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Décisions

Cass. com., 27 mai 2015, n° 14-50.042

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Sud-Ouest gouttières (Sté)

Défendeur :

Gouttières Alu 32 (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Conseillers :

Mmes Orsini, Riffault-Silk

Avocats :

Scp Rousseau, Tapie, Scp Ortscheidt

Agen, 15 janv. 2014

15 janvier 2014

LA COUR : - Sur le moyen unique : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Agen, 15 janvier 2014), que la société Sud-Ouest gouttières (la société SOG), spécialisée dans la fourniture, la fabrication et la pose de gouttières, reprochant à la société Gouttières Alu 32 (la société Gouttières Alu), crée par trois anciens salariés pour exercer la même activité dans le même secteur, l'embauche massive de son personnel, l'exploitation de ses connaissances techniques et de son savoir-faire et le détournement de commandes et de clientèle, l'a assignée en paiement de dommages-intérêts pour concurrence déloyale ;

Attendu que la société SOG fait grief à l'arrêt du rejet de sa demande alors, selon le moyen : 1°) que constitue un acte de concurrence déloyale l'embauche massive du personnel d'une entreprise concurrente ayant pour effet, même hors de toute manœuvre déloyale ou frauduleuse de débauchage, de désorganiser cette dernière ; que la cour d'appel a constaté que trois salariés (sur six, soit la moitié de l'effectif) de la société Sud-Ouest gouttières ayant une connaissance précise de son activité commerciale, l'ont quittée entre les 27 juin et 1er août 2011, pour constituer la société Gouttières Alu , ayant la même activité, dans le même secteur géographique et le même siège social, en utilisant nécessairement leurs connaissances des savoirs faire et de la clientèle ; que la société Sud-Ouest gouttières avait perdu plusieurs clients, parfois après établissement et acceptation de devis ; que la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, dont il résultait que cette embauche massive des salariés avait, dans ces conditions, nécessairement désorganisé la société Sud-Ouest gouttières, a, partant, violé l'article 1382 du Code civil ; 2°) qu'en s'étant fondée sur la circonstance, à la supposer établie, que le gérant de la société Gouttières Alu 32, M. Lacoste, avait proposé le 20 mai 2011 de racheter les parts de la société Sud-Ouest gouttières, ce qu'avait refusé son gérant le 31 mai 2011, et avait manifesté ainsi le souhait de demeurer au sein de la société Sud-Ouest gouttières, inopérante pour, d'abord, exclure une concurrence déloyale de la société gouttières Alu 32, créée par M. Lacoste après sa démission de la société Sud-Ouest gouttières le 27 juin 2011, avec son épouse, secrétaire en contact avec la clientèle, ayant signé une rupture conventionnelle avec la société Sud-Ouest gouttières le 1er août 2011, et M. Krzyzynski, chef d'équipe, également démissionnaire de la société Sud-Ouest gouttières le 1er août 2011, et ensuite, retenir que " le débauchage de salariés...invoqué ne peut dans ces conditions être considéré comme fautif ", la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; 3°) que la circonstance que le salarié débauché ne soit pas lié par une clause de non-concurrence n'exclut pas que son embauche par un concurrent constitue un acte de concurrence déloyale, notamment lorsque cette embauche fait bénéficier l'entreprise qui le recrute de l'expérience acquise par ce salarié chez son précédent employeur ; qu'en s'étant fondée sur la circonstance qu'aucun des trois salariés ayant constitué la société Gouttières Alu 32 n'était tenu par une clause contractuelle de non-concurrence, inopérante pour exclure une concurrence déloyale au préjudice de la société Sud-Ouest gouttières, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; 4°) que le détournement de certains clients suffit à caractériser la concurrence déloyale ; qu'en s'étant fondée sur la circonstance inopérante qu'il n'était pas établi que " l'ensemble de la clientèle a été détournée ", le procès-verbal de constat d'huissier de justice du 10 janvier 2012 indiquant que l'examen du listing clients de la société Gouttières Alu 32 ne révèle " aucune copie servile de ce fichier ", au lieu de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la circonstance qu'il ressortait de cette même pièce qu'en moins de cinq mois, 78 739,36 euro avaient été facturés par la société Gouttières Alu 32 à des sociétés autrefois clientes de l'EURL Sud-Ouest gouttières, ne suffisait pas établir une concurrence déloyale résultant d'un détournement significatif de clientèle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; 5°) qu'en ayant examiné les faits reprochés à la société Gouttières Alu 32 isolément les uns des autres, au lieu de rechercher si, pris dans leur ensemble, le fait d'avoir, pour trois salariés de la société Sud-Ouest gouttières, quitté l'entreprise, créé au même moment une société Gouttières Alu 32 ayant la même activité dans le même secteur géographique avec le même siège social, en utilisant nécessairement leurs connaissances des savoirs faire et de la clientèle de la première société, ajouté au fait qu'en moins de cinq mois, 78 739,36 euro avaient été facturés à des sociétés autrefois clientes de l'EURL Sud-Ouest gouttières, laquelle avait perdu plusieurs clients, parfois après établissement et acceptation de devis, ne caractérisait pas une concurrence déloyale au préjudice de la société Sud-Ouest gouttières, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant constaté que trois des dix salariés de la société SOG, qui n'étaient pas liés par une clause de non-concurrence, l'avaient quittée pour rejoindre la société Gouttières Alu, créée par eux, l'arrêt retient que cette société n'a usurpé aucun procédé de fabrication ni technique particulière qui seraient propres à la société SOG et que le fait que les trois anciens salariés utilisent nécessairement leur connaissance des savoir-faire et de la clientèle de la société SOG ne suffit pas à caractériser l'existence de manœuvres déloyales pour démarcher la clientèle ; qu'il retient, encore, qu'aucun procédé déloyal de captation de la clientèle n'est établi et que la perte de chiffre d'affaires de la SOG n'est pas due à une faute de la société Gouttières Alu mais résulte d'un transfert de certains chantiers à la société Sud-Ouest gouttières Dax, " qui n'est autre qu'une émanation de la société SOG " ; qu'il retient, enfin, qu'il n'est pas démontré que le débauchage allégué de trois salariés ait désorganisé la société SOG ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par la deuxième branche, la cour d'appel, qui a effectué la recherche visée à la quatrième branche, a légalement justifié sa décision ;

Attendu, en second lieu, qu'ayant examiné chacun des griefs formulés contre la société Gouttières Alu et retenu qu'aucun des faits allégués ne constituait une faute, la cour d'appel, qui n'avait pas à rechercher si ces faits, pris dans leur ensemble, n'étaient pas fautifs, dès lors que l'action en concurrence déloyale est fondée sur les articles 1382 et 1383 du Code civil et non sur une présomption de responsabilité, a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen, inopérant en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.