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Décisions

Cass. com., 17 mars 2015, n° 14-12.087

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Fiorensa (SARL)

Défendeur :

Sos cintres Bouchet (SAS), Société nationale d'extrusion et d'injection des plastiques (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Orsini

Avocat général :

M. Debacq

Avocats :

SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, SCP Hémery, Thomas-Raquin

Paris, du 12 déc. 2013

12 décembre 2013

LA COUR : - La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Sochape commercialise des cintres en s'approvisionnant principalement auprès de la Société nationale d'extrusion et d'injection des plastiques (la SNEIP) ; qu'ayant constaté que la société Fiorensa, créée en octobre 2009 et co-gérée par son ancien directeur commercial et associé, commercialisait des cintres identiques aux siens et éditait un catalogue présentant de nombreuses similitudes avec le sien, la société Sochape l'a assignée en concurrence déloyale et parasitaire ; que la SNEIP est intervenue volontairement à l'instance, en formulant les mêmes griefs à l'encontre de la société Fiorensa et demandant réparation de son préjudice ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses quatrième et cinquième branches : - Attendu que la société Fiorensa fait grief à l'arrêt de sa condamnation à payer à la société Sochape des dommages-intérêts pour concurrence déloyale par parasitisme alors, selon le moyen : 1°) qu'il incombe à celui qui invoque un préjudice de rapporter la preuve de son existence et de son étendue, ainsi que de son lien de causalité avec la faute alléguée ; qu'en l'espèce, en présumant que la diminution du chiffre d'affaires de la société Sochape était imputable aux actes reprochés à la société Fiorensa, et en jugeant que cette dernière société ne prouvait qu'à hauteur de 15 % ne pas être responsable de la diminution de ce chiffre, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé l'article 1315 du Code civil ; 2°) que la réparation du dommage, qui doit être intégrale, ne peut excéder le montant du préjudice ; que la cour d'appel a elle-même estimé qu'il était " démontré par [la société Fiorensa] que le secteur textile a connu une baisse de 15 % au cours de l'année 2009 " et qu'il convenait de tenir compte de cette baisse, non imputable à la société Fiorensa, qui expliquait en partie la diminution du chiffre d'affaires de la société Sochape entre 2009 et 2010 ; que cette baisse de 15 % devait être calculée sur la base du chiffre d'affaires réalisé par la société Sochape en 2009 ; que dès lors, en appliquant le taux de 15 % à la perte de chiffre d'affaires de la société Sochape entre 2009 et 2010, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu qu'ayant constaté que la société Sochape démontrait avoir subi une perte de chiffre d'affaires, l'arrêt fixe le montant du préjudice subi par cette société en tenant compte de la baisse générale ayant affecté tout le secteur du textile ; que le moyen, qui ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation souveraine de l'existence et de l'étendue du préjudice par la cour d'appel, qui n'a pas inversé la charge de la preuve ni méconnu le principe de la réparation intégrale, n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen, pris en ses autres branches, qui n'est pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le premier moyen : - Vu l'article 1382 du Code civil ; Attendu que pour dire que la société Fiorensa a commis des actes de concurrence déloyale par parasitisme au préjudice de la SNEIP, l'arrêt retient que si le fait de vendre des modèles de cintres identiques, non protégés par des droits de propriété intellectuelle, ne peut être constitutif, à lui seul, d'un acte de concurrence déloyale au détriment de la société Sochape et de la SNEIP, en revanche, le fait de vendre des modèles identiques au moyen d'un catalogue, qui, par ses similarités avec celui de la société Sochape, ne peut qu'induire un risque de confusion ou une méprise sur l'existence de liens entre les sociétés concernées, constitue un comportement fautif ; qu'il en déduit que la société Fiorensa s'est placée dans le sillage de la société Sochape pour bénéficier, sans rien débourser, de sa réputation et de ses investissements et qu'elle a, de ce fait, commis une faute constitutive de concurrence déloyale par parasitisme ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans caractériser d'actes de concurrence déloyale par parasitisme commis à l'égard de la SNEIP, qui n'était que le fournisseur de la société Sochape, dont le catalogue avait été imité par la société Fiorensa, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le troisième moyen, Casse et Annule, mais seulement en ce qu'il dit que la société Fiorensa a commis des actes de concurrence déloyale par parasitisme au préjudice de la société SNEIP et la condamne à payer à cette dernière la somme de 50 000 euro à titre de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 12 décembre 2013, entre les parties, par la Cour d'appel de Paris, Remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Paris, autrement composée.