Cass. 1re civ., 5 mars 2015, n° 14-13.062
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Batut
Avocats :
SCP Gadiou, Chevallier, SCP Gatineau, Fattaccini, SCP Thouin-Palat, Boucard
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, selon acte sous seing privé du 17 janvier 2008, M. X a confié à la société CSO santé (l'agent immobilier) un mandat exclusif de vendre le fonds de commerce de pharmacie qu'il exploitait avec son épouse, qu'était stipulée une clause pénale, sans limitation de durée, selon laquelle, après expiration ou résiliation du mandat, le mandataire s'interdisait de vendre le bien, sans le concours de l'agent immobilier, à un acquéreur qu'il lui aurait présenté, sauf à payer une pénalité égale au montant de la commission, que Mme Y a visité le fonds le 27 février 2008 et émis une offre d'achat au prix de 2 820 000 euro transmise par l'agent immobilier à M. X qui, sans y donner suite, a, le 21 avril 2008, résilié le mandat, et que, selon acte notarié du 31 janvier 2009, les époux X ont vendu l'officine à Mme Y, au prix de 3 000 000 euro ; que l'agent immobilier a assigné en paiement de la clause pénale les époux X, qui ont appelé en garantie Mme Y ;
Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche : - Attendu que les époux X font grief à l'arrêt de condamner M. X à payer à la société CSO santé la somme de 150 000 euro à titre d'indemnité contractuelle, alors, selon le moyen, qu'aux termes de l'arrêt attaqué citant intégralement la clause pénale litigieuse, celle-ci était illimitée dans le temps ; qu'il s'ensuit qu'elle avait pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties de sorte qu'elle était abusive et réputée non écrite par l'article L. 132-1 du Code de la consommation ; que la cour d'appel a violé ce texte en se fondant néanmoins sur ladite clause pénale pour condamner M. X ;
Mais attendu qu'en confiant à l'agent immobilier mandat de vendre le fonds de commerce qu'il exploitait, M. X n'a pas agi en qualité de non-professionnel ou de consommateur ; que le moyen est mal fondé ;
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche, et sur le second moyen : - Attendu que ces griefs ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche : - Vu les articles 6, I, de la loi du 2 janvier 1970 et 78 du décret du 20 juillet 1972, en leur rédaction applicable au litige, ensemble l'article 7 de la même loi ; - Attendu que, selon le deuxième de ces textes, lorsqu'un mandat est assorti d'une clause d'exclusivité ou d'une clause pénale, ou lorsqu'il comporte une clause aux termes de laquelle une commission sera due par le mandant, même si l'opération est conclue sans les soins de l'intermédiaire, cette clause ne peut recevoir application que si elle résulte d'une stipulation expresse d'un mandat dont un exemplaire a été remis au mandant et si elle est mentionnée en caractères très apparents ; que le défaut de tels caractères entraîne, non la nullité du mandat, mais celle de la clause ;
Attendu que, pour condamner M. X à payer à l'agent immobilier la somme de 150 000 euro au titre de l'indemnité contractuelle, après avoir dit le mandat valable, l'arrêt retient que la clause pénale y est insérée sous le titre " Conditions concernant le mandant " écrit en caractères gras et en grands caractères, qu'au sein de ce titre, la clause pénale est mentionnée dans les mêmes caractères que ceux de l'ensemble des conditions générales, et non en caractères plus réduits, qu'elle fait partie d'un ensemble de trois paragraphes comprenant selon une typographie particulière, d'abord, les deux interdictions faites au mandant, puis la sanction prévue en cas de manquement à ces engagements, qu'au sein de cet ensemble, un paragraphe particulier est consacré à la clause pénale ; qu'en statuant par de tels motifs, impropres à justifier que la clause pénale aurait été mentionnée en caractères très apparents, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Par ces motifs, casse et annule, mais seulement en ce qu'il condamne M. X à payer à la société CSO santé la somme de 150 000 euro à titre d'indemnité contractuelle, l'arrêt rendu le 12 décembre 2013, entre les parties, par la Cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Caen.