CE, 3e sous-sect., 9 juin 2015, n° 387366
CONSEIL D'ÉTAT
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Brenntag (SA)
Défendeur :
Autorité de la concurrence
LE CONSEIL : - Vu la procédure suivante : - Par une requête, enregistrée le 23 janvier 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Brenntag SA demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, la demande d'informations, assortie du rappel des sanctions auxquelles elle s'exposerait à défaut de réponse positive, que lui ont adressée par lettre du 25 novembre 2014 des rapporteurs permanents de l'Autorité de la concurrence ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euro au titre de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le Code de commerce ; - le Code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Pierre Lombard, auditeur, - les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ; Considérant ce qui suit :
1. Dans le cadre de l'instruction relative à des pratiques anticoncurrentielles prohibées par l'article L. 420-1 du Code de commerce, dans lesquelles la société Brenntag SA serait impliquée, des rapporteurs permanents de l'Autorité de la concurrence ont adressé le 25 novembre 2014 une lettre à cette société pour lui demander des informations et la communication de divers documents, reprenant des demandes d'informations précédemment formulées et auxquelles la société avait répondu de manière incomplète. Cette lettre mentionnait, en outre, qu'à défaut d'obtempérer dans les délais impartis, la société Brenntag SA s'exposerait à l'application des sanctions pour obstruction à l'instruction prévues au V de l'article L. 464-2 du Code de commerce. La société Brenntag SA demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la demande d'informations du 25 novembre 2014.
2. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 464-8 du Code de commerce : " Les décisions de l'Autorité de la concurrence mentionnées aux articles L. 462-8, L. 464-2, L. 464-3, L. 464-5, L. 464-6, L. 464-6-1 et L. 752-27 sont notifiées aux parties en cause et au ministre chargé de l'Economie, qui peuvent, dans le délai d'un mois, introduire un recours en annulation ou en réformation devant la Cour d'appel de Paris ". Ces dispositions, qui codifient les dispositions de l'article 2 de la loi du 6 juillet 1987 transférant le contentieux des décisions du Conseil de la concurrence, devenu l'Autorité de la concurrence, à la juridiction judiciaire, s'appliquent aux décisions que prend l'Autorité de la concurrence en matière de pratiques anticoncurrentielles.
3. La demande contestée par la société Brenntag SA lui a été adressée dans le cadre de l'instruction d'une affaire relative à des pratiques anticoncurrentielles. Cette demande, qui n'est pas susceptible de faire grief par elle-même à la société Brenntag SA indépendamment de la procédure suivie devant l'Autorité de la concurrence dans laquelle elle s'inscrit, ne peut être regardée comme un acte détachable de cette procédure susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. En outre, si, faute d'avoir répondu, la société fait l'objet des sanctions prévues au V de l'article L. 464-2 du Code de commerce, il résulte des dispositions précitées de l'article L. 464-8 du même Code qu'elle peut les contester devant le juge judiciaire. Il suit de là que la juridiction administrative n'est pas compétente pour connaître de la requête de la société Brenntag SA. Celle-ci doit, par suite, être rejetée comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.
DECIDE
Article 1er : La requête de la société Brenntag SA est rejetée comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Brenntag SA, à l'Autorité de la concurrence et au ministre de l'Economie, de l'Industrie et du Numérique.