CA Paris, Pôle 1 ch. 2, 21 mai 2015, n° 14-17934
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Lidl (SNC)
Défendeur :
Sécurité Academy (EURL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Charlon
Conseillers :
Mmes Louys, de Gromard
Avocats :
Mes Houssain, Kong Thong, Chellat
Vu l'arrêt rendu avant dire droit rendu le 12 février 2015, auquel il convient de se rapporter pour plus ample exposé des éléments du litige, ayant ordonné la réouverture des débats afin que les parties fassent connaître leurs observations sur le moyen de droit relevé d'office tenant au caractère délictuel de la responsabilité encourue dans le cadre de l'application de l'article L. 446-2, I, 5° du Code de commerce ;
Vu les conclusions développées par la société Lidl à l'audience du 26 mars 2015 tendant :
- à l'infirmation du jugement du 25 juin 2014,
- au renvoi de l'affaire devant le Tribunal de commerce de Nancy en raison de ce que la clause attributive de compétence serait applicable même si l'action engagée est de nature délictuelle,
- à la condamnation de la société Sécurité Academy aux dépens et au paiement de la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Vu les conclusions développées par la société Sécurité Academy à l'audience du 26 mars 2015 tendant :
- au rejet des prétentions de la société Lidl,
- à la confirmation du jugement du 25 juin 2014,
- à la condamnation de la société Lidl au paiement de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
MOTIFS DE LA DECISION
Considérant que le contredit formé par la société Lidl contre le jugement rendu le 25 juin 2014 par le Tribunal de commerce d'Evry est motivé et qu'il a été remis au greffe de cette juridiction dans le délai de quinze jours à compter de la décision;
Qu'il est donc recevable;
Considérant que la société Sécurité Academy a engagé une action devant le Tribunal de commerce de Paris pour obtenir à titre principal la condamnation de la société Lidl à lui payer des dommages-intérêts sur le fondement de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce;
Qu'il résulte de cette disposition légale que le fait pour tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels, engage la responsabilité délictuelle de son auteur;
Considérant que l'article 48 du code de procédure civile permet aux parties qui contractent en qualité de commerçant de déroger aux règles légales de compétence territoriale, dont la règle dite des "gares principales", et qu'en vertu de cette disposition, la société Lidl et la société Sécurité Academy avaient inséré dans leur contrat du 22 juin 2010 une clause selon laquelle "en cas de litige, seuls les tribunaux de Strasbourg seront compétents";
Que cette stipulation, qui fait la loi des parties et qui s'impose au juge, englobe l'ensemble des litiges susceptibles d'opposer les parties, ce qui inclut nécessairement ceux qui découleraient d'une rupture brutale des relations établies entre la société Lidl et la société Sécurité Academy ;
Que cependant la clause attributive de compétence au tribunal de commerce de Stasbourg doit être combinée avec l'article D. 442-3 du Code de commerce qui précise que, pour l'application de l'article L. 442-6, le siège et le ressort des juridictions commerciales compétentes en métropole et dans les départements d'outre-mer sont fixés conformément au tableau de l'annexe 4-2-1, tableau qui attribue au Tribunal de commerce de Nancy les affaires normalement dévolues aux juridictions qui, tel le tribunal de commerce de Strasbourg, sont situées dans le ressort de la Cour d'appel de Colmar ;
Considérant qu'en définitive l'exception d'incompétence apparaît fondée et qu'il y a lieu d'y faire droit et de renvoyer l'affaire devant le Tribunal de commerce de Nancy ;
Par ces motifs : Déclare recevable et bien-fondé le contredit formé par la société Lidl contre le jugement d'incompétence rendu par le Tribunal de commerce d'Evry le 25 juin 2014 ; Dit que le litige relève de la compétence du Tribunal de commerce de Nancy et ordonne la transmission du dossier de l'affaire au greffe de ce tribunal de commerce, pour que l'instance y soit poursuivie dans les conditions de l'article 97 du Code de procédure civile ; Vu l'article 88 du Code de procédure civile, Condamne la société Sécurité Academy aux frais du contredit ; Vu l'article 700 du Code de procédure civile, Laisse à la charge de la société Sécurité Academy ses frais irrépétibles et la condamne à payer à la société Lidl la somme de 2 000 euros.