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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 2 avril 2015, n° 13-17628

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

MS Conseil (SARL)

Défendeur :

Distribution Casino France (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Perrin

Conseillers :

MM. Birolleau, Douvreleur

Avocats :

Mes de Maria, Mrabent, Fromantin, Semoun

T. com. Lyon, du 23 juill. 2013

23 juillet 2013

Faits et Procédure

Par contrat de télémarketing en date du 20 mars 2000, la société Distribution Casino France a confié à la société MS Conseil la réalisation des opérations de télémarketing portant sur ses offres de fruits, légumes, fleurs et plantes auprès des points de vente de son réseau de proximité, recouvrant notamment les enseignes Petit Casino, Spar et Vival. Ce contrat a été conclu pour une durée initiale de trois ans et était renouvelable par tacite reconduction pour une durée indéterminée. Il a été reconduit jusqu'au 31 mars 2006 par un avenant du 23 juin 2003 qui a prévu qu'il serait ensuite tacitement reconduit pour une période indéterminée, sauf résiliation par l'une ou l'autre des parties trois mois avant le terme fixé.

En octobre 2006, la société Distribution Casino France a fait savoir à la société MS Conseil qu'elle reprendrait en interne une partie des prestations qu'elle lui avait confiées et qu'elle en évaluerait les résultats en septembre 2007. Par courrier du 17 décembre 2007, elle lui a notifié sa décision de mettre un terme au contrat au 31 décembre 2009 et elle l'a invitée à mettre en place toutes les solutions alternatives appropriées. A la suite des discussions menées entre les parties, la société Distribution Casino France a, par courrier du 28 septembre 2009, indiqué à la société MS Conseil qu'elle maintenait une partie de sa mission jusqu'au 31 décembre 2010.

Par acte du 27 juillet 2011, la société MS Conseil a assigné la société Distribution Casino France en lui demandant le paiement de diverses sommes sur le fondement des dispositions de l'article L. 442-6 I 2° et 5° du Code de commerce.

Par jugement du 23 juillet 2013, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de commerce de Lyon a :

- débouté la société MS Conseil de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

- condamné la société MS Conseil à payer à la société Distribution Casino France la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

- condamné la société MS Conseil à payer à la société Distribution Casino France la somme de 10 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- dit qu'en cas d'exécution forcée de la présente décision, les sommes retenues par l'huissier de justice instrumentaire au titre de l'article 10 du décret 2001-212 du 8 mars 2001 sont mises à la charge de la société MS Conseil.

La société MS Conseil a interjeté appel de ce jugement le 3 septembre 2013. Vu les dernières conclusions signifiées le 12 mars 2014 par la société MS Conseil, par lesquelles il est demandé à la cour de :

- dire et juger recevable et bien fondé l'appel formé par la société MS Conseil ;

- infirmer le jugement dont appel ;

- dire et juger que la société MS Conseil est dans un état de dépendance économique vis-à-vis de la société Distribution Casino France ;

- en conséquence, condamner la société Distribution Casino France à verser à la société MS Conseil la somme de 500 000 euros pour déséquilibre contractuel ;

- condamner la société Distribution Casino France à verser à la société MS Conseil la somme de 1 265 416,17 euros pour rupture brutale des relations commerciales établies ;

- condamner la société Distribution Casino France à verser à la société MS Conseil la somme de 178 549,07 euros au titre des licenciements survenus du fait de la rupture des relations commerciales ;

- débouter la société Distribution Casino France de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- condamner la société Distribution Casino France à la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société MS Conseil fait valoir qu'elle était à l'égard de la société Distribution Casino France en situation de dépendance économique au sens de l'article L. 420-2 du Code de commerce. Elle soutient par ailleurs que la société Distribution Casino France l'a, au mépris des dispositions de l'article L. 442-6 I 2° du même Code, soumise à des obligations créant un déséquilibre significatif dans leurs droits et obligations respectives et elle demande à ce titre l'allocation de la somme de 500 000 euros à titre de dommages et intérêts. Enfin, la société MS Conseil réclame, sur le fondement de l'article L. 442-6 I 5°, la somme de 1 265 416,17 euros, représentant la moyenne des chiffres d'affaires réalisés avec la société Distribution Casino France durant les cinq dernières années de leur relation commerciale. Elle ajoute qu'elle a été contrainte de licencier tous les salariés liés à cette activité commerciale, soit au total treize personnes, pour un coût total de 178 549,07 euros dont elle demande à être indemnisée.

Vu les dernières conclusions signifiées le 31 janvier 2014 par la société Distribution Casino France, par lesquelles il est demandé à la cour de :

A titre principal,

- confirmer le jugement du Tribunal de commerce de Lyon en date du 23 juillet 2013 ; Y ajoutant,

- condamner la société MS Conseil au paiement d'une somme de 20 000 euros à la société Distribution Casino France à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

- condamner la société MS Conseil à payer à la société Distribution Casino France la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- mettre à la charge de la société MS Conseil, en cas d'exécution forcée de la décision à intervenir, les sommes retenues par l'huissier de justice instrumentaire au titre de l'article 10 du décret 2001-212 du 8 mars 2011 ;

A titre subsidiaire et en tout état de cause,

- constater qu'alors que les dispositions contractuelles prévoyaient le respecte d'un préavis de trois mois, la société Distribution Casino France a accepté d'accorder un préavis d'une durée totale de trois ans à la société MS Conseil ;

- constater que la rupture du contrat de la société MS Conseil par la société Distribution Casino France n'a été ni imprévisible, ni soudaine et ne peut donc revêtir la qualification de rupture brutale ;

- en tout état de cause, constater que la société MAS Conseil ne rapporte ni la preuve de son préjudice, que ce soit dans son principe ou son montant, ni celle d'un lien de causalité entre son prétendu préjudice et l'insuffisance du délai de préavis accordé ;

- constater que la société MS Conseil ne peut imputer à la société Distribution Casino France ni son état de dépendance économique à son égard, ni un abus de celle-ci par la société Distribution Casino France ;

- en tout état de cause, constater que la société MS Conseil ne rapporte pas la preuve d'un préjudice en résultant ;

En conséquence,

- dire et juger la société MS Conseil mal fondée en toutes ses demandes formées à l'encontre de la société Distribution Casino France ;

- la débouter de l'ensemble de ses demandes formées à l'encontre de la société Distribution Casino France ;

En toute hypothèse,

- condamner la société MS Conseil à payer à la société Distribution Casino France la somme de 40 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

- condamner la société MS Conseil à payer à la société Distribution Casino France la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- condamner la société MS Conseil aux entiers dépens ;

- mettre à la charge de la société MS Conseil, en cas d'exécution forcée de la décision à intervenir, les sommes retenues par l'huissier instrumentaire au titre de l'article 10 du décret 2001-212 du 8 mars 2001.

La société Distribution Casino France soutient, en premier lieu, que la société MS Conseil n'était pas à son égard en état de dépendance économique. Elle conteste, en deuxième lieu, avoir soumis la société MS Conseil à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations nés du contrat de télémarketing. En troisième lieu, elle soutient que la rupture de la relation commerciale établie avec la société MS Conseil n'a été nullement brutale puisqu'elle lui a accordé un préavis de trois ans. Elle expose qu'en toute hypothèse, la société MS Conseil ne justifie pas des préjudices qu'elle invoque.

LA COUR renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.

Motifs

Considérant que dans le dispositif de ses conclusions, la société MS Conseil demande à la cour de " dire et juger que la société MS Conseil est dans un état de dépendance économique vis-à-vis de la société Distribution Casino France " et " en conséquence, condamner la société Distribution Casino France à verser à la société MS Conseil la somme de 500 000 euros pour déséquilibre contractuel " ; que l'état de dépendance économique allégué par la société MS Conseil sera dès lors examiné, s'il y a lieu, au titre du déséquilibre.

Sur la demande fondée sur l'article L. 442-6 I 2° du Code de commerce

Considérant qu'aux termes de l'article L. 442-6 I 2° du Code de commerce, " engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait (...) : (...) de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties " ; que la société MS Conseil prétend que le contrat de télémarketing qu'elle a conclu le 20 mars 2000 avec la société Distribution Casino France contient une " accumulation de clauses abusives ", d'où il résulte un déséquilibre contractuel à son détriment ; qu'elle soutient être fondée à en demander réparation, sur la base des dispositions de l'article L. 442-6 I 2° précité, par l'allocation de dommages et intérêts à hauteur de 500 000 euros ; qu'à l'appui de cette demande, elle vise des clauses figurant aux articles 2.2.5, 2.2.2, 4, 7, 8 et 9 du contrat ;

Clause figurant à l'article 2.2.5 du contrat

Considérant que la société MS Conseil soutient qu'était abusive la clause figurant à l'article 2.2.5 du contrat qui était ainsi rédigée : " Compte tenu de l'importance qu'attache Casino à la parfaite exécution de ces prestations, MS Conseil devra lui donner la priorité sur tout autre projet qu'elle serait amenée à réaliser au profit de tiers, notamment quant à l'affectation de son personnel au présent contrat " (...) ;

Considérant que cette clause figurait dans l'article 2.2.5 consacré à la " Gestion des appels téléphoniques " confiée à la société MS Conseil ; que cet article fixait, en particulier, les plages horaires durant lesquelles les personnels de la société MS Conseil traiteraient les appels téléphoniques et qu'il prévoyait l'engagement de celle-ci d'" apporter un soin tout particulier au respect des procédures instaurées par les parties " ; que la priorité due par la société MS Conseil en ce qui concerne l'exécution du contrat qu'elle avait passé avec la société Distribution Casino France traduisait son engagement d'exécuter au mieux ses obligations et assurait à la société Distribution Casino France que la réalisation d'une autre activité au profit de tiers ne justifierait pas qu'elle n'exécute pas au mieux ses obligations à son égard ; que cette clause ayant pour objet de garantir l'une des parties de la bonne exécution du contrat par l'autre partie, ne saurait dès lors être considérée ni comme abusive, ni comme créant un déséquilibre entre leurs droits et obligations respectifs ;

Clause figurant à l'article 2.2.2 du contrat

Considérant que l'article 2 du contrat, consacré aux " Actions de Télémarketing " que la société MX Conseil s'engage à effectuer pour la société Distribution Casino France, définissait des " Actions générales ", consistant notamment dans l'augmentation du chiffre d'affaires par une prise de commande professionnalisée et dans l'optimisation de la vente des produits, et des " Actions spécifiques ", consistant notamment dans l'émission d'appels auprès des clients de la branche proximité ainsi que dans la qualification de fichiers et la prise de commandes ; que ce même article prévoyait ensuite que " Casino pourra demander à MS Conseil la réalisation de toute autre action générale ou spécifique de télémarketing qui lui semblera nécessaire " ; que la société MS Conseil considère que cette dernière clause est abusive et qu'elle crée un déséquilibre puisqu'elle permet à la société Distribution Casino France de " décider de la quantité de travail " de la société MS Conseil ;

Mais considérant que le contrat en cause avait, selon son article premier, pour objet de confier à la société MS Conseil l'exécution d'actions de marketing téléphonique au profit de la société Distribution Casino France et de définir les conditions dans lesquelles ces actions seraient mises en place ; que dès lors la clause définissant ces actions de façon non limitative et prévoyant que la société Casino pourrait demander la réalisation d'autres actions n'était pas abusive, pas plus qu'elle ne déséquilibrait le contrat, dès lors que ces actions restaient dans les limites de la mission confiée à la société MS Conseil et qu'elles concouraient à sa réalisation ;

Clause figurant à l'article 4 du contrat

Considérant que l'article 4 du contrat déterminait la rémunération de la société MS Conseil en fonction du chiffre d'affaires réalisé par la société Distribution Casino France sur les produits entrant dans la mission qui lui était confiée ; qu'ainsi cette rémunération était égale à un pourcentage allant de 1 % à 0,70 % de ce chiffre d'affaires selon l'importance de celui-ci ; que la société MS Conseil en conclut que ce contrat donnait le pouvoir à la société Distribution Casino France de " décider " de sa rémunération ;

Mais considérant que les parties ayant fait le choix, comme le contrat l'indique expressément, d'intéresser la société MS Conseil aux résultats réalisés, il leur était loisible de convenir que sa rémunération ne serait pas forfaitaire, mais qu'elle serait proportionnelle à ces résultats ; que ce faisant, le contrat n'a nullement fait dépendre la rémunération de la société MS Conseil de la " décision " de la société Distribution Casino France et qu'il ne saurait, en conséquence, être considéré comme contenant une clause abusive ou créant un déséquilibre entre les parties ;

Clause figurant à l'article 7 du contrat

Considérant que l'article 7 du contrat déterminait les conditions et modalités selon lesquelles il pouvait être résilié de façon anticipée ; que, notamment, il fixait les conséquences d'une faute grave de l'une ou l'autre partie et prévoyait qu'" en cas de résiliation anticipée pour quelque cause que ce soit qui interviendrait du fait de MS Conseil, celle-ci versera à Casino à titre de clause pénale une indemnité de trois millions de francs " ; que la société MS Conseil observe qu'en revanche aucune clause pénale n'était prévue en cas de résiliation anticipée du contrat par la société Distribution Casino France ;

Mais considérant que le contrat du 20 mars 2000 a été modifié par un avenant du 23 juin 2003 ; que cet avenant a prévu que le contrat serait reconduit jusqu'au 31 mars 2006 et qu'il serait ensuite renouvelé par tacite reconduction pour une période indéterminée et que chaque partie pourrait alors le dénoncer à tout moment en respectant un préavis de trois mois ; que ces stipulations donnaient donc à chaque partie un droit égal à résilier le contrat aux mêmes conditions ; qu'ainsi la société Distribution Casino France aurait engagé sa responsabilité contractuelle à l'égard de la société MS Conseil si elle avait résilié le contrat sans respecter ces conditions ; que ce dispositif contractuel assurait ainsi l'équilibre des droits et obligations des parties au contrat ;

Clause figurant à l'article 8 du contrat

Considérant que l'article 8 du contrat interdisait à la société MS Conseil de " diffuser à quiconque (...) toutes les informations concernant Casino notamment d'ordre organisationnel, commercial ou financier dont il pourrait avoir connaissance " et qu'il prévoyait que " le défaut de respect de cette confidentialité est susceptible d'entraîner, à la demande de Casino, l'application de plein droit d'une pénalité de trois millions de francs sans préjudice de tous dommages-intérêts pouvant être réclamés " ; que la société MS Conseil observe qu'aucune clause pénale du même ordre n'était prévue pour la société Distribution Casino France ;

Mais considérant que l'exécution par la société MS Conseil de la mission qui lui avait été confiée supposait nécessairement qu'elle ait connaissance d'informations concernant son co-contractant, dont celui-ci pouvait légitimement vouloir conserver la confidentialité à l'égard de ses concurrents ; que l'importance que la société Distribution Casino France attachait au respect par la société MS Conseil de cette confidentialité explique l'insertion de cette clause, laquelle n'avait dès lors aucun caractère abusif, pas plus qu'elle n'introduisait un déséquilibre dans les droits et obligations des parties ;

Clause figurant à l'article 9 du contrat

Considérant qu'aux termes de l'article 9 du contrat, celui-ci a été conclu " en considération de la personne de Mme Monique Satre et des garanties que MS Conseil présente. Son transfert, à des tiers à quelque titre que ce soit, ou le recours à des sous-traitants, sera soumis à l'accord exprès et préalable de Casino. A contrario, le présent contrat n'est pas, à l'égard de Casino, conclu intuitu personae " ;

Considérant que s'agissant d'un contrat de prestation de services, on ne saurait faire grief à la société Casino d'avoir pris en compte, dans sa décision de contracter, la personne même de la dirigeante de la société MS Conseil et d'y avoir vu la garantie d'une bonne exécution du contrat ; que le contrat ayant dès lors été conclu intuitu personae, il est pleinement justifié que la société Distribution Casino France ait souhaité que le contrat soit exécuté par la société MS Conseil avec laquelle elle avait décidé de contracter, sauf à donner son accord au transfert de ce contrat ou au recours à la sous-traitance ; que le fait que les parties n'aient pas prévu de stipulation équivalente à l'égard de la société Distribution Casino France est sans effet ;

Considérant que des constatations qui précèdent, il résulte que les clauses ci-dessus ne peuvent, ni séparément ni ensemble, être considérées comme créant, au détriment de la société MS Conseil, un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ; que la société MS Conseil sera donc déboutée de sa demande et que le jugement sera confirmé ;

Sur la demande fondée sur l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce

Considérant que les relations commerciales entre les parties ayant pris fin au 31 décembre 2010, la société MS Conseil demande la condamnation de la société Distribution Casino France à lui payer, d'une part, la somme de 1 265 416,17 euros correspondant à la moyenne annuelle du chiffre d'affaires qu'elle avait réalisé avec son client durant les cinq années précédant cette rupture et, d'autre part, la somme de 178 549,07 euros représentant le coût des licenciements auxquels elle dit avoir dû procéder ; qu'elle justifie cette demande en reprochant à la société Distribution Casino France d'avoir mis fin " sans raison légitime " à leurs relations commerciales ; qu'elle fonde néanmoins sa demande sur les dispositions de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce, lesquelles sanctionnent non la rupture d'une relation commerciale établie, mais la rupture d'une telle relation sans préavis écrit d'une durée suffisante au regard, notamment, de son ancienneté ; qu'il y a donc lieu de déterminer si, la relation commerciale établie entre les parties depuis 2000 ayant pris fin au 31 décembre 2010 à l'initiative de la société Distribution Casino France, ces dispositions légales ont été respectées ;

Considérant qu'il ressort du dossier que, contrairement aux allégations de la société MS Conseil, la société Casino n'a mis fin à la relation établie avec celle-ci qu'après l'en avoir informée par écrit et à l'expiration d'un préavis d'une durée suffisante au regard des dispositions de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce ; qu'il apparaît en effet que la société Casino a dès l'année 2007, et notamment au cours d'un entretien tenu le 30 octobre de cette année, fait connaître à la société MS Conseil qu'elle avait arrêté de nouvelles orientations en ce qui concerne l'activité qu'elle lui avait confiée ; que par courrier recommandé du 17 décembre 2007, elle lui clairement notifié sa décision de mettre fin à sa mission, dans les termes suivants : " (...) nous vous informons que notre contrat ne sera pas reconduit et expirera le 31 décembre 2009 " (pièce MS Conseil n° 5) ; que la société Casino a, par la suite, repoussé cette échéance d'une année en confiant à la société MS Conseil l'activité de télévente d'un de ses réseaux de proximité pour l'année 2010 (courrier recommandé du 28 septembre 2009 - pièce MS Conseil n° 11) ; qu'il résulte des courriers échangés qu'il a été clairement convenu que ce report ne signifiait nullement que la société Casino renonçait à la décision qu'elle avait notifiée deux ans auparavant ni que la relation commerciale reprenait pour une durée indéterminée ; que la société Casino a souligné, à plusieurs reprises, que tel n'était pas le cas, ainsi dans un courrier recommandé du 12 juillet 2010 ainsi rédigé : " Conformément à votre demande, nous vous confirmons les termes de nos échanges relatifs à la poursuite de nos activités jusqu'au 31 décembre 2010 (...). Nous attirons votre attention sur la nécessité de vous organiser en conséquence pour cette date qui est ferme et définitive " (pièce Distribution Casino France n° 21) ; que la société MS Conseil ne peut dès lors prétendre, comme elle le fait dans ses écritures, qu'elle avait pu croire que sa mission ayant été prolongée d'un an, elle se poursuivrait au-delà ;

Considérant, par ailleurs, que si la mission confiée à la société MS Conseil a été modifiée à partir de 2007, le chiffre d'affaires réalisé avec la société Casino a été globalement stable, puisqu'il s'établit pour les années 2006, 2007, 2008 et 2009 à, respectivement, 1 446 140 euros, 1 398 930 euros, 1 319 579 euros et 1 280 572 euros ; qu'en outre, la société Casino a, à plusieurs reprises, appelé l'attention de la société MS Conseil sur la nécessité pour elle d'anticiper la conséquences de la fin annoncée de la relation commerciale établie avec elle de s'organiser en conséquence, ainsi dans ses courriers recommandés des 27 octobre 2006, 17 décembre 2007, 31 mars 2008, 18 avril 2008 et 12 juillet 2010 (pièces MS Conseil n° 4, 8 et 9 et Distribution Casino France n° 17 et 21) ;

Considérant, dans ces conditions, que la rupture de la relation commerciale annoncée le 17 décembre 2007 ayant été effective au 31 décembre 2010, la société Casino a accordé à la société MS Conseil un préavis d'une durée de trois années ; que cette durée est très supérieure au délai contractuel de trois mois prévu par l'avenant conclu en 2003 par les parties ; que compte tenu de l'ancienneté de la relation qui a débuté en 2000, elle est conforme aux exigences de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce ; que la société MS Conseil sera donc déboutée de sa demande et que le jugement sera confirmé ;

Sur la demande de condamnation pour procédure abusive

Considérant que le tribunal, au vu des dossier, a relevé à juste titre que la société MS Conseil avait engagé avec une légèreté blâmable son action contre la société Distribution Casino France, notamment en ce qui concerne le fondement juridique de ses demandes ; qu'il l'a en conséquence condamnée à lui payer la somme de 20 000 euros en réparation du préjudice qui en est résulté pour elle ; que la société Distribution Casino France n'apporte pas d'élément de nature à porter, comme elle le demande, le montant de cette condamnation à la somme de 40 000 euros ; que le jugement sera donc confirmé ;

Sur la demande relative au frais d'huissier en cas d'exécution forcée de la décision

Considérant que la société Distribution Casino France demande à la cour de dire qu'en cas d'exécution forcée de la présente décision, les sommes retenues par l'huissier de justice instrumentaire au titre de l'article 10 du décret 2001-212 du 8 mars 2001 seront mises à la charge de la société MS Conseil ;

Mais considérant que cette demande vise, en dehors de tout intérêt né et actuel, la situation hypothétique dans laquelle la société Distribution Casino France serait amenée à recourir à l'exécution forcée de la condamnation prononcée à son profit ; qu'elle sera donc rejetée et que la jugement sera réformé sur ce point ;

Sur les frais irrépétibles

Considérant qu'au regard de l'ensemble de ce qui précède, il serait inéquitable de laisser à la charge de la société Casino la totalité des frais irrépétibles engagés pour faire valoir ses droits et la société MS Conseil sera condamnée à lui verser la somme de 6 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Par ces motifs, LA COUR : statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, Confirme le jugement entrepris en toute ses dispositions, sauf en ce qu'il a mis à la charge de la société MS Conseil les sommes qui, en cas d'exécution forcée, seraient retenues par l'huissier instrumentaire au titre de l'article 10 du décret 2001-212 du 8 mars 2001 ; Condamne la société MS Conseil à payer à la société Distribution Casino France la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; Rejette toutes les demandes autres, plus amples ou contraires des parties ; Condamne la société MS Conseil aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.