Livv
Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 12 juin 2015, n° 13-21380

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Nys

Défendeur :

Arcelormittal Construction France (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Aimar

Conseillers :

Mmes Nerot, Renard

Avocats :

Mes Cheviller, Fabiani, Bodin-Casalis, Payet-Godel

TGI Paris, 3e ch. sect. 4, du 3 oct. 201…

3 octobre 2013

La société Arcelormittal Construction France est spécialisée dans la conception, la fabrication et la commercialisation de produits finis destinés à être utilisés dans l'activité du bâtiment et de la construction. Elle fabrique et commercialise notamment depuis les années 1980 un " panneau sandwich " traditionnellement utilisé pour le bardage et la couverture, notamment dans le cadre d'usines à froid. Pour cette application, ces panneaux sont dénommés habituellement panneaux frigorifiques.

A partir de ce panneau, ont été mis au point un panneau destiné à la fabrication de toitures dit Tap (Tuile Acier Plâtre) et un panneau destiné à la fabrication de murs dit Paroi (Paroi Acier Rapide Ossature Intégré). Il a ensuite été imaginé d'associer ces deux panneaux à un système de plancher pour obtenir un projet constructif global appelé Energy house puis Tecoia.

La société Arcelormittal Construction France a fait appel à Monsieur Michel Nys, architecte, dans le cadre de ce projet Energy house. Elle a conclu avec lui un accord de confidentialité le 14 juin 2006 et plusieurs réunions ont été organisées notamment de 2006 à 2008.

Le panneau Tap a donné lieu à un dépôt de brevet à l'INPI par la société Arcelormittal Construction France le 23 octobre 2007 et le panneau Paroi à un dépôt de brevet à l'INPI le 10 octobre 2008.

Quatre chantiers tests se sont ensuite déroulés, le premier sur un terrain appartenant à un salarié de l'entreprise et les trois autres sur des sites appartenant à la société Arcelormittal Construction France et situés à Montataire, Bourg Saint Andeol et Diemoz. Monsieur Michel Nys a participé à ces trois chantiers en 2008 et 2009 et a été rémunéré pour une mission complète d'architecte.

Monsieur Michel Nys a par ailleurs proposé la réalisation de bâtiments avec des panneaux Tap et Paroi et il a conclu le 2 octobre 2006 un contrat d'architecte avec les époux Feldman pour une construction à Noisy-le-Grand. La société Arcelormittal Construction France a fourni des panneaux Tap et Paroi tout en faisant signer à Monsieur Feldman un accord de confidentialité. Ce chantier a rencontré des difficultés.

Monsieur Michel Nys a conclu d'autres contrats d'architecte prévoyant la mise en œuvre de ces panneaux mais ceux-ci n'ont pas abouti.

La société Arcelormittal Construction France est en outre entrée en relation avec la société de promotion immobilière Nexity et a conclu avec elle le 11 février 2009, un projet de mise en œuvre du système de construction Energy house à la Seyne-sur-mer. Ce projet a donné lieu à la publication de deux articles dans le journal spécialisé Le Moniteur, à l'initiative de la société Nexity, à la suite desquels Monsieur Michel Nys a lui-même fait paraître un article dans le même journal, le 23 octobre 2009.

La société Arcelormittal Construction France et la société Nexity ont cependant renoncé à la réalisation de ce projet pour des raisons techniques et économiques.

Après une mise en demeure du 30 juillet 2010, Monsieur Michel Nys a fait assigner les sociétés Arcelormittal Construction France et Arcelor Mittal France devant le Tribunal de grande instance de Paris les 18 et 20 octobre 2011 en revendication des brevets portant sur les panneaux Tap et Paroi déposés selon lui en violation de l'accord de confidentialité du 14 juin 2006 et en fraude de ses droits, ainsi qu'en contrefaçon de droits d'auteur par reproduction non autorisée et sans indication de son nom de photographies des ouvrages qu'il a réalisés, et en concurrence déloyale.

Par jugement en date du 3 octobre 2013, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de grande instance de Paris a :

- prononcé la mise hors de cause de la société Arcelor Mittal France,

- écarté des débats les pièces 47 et 49 du demandeur,

- dit que Monsieur Michel Nys ne justifie pas de sa qualité de co-inventeur,

- rejeté la demande de transfert partiel des brevets FR 07 07392 et 0856882,

- dit que la société Arcelormittal Construction France n'a pas violé l'accord de confidentialité du 14 juin 2006 la liant à Michel Nys,

- dit que la société Arcelormittal Construction France n'a pas commis d'acte de déloyauté en profitant du travail de Michel Nys sans le rémunérer,

- dit que la société Arcelormittal Construction France n'a pas rompu brutalement ses relations avec Michel Nys,

- rejeté l'ensemble des demandes se rapportant à ces faits,

- dit que la société Arcelormittal Construction France a porté atteinte aux droits d'auteur de Michel Nys sur ses œuvres architecturales en les reproduisant sans son autorisation et sans indication de son nom,

- condamné la société Arcelormittal Construction France à payer à Michel Nys la somme de 500 euro en réparation de l'atteinte à son préjudice patrimonial et 5 000 euro en réparation de l'atteinte à son droit moral,

- rejeté la demande de publication de la décision,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné la société Arcelormittal Construction France aux dépens.

Monsieur Michel Nys a interjeté appel de ce jugement le 6 novembre 2013.

Par dernières écritures notifiées par voie électronique le 20 mars 2015, auxquelles il est expressément renvoyé, Monsieur Michel Nys demande à la cour de :

- réformer le jugement en date du 3 octobre 2013 sauf en ce qu'il a reconnu le principe de la reproduction de ses œuvre architecturale sans son autorisation et sans mention de son nom et statuant de nouveau,

- dire que les sociétés Arcelor Mittal France (sic) et Arcelor Mittal Construction France ont violé les obligations du contrat en date du 14 juin 2006

- dire que les sociétés Arcelor Mittal France et Arcelor Mittal Construction France lui ont soustrait les inventions objets des brevets n° 07 07392 et 08 56882,

- dire que les sociétés Arcelor Mittal France et Arcelor Mittal Construction France ont commis des actes de parasitisme en profitant de son travail non rémunéré,

- dire que les sociétés Arcelor Mittal France et Arcelor Mittal Construction France ont brutalement rompu les relations de travail et commerciales établies qu'elles entretenaient avec lui,

En conséquence :

- ordonner le transfert partiel des demandes de brevets n° 07 07392 et 08 56882 à son profit,

- condamner solidairement les sociétés Arcelor Mittal France (sic) et Arcelor Mittal Construction France à lui verser les sommes de :

- 154 000 euro HT correspondant à son travail non rémunéré et à la facture n° 1217,

- 800 000 euro correspondant aux chantiers annulés,

- 150 000 euro au titre de la contrefaçon de ses droits d'auteur, consistant à la reproduction de ses œuvres sans autorisation,

- 150 000 euro au titre de la violation de son droit à la paternité ;

- 746 799 euro correspondant à sa perte directe d'honoraires,

- 365 960 euro correspondant à la perte d'honoraires sur des projets initiés, sans contrat signé,

- 12 802 560 euro correspondant à sa perte de chance et à la rupture brutale des relations commerciales et de travail subie,

- ordonner la publication du jugement à intervenir (sic) dans cinq journaux ou magazines, en format page entière, aux frais solidaires des sociétés Arcelor Mittal Construction France et Arcelor Mittal France, et de son choix, sans que le coût de chaque insertion ne puisse excéder la somme de 5 000 euro HT,

- condamner solidairement les sociétés Arcelor Mittal France et Arcelor Mittal Construction France à lui verser la somme de 20.000 euro en application de l'article 700 du Code de la procédure civile,

- condamner solidairement les sociétés Arcelor Mittal France et Arcelor Mittal Construction France en tous les dépens, frais d'huissier et de constat.

Par dernières écritures notifiées par voie électronique le 7 avril 2015, auxquelles il est expressément renvoyé, la société Arcelormittal Construction France entend voir :

- dire Monsieur Nys recevable mais mal fondé en son appel,

- le débouter de l'ensemble de ses demandes,

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

- condamner Monsieur Nys à lui verser la somme de 20 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- le condamner aux entiers dépens dont distraction au profit de son conseil conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 16 avril 2015.

SUR CE,

Considérant qu'il y a lieu au préalable de relever que seule la société Arcelormittal Construction France a été intimée par Monsieur Michel Nys à l'exception de la société Arcelormittal France et qu'en conséquence les demandes formées à l'encontre de cette dernière sont sans objet ;

Sur la demande en paiement de la note d'honoraires du 4 septembre 2012

Considérant qu'en cours de procédure de première instance, Monsieur Nys a émis une note d'honoraires de 154 000 euro HT dont l'intitulé se lit ainsi : " prestation de services pour l'élaboration projet Energy House (Tecoia) de juin 2006 à octobre 2009 suivant détail : 70 réunions de travail d'une durée moyenne de 6 heures et 5 heures d'analyse et de rédaction, soit 770 heures au taux horaire de 200 euro HT " ;

Qu'il soutient avoir mené auprès de la société Arcelormittal Construction France une mission de conseil pendant trois années de 2006 à 2008, antérieurement et indépendamment de sa mission d'architecte pour les trois chantiers tests de Montataire, Bourg Saint Andeol et Diemoz pour laquelle il a reçu une rémunération de 34 000 euro HT ;

Qu'il indique à cet effet avoir participé à près de 70 réunions de travail, réfléchi et travaillé sur les inventions réalisées, envoyé des notes de travail et échangé sur le dossier de façon générale (plus de 700 emails entre juin 2007 et novembre 2009), réalisé des plans, et notamment ceux de " Energy House ", fait remonter les informations et réalisé des essais sur ses chantiers personnels sans être rémunéré, ce qui représenterait près de 770 heures de travail facturées à un taux horaire moyen de consultant de 200 euro, dont il demande rémunération ;

Considérant toutefois qu'il y a lieu de relever en premier lieu que la première réunion avec la société intimée s'est tenue en mars 2006 et que la demande de permis de construire pour le projet de Montataire est datée du 15 mai 2008 ; que les pièces versées aux débats par Monsieur Nys démontrent l'existence d'environ 30 réunions de travail allant du 6 mars 2006 au 8 juillet 2008, et au cours desquelles au demeurant sont évoqués ses projets personnels ; que le constat d'huissier que l'appelant a fait réaliser le 16 avril 2013 n'établit que l'existence de dix cahiers comprenant des notes manuscrites d'octobre 2005 à janvier 2010, parfois illisibles, parfois en langue chinoise, difficilement exploitables, et en tous cas non explicitées dans ses dernières écritures ;

Que surtout la société Arcelormittal Construction France et Monsieur Nys, ce dernier en sa qualité d'architecte DPLG, ont signé le 14 juin 2006 un accord de confidentialité aux termes duquel, afin de tester la faisabilité du système Arcelor " Panneau sandwich plâtre porteur des maisons prototypes, les parties se sont rapprochées et ont convenu de la réalisation de quelques chantiers tests " ; que dans sa note de travail du 19 juillet 2007, Monsieur Nys indique lui-même que " (le concept constructif global par panneaux isolants structure intégrée) est le fruit de la collaboration entre les bureaux d'étude d'Arcelormittal Bâtiment et Innovation pour le concept matériaux et Nys Michel Architecte pour le développement architectural dans ses finalités et sa mise en œuvre " ; que, par ailleurs, Monsieur Nys a adressé à la société intimée le 18 novembre 2008, soit en fin de la période considérée, une note d'honoraires d'un montant initial de 35 240 euro HT ramené à 34 000 euro après négociation, et couvrant comme mentionné dans la proposition, ses missions complètes d'architecte pour les trois chantiers réalisés sans aucune mention de quelconques réunions entre 2006 et 2008 ; qu'enfin il a lieu de relever qu'aucun document contractuel ne prévoyait une quelconque mission de consultant au profit de l'appelant au-delà de sa mission d'architecte pour laquelle il a été rémunéré ;

Que le jugement mérite donc confirmation en ce qu'il a rejeté la demande de rémunération complémentaire formée par Monsieur Michel Nys ;

Sur les demandes relatives aux brevets

Considérant que la société Arcelor Construction France a déposé le 23 octobre 2007 auprès de l'INPI une demande de brevet français ayant pour titre " panneau sandwich pour couverture de bâtiment ", laquelle a été publiée le 24 avril 2009 sous le numéro 2 922 567, et enregistrée sous le numéro 07 07392 ; cette demande a servi de base à une demande de brevet européen du 23 octobre 2008, publiée le 29 avril 2009, puis retirée le 26 mars 2010 ; que l'intimée a également déposé le 10 octobre 2008 une demande de brevet ayant pour titre " panneau composite pour paroi et procédé de fabrication ", laquelle a été publiée le 16 avril 2010 sous le numéro 2 937 064, et enregistrée sous le numéro 08 56882 ; cette demande a été étendue le 11 mars 2009 à une demande de brevet international publiée sous le n° WO 2010/040921 ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 611-8 du Code de la propriété intellectuelle "si un titre de propriété industrielle a été demandé soit pour une invention soustraite à l'inventeur ou à ses ayants cause, soit en violation d'une obligation légale ou conventionnelle, la personne lésée peut revendiquer la propriété de la demande ou du titre délivré. L'action en revendication se prescrit par trois ans à compter de la publication de la délivrance du titre de propriété industrielle" ;

Que se fondant sur ces dispositions, Monsieur Nys sollicite à son profit le transfert partiel (sic) des demandes de brevets n° 07 07392 relatif au " panneau sandwich plâtre porteur ", et n° 08 56882 relatif au " panneau composite pour paroi et procédé de fabrication " en faisant valoir que ces demandes ont été déposées en fraude de l'accord de confidentialité du 14 juin 2006 et en fraude de ses droits ;

Or il a été dit s'agissant de l'accord de confidentialité intervenu entre les parties le 14 juin 2006 que l'objet de celui-ci est de tester la faisabilité du système Arcelor " Panneau sandwich plâtre porteur " des maisons prototypes, les parties étant convenues de la réalisation de quelques chantiers tests ;

Qu'aux termes de l'article 1 point 3 de cet accord, les parties s'engagent à ne faire usage des informations fournies par l'une ou l'autre que pour l'exécution des essais relatifs au système étudié, aucune des parties ne pouvant, notamment, utiliser lesdites informations, et tout ou partie, pour déposer un brevet ; qu'il en résulte que la société Arcelormittal Construction France ne pouvait déposer une demande de brevet couvrant les informations, au demeurant non identifiées en l'espèce par l'appelant, que ce dernier aurait pu lui fournir quant à l'exécution des essais relatifs au système étudié, et non pas une demande de brevet couvrant ses inventions développées antérieurement à la date d'entrée en vigueur de l'accord ; que par ailleurs Monsieur Nys, qui a lui-même indiqué dans les demandes de permis de construire du 20 janvier 2009 concernant l'immeuble de Diemoz et du 25 février 2009 concernant celui de Bourg Saint Andéol, que " ces matériaux et techniques de mise en œuvre font l'objet de brevets internationaux " ne peut valablement soutenir ne pas avoir été informé des dépôts des demandes de brevets en cause ;

Considérant s'agissant de la violation des droits de Monsieur Nys que celui-ci fait valoir qu'il est l'un des co-inventeurs de l'invention issue du brevet n° 0707392 et/ou du brevet 0856882 puisqu'il a participé pendant plus de trois ans à l'étude et au développement de ce concept constructif innovant ;

Qu'il ajoute avoir effectué un véritable travail d'étude et développement, notamment sur le terrain, en faisant part de ses réflexions et indications à l'équipe Arcelor, afin que les panneaux puissent être adaptés pour l'habitation, ce qui révélerait une véritable activité inventive de sa part confirmée par un email de la société Arcelor du 7 janvier 2009 ainsi que par ses notes et comptes rendus de réunions de mars et juin 2006 et des 17 janvier 2007, 14 mars 2007, 8 juin 2007, 22 juin 2007 et 19 décembre 2007, en comparaison avec les revendications " du brevet " ;

Que toutefois, les termes laconiques du mail susvisé contenant échange de vœux et remerciements pour (sa) confiance et (son) énergie ne sont pas de nature à établir une quelconque activité inventive de la part Monsieur Michel Nys dans l'élaboration des inventions en cause ;

Que s'agissant des notes de travail, il y a lieu de relever en premier lieu qu'ont également été traités lors des réunions invoquées des sujets totalement étrangers aux brevets revendiqués ;

Que par ailleurs la société intimée fait valoir à juste titre qu'il n'est établit aucun lien entre les notes de réunions de 2006 et les brevets en cause ;

Que Monsieur Nys indique que la note de réunion du 17 janvier 2007 d'une part montre 'le principe du positionnement des structures métalliques pour assurer une isolation phonique sans pont thermique " tout en reconnaissant que " cette disposition n'apparaît pas dans l'énoncé des revendications des demandes de brevet, et d'autre part que la constitution de jupe fait l'objet de croquis " d'idée sans validation " ; qu'il n'indique pas plus où se retrouveraient dans les brevets les capotages rajoutés aux angles des bâtiments dont il fait état ;

Que s'agissant de la note de réunion du 14 mars 2007, il indique, sans plus de précisions, que cette note montrerait une étude sur la forme des emboîtements pour une meilleure étanchéité à l'air, et que ce " détail " apparaît dans les deux demandes de brevets (sous des références qui sont erronées dans ses dernières écritures) sans aucune analyse notamment du petit croquis qui se trouve en page 3 de cette note, à laquelle se réfère l'intimée, en comparaison avec la ou les demandes de brevets revendiquées ;

Qu'il en est de même de la note de réunion du 8 juin 2007 à laquelle l'appelant se réfère en énonçant, là encore sans plus de précisions, que cette dernière montrerait, " la liaison de deux panneaux formant angle des bâtiments " et " les jupes de recouvrement des têtes de planchers " sans identifier et a fortiori analyser les multiples croquis dessinés à la main et entourés de commentaires manuscrits en lien avec la ou les demandes de brevets en cause, étant précisé qu'il n'appartient pas à la cour de procéder à une telle démonstration en l'absence d'analyse sur ce point par l'appelant dans ses écritures ;

Que selon Monsieur Nys, la note de réunion du 22 juin 2007 montrerait " les goulottes internes permettant les passages de câbles avec éventuellement un pré-câblage " et ce détail apparaîtrait dans le brevet 2937064 et dans son extension internationale (avec toujours des renvois erronés aux revendications) sans indiquer quel croquis de cette note est concerné alors qu'elle en comporte de nombreux et sans répondre à l'argumentation contraire de l'intimée sur ce point ;

Qu'en ce qui concerne enfin la note de réunion du 19 décembre 2007 il indique qu'elle montre " la reprise et l'approfondissement de la mise en œuvre de la jupe d'isolation en tête de plancher " sans faire aucun lien avec les brevets qu'il revendique ;

Considérant dès lors que Monsieur Nys, qui ne se prévaut que de notes de réunions ou croquis non explicités, qui en tout état de cause ne présentent pas l'ensemble des caractéristiques du ou des brevets concernés, ne démontre ainsi nullement la qualité d'inventeur qu'il revendique, étant ajouté que les témoignages de ses clients ne sont pas plus de nature à établir cette qualité d'inventeur ;

Que le jugement qui a rejeté la demande de transfert des deux demandes de brevets litigieuses doit en conséquence être confirmé ;

Sur la divulgation à des tiers en fraude du contrat en date du 14 juin 2006 et des droits de Monsieur Nys

Considérant que l'appelant développe dans ses dernières écritures un chapitre intitulé " Sur la divulgation à des tiers en fraude du contrat en date du 14 juin 2006 et des droits de Monsieur Nys " dans lequel il ne fait toutefois que relater un accord conclu en 2008 entre les sociétés Arcelormittal Construction et Nexity ayant fait l'objet d'un article le 12 mars 2009 dans le magazine " Le Moniteur ", spécialisé en matière de construction, puis d'un droit de réponse de sa part, et qui aurait servi de prétexte pour l'évincer des projets en cours, sans en tirer aucune conséquence juridique ni formuler aucune demande spécifique à ce titre ;

Que ces arguments correspondant en tout état de cause à ceux développés au chapitre concernant la rupture brutale des relations commerciales entre les parties seront ci-après examinés ;

Sur les droits d'auteur

Considérant les dispositions de l'article L. 112-1 du Code de la Propriété Intellectuelle protègent par le droit d'auteur toutes les œuvre de l'esprit, quels qu'en soient le genre, la forme d'expression, le mérite ou la destination, pourvu qu'elles soient des créations originales ;

Que selon l'article L. 112-2, 12° du même Code, sont considérées notamment comme œuvres de l'esprit les ouvrages plastiques relatifs à l'architecture ;

Considérant en l'espèce que Monsieur Michel Nys reproche à la société intimée d'avoir reproduit sans autorisation et sans mention de sa qualité d'architecte ni de " concepteur " du système, les ouvrages qu'il a réalisés à Torcy (chantier Monsieur Louge), à Paris (chantier Villa de Ternes de Monsieur Lebizay) et à Diemoz ;

Qu'il fait grief aux premiers juges de n'avoir retenu la contrefaçon qu'en ce qui concerne le chantier parisien de la Villa des Ternes, alors que selon lui les reproductions sans droit des deux autres ouvrages doivent également être sanctionnées ;

Que la société Arcelormittal Construction France ne conteste pas dans ses dernières conclusions la décision du tribunal sur ce point, y compris sur le quantum des dommages-intérêts alloués du fait de la reproduction illicite de l'œuvre Villa des Ternes mais invoque une négligence de sa part ; qu'elle fait valoir que cette maladresse n'est pas significative de mauvaise foi mais résulte d'un simple oubli de ses services de communication de supprimer ces photographies et qu'à ce jour, il n'y a plus aucune photo et/ou quelconque référence à Tecoia sur son site internet et dans les pages qui lui sont dédiées, autres que dans un rapport public de 2010 qui n'est plus présent qu'en archive, et que de même, le constat d'huissier établi par Maître Klein le 11 mars 2013 révèle que les deux photos oubliées initialement ont été retirées du site ;

Considérant toutefois que la bonne foi invoquée est inopérante en la matière, de sorte qu'il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu la contrefaçon par reproduction illicite de l'ouvrage Villa des Ternes dont Monsieur Nys est l'auteur et alloué à ce dernier la somme de 500 euro en réparation de l'atteinte portée à son préjudice patrimonial et celle de 5 000 euro en réparation de l'atteinte portée à son droit moral qui sont de nature à réparer son entier préjudice ;

Que pour le surplus et en l'absence de toute contestation de l'intimée quant à l'originalité des deux autres œuvre architecturales revendiquées et aux reproductions non autorisées de ces deux autres ouvrages, aucune explication n'étant consacrée à ce sujet dans ses dernières écritures, et les reproductions étant en tout état de cause établies par les constats d'huissier des 23 mai 2011 et décembre 2012, il sera ajouté au jugement et alloué de ce chef à Monsieur Nys les sommes supplémentaires de 500 euro en réparation des atteintes portées à son préjudice patrimonial et de 5 000 euro en réparation des atteintes portées à son droit moral pour chacune des reproductions illicites des œuvre de Torcy et de Diemoz dont il est l'auteur ;

Que les dommages-intérêts ainsi alloués étant de nature à indemniser l'appelant de son entier préjudice, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de publication de la présente décision qui est en outre sollicitée ;

Sur la déloyauté

Considérant que pour soutenir que la société intimée a fait preuve de déloyauté à son égard,

Monsieur Nys indique que cette dernière s'est appropriée ses travaux de plus de trois années sans le rémunérer, ce qui correspond aux moyens déjà développés ci-dessus et sur lesquels la cour a déjà statué ;

Sur la rupture brutale des relations commerciales

Considérant enfin que se fondant sur les dispositions des articles 442-6, I, 5° du Code de commerce et 1382 du Code civil, Monsieur Nys soutient que le comportement de la société Arcelormittal Construction France s'analyse également en une brusque rupture des relations commerciales établies ; qu'il fait ainsi grief aux premiers juges d'avoir considéré que sa mission était ponctuelle alors qu'elle consistait à construire trois bâtiments en 2008 ; qu'il précise que sa relation avec Arcelormittal Construction France est une relation d'affaire suivie, stable et régulière, la collaboration qui avait pour objet de mener le projet commun de développement d'un concept constructif abouti et novateur ayant duré plus de trois ans, de sorte qu'il ne pouvait pas légitimement s'attendre à être évincé sans préavis, ni indemnité de ce projet par son partenaire d'affaire ; qu'il sollicite ainsi réparation de ses préjudices moral et économique à hauteur de 12 802 560 euro incluant une perte de chance ;

Mais considérant que Monsieur Michel Nys a conclu avec la société Arcelormittal Construction France un contrat d'architecte en 2005 portant sur l'étude et la conception de salles de classe et de bâtiments de santé, et un second contrat en 2008, suivant sa proposition d'honoraires du 18 novembre 2008, portant sur la réalisation des plans et le dépôt des permis de construire de trois bâtiments tests du projet Tecoia, sans qu'aucune exclusivité ne lui ait été consentie ;

Qu'il ne s'agit donc aucunement de relations suivies mais bien de missions ponctuelles, y compris pour la seconde, le fait qu'un accord de confidentialité ait été conclu pour couvrir les informations confidentielles issues des chantiers tests étant sans incidence sur la qualification des relations intervenues entre les parties ;

Que c'est donc à bon droit que le tribunal a estimé que si la mission d'architecte de Monsieur Nys liée au projet Energy House avait été longue, elle avait néanmoins été ponctuelle et n'avait pas vocation à se poursuivre une fois réalisés les chantiers tests par nature aléatoires dès lors qu'ils avaient pour but de démontrer la faisabilité du projet Energy House qui finalement a été abandonné après s'être révélé non viable tant économiquement que techniquement ;

Que l'appelant doit donc être également débouté de ses demandes indemnitaires relatives à la rupture brutale des relations commerciales entre les parties ;

Sur les autres demandes

Considérant qu'il y a lieu de condamner la société Arcelormittal Construction France qui succombe partiellement, aux entiers dépens qui comprendront les frais de constats d'huissier des 23 mai 2011 et 7 décembre 2012 ;

Qu'en outre, elle doit être condamnée à verser à Monsieur Nys, qui a dû exposer des frais irrépétibles pour faire valoir ses droits, une indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile qu'il est équitable de fixer à la somme totale de 5 000 euro.

Par ces motifs, Confirme en toutes ses dispositions jugement rendu le 3 octobre 2013 entre les parties par le Tribunal de grande instance de Paris, Y ajoutant, Dit que la société Arcelormittal Construction France a porté atteinte aux droits d'auteur de Monsieur Michel Nys sur ses deux œuvres architecturales réalisées à Torcy et à Diemoz en les reproduisant sans son autorisation et sans indication de son nom, En conséquence, Condamne la société Arcelormittal Construction France à payer à Monsieur Michel Nys la somme de 500 euro en réparation de l'atteinte à son préjudice patrimonial et 5 000 euro en réparation de l'atteinte à son droit moral pour chacune de ces deux atteintes. Condamne la société Arcelormittal Construction France à payer à Monsieur Michel Nys la somme de 5 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile. Rejette toutes autres demandes, Condamne la société Arcelormittal Construction France aux entiers dépens qui comprendront les frais des constats d'huissier des 23 mai 2011 et 7 décembre 2012.