CA Lyon, 1re ch. civ. A, 4 juin 2015, n° 13-09896
LYON
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Jercar (SA), BCG (SARL), BAJ (SA), Pot Express (SA), ABCJ (SA), JB (SA), Bond (SARL)
Défendeur :
Locam (SAS), SCP Angel Hazane (ès qual.), Eyelink (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Gaget
Conseillers :
MM. Martin, Semeriva
Avocats :
SCP Ligier de Mauroy & Ligier, Selarl Lefèvre & Associés, Selarl Lexi
Vu le jugement en date du 5 novembre 2013 du Tribunal de commerce de Saint-Etienne qui déclare irrecevables les interventions volontaires des six sociétés au motif que l'exercice d'un droit est personnel et que les actions de groupe ne sont pas recevables, qui constate la résiliation du contrat conclu entre Jercar et Avos, qui constate l'indépendance des contrats de location et de prestation et qui rejette l'ensemble des demandes de la société Jercar à l'encontre de la société Locam au motif que le risque économique lié à la seule prestation de location du matériel ne peut être assumé par le bailleur ;
Vu l'appel régulièrement formé la société Jercar et consorts le 20 décembre 2013 ;
Vu les conclusions en date du 23 décembre 2014 par lesquelles la société Jercar et consorts concluent à la réformation du jugement entrepris aux motifs que les contrats de location et de maintenance sont dépendants et que l'intervention volontaire à l'instance des six autres sociétés est recevable ;
Vu ces mêmes conclusions par lesquelles les sociétés Jercar et consorts demandent à la cour à titre principal :
1) de dire recevables les interventions volontaires des sociétés BCG, BAJ, Pot Express, ABJC, JB et Bond.
2) de dire que les contrats de location et de maintenance forment un ensemble contractuel, que la société Avos a cessé d'exécuter ses obligation contractuelles depuis 2009, que la société Eyelink n'a jamais repris le contrat en raison de sa liquidation, que la clause de divisibilité contractuelle est inapplicable, en conséquence, prononcer la résolution judiciaire du contrat entre Jercar et Locam ;
3) et à titre subsidiaire de dire que le contrat entre Locam et Jercar conduit à un déséquilibre manifestement excessif au profit de Locam et par conséquent, de prononcer la résolution judiciaire du contrat conclu entre les sociétés Jercar et Locam, ainsi qu'entre la société Locam et les six sociétés intervenantes volontaires ;
Vu les conclusions en date du 8 décembre 2014 par lesquelles la société Locam conclut à la confirmation du jugement et demande à la cour de condamner la société Jercar à lui verser la somme de 3 250,90 euro au titre des loyers impayés ;
Vu l'ordonnance de clôture en date du 10 février 2015.
DECISION
1. Les sociétés Jercar et Locam ont signé un contrat de location, le 27 février 2008, d'une durée de 48 mois. Ce contrat avait pour objet la location de matériel de vidéo surveillance fourni par la société Avos, qui assurait également l'entretien de ce matériel dans les 7 magasins Midas concernés par des contrats similaires.
2. La société Avos a été mise en liquidation judiciaire le 6 octobre 2008.
La société Jercar a souhaité mettre fin au contrat de location le 24 décembre 2009. La société Locam, par une lettre du 22 janvier 2010, a refusé en expliquant que la prestation était désormais assurée par la société Eyelink. Cette société a été placée en liquidation judiciaire le 25 juin 2009.
3. Par un courrier en date du 24 décembre 2009, la société Jercar a demandé à la société Locam de mettre fin au contrat les liant. La société Locam a refusé, et demandait en cas de rupture anticipée le paiement d'une indemnité de résiliation prévue par le contrat.
Sur la recevabilité des interventions volontaires des sociétés BCG, BAJ, Pot Express, ABJC, JB et Bond
4. Il est soutenu que ces sociétés sont fondées à intervenir à la procédure en cours entre la société Jercar et la société Locam car elles sont liées par des contrats similaires et dépendent du même réseau de distribution Midas et que l'article 325 du Code de procédure civile dispose qu'une telle intervention est recevable s'il existe un lien de connexité suffisant entre l'intervention et le litige originaire.
5. Mais comme l'a relevé à bon droit le premier juge, les sept sociétés appelantes ne sont pas liées par le même contrat mais bien par sept contrats distincts de location qui ne peuvent dès lors constituer le même litige. Si le défendeur et les demandes sont les mêmes, les demandeurs sont des personnes morales distinctes, liées avec la société Locam par des contrats distincts.
6. Mais encore, aux termes de l'article 325 du Code de procédure civile, leur intervention, pour être recevable doit se rattacher aux prétentions initiales des parties par un lien suffisant, ce qui n'est pas le cas en l'espèce dans la mesure où il s'agit d'actions en exécution de contrats qui sont propres à chaque société qui doit engager sa propre action et lier un lien d'instance avec la société Locam avec laquelle chacune a conclu un contrat unique qui n'est pas un contrat de groupe.
7. En conséquence, les interventions volontaires des sociétés BCG, BAJ, Pot Express, ABJC, JB et Bond sont déclarées irrecevables par la cour. Le jugement doit être confirmé sur ce point.
Sur l'indépendance des contrats de location et de maintenance
8. La société Jercar soutient que le contrat de location souscrit avec la société Locam doit être résilié en raison de l'inexécution par la société Avos et par la société Eyelink de leurs prestations dans la mesure où ces deux contrats font partie d'un même ensemble contractuel, les rendant indivisibles.
9. Mais le contrat de location entre la société Jercar et la société Locam n'a que pour objet la location financière du matériel. Le contrat souscrit avec la société Avos a pour objet la mise à disposition et la maintenance du matériel loué.
10. Mais comme l'a relevé le premier juge, le défaut des prestations de la société Avos ou de la société Eyelink ne fait pas nécessairement obstacle au fonctionnement du matériel loué et rien n'empêchait la société Jercar de trouver un autre prestataire de service.
11. Mais le contrat de location financière signé entre les sociétés Locam et Jercar stipule que les contrats sont juridiquement indépendants et que les difficultés d'exécution ne sauraient justifier le non-paiement des loyers.
12. En conséquence, comme l'a retenu le premier juge, l'indivisibilité des contrats n'est nullement démontrée et cette prétention doit être rejetée. Le jugement est confirmé sur ce point.
13. Le contrat de location ayant été signé pour une durée irrévocable de 48 mois, et n'ayant pas été résilié par la cour, la société Jercar doit les loyers restés impayés à la société Locam. La cour condamne donc la société Jercar à verser à la société Locam la somme de 3 250,90 euro outre la clause pénale de 10 % avec intérêts au taux légal à ce titre.
Sur les dispositions de l'article L. 442-6, I 2° du Code de commerce
14. La société Jercar soutient que le contrat souscrit avec la société Locam est manifestement déséquilibré dans les droits et obligations des parties. La société Locam de son côté soutient que cette demande est irrecevable faute pour la cour de disposer du pouvoir juridictionnel de statuer sur celle-ci.
15. En effet, comme le soutient à raison la société Locam, les demandes fondées sur les dispositions de l'article L. 442-6, I 2° du Code de commerce relèvent de la compétence exclusive de la cour d'appel de Paris.
16. Cette cour n'étant pas désignée par le texte visé, elle est dépourvue de tout pouvoir juridictionnel à l'égard du litige portant sur l'existence d'une telle pratique.
17. Ce défaut de pouvoir constitue non pas une exception d'incompétence comme le soutient la société Jercar mais une fin de non-recevoir, qui peut être soulevée à en tout état de cause, conformément aux dispositions de l'article 123 du Code de procédure civile.
18. La demande de la société Jercar à ce titre est donc déclarée irrecevable par la cour.
19. L'équité commande d'allouer la somme de 3 000 euro à la société Locam.
20. La société Jercar qui perd en appel est tenue aux dépens de cette procédure.
Par ces motifs : LA COUR, - confirme en toutes ses dispositions le jugement en date du 5 novembre 2013 du Tribunal de commerce de Saint-Etienne ; - y ajoutant ; - condamne la société Jercar à verser à la société Locam la somme de 3 250,90 euro outre la clause pénale de 10 % avec intérêts au taux légal au titre des loyers impayés ; - condamne solidairement les sociétés Jercar, BCG, BAJ, Pot Express, ABJC, JB et Bond à verser la somme de 3 000 euro à la société Locam en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile ; - condamne solidairement les sociétés Jercar, BCG, BAJ, Pot Express, ABJC, JB et Bond aux dépens de l'appel - autorise les mandataires des parties qui en ont fait la demande à les recouvrer aux formes et conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.