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Décisions

Cass. com., 10 février 2015, n° 13-27.225

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Toulouse (Consorts), Constructions mécaniques Toulouse (SARL)

Défendeur :

Garbolino Europe (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Darbois

Avocat général :

Mme Pénichon

Avocats :

SCP Lévis, SCP Hémery, Thomas-Raquin

CA Paris, du 18 sept. 2013

18 septembre 2013

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 septembre 2013), que la société Constructions mécaniques Toulouse (la société CMT), titulaire du modèle n° 0075277, constitué d'un moulinet de canne à pêche dénommé Ritma 72 Evolut, et se prévalant de droits d'auteur sur un modèle de moulinet dénommé Ritma 71-72, dont la protection au titre d'un dépôt était expirée, a assigné la société Garbolino Europe (la société Garbolino), qui commercialisait un modèle de moulinet dénommé GTR, en contrefaçon du modèle n° 0075277, pour atteinte à ses droits d'auteur et concurrence déloyale ; que Mme Toulouse née Ferran et MM. Marc et Bernard Toulouse (les consorts Toulouse) sont intervenus volontairement à la procédure ;

Sur le premier moyen : - Attendu que la société CMT et les consorts Toulouse font grief à l'arrêt de rejeter la demande de la société CMT au titre de la contrefaçon de droits d'auteur alors, selon le moyen, que le caractère propre d'un modèle implique son originalité, c'est-à-dire l'empreinte de la personnalité de son auteur ; qu'ainsi en considérant d'une part que le moulinet revendiqué apparaît avoir une physionomie propre, d'autre part que sa combinaison ne s'avérerait pas de nature à traduire un réel parti pris esthétique empreint de la personnalité de son auteur, la cour d'appel s'est contredite en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui, procédant à l'examen d'ensemble de ses divers éléments, a constaté que le moulinet revendiqué paraissait avoir une physionomie propre au regard d'autres moulinets, même si certains des éléments qui le composent sont connus ou appartiennent au fonds commun de l'univers du moulinet ou du moulinet pour la pêche "au toc", ne s'est pas contredite en relevant également que, néanmoins, le choix de faire passer, au sortir d'un moulinet de pêche, le fil dans un prolongateur, banalement en forme de tube cylindrique, afin d'éviter qu'il ne s'emmêle, même associé à l'apposition sur un côté du moulinet de parties évidées, lesquelles s'imposent dans une structure fermée amenée à contenir du fil pouvant être mouillé, comme de positionner à l'arrière des éléments permettant le fonctionnement du moulinet, ne saurait suffire à conférer à l'ensemble ainsi réalisé, dont la protection industrielle est expirée, une protection au titre du droit d'auteur dès lors que, même si cette combinaison procède de choix pour partie arbitraires, elle ne s'avère pas de nature à traduire un réel parti-pris esthétique empreint de la personnalité de son auteur ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen : - Attendu que la société CMT et les consorts Toulouse font grief à l'arrêt de rejeter l'ensemble des demandes de la société CMT fondées sur la contrefaçon du modèle n° 0075277 alors, selon le moyen, que l'imitation constitutive de contrefaçon s'apprécie selon les ressemblances des modèles en cause, non leurs différences ; qu'ainsi, en relevant que les modèles litigieux ne présenteraient pas les mêmes excavations sur leurs parties centrales, que l'embout des deux manettes seraient différents et que la découpe et le positionnement des excavations du modèle de la société CMT, associés à un large renflement central arrondi, évoquerait un mouvement rotatif facilité, effet inexistant sur le modèle de la société Garbolino, sans examiner, comme elle y était invitée, les ressemblances des modèles en cause et tenant à leur volume, leur couleur, leur bobine, leurs bossages externes sur l'arrière des boîtiers, leur prolongateur amovible, le relief et les dimensions de leurs faces internes ainsi que leurs faces externes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 521-1 du Code de la propriété intellectuelle ;

Mais attendu que l'arrêt relève, d'abord, par motifs propres et adoptés, que le modèle de la société CMT se caractérise en ce que les excavations de sa partie centrale ne sont pas géométriques et en ce que l'embout des manettes est rouge et de forme ronde tandis que, sur le modèle commercialisé par la société Garbolino, les excavations sont réparties autour du cercle extérieur, géométriquement, en forme de rectangle et, dans le second cercle, en forme de demi-cercle, et l'embout des manettes est noir et de forme ovale ; qu'il relève, ensuite, que la comparaison des moulinets en présence montre que le positionnement et la découpe très particulière des excavations en demi-cercle du côté opposé à la manivelle, associés à la présentation d'un large renflement central arrondi, évoquent, sur le modèle déposé, un mouvement rotatif facilité et retient que cet effet dominant, immédiatement perceptible mais totalement inexistant dans le modèle incriminé, ne peut que produire sur l'observateur averti une impression visuelle d'ensemble différente ; que la cour d'appel, qui a procédé à la recherche prétendument omise en considérant les produits en leur ensemble, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le troisième moyen : - Attendu que la société CMT et les consorts Toulouse font grief à l'arrêt de rejeter la demande de la société CMT au titre de la concurrence déloyale et du parasitisme alors, selon le moyen, que le fait de commercialiser une gamme de produits qui se rapproche par sa composition d'une gamme de produits concurrents constitue un acte de concurrence déloyale ; qu'ainsi, en s'abstenant de répondre au moyen tiré de la commercialisation par la société Garbolino de produits se rapprochant par leur composition de la gamme des produits de la société CMT, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

Mais attendu que le fait de commercialiser une gamme de produits se rapprochant par leur composition d'une gamme de produits concurrents ne suffit pas à caractériser un acte de concurrence déloyale ; que le moyen, qui postule le contraire, n'est pas fondé ;

Par ces motifs, Rejette le pourvoi.