestement excessive au regard du préjudice effectivement subi par la société Speed Rabbit Pizza ; qu'ainsi qu'en justifie la société Express Food, la société Speed Rabbit Pizza n'a pas perdu le secteur de Rennes contrairement à ses affirmations puisqu'un nouveau franchisé "speed rabbit pizza" a ouvert une boutique peu de temps après la résiliation des contrats de franchise, bénéficiant du travail accompli pendant de nombreuses années par la société Express Food ; qu'elle n'a pas davantage eu à supporter les frais liés aux franchises pour les autres boutiques ;

Que le préjudice de la société Speed Rabbit Pizza aurait été réduit si elle avait accepté de donner son accord à la cession des fonds de commerce de la société Express Food à des cessionnaires prêts à adhérer à son réseau au réseau Speed Rabbit Pizza, y compris en renonçant à certaines de ses demandes ;

Qu'au regard de ces éléments, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Express Food à payer à la société Speed rabbit food la somme de 150 000 euros à titre d'indemnité de résiliation anticipée des contrats ;

Sur la demande de dommages-intérêts à l'encontre de M. Gennevee au titre du dénigrement

Considérant que la société Speed Rabbit Pizza invoque le courriel anonyme transmis le 16 avril 2010 à l'ensemble du réseau par le biais d'une adresse e-mail dénommée "[email protected]", contenant des critiques inadmissibles à son égard et constituant, vis-à-vis d'elle une véritable campagne de dénigrement, courriel qui a été adressé, selon les résultats de l'expertise qu'elle a fait réaliser, à partir de l'ordinateur de la société Express Food et par M. Gennevee en particulier ainsi que celui-ci l'admet dans ses écritures ; qu'elle sollicite la condamnation de M. Gennevee au paiement de la somme de 100 000 euros en réparation de son préjudice ;

Considérant que M. Gennevee, gérant de la société Express Food, ne conteste pas être l'auteur de ce courriel mais soutient qu'il s'agissait d'un mail humoristique destiné à entamer un début de discussion entre les franchisés et que la société Speed Rabbit Pizza ne démontre pas le préjudice qu'elle allègue ;

Mais considérant que le mail litigieux contient des formules dénigrantes puisqu'il y est indiqué notamment qu' "ils nous ont vendu du vent" "ces du vol" ou encore "nous ont veu que le siège redonne l'argent qu'ont leurs a donné" ; que les fautes d'orthographe qu'il contient n'ont pas pour effet de lui donner un caractère humoristique ; qu'adressé à l'ensemble du réseau de franchise, il a nécessairement eu pour but et effet de déstabiliser le franchiseur ;

Que M. Gennevee, qui précise qu'il n'a pas écrit ce mail dans l'intérêt de la société Express Food, n'a pas agi en qualité de représentant de cette société et a commis une faute personnelle séparable de ses fonctions de dirigeant dont il doit réparation à titre personnel sur le fondement de l'article 1382 du Code civil ;

Qu'il sera condamné au paiement de la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice subi par la société Speed Rabbit Pizza du fait du dénigrement dont elle a été victime ;

Que jugement sera infirmé en ce qu'il a retenu que le tribunal n'avait pas le pouvoir de juger une faute délictuelle et a débouté la société Speed Rabbit Pizza de sa demande au titre d'une faute délictuelle et contractuelle et l'a invité à mieux se pourvoir ;

Sur les autres demandes

Considérant que le jugement sera infirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles

Que la société Express Food sera condamnée à payer à la société Speed Rabbit Pizza la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile au titre des procédures de première instance et d'appel, aucune condamnation n'étant prononcée à l'encontre de M. Gennevee ;

Par ces motifs : LA COUR, Statuant par arrêt par défaut, Confirme le jugement, sauf en ce qu'il a débouté la société Speed Rabbit Pizza de sa demande au titre d'une faute contractuelle et délictuelle à l'encontre de M. Gennevee et en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles ; Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant, Déboute la société Express Food de ses demandes de dommages-intérêts, de restitution et de mainlevée des oppositions ; Condamne M. Gennevee à payer la somme de 10 000 euros à la société Speed Rabbit Pizza à titre de dommages-intérêts pour dénigrement ; Condamne la société Express Food à payer à la société Speed Rabbit Pizza la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ; Déboute les parties de toutes autres demandes sur ce même fondement ; Condamne la société Express Food aux dépens de première instance et d'appel ; Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.