Cass. com., 24 juin 2014, n° 12-20.705
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Baldelli Guirao Architectes (Sté)
Défendeur :
Air Architectures Ingénieries Recherches (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Espel
Rapporteur :
Mme Le Bras
Avocat général :
Mme Batut
Avocats :
SCP Coutard, Munier-Apaire, SCP Piwnica, Molinié
LA COUR : Sur le moyen unique, pris en ses troisième et quatrième branches : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 22 mars 2012), que la société Air Architectures Ingénieries Recherches (la société Air Architectures) constituée en 2000, exploite un cabinet d'Architectes en région parisienne sous le nom commercial "Air" ; qu'elle a procédé en 2001 à la réservation du nom de domaine air-architecture.com, puis déposé le 14 décembre 2005 à l'Institut national de la propriété industrielle la marque verbale Air, sous le n° 05-3399765, en classe 42, services d'architecture et de décoration intérieure ; que la société Air Architectes constituée en 2002 exerce sous ce nom commercial l'activité d'architecte sur le territoire de la région d'Aquitaine et a fait enregistrer le nom de domaine air-Architectes.com ; que la société Air Architectures l'ayant mise en demeure de cesser d'utiliser ce nom commercial et ce nom de domaine en violation de son droit de marque, la société Air Architectes l'a fait assigner en nullité de la marque verbale Air ; que la société Air Architectures a reconventionnellement demandé la condamnation de la société Air Architectes notamment pour concurrence déloyale ;
Attendu que la société Air Architectes fait grief à l'arrêt de lui avoir enjoint de procéder à la modification de sa dénomination sociale, de son nom commercial et de son nom de domaine en y supprimant l'expression "air" et de l'avoir condamnée à payer à la société Air Architectures une indemnité pour préjudice moral, alors, selon le moyen : 1°) que la profession d'architecte étant réglementée, seule doit être prise en compte, pour l'appréciation d'un éventuel risque de confusion entre deux sociétés d'architecture, la dénomination officiellement déposée à l'ordre des Architectes et telle qu'elle figure au tableau de l'ordre ; que dès lors, en se bornant à énoncer, pour considérer qu'il existait un risque de confusion entre la société Air Architectes et la société Air Architectures, que cette dernière utilisait le terme "air" sans points séparant les lettres et non, comme le soutenait la société Air Architectes sous la forme d'un acronyme, sans vérifier, ainsi qu'elle y était invitée, si cette société avait elle-même déclaré comme raison sociale à l'ordre des Architectes "Air Architecture" de sorte que seule cette dénomination officielle devait être prise en compte et que peu importaient les différentes appellations qu'elle avait ensuite utilisées, qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel, qui a statué par des motifs inopérants, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et 1383 du Code civil ; 2°) qu'au demeurant, la société Air Architectes faisait valoir, dans ses conclusions d'appel délaissées, qu'elle limitait son activité aux marchés publics, lesquels n'étaient attribués qu'à la suite d'un appel d'offres et d'une procédure destinée à assurer la transparence, de telle sorte que toute logique de prospection de clientèle devait être exclue et qu'il ne pouvait donc y avoir, entre elle et la société Air Architectures, le moindre risque de confusion dans l'esprit de ce public averti que sont les collectivités publiques territoriales soumises, non à une concurrence commerciale, mais aux règles strictes du Code des marchés publics; que dès lors la cour d'appel ne pouvait affirmer qu'il existait un risque de confusion du seul fait que la société Air Architectures prospectait de la clientèle sur l'ensemble du territoire national, y compris en vue de l'obtention de marchés publics, sans vérifier si le cadre des marchés publics excluait en lui-même tout risque de confusion de sorte qu'il importait peu que les deux sociétés exercent toutes deux en Aquitaine une activité de marchés publics exclusive de tout risque de confusion ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles 1382 et 1383 du Code civil ;
Mais attendu, d'une part, qu'ayant constaté l'utilisation par la société Air Architectures du mot Air, sans points séparant les lettres, et non sous la forme d'un acronyme, dès son immatriculation au registre du commerce et des sociétés le 3 octobre 2000 sous la dénomination sociale Air-Architectes, puis dans la nouvelle dénomination sociale Air Architectures qu'elle a adoptée en 2002, et relevé dans l'exercice de son pouvoir souverain qu'en tout état de cause, cette dénomination avait été adoptée avant la constitution de la société Air Architectes, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de prendre en compte, pour apprécier le risque de confusion, la dénomination déclarée à l'Ordre des Architectes laquelle n'est qu'un critère éventuel d'appréciation, a légalement justifié sa décision ;
Et attendu, d'autre part, que la prospection de clientèle en vue de l'obtention de marchés publics n'est pas en soi exclusive d'un risque de confusion ;
D'où il suit que le moyen, inopérant en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
Et attendu que les autres griefs ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi.