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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 11, 16 janvier 2015, n° 12-13539

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Rem (SARL)

Défendeur :

Sipp (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Touzery-Champion

Conseillers :

Mmes Prigent, Volte

Avocats :

Mes Bernabe, Samson, Chesneau, Faure

T. com. Melun, du 18 juin 2012

18 juin 2012

La société Rem qui déploie son activité dans le domaine de la sécurité depuis 1997, a assigné le 27 mai 2011 la société Sipp exerçant sous le nom commercial de " Groupe SPSP " pour la voir condamner à lui payer la somme de 150 000 euro à titre de dommages intérêts et 10 000 euro au visa de l'article 700 du Code de procédure civile en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale commis à son encontre.

Par jugement du 18 juin 2012, le Tribunal de commerce de Melun a débouté la société Rem de l'ensemble de ses demandes.

La société Rem a interjeté appel.

La société Rem aux termes de ses dernières conclusions en date du 13 novembre 2014 demande à la cour de voir :

- confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la société Sipp Groupe SPSP,

- infirmer pour le surplus,

- vu les articles 1382 et 1383 du Code civil, et L. 121-1 et L. 120-1 du Code de la consommation, enjoindre à la société Sipp Groupe SPSP de justifier par tout moyen de la destruction effective des brochures commerciales du Groupe SPSP faisant référence à la société Rem sous astreinte de 1 000 euro/jour de retard à compter de la signification de l'arrêt,

- condamner la société Sipp Groupe SPSP à lui payer les sommes de 150 000 euro à titre de dommages intérêts et de 13 000 euro au visa de l'article 700 du Code de procédure civile,

- ordonner l'affichage de l'arrêt sur l'ensemble des portes d'accès à tous les locaux de la société Sipp Groupe SPSP pendant une durée de 3 mois à compter de la signification de l'arrêt sous peine de 1 000 euro par infraction constatée.

Vu les dernières conclusions de la société Sipp en date du 19 novembre 2014 tendant à voir :

- déclarer la société Rem irrecevable en ses demandes formées à l'encontre de la société Sipp pour défaut d'appel à la présente instance de la société SPSP Contact Médiation,

Au fond, subsidiairement,

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Rem de l'ensemble de ses demandes,

En tout état de cause,

- condamner la société Rem à payer la somme de 13 000 euro au visa de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.

Il est expressément référé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits, de leur argumentation et de leurs moyens.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Considérant que la société Rem fait grief à la société Sipp Groupe SPSP d'avoir diffusé une brochure dans laquelle elle apparaît comme faisant partie du Groupe SPSP alors qu'elle est indépendante ;

Considérant que la société Sipp Groupe SPSP soutient qu'elle n'est pas l'auteur de la brochure litigieuse et que la société Rem tente de faire endosser la responsabilité de cette concurrence déloyale à la société Sipp plutôt qu'à la société SPS contact médiation qui est à l'origine de cette plaquette ; que la société Sipp se déclare non concernée par la plaquette dont elle n'est pas à l'origine de la création ;

Que sur la brochure apparaît la photo de M. Aoun Sebaiti gérant de la société SPSP Contact Médiation ;

Mais, considérant que la brochure porte en bas de la première page la mention " Groupe SPSP la protection des biens et des personnes " ; qu'au bas de la page à en tête de " savoir et faire savoir " est mentionné le nom de la société Rem accompagnée d'une adresse et d'un numéro de téléphone, que sur la page intitulée " mot du directeur " figure effectivement la photo de M. Aoun Sebaiti accompagnée de la mention de sa qualité de Directeur général du groupe SPSP depuis 1999 ;

Considérant que la qualité de gérant de la société SPSP Contact Médiation n'apparaît pas, pas plus que le nom même de cette société ;

Considérant en outre que sur interpellation du conseil de la société Rem, Mme Laouini, gérante de la société Sipp Groupe SPSP a répondu le 22 avril 2011 que " notre société n'a jamais eu l'intention de porter atteinte à la réputation de votre cliente. Les mentions incriminées dans votre courrier ne peuvent pas, à notre sens, conduire à un détournement de clientèle, ni à la moindre confusion, les plaquettes sont des échantillons qui ont été diffusés de manière très limitée et circonscrite à titre de test " ;

Considérant qu'il résulte de ces constatations que la société SPSP Contact Médiation n'est pas concernée par cette procédure et que la société Rem n'avait pas à la mettre en cause son existence n'apparaissant nulle part sur la brochure litigieuse que même si M. Aoun Sebaiti est le gérant de cette société, cette qualité n'apparaît pas puisqu'il se présente comme le directeur du groupe SPSP ;

Considérant que le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir de la société Sipp Groupe SPSP ;

Considérant que la société Rem soutient que, la conception, l'impression et la diffusion par la société Sipp Groupe SPSP de la plaquette commerciale " une sécurité qui vous rassure " constituent : une concurrence illégale et une concurrence illicite, les agissements s'analysant comme du parasitisme au visa des articles L. 120-1 et L. 121-1 du Code de la consommation ; que la violation par la société Sipp Groupe SPSP des-dits articles constitue une faute délictuelle engageant sa responsabilité au visa de l'article 1382 du Code civil et en prétendant faussement que la société Rem fait partie intégrante du Groupe SPSP, la société Sipp Groupe SPSP a utilisé indûment l'identité, la réputation et l'excellence reconnues de la société Rem ce qui constituent des actes de parasitisme ;

Considérant que la société Sipp Groupe SPSP soutient que les deux sociétés n'étant pas concurrentes, l'une la société Sipp étant une société de prestation dans la sécurité de lieux publics alors que l'autre, la société Rem est spécialisée dans les formations dans le domaine de la sécurité ; que le parasitisme n'est pas non plus démontré, que la société Rem se contente d'affirmer que la société intimée a utilisé indûment l'identité, la réputation et l'excellence de la société Rem ; qu'enfin aucun préjudice n'est démontré en lien avec une quelconque faute ;

Considérant que si les sociétés ne sont pas concurrentes stricto sensu, elles sont complémentaires dans la mesure où la société Sipp Groupe SPSP qui assure des services de protection vante les qualités de ses agents qui sont recrutés et formés selon des procédures très strictes ; qu'en présentant la société Rem comme faisant partie de son groupe en charge de la formation elle commet un acte de pratique commerciale contraire à l'article L. 121-1 du Code de la consommation, l'affirmation de la participation de la société Rem à son groupe étant fausse ; que cette attitude a consisté à utiliser le nom d'une société renommée dans sa spécialité ayant pour but de donner du crédit supplémentaire à sa propre structure ;

Que cet objectif est clairement exprimé dans le courrier du 22 avril 2011 précité, la gérante de la société Sipp Groupe SPSP indiquant que " les plaquettes sont des échantillons qui ont été diffusés de manière très limitée et circonscrite à titre de test " ; que cette affirmation démontre que la société Sipp Groupe SPSP avait pour objectif si la société Rem n'était pas intervenue de diffuser plus largement les brochures litigieuses, la notion de test impliquant celle d'essai afin de constater les retombées en terme de clientèle ;

Considérant que la société Rem a nécessairement subi un préjudice du fait de ces agissements qui la présentait pendant plusieurs années comme une simple branche d'un autre groupe auquel elle n'appartient pas alors qu'elle est une société indépendante et qu'elle aurait pu de ce fait perdre une clientèle abusée par ces agissements ;

Considérant que la société Sipp Groupe SPSP sera en conséquence condamnée à verser à la société Rem la somme de 50 000 euro à titre de dommages intérêts ;

Considérant que la société Rem sollicite de la cour qu'elle enjoigne à la société Sipp Groupe SPSP qu'elle justifie de la destruction totale des brochures litigieuses sous astreinte de 1 000 euro/jour de retard à compter de la signification de l'arrêt ;

Mais, considérant que la société Sipp Groupe SPSP ayant affirmé depuis le 22 avril 2011 avoir détruit l'ensemble des plaquettes existantes, aucune autre preuve ne peut être matériellement apportée de cette destruction ;

Considérant que la société Rem sollicite enfin l'affichage de la décision sur les portes d'accès à tous les locaux de la société Sipp Groupe SPSP ;

Mais, considérant que l'affichage de la décision n'apparaît pas justifiée ;

Considérant qu'il sera fait application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Par ces motifs, Statuant contradictoirement, Confirme le jugement en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir formée par la société Sipp Groupe SPSP à l'encontre de la société Rem, Infirme pour le surplus, A nouveau, Dit que la société Sipp Groupe SPSP a commis des actes de concurrence déloyale en utilisant indûment l'identité de la société Rem présentée comme faisant partie intégrante de son groupe, Condamne en conséquence la société Sipp Groupe SPSP à verser à la société Rem la somme de 50 000 euro à titre de dommages intérêts, Condamne la société Sipp Groupe SPSP à verser la somme de 10 000 euro au visa de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la société Sipp Groupe SPSP aux dépens.