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Décisions

CA Paris, Pôle 1 ch. 2, 5 mars 2015, n° 13-21073

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Prolex (SAS)

Défendeur :

Directeur Départemental de la Protection des Populations, Ministère Public

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Charlon

Conseillers :

Mmes Louys, Graff-Daudret

Avocats :

Mes Morain, Saidji

TGI Paris, du 18 oct. 2013

18 octobre 2013

FAITS ET PROCEDURE :

La SAS Prolex, ayant pour dirigeant M. Ozyuruk, exploite les sites Internet www.infos-siret.fr et www.info-kbis.fr. A compter du mois de mars 2013 et jusqu'en juin 2013, la société Prolex a adressé, sur l'ensemble du territoire français, 121 000 prospects.

Par acte du 22 juillet 2013 le Directeur départemental de la protection des populations de Paris (DDPP) a fait délivrer une assignation en référé d'heure à heure à la société Prolex pour notamment, faire reconnaître le caractère déloyal et trompeur des documents de prospection "info-kbis " et " info-siret " intitulés " Fiche d'enregistrement " utilisés par la société Prolex à destination des professionnels, faire enjoindre à la société Prolex de cesser de diffuser et d'utiliser ces documents sous astreinte de 10 000 euro par jour de retard à compter du lendemain de la signification de l'ordonnance de référé sollicitée et obtenir la publication de ladite ordonnance de référé sur la page d'accueil des sites Internet www.info-kbis.fr et www.info-siret.fr ainsi que dans le journal Le Parisien.

Par ordonnance contradictoire du 18 octobre 2013, le juge des référés du Tribunal de grande instance de Paris a :

- ordonné à la société Prolex de cesser de diffuser et d'utiliser les supports publicitaires trompeurs annexés à l'acte introductif d'instance ainsi que des supports modifiés en cours d'instance et, ce sous peine d'astreinte de 10 000 euro par infraction constatée dès le lendemain de la signification de l'ordonnance,

- ordonné la publication de l'ordonnance sur la page d'accueil des sites Internet www.info-kbis.fr et www.info-siret ainsi que dans le journal Le Parisien,

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- condamné la société Prolex aux dépens,

- rappelé que l'exécution provisoire était de droit.

La SAS Prolex a interjeté appel de cette décision le 31 octobre 2013.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 21 janvier 2015.

Par dernières conclusions du 13 janvier 2015, auxquelles il convient de se reporter, la société Prolex demande à la cour de :

A titre principal,

- constater le défaut de motivation du jugement rendu,

En conséquence,

- annuler l'ordonnance de référé du 18 octobre 2013,

A titre subsidiaire,

- constater le défaut de trouble manifestement illicite,

- constater le défaut de péril imminent,

En conséquence,

- infirmer l'ordonnance de référé du 18 octobre 2013,

- débouter purement et simplement la DDPP de ses demandes, fins et conclusions, et de la dire mal fondée,

En tout état de cause,

- condamner la DDPP à verser la somme de 5 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.

Elle fait valoir que l'ordonnance de référé doit être annulée pour défaut de motivation ; qu'en effet, l'injonction prononcée par le juge des référés vise " les supports publicitaires trompeurs annexés à l'acte introductif d'instance ainsi que des supports modifiés en cours d'instance " ; qu'il n'apparaît nulle part dans l'ordonnance de référé que le juge a procédé à l'analyse des supports dont il interdit la diffusion ; que la motivation porte uniquement sur les supports annexés à l'assignation de la DDPP alors que l'injonction prétend viser d'autres supports ;

Que l'ordonnance de référé doit être infirmée pour absence de trouble manifestement illicite et de péril imminent ; qu'en effet, son offre n'est pas constitutive de pratique commerciale trompeuse ; que la présentation n'est pas de nature à induire les professionnels en erreur sur l'expéditeur et que les indications figurant sur les formulaires sont détaillées et non équivoques quant à la nature publicitaire du document ; qu'en outre, son offre n'est pas déloyale ; qu'enfin, il n'existe pas de péril imminent car l'offre publicitaire a déjà été soumise à deux autres juridictions : le tribunal correctionnel qui a relaxé les dirigeants de Prolex et le juge commercial qui a protégé le support publicitaire litigieux en condamnant des sociétés concurrentes pour concurrence déloyale et parasitisme.

Par dernières conclusions du 18 décembre 2014, auxquelles il convient de se reporter, le Directeur départemental de la protection des populations de Paris demande à la cour de :

- confirmer l'ordonnance de référé rendue en date du 18 octobre 2013 par Madame la Présidente du Tribunal de grande instance de Paris en ce qu'elle a retenu le trouble manifestement illicite résultant des envois en nombre de pseudo-formulaires ayant d'apparence de factures à acquitter par ses destinataires sous les entêtes " info-Kbis" et " info-Siret ",

Statuant à nouveau pour le surplus,

- ordonner, aux frais de la société Prolex, et sous astreinte de 1 000 euro par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la signification qui lui sera faite à partie de l'arrêt à intervenir, la publication du communiqué judiciaire suivant : en titre de caractères gras de 2 cm de hauteur : " Communiqué judiciaire " en texte après ce titre, en caractères d'imprimerie 11 : " Par arrêt en date du , la Cour d'appel de Paris a fait interdiction à la société Prolex de poursuivre l'expédition auprès de toute personne des documents diffusés sous les entêtes info-Kbis et info-Siret présentés comme étant des " Fiche d'Enregistrement ". Cette interdiction est fondée sur le constat de leur caractère trompeur et de nature à induire en erreur leurs destinataires en leur laissant croire qu'ils seraient redevables d'une somme envers la société Prolex ",

- juger que cette publication devra intervenir : 1°) dans la prochaine édition de l'hebdomadaire Le Parisien suivant la date de cette signification à partie ; 2°) en page d'accueil des sites Internet www.info-kbis.fr et www.info-siret.fr pendant une durée d'une année à compter de la signification de l'arrêt d'appel à intervenir, et ce sous astreinte de 1 000 euro par jour de retard à compter de la signification à partie de cet arrêt,

- ordonner à la société Prolex de cesser de diffuser et d'utiliser les documents trompeurs ayant l'apparence d'une facture sous entêtes " info-Kbis " et " info-Siret ", et ce sous astreinte de 100 000 euro par infraction constatée dès le lendemain de la signification à partie de l'arrêt à intervenir,

- condamner la société Prolex à lui payer, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, la somme de 5 000 euro, ainsi qu'aux dépens, dont distraction au profit de la SCP Saidji & Moreau conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Il réplique que la société Prolex commet des pratiques commerciales trompeuses au sens du Code de la consommation ; que la présentation de cette dernière est de nature à induire en erreur sur l'identité du professionnel ; qu'elle crée une confusion avec le registre du commerce et des sociétés tenu auprès des greffes des tribunaux de commerce car ses fiches de renseignement comportent le sigle " info-kbis " ou " info-siret ", avec " l'information sur les entreprises du registre du commerce et des sociétés ", laissant penser au destinataire que le document émane du greffe du tribunal de commerce ;

Que ses fiches de renseignement sont en réalité des bons de commande déguisés sous l'apparence d'une facture émanant d'un organisme officiel ;

Que la facture intitulée " Fiche d'enregistrement " envoyée aux créateurs d'entreprises est perçue par les instances représentatives du secteur de la publicité comme constituant une pratique commerciale déloyale.

Par conclusions du 21 janvier 2015, le Ministère Public estime que les demandes de la Direction départementale de la protection des populations de Paris doivent être accueillies.

Sur ce, LA COUR,

Sur la validité de l'ordonnance :

Considérant que la société Prolex invoque la violation des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, en soutenant que le juge des référés a repris les termes de la demande de la Direction départementale de la protection des populations de Paris, pour statuer sans prendre la peine d'examiner la conformité des formulaires auxquels il fait référence dans son dispositif, la motivation portant uniquement sur les supports annexés à l'assignation du DDPP alors que l'injonction prétend viser d'autres supports ;

Considérant, cependant, que l'instance a été introduite sur le fondement de documents annexés à l'assignation délivrée par le DDPP, que le premier juge a analysés au terme de plusieurs pages de motivation ; que la société Prolex précise avoir présenté à la DDPP un projet de nouveaux formulaires " au cours du délibéré " ;

Qu'il est pour le moins surprenant que l'appelante déplore " 'qu'aucun document autre' (que les deux documents objets de la saisine du juge des référés) n'ait été soumis au débat contradictoire, tout en précisant avoir elle-même présenté à la DDPP un projet de nouveaux formulaires " au cours du délibéré ", sans qu'il résulte de la décision entreprise que le premier juge ait autorisé la production d'une note ou de pièces en délibéré, sur le fondement de l'article 445 du Code de procédure civile ;

Qu'il apparaît, aux termes de l'ordonnance, que l'affaire, évoquée à l'audience du 26 août 2013, a été renvoyée à l'audience du 13 septembre 2013 " pour recherche d'un accord " ;

Que le DDPP produit, devant la cour, les documents " info-kbis " et " info-Siret " joints à l'assignation de première instance, le formulaire " info-Siret " soumis au juge des référés le 23 août 2013 et les formulaires " info-Kbis " et " info-Siret " présentés au juge des référés à l'audience du 13 septembre 2013, sans que l'absence de discussion contradictoire de ces documents aux cours des audiences intervenues ne soit dénoncée dans le dispositif des conclusions de l'appelante ;

Qu'en ordonnant à la société Prolex, dans le dispositif de l'ordonnance, de cesser de diffuser et d'utiliser les supports publicitaires trompeurs annexés à l'acte introductif d'instance, ainsi que des supports modifiés en cours d'instance, le premier juge, qui a fait référence, dans la motivation, aux documents présentés " en cours de procédure ", et en retenant que la société Prolex avait " modifié depuis la première audience la présentation du document, en ajoutant au terme " information " celui de " promotion " se refusant néanmoins à utiliser celui plus transparent de " publicité " soit dans l'entête soit à tout emplacement de son choix au recto mais toujours en caractères apparents ", a motivé sa décision au vu de l'ensemble des pièces régulièrement produites, y compris après l'assignation ;

Qu'ainsi, il a satisfait aux exigences du texte susvisé et que l'ordonnance n'est pas affectée de nullité ;

Sur le bien-fondé

Considérant qu'en vertu de l'article 809, alinéa 1er, du Code de procédure civile, le juge des référés peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ;

Sur les pratiques commerciales trompeuses :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 121-1 du Code de la consommation,

" I.- Une pratique commerciale est trompeuse si elle est commise dans l'une des circonstances suivantes :

1° Lorsqu'elle crée une confusion avec un autre bien ou service, une marque, un nom commercial, ou un autre signe distinctif d'un concurrent ;

2° Lorsqu'elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur l'un ou plusieurs des éléments suivants :

a) L'existence, la disponibilité ou la nature du bien ou du service ;

b) Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, à savoir : ses qualités substantielles, sa composition, ses accessoires, son origine, sa quantité, son mode et sa date de fabrication, les conditions de son utilisation et son aptitude à l'usage, ses propriétés et les résultats attendus de son utilisation, ainsi que les résultats et les principales caractéristiques des tests et contrôles effectués sur le bien ou le service ;

c) Le prix ou le mode de calcul du prix, le caractère promotionnel du prix et les conditions de vente, de paiement et de livraison du bien ou du service ;

d) Le service après-vente, la nécessité d'un service, d'une pièce détachée, d'un remplacement ou d'une réparation ;

e) La portée des engagements de l'annonceur, la nature, le procédé ou le motif de la vente ou de la prestation de services ;

f) L'identité, les qualités, les aptitudes et les droits du professionnel ;

g) Le traitement des réclamations et les droits du consommateur ;

3° Lorsque la personne pour le compte de laquelle elle est mise en œuvre n'est pas clairement identifiable.

II. -Une pratique commerciale est également trompeuse si, compte tenu des limites propres au moyen de communication utilisé et des circonstances qui l'entourent, elle omet, dissimule ou fournit de façon inintelligible, ambiguë ou à contretemps une information substantielle ou lorsqu'elle n'indique pas sa véritable intention commerciale dès lors que celle-ci ne ressort pas déjà du contexte.

Lorsque le moyen de communication utilisé impose des limites d'espace ou de temps, il y a lieu, pour apprécier si des informations substantielles ont été omises, de tenir compte de ces limites ainsi que de toute mesure prise par le professionnel pour mettre ces informations à la disposition du consommateur par d'autres moyens.

Dans toute communication commerciale constituant une invitation à l'achat et destinée au consommateur mentionnant le prix et les caractéristiques du bien ou du service proposé, sont considérées comme substantielles les informations suivantes :

1° Les caractéristiques principales du bien ou du service ;

2° L'adresse et l'identité du professionnel ;

3° Le prix toutes taxes comprises et les frais de livraison à la charge du consommateur, ou leur mode de calcul, s'ils ne peuvent être établis à l'avance ;

4° Les modalités de paiement, de livraison, d'exécution et de traitement des réclamations des consommateurs, dès lors qu'elles sont différentes de celles habituellement pratiquées dans le domaine d'activité professionnelle concerné ;

5° L'existence d'un droit de rétractation, si ce dernier est prévu par la loi.

III.- Le I est applicable aux pratiques qui visent les professionnels. " ;

Que selon l'article L. 121-1-1 du même Code : " Sont réputées trompeuses au sens de l'article L. 121-1 les pratiques commerciales qui ont pour objet :

" 20° D'inclure dans un support publicitaire une facture ou un document similaire demandant paiement qui donne au consommateur l'impression qu'il a déjà commandé le produit ou le service commercialisé alors que tel n'est pas le cas " ;

Considérant que les deux documents produits par la DDPP, à l'appui de l'assignation, comprennent au recto :

- En caractères gras de grande taille le nom commercial de la société Prolex à savoir

" Info-KBIS " ou " Info-SIRET " suivi de la mention " L'information sur les entreprises du registre du commerce et des sociétés " ;

- Suivi de l'intitulé en tête de page et caractères majuscules et en gras " fiche d'enregistrement ", auquel succèdent des informations concernant la société prospectée puis un encadré type facture mentionnant le tarif Montant HT TVA 19,6 % Montant TTC accompagné d'un " Coupon à détacher et à renvoyer pour enregistrement " à l'adresse d'" Info-kbis " ou " Info-Siret ", précédée, à côté du Tarif, de l'indication, en caractères gras, " Merci de nous retourner le coupon ci-dessous sous 8 jours avec son règlement : Par chèque (souligné) (à renvoyer avec le coupon ci-dessous) " ;

Considérant que le premier juge a justement estimé que ces documents, par leur présentation et la combinaison des éléments précités, étaient incontestablement de nature à laisser croire aux entreprises prospectées qu'elles devaient payer le prix demandé au titre de leur enregistrement au registre du commerce et des sociétés, donc d'un service déjà commandé, étant souligné que l'examen des " Fiches d'enregistrement " litigieuses montre que la société Prolex adresse systématiquement ces " fiches " aux sociétés qui viennent de s'immatriculer auprès du registre du commerce et des sociétés tenus par les greffes des tribunaux de commerce, ou au titre d'une commande concomitante de son enregistrement au registre du commerce et des sociétés, ce qui, dans les deux cas, créé en outre une confusion sur l'émetteur du document, en laissant penser au destinataire qu'il s'agit d'un envoi émanant du greffe du tribunal de commerce ;

Que l'exigence d'un " règlement sous 8 jours " accrédite la croyance erronée d'une dette contractée, et contribue à relâcher la vigilance des entreprises sollicitées, le Jury de Déontologie Publicitaire, qui statue sous l'égide de l'Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP), ayant, dans une décision du 3 octobre 2013 publiée le 23 octobre 2013, lui aussi considéré que : " le document en cause se présente dans sa forme et son contenu de façon identique à une facture. Il ne permet pas au public d'identifier son caractère de simple offre ou même simplement publicitaire " ;

Que cette confusion est clairement étayée par les pièces produites par la DDPP, de nombreux professionnels, dont des chambres de commerce et d'industrie, mettant en garde, sur des sites Internet, sur le fait que " Info-Kbis est un service de publicité par annuaire non obligatoire.

Il ne doit pas être confondu avec votre KBIS, qui lui est délivré par le Greffe du TC " ;

Que le caractère trompeur sur la personne pour le compte de laquelle la publicité litigieuse est mise en œuvre est d'autant plus patent que celle-ci ne comporte pas d'identification claire de la société Prolex comme en étant l'auteur ; qu'en effet, si l'appelante invoque deux mentions relatives à son nom figurant au recto du formulaire, celle-ci apparaissent, l'une écrite sur le côté droit en vertical, l'autre en bas sous une première ligne du " coupon à détacher ", en caractères minuscules, à peine lisibles, insuffisamment visibles pour permettre l'identification rapide, alors que les autres indications en gros caractères, et pour plusieurs, en gras, et dans une présentation aérée à l'inverse du recto, donnent l'impression d'une impérieuse nécessité de paiement " sous 8 jours " à un organisme officiel (greffe du tribunal de commerce) ;

Qu'il est à souligner que la société Prolex indique (non sans contradiction lorsqu'elle vise par ailleurs les grandes entreprises telles EADS) qu'elle " n'adresse ses offres qu'aux sociétés nouvellement immatriculées ou dont le KBIS a enregistré une modification " ;

Que la même observation peut être faite, pour les mentions, toutes formulées en petits voire très petits caractères, figurant au verso, qui ne permettent d'identifier clairement ni l'émetteur du document, ni sa nature de document publicitaire et les services proposés, l'accent étant porté sur le terme " Enregistrement ", mis en exergue et repris plusieurs fois, de façon très lisible au recto, dans le titre du document mais aussi dans l'adresse de retour " Service d'enregistrement " ;

Que le premier juge a retenu, à juste titre, par les motifs précités, que les modifications successives des formulaires incriminés ne sont pas de nature à priver les publicités de la société Prolex de leur caractère trompeur ;

Que le fait que la publicité litigieuse soit destinée aux professionnels, et ait été (notamment) adressée à de " grandes entreprises ", est sans incidence, dès lors que les textes précités ont étendu la protection légale visant initialement les consommateurs aux professionnels ;

Que, contrairement à ce que soutient l'appelante, la présentation et les indications au recto et au verso du formulaire ne sont ni claires ni non équivoques ; que l'objet d'offre publicitaire, diffusée par un prestataire privé, sous toutes ses formes successives, est difficilement décelable et que ces faits sont constitutifs d'une pratique commerciale trompeuse, et d'un trouble manifestement illicite au sens des textes précités ;

Sur les pratiques commerciales déloyales :

Considérant que selon l'article L. 120-1 du Code de la consommation, " les pratiques commerciales déloyales sont interdites. Une pratique commerciale est déloyale lorsqu'elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu'elle altère, ou est susceptible d'altérer de manière substantielle, le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l'égard d'un bien ou d'un service.

Le caractère déloyal d'une pratique commerciale visant une catégorie particulière de consommateurs ou un groupe de consommateurs vulnérables en raison d'une infirmité mentale ou physique, de leur âge ou de leur crédulité s'apprécie au regard de la capacité moyenne de discernement de la catégorie ou du groupe.

II. -Constituent, en particulier, des pratiques commerciales déloyales les pratiques commerciales trompeuses définies aux articles L. 121-1 et L. 121-1-1 et les pratiques commerciales agressives définies aux articles L. 122-11 et L. 122-11-1. " ;

Que ces dispositions ne s'applique qu'aux seuls consommateurs non professionnels ;

Que l'intimé ne développe aucun moyen à l'appui de son allégation selon laquelle, à défaut d'application de l'article L. 120-1 aux professionnels, la pratique litigieuse devra être jugée comme contraire aux dispositions des articles 1108 et suivants ainsi que 1134 du Code civil ;

Qu'en toute hypothèse, les mesures prononcées sont de nature à mettre fin au trouble manifestement illicite fondé sur les pratiques commerciales trompeuses, sans qu'il y ait lieu d'examiner ce trouble au titre d'une autre qualification ;

Sur les mesures provisoires :

Considérant que le premier juge ayant ordonné une mesure de cessation de diffusion et d'utilisation des supports litigieux, sous peine d'astreinte de 10 000 euro par infraction constatée, il convient de modifier les termes de la mesure de cessation des pratiques ;

Qu'il y a lieu, par ailleurs, de relever que la société Prolex n'apporte aucun démenti sérieux aux éléments fournis par le DDPP faisant état d'un chiffre d'affaires de cette société, pour 2013, de plus de 1, 5 millions d'euro pour neuf mois d'activité ;

Qu'au regard de ce constat, l'astreinte sera augmentée et qu'il sera ordonné la communication d'un communiqué judiciaire, dans les termes précisés au dispositif, l'ensemble de ces mesures étant précisé dans le dispositif du présent arrêt ;

Par ces motifs, Rejette la demande d'annulation de l'ordonnance entreprise, Confirme l'ordonnance, Y ajoutant, Ordonne à la SAS Prolex de cesser de diffuser et d'utiliser les documents trompeurs ayant l'apparence d'une facture sous entêtes " info-Kbis " et " info-Siret " et ce, sous astreinte de 100 000 euro par infraction constatée, dès le lendemain de la signification du présent arrêt, Ordonne, aux frais de la SAS Prolex, et sous astreinte de 1 000 euro par jour de retard passé un délai de quinze jours à compter de la signification du présent arrêt, la publication du communiqué judiciaire suivant : En titre de caractères gras de 2 cm de hauteur : " Communiqué judiciaire " En texte après titre, en caractères d'imprimerie 11 : " Par arrêt du 5 mars 2015, la Cour d'appel de Paris a fait interdiction à la société Prolex de poursuivre l'expédition auprès de toute personne des documents diffusés sous les entêtes info-Kbis et info-Siret présentés comme étant des " fiches d'enregistrement. Cette interdiction est fondée sur le constat de leur caractère trompeur et de nature à induire en erreur leurs destinataires en leur laissant croire qu'ils seraient redevables d'une somme destinée à la société Prolex ", Dit que cette publication devra intervenir : 1°) dans la prochaine édition de l'hebdomadaire Le Parisien suivant la date de la signification du présent arrêt ; 2°) en page d'accueil des sites Internet www.info-kbis.fr et www.info-siret pendant une durée d'une année à compter de la signification du présent arrêt, Condamne la SAS Prolex à payer à M. le Directeur Départemental de la Protection des Populations de Paris la somme de 5 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la SAS Prolex aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.