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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 2 juillet 2015, n° 10-25266

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Promedico Ltd (Sté)

Défendeur :

Sanofi Pasteur (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Perrin

Conseillers :

MM. Birolleau, Douvreleur

Avocats :

Mes Fisselier, Lacroix, Teytaud, Gouesse

T. com. Lyon, du 5 oct. 2010

5 octobre 2010

Faits et procédure

Par contrat signé le 15 avril 1980, la société Promedico est devenue l'agent commercial exclusif pour la commercialisation de vaccins en Israël, de la société Institut Merieux aux droits de laquelle vient la société Sanofi Pasteur ;

L'article 2 du contrat accorde une exclusivité à la société Promedico. En contrepartie, l'article 3 mentionne que la société Promedico s'engage à ne pas commercialiser des produits concurrents de ceux de son cocontractant ;

L'article 9 prévoit qu'en cas de violation des obligations contractuelles par l'une des parties, l'autre sera en droit de rompre le contrat à effet immédiat ;

Parallèlement à son activité d'agent commercial, la société Promedico a également assuré, les dernières années de la relation, une activité de distribution de vaccins de la société Sanofi Pasteur ;

En 2005, la société Promedico s'est rapprochée de la société Neopharm qui, notamment, distribue en Israël des produits pharmaceutiques dont des vaccins du laboratoire Chiron ;

Le 4 avril 2006, la société Sanofi Pasteur, estimant que la société Promedico avait violé son obligation d'exclusivité, a pris l'initiative de rompre les relations commerciales à effet immédiat pour les vaccins contre la grippe, à effet de la fin de l'année pour les autres produits ;

Plus d'un an après la rupture, le conseil de la société Promedico a mis en demeure la société Sanofi Pasteur de lui régler une somme de neuf millions d'euro en réparation du préjudice subi du fait de l'interruption de la relation qu'il estime brutale et abusive ;

C'est dans ces conditions que la société Promedico a assigné, par acte d'huissier du 23 décembre 2008, devant le Tribunal de commerce de Lyon, la société Sanofi Pasteur.

Par jugement du 5 octobre 2010, le Tribunal de commerce de Lyon a :

- jugé que la société Promedico ne saurait prétendre à une quelconque indemnité que ce soit au titre de la rupture de ses relations commerciales de distributeur des produits de la société Sanofi Pasteur ;

- jugé que les manquements relevés constituent autant de fautes graves qui privent la société Promedico de son droit aux indemnités légales auxquelles un agent peut prétendre ;

- débouté en conséquence la société Promedico de l'ensemble de ses demandes ;

- rejeté la demande reconventionnelle formée par la société Sanofi Pasteur ;

- condamné la société Promedico à verser à la société Sanofi Pasteur la somme de 10 000€ en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Vu l'appel interjeté par la société Promedico le 30 décembre 2010 devant la Cour d'appel de Paris contre cette décision.

La société Sanofi Pasteur a saisi le conseiller de la mise en état en concluant à l'irrecevabilité de cet appel, au motif que la Cour d'appel de Lyon aurait seule compétence pour en connaître. Par ordonnance du 5 avril 2012, le conseiller de la mise en état a rejeté cette fin de non-recevoir et jugé l'appel recevable. Par arrêt du 13 décembre 2012, la cour d'appel a confirmé cette ordonnance dans toutes ses dispositions. La société Sanofi Pasteur a, le 15 mars 2013, formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt ;

Par ordonnance du 16 janvier 2014, le conseiller de la mise en état a ordonné un sursis à statuer dans l'attente de l'arrêt à intervenir sur le pourvoi formé le 15 mars 2013 contre l'arrêt du 12 décembre 2012 ;

Par arrêt le 10 avril 2014 qui la Cour de cassation a déclaré non admis le pourvoi formé par la société Sanofi Pasteur.

Vu les dernières conclusions signifiées par la société Promedico le 25 novembre 2014 par lesquelles il est demandé à la cour :

A titre principal :

- constater que, contrairement à ce qui est affirmé dans le jugement dont appel, la société Promedico n'a commis aucun manquement grave à ses obligations contractuelles susceptibles de justifier la rupture sans préavis initiée par la société Sanofi Pasteur ;

A titre subsidiaire :

- constater en tout état de cause, que la tolérance dont a fait preuve la société Sanofi Pasteur à l'égard des prétendus manquements contractuels de la société Promedico l'empêche de se prévaloir de ces prétendues fautes pour tenter de justifier la rupture sans préavis ;

- constater que le Tribunal de commerce de Lyon a, à tort, ignoré les circonstances factuelles illustrant le caractère brutal, abusif et déloyal de la rupture de la relation commerciale initiée par la société Sanofi Pasteur ;

En conséquence :

A titre principal :

- infirmer le jugement du Tribunal de commerce de Lyon du 5 octobre 2010 en ce qu'il a jugé que la rupture initiée par la société Sanofi Pasteur était justifiée et en ce qu'il a débouté corrélativement la société Promedico de l'intégralité de ses demandes d'indemnisation ;

- constater, en conséquence, le caractère brutal, abusif et déloyal de la rupture infligée à la société Promedico par la société Sanofi Pasteur ;

- condamner la société Sanofi Pasteur, en réparation de la rupture brutale et sans préavis, au paiement d'une indemnité de brusque rupture de 3 369 748,72 euro ;

- condamner la société Sanofi Pasteur, en réparation du préjudice commercial et économique subi du fait de la rupture abusive et déloyale, en paiement de dommages-intérêts d'un montant de 5 054 623,08 euro ;

- condamner la société Sanofi Pasteur au paiement de la somme de 200 000 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Et, statuant sur l'appel incident de la société Sanofi Pasteur par conclusions en date du 21 février 2013 :

- confirmer le jugement du Tribunal de commerce de Lyon du 5 octobre 2010 en ce qu'il a rejeté la demande reconventionnelle formée par la société Sanofi Pasteur ;

- débouter la société Sanofi Pasteur de l'intégralité de ses demandes.

L'appelante fait valoir que la rupture a été brutale sans que cette brutalité soit justifiée par des manquements de sa part à ses obligations contractuelles dès lors que, si un changement de contrôle de son actionnariat a eu lieu, il ne s'est pas traduit par un transfert ou une délégation de ses droits à un tiers. Elle ajoute n'avoir pas manqué à l'obligation d'exclusivité stipulée à l'article 3 du contrat puisque les produits du laboratoire Chiron ne sont pas, selon elle, concurrents de ceux de la société Sanofi Pasteur et qu'elle les a distribués pendant plusieurs années avec l'aval de la société Sanofi ;

Elle soutient que les faits de l'espèce caractérisent le caractère abusif et déloyal de la rupture initiée par la société Sanofi Pasteur qui l'a maintenue dans la croyance légitime que les relations allaient se poursuivre normalement ;

Vu les dernières conclusions signifiées par la société Sanofi Pasteur 30 janvier 2015, par lesquelles il est demandé à la cour de :

A titre principal :

- constater que la société Promedico, société de droit israélien, exerçait à la fois une activité d'agent commercial et de distributeur de la société Sanofi Pasteur ;

- constater que les parties ont conclu un contrat contenant une clause d'exclusivité, laquelle a constitué une condition essentielle de l'engagement de la société Sanofi Pasteur ;

- constater que la société Promedico s'est rapprochée d'un tiers, la société Neopharm, et que le nouvel ensemble distribuait des produits concurrents de ceux de la société Sanofi Pasteur ;

- constater que la société Promedico a manqué aux engagements souscrits à l'égard de son cocontractant et, notamment, à l'engagement d'exclusivité précité ;

- constater que ces manquements constituent autant de fautes graves au sens de la jurisprudence sur les agents commerciaux ;

- constater encore que la société Promedico a poursuivi M. Braveman et/ou la société Medici et que les demandes formulées dans ce cadre recouvrent les préjudices dont l'indemnisation a été sollicitée devant les juridictions françaises ;

Dans ces conditions :

- dire et juger que les demandes de la société Promedico sont irrecevables et qu'elle est dépourvue d'un intérêt à agir dès lors que les préjudices dont l'indemnisation est sollicitée sont déjà indemnisés ;

En conséquence,

- confirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Lyon le 5 octobre 2010 ;

A titre subsidiaire, sur le fond :

- dire et juger que la société Promedico ne saurait prétendre à quelque indemnité que ce soit au titre de la rupture de ses relations commerciales de distributeur des produits de la société Sanofi Pasteur ;

- dire et juger que les manquements relevés constituent autant de fautes graves qui privent la société Promedico de son droit aux indemnités légales, auxquelles un agent peut prétendre ;

En conséquence :

- confirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Lyon le 5 octobre 2010 ;

- débouter la société Promedico de l'intégralité de ses demandes ;

Subsidiairement, si la cour venait à estimer que la société Promedico peut prétendre à une indemnisation :

- constater que la société Promedico ne distingue pas entre les sommes auxquelles elle prétend au titre de la rupture de ses activités de distribution et de celles d'agent ;

En conséquence :

- débouter purement et simplement la société Promedico de ses demandes indemnitaires faute pour celles-ci d'être fondées ;

Mais aussi en tout état de cause :

- constater que la société Promedico n'a subi aucun préjudice dès lors qu'elle a remplacé les produits de la société Sanofi Pasteur par ceux de l'un de ses concurrents, dès avant que n'intervienne la rupture ;

- constater que les sommes demandées ne sont nullement justifiées dans leur quantum, l'année de référence n'étant pas pertinente pas plus que la durée retenue de préavis alors même que les opérations de distribution ne se sont déroulées que sur les dernières années de la relation ;

- constater que les différentes indemnités sollicitées correspondent en réalité à des préjudices identiques ;

En conséquence :

- débouter la société Promedico de l'intégralité de ses demandes ;

A titre reconventionnel :

- constater que la rupture des relations commerciales et les manquements de la société Promedico à ses obligations contractuelles ont causé un préjudice à la société Sanofi Pasteur du fait, notamment de la dégradation de son image et de la nécessité de réorganiser le circuit de distribution de ses produits en Israël ;

En conséquence :

- réformer le jugement sur ce point ;

- condamner la société Promedico à verser la somme de 100 000€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

L'intimée fait d'abord valoir que les demandes formulées par la société Promedico sont irrecevables, puisque l'appelant dispose d'une décision constatant son droit à indemnisation des préjudices émanant du Tribunal de grande instance de Tel Aviv. L'appelant ne pourrait donc pas cumuler les actions en indemnisation d'un même préjudice ;

Elle ajoute que la société Promedico ne saurait prétendre à une indemnisation au titre de la cession de l'activité de distribution, les manquements de Promedico et sa mauvaise foi justifiant une rupture immédiate des relations selon l'article L. 442-6-I-5 du Code de commerce ;

La société Promedico ne saurait non plus prétendre à une indemnisation au titre de la rupture de son contrat d'agent commercial, ses manquements constituant des fautes graves au sens de l'article L. 134-11 du Code de commerce et par ailleurs ses demandes ayant été formulées plus d'un an après la rupture sont irrecevables ;

Subsidiairement, l'intimée fait valoir que si la cour retenait le droit à une quelconque indemnité pour la société Promédico, les sommes demandées ne seraient pas justifiées ;

Enfin, compte tenu des manquements de Promedico à ses obligations mais aussi de sa mauvaise foi, l'intimée demande à la cour de faire droit à sa demande indemnitaire, et de réformer le jugement sur ce point ;

LA COUR renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la recevabilité des demandes formulées par la société Promedico :

Considérant que la société Sanofi soutient que la société Promedico est irrecevable puisqu'elle dispose d'une décision constatant son droit à indemnisation des préjudices rendue par le Tribunal de grande instance de Tel Aviv en date du 21 février 2012 et qu'elle ne peut cumuler les actions en indemnisation d'un même préjudice ;

Considérant que la société Promedico fait valoir que, si le jugement du 21 février 2012 s'est prononcé sur la responsabilité de M. Bravermann, il n'a pas prononcé de réparation financière et que le préjudice qui a été réparé par un accord transactionnel est totalement distinct de celui résultant de la rupture brutale des relations commerciales initié par la société Sanofi puisqu'il a pour objet la réparation d'une obligation de non-concurrence alors que le litige dont est saisie la cour porte sur la réparation du préjudice résultant de la brutalité de la rupture de relations commerciales établies ;

Considérant que la société Sanofi ne conteste pas que devant le Tribunal de Tel Aviv, la société Promedico a sollicité l'indemnisation de la conséquence de la perte de cinq fournisseurs dont la société Sanofi, Promedico ayant soutenu que cette perte résultait d'une collusion frauduleuse entre M. Bravermann, sa société Medici et ces cinq fournisseurs ; qu'il n'est pas démontré que cette action recouvre celle fondée sur la brutalité des relations commerciales dont a été saisie la cour ;

Sur la rupture des relations commerciales :

Considérant que la société Sanofi fait valoir que la relation contractuelle a tout d'abord été une relation d'agent commercial à laquelle s'est ajoutée au cours des dernières années une activité de distributeur ce que la société Promedico ne conteste pas puisqu'elle a écrit " Promedico a été l'agent et le revendeur exclusif en Israël sur le marché public et sur le marché institutionnel de plusieurs catégories de vaccins " ;

Considérant que la société Sanofi soutient que la société Promedico ne saurait revendiquer une indemnité ni pour l'une, ni pour l'autre de ces activités en raison de ses manquements graves à ses obligations contractuelles ;

Considérant que la société Sanofi soutient qu'elle était fondée à rompre sa relation commerciale avec la société Promedico sans préavis en raison même du comportement de celle-ci qui a manqué à son obligation d'exclusivité et qu'en toute hypothèse les circonstances créées par celle-ci rendaient cette rupture prévisible et inéluctable;

Considérant que la société Promedico fait valoir que le rapprochement qui a été opéré entre elle et la société Neopharm a consisté en un changement de contrôle, la société Neopharm ayant acquis les actions de la société Promedico sans pour autant l'absorber de sorte que seul l'actionnariat s'est trouvé modifié, la personne morale subsistant et gardant son autonomie et que la société Sanofi ne saurait en conclure qu'elle a manqué à son obligation d'exclusivité ;

Considérant que les relations entre les deux parties reposaient sur une exclusivité réciproque, la société Mérieux s'engageant " à ne pas accorder de mandat similaire à un tiers " et la société Promedico " à ne pas commercialiser en Israël des produits à usage humain concurrents de ceux de Mérieux ";

Considérant que l'article 4 du contrat liant les parties stipule que : " La société Promedico s'engage à ne pas transférer ou déléguer à un tiers des droits et prérogatives conférés aux termes du présent contrat sans l'accord écrit de Mérieux ; Le sens de cette clause est d'exclure la possibilité d'un transfert ou d'une cession des droits et privilèges de l'agent aux termes de ce contrat à une société qui serait inacceptable pour Mérieux ";

Considérant que cette disposition est extrêmement rigoureuse en ce qu'elle précise sa finalité qui est d'exclure la possibilité de transfert ou d'une cession des droits et privilèges de l'agent de sorte qu'il n'est pas nécessaire que cette situation soit réalisée ; qu'il suffit que la possibilité en soit avérée ; que, si la modification de l'actionnariat social ne signifie ni transfert, ni délégation des droits et prérogatives à un tiers, il n'en demeure pas moins qu'elle n'en exclut pas la possibilité d'autant que la société Promedico évoque elle-même dans son courriel du 7 septembre 2005 " une fusion " avec son nouvel actionnaire ;

Considérant que la société Sanofi est le premier producteur mondial de vaccins contre la grippe dont elle a confié la distribution en Israël à la société Promedico qui est aussi agent commercial pour d'autres laboratoires ; que cette spécificité de la société Sanofi en matière de vaccins anti grippaux n'est pas contestée ; que dès lors la société Promedico liée avec la société Sanofi par un mandat d'intérêt commun était tenue à veiller à préserver les intérêts de son mandant sur cette spécificité ;

Considérant que la société Neopharm distribuait des vaccins antigripaux de la société Chiron depuis 2003; que, si la société Promedico soutient que vaccin antigrippe " Agrippal " de cette société n'est pas concurrent des vaccins Vaxigrip et Vaxigrip Pediatric en ce qu'ils ne concernent pas le même public puisque Vaxigrip Pediatric est destiné aux enfants et Agrippal aux adultes et qu'ils ont donné lieu à des enregistrements séparés auprès du ministère de la Santé israélien au vu de leurs caractéristiques respectives, la gamme de vaccins de ces deux laboratoires ne peut être limitée aux seuls vaccins antigrippe précités, d'autant que la caractéristique de ces vaccins est d'évoluer chaque année; que de plus la société Promedico avait sollicité en 2003 l'autorisation de la société Sanofi de distribuer les vaccins du laboratoire Chiron, demande à laquelle la société Sanofi avait alors clairement opposé un refus; que cette demande démontre que la société Promedico était parfaitement consciente du caractère concurrentiel des vaccins en cause ; que d'ailleurs elle a alors affiché son acceptation du refus de son mandant ; que c'est dans ces conditions que la société Néopharm en était devenue le distributeur ;

Considérant que la société Promedico prétend avoir informé la société Sanofi de son rapprochement avec la société Néopharm et que celle-ci l'aurait accepté ;

Considérant toutefois que c'est par courriel du 7 septembre 2005 que M. Jesselson, Président directeur général de la société Promedico a avisé M. Elie Mina, vice-président Afrique, Moyen Orient et Europe de l'Est de Sanofi et M. Jurine, responsable des opérations commerciales au Moyen Orient de la signature d'un accord de rachat et de la validation dans un délai de 30 à 60 jours de cette opération par les autorités israéliennes, précisant alors les activités de la société Neopharm dont la distribution des produits vaccins des laboratoires Chiron; que le même jour la presse s'est fait l'écho de cette opération en annonçant que la société Neopharm " rachète son concurrent Promedico " ; que la société Promedico ne démontre pas avoir informé la société Sanofi avant cette date ;

Considérant qu'une réunion s'est tenue le 27 octobre 2005 entre les dirigeants des sociétés Promedico, Néopharm et de la société Sanofi pour envisager les conséquences de cette opération ; que M. Mina atteste avoir à cette occasion rappelé qu'en 2003 il avait refusé que la société Promedico distribue les vaccins du laboratoire Chiron et avoir fait observer que le rapprochement de Promedico et de Neopharm suscitait les mêmes problématiques, contestant avoir donné une approbation au rapprochement bien au contraire ;

Considérant que par courriel du 14 décembre 2005 M. Jurine s'enquiert des conséquences de ce rapprochement, demandant à la société Promedico de " faire part clairement de ses intentions " sans qu'il lui soit apporté de réponse par Promedico ; que c'est la société Neopharm qui répondra le 20 décembre faisant état de ce que " Neopharm a récemment finalisé l'acquisition de Promedico ", assurant la société Sanofi d'une " transition sans problème suite à la fusion s'agissant de la commercialisation des vaccins de Sanofi " ;

Considérant qu'il résulte de ces éléments que la société Promedico a poursuivi son projet en dépit de l'opposition de la société Sanofi, alors même qu'à la suite de la réunion du 27 octobre la société Sanofi pouvait penser que, dans la mesure où dans le passé la société Promedico avait renoncé à son partenariat avec la société Chiron, elle abandonnerait ce rapprochement; que, si le 22 février 2006 M. Jurine a écrit à la société Promedico " Merci pour votre coopération, c'est un véritable partenariat ", cette circonstance ne démontre pas que Sanofi ait donné son accord au rapprochement envisagé, ni que Promedico lui ait donné une réponse claire sur ses intentions de nature à préserver ses intérêts, ce qu'elle était en droit d'attendre de son mandataire ;

Considérant qu'au surplus la société Sanofi fait valoir qu'elle ignorait alors que la société Promedico avait, avant de solliciter son accord pour distribuer les vaccins du laboratoire Chiron en 2003, développé un partenariat avec celui-ci et qu'elle distribuait ses vaccins depuis 1999 et que c'est qu'au cours de la procédure qu'elle l'a appris; que la société Promedico le revendique effectivement, prétendant que la société Sanofi ne pouvait l'ignorer et que cette distribution aurait cessé en 2003 à l'initiative de la société Chiron ce qui est inexact puisque c'est à cette date qu'elle a demandé à la société Sanofi si elle pouvait distribuer les produits de la société Chiron et que la société Sanofi lui a clairement exprimé son refus, l'invitant à choisir entre elle et la société Chiron de sorte que la société Promedico ne peut sans mauvaise foi prétendre que sa rupture avec la société Chiron a été le fait de cette dernière; que ces faits démontrent aussi que la société Sanofi avait été laissée dans l'ignorance de cette relation, parfaitement contraire aux obligations contractuelles de la société Promedico ; que, si la société Promedico produit deux attestations, l'une de M. Aizemberg, son dirigeant jusqu'en 1992 et l'autre de M. Jesselson, également ancien dirigeant de la société Promedico qui attestent en des termes strictement identiques que la société Sanofi et le docteur Mina étaient au courant qu'elle distribuait les vaccins du laboratoire Chiron ; ces attestations du fait même de cette similitude de rédaction ne sauraient être retenues comme probantes; que la société Sanofi produit une attestation de M. Bravermann, directeur général de la société Promedico au moment des faits qui indique que la société Sanofi lui avait clairement fait part de son opposition concernant la distribution, des vaccins du laboratoire Chiron et une attestation de M. Elie Mina qui indique avoir clairement opposé un refus à la demande de M. Bravermann ; qu'il résulte de ces deux attestations que la société Promedico a fait sa demande en 2003 et qu'elle a été refusée ;

Considérant que l'article 8 du contrat stipule que " Promedico s'engage à informer Mérieux régulièrement et périodiquement sur les produits concurrents qui sont vendus en Israël "; qu'il résulte de ces éléments que la société Promedico n'a pas avisé son mandant alors même qu'elle distribuait des produits concurrents depuis plusieurs années; que si cette circonstance en ce qu'elle a été révélée après la rupture ne peut servir de fondement à celle-ci, il n'en demeure pas moins qu'elle met en évidence que la société Promedico connaissait parfaitement la situation de concurrence entre les vaccins Sanofi et les vaccins Chiron et le conflit d'intérêts généré par son rapprochement avec la société Neopharm distributeur de ceux-ci et qu'elle a passé outre, au mépris des intérêts de son mandant;

Considérant que la société Promedico ne pouvait dès lors pas ignorer que ce rapprochement avec la société Neopharm rendait prévisible une rupture dès lors que la société Sanofi lui avait clairement indiqué qu'elle devait choisir de commercialiser ses vaccins ou ceux de la société Chiron, puis lui avait fait connaître que le rapprochement envisagé soulevait le même problème; qu'il résulte du comportement de la société Promedico que celle-ci entendait manifestement poursuivre la commercialisation des vaccins de la société Chiron qu'elle avait entrepris depuis 1999 à l'insu de son mandant et passer outre à son refus par la voie d'un changement d'actionnariat en vue d'une fusion ;

Considérant que par ce comportement la société a ainsi manqué à ses obligations résultant du mandat d'intérêt commun qui la liait à la société Sanofi ; que dès lors elle ne pouvait que s'attendre à ce que la société Sanofi mette un terme à leur relation commerciale ;

Considérant que la société Sanofi était fondée, comme l'ont relevée les premiers juges, à mettre fin à la relation commerciale la liant à la société Promedico qui ne rapporte ni la preuve de la brutalité de cette rupture, ni de son caractère abusif, celle-ci résultant du manquement de la société Promedico à son obligation d'exclusivité et de loyauté : qu'il importe peu que cette rupture ait eu lieu en deux temps, d'abord en avril pour la commercialisation d'un vaccin, puis par lettre du 22 décembre 2006 à effet au 31 décembre 2006, la société a étendu la rupture à tous les autres produits, cette circonstance résultant des particularités du marché en cause.

Sur la demande reconventionnelle de la société Sanofi :

Considérant que la société Sanofi fait valoir que les manquements de la société Promedico à ses obligations contractuelles lui ont causé un préjudice en ce qu'ils ont d'une part nui à son image, d'autre part l'ont obligé à réorganiser son circuit de distribution en Israël ;

Considérant que la société Promedico n'était pas contrainte de rester en relations avec la société Sanofi sauf à l'en informer loyalement ce qu'elle n'a pas fait ; que dès lors la société Sanofi ne démontre pas que la rupture qui relevait du droit de chacune des parties et dont elle a légitimement usé lui aurait créé un préjudice de réorganisation dès lors que les relations avec son agent n'étaient plus possibles du fait du choix de celui-ci de se rapprocher d'un distributeur concurrent ; qu'elle ne démontre pas davantage qu'il s'en serait suivi pour elle un préjudice d'image ; que c'est à bon droit qu'elle a été déboutée de ses demandes par premiers juges ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile :

Considérant que la société Sanofi a dû engager des frais non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge, qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure qui sera précisée au dispositif.

Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, Confirme le jugement déféré. Condamne la société à payer Promedico à la société Sanofi la somme de 50 000€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile. Condamne la société Promedico aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.