CA Besançon, 1re ch. civ. et com., 30 juin 2015, n° 13-02276
BESANÇON
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Berçot (ès qual.), Actis Travaux & Co (SARL)
Défendeur :
ITF (SA), Besançon Courtage en Travaux (SARL), Guigon (ès qual.)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Mazarin
Conseillers :
Mmes Uguen Laithier, Lamboley-Cuney
Avocats :
Mes Maillot, Leroux, Ropars
FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Suivant acte sous seing privé du 8 avril 2009, M. Cyrille Berçot pour le compte de la SARL Actis travaux & Co en cours d'immatriculation, et la SAS ITF, exploitant sous l'enseigne commerciale " Illico travaux ", ont régularisé un contrat de franchise de courtage en travaux.
Par avenant du 11 juin 2009, la SAS ITF et la SARL Actis travaux & Co ont arrêté le territoire contractuel de cette dernière comme étant les cantons de Besançon Planoise, Besançon Nord-ouest et Nord-est et Audeux-Marchaux, la zone de Besançon sud étant en revanche dévolue à la SARL BCT, autre franchisé.
Arguant d'une concurrence déloyale de la part de la SARL BCT et d'une violation par le franchiseur de ses obligations contractuelles, la SARL Actis travaux & Co a fait assigner par acte du 20 décembre 2011, la SAS ITF et la SARL BCT devant le Tribunal de commerce de Besançon, aux fins de voir prononcer la résiliation du contrat de franchise aux torts du franchiseur et la condamnation in solidum des défendeurs à l'indemniser de son entier préjudice, puis, à la suite du placement en liquidation judiciaire de la SARL BCT, fixer sa créance au passif de cette dernière.
Par jugement du 23 septembre 2013 le Tribunal de commerce de Besançon, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, a :
- prononcé aux torts exclusifs de M. Cyla courla courrille Berçot, ès qualités de liquidateur de la SARL Actis travaux & Co, la résiliation du contrat de franchise,
- débouté la M. Cyrille Berçot de ses entières prétentions formées tant en son nom personnel qu'ès qualités de liquidateur de la SARL Actis travaux & Co,
- condamné M. Cyrille Berçot, ès qualités de liquidateur de la SARL Actis travaux & Co, à payer à la SAS ITF la somme de 1 745,78 euro au titre des redevances arrêtées à juin 2010,
- condamné M. Cyrille Berçot à titre personnel à payer à la SAS ITF et à M. Pascal Guigon, en sa qualité de liquidateur de la SARL BCT, chacun la somme de 5 000 euro à titre de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice découlant des actes de dénigrement de l'intéressé à l'endroit du réseau de franchise,
- condamné M. Cyrille Berçot, ès qualités de liquidateur de la SARL Actis travaux & Co, à payer à la SAS ITF la somme de 10 000 euro à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant de la faute de parasitisme économique,
- condamné M. Cyrille Berçot, ès qualités de liquidateur de la SARL Actis travaux & Co, à payer à la SAS ITF et à M. Pascal Guigon, en sa qualité de liquidateur de la SARL BCT, chacun la somme de 5 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens dont les frais de greffe (163,25 euro).
M. Cyrille Berçot, en son nom personnel et ès qualités de liquidateur de la SARL Actis travaux & Co, a relevé appel de cette décision par déclaration enregistrée au greffe le 7 novembre 2013 en intimant devant la cour la SAS ITF, la SARL BCT et M. Pascal Guigon, en sa qualité de liquidateur de la SARL BCT.
Suivant ordonnance du 19 février 2014, le magistrat chargé de la mise en état a prononcé la caducité de la déclaration d'appel à l'encontre de la SARL BCT au visa de l'article 902 du Code de procédure civile et constaté l'extinction de l'instance d'appel à l'égard de cette seule partie intimée.
Par ses dernières écritures déposées le 16 avril 2015, M. Cyrille Berçot, en son nom personnel et ès qualités de liquidateur de la SARL Actis travaux & Co, conclut à l'infirmation du jugement entrepris et demande à la cour de :
A titre principal :
- prononcer la résiliation du contrat de franchise aux torts exclusifs de la SAS ITF,
- condamner in solidum la SARL BCT et la SAS ITF à lui payer, ès qualités de liquidateur, la somme de 133 124,16 euro à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice, outre intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2011,
- fixer sa créance, ès qualités, à la procédure collective de la SARL BCT à la somme de 133 124,16 euro à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice, outre intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2011,
- condamner in solidum la SARL BCT et la SAS ITF à lui payer à titre personnel la somme de 17 906 euro au titre de la rémunération qu'il aurait dû percevoir en qualité de dirigeant pour la première année d'exploitation, outre intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2011,
- fixer sa créance, à titre personnel, à la procédure collective de la SARL BCT à la somme de 17 906 euro au titre de la rémunération qu'il aurait dû percevoir en qualité de dirigeant pour la première année d'exploitation, outre intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2011 ;
A titre subsidiaire :
- condamner in solidum la SARL BCT et la SAS ITF à lui payer, ès qualités de liquidateur, la somme de 17 906 euro au titre de la rémunération qu'il aurait dû percevoir en qualité de dirigeant pour la première année d'exploitation, outre intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2011,
- fixer sa créance, ès qualités de liquidateur, à la procédure collective de la SARL BCT à la somme de 17 906 euro au titre de la rémunération qu'il aurait dû percevoir en qualité de dirigeant pour la première année d'exploitation, outre intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2011 ;
En tout état de cause :
- débouter la SAS ITF de ses entières demandes,
- juger que l'arrêt à intervenir sera déclaré commun et opposable à M. Pascal Guigon, liquidateur de la SARL BCT,
- condamner in solidum la SARL BCT et la SAS ITF à lui payer, tant en son nom personnel qu'ès qualités de liquidateur, la somme de 5 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- fixer sa créance, tant en son nom personnel qu'ès qualités de liquidateur, à la procédure collective de la SARL BCT à la somme de 5 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner la SAS ITF aux dépens avec droit pour la SCP Parisot-Maillot de se prévaloir des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Aux termes de ses dernières écritures déposées le 4 mai 2015, la SAS ITF demande à la cour de :
- déclarer irrecevables les demandes formées par M. Cyrille Berçot à titre personnel correspondant à une prétendue perte de rémunération,
- confirmer pour le surplus le jugement déféré,
- subsidiairement réduire le montant des dommages-intérêts sollicités par l'appelant en y retranchant notamment le montant des sommes investies par la SARL Actis travaux & Co non spécifiques au concept " Illico travaux " ou qui bénéficient à la Société Fox habitat et qui ont profité à cette dernière,
- en tout état de cause, condamner solidairement M. Cyrille Berçot, en son nom personnel et ès qualités de liquidateur de la SARL Actis travaux & Co à lui payer la somme de 5 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les dépens de première instance et d'appel.
En dépit de la signification de la déclaration d'appel suivant acte d'huissier du 16 décembre 2013 remis à domicile, et de celle des conclusions d'appelant par acte du 3 avril 2014 remis à sa personne, M. Pascal Guigon, ès qualités de liquidateur de la SARL BCT n'a pas constitué avocat, en sorte que le présent arrêt sera réputé contradictoire.
Par conclusions de procédure déposées le 5 mai 2015, la SAS ITF sollicite en tant que de besoin un report, voire une révocation et un report de l'ordonnance de clôture, à une date la plus proche de l'audience de plaidoiries. La partie appelante, qui n'a pas répondu par voie de conclusions sur ce point, a fait savoir à la cour par simple courrier qu'elle sollicitait le rejet des conclusions adverses de dernière heure signifiées les 4 et 5 mai 2015.
Pour l'exposé complet des moyens des parties, la cour se réfère aux dernières conclusions susvisées de celles-ci, conformément aux dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.
La clôture de l'instruction de l'affaire a été prononcée par ordonnance du 5 mai 2015.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Attendu qu'il convient à titre liminaire de souligner que si l'instance d'appel est éteinte à l'encontre de la seule SARL BCT ensuite de l'ordonnance du magistrat chargé de la mise en état du 19 février 2014 ayant prononcé la caducité de la déclaration d'appel à l'égard de cette seule intimée, tel n'est pas le cas de l'appel formé à l'égard de M. Pascal Guigon, liquidateur judiciaire de la SARL BCT, intimé valablement avisé de la déclaration d'appel conformément aux prescriptions de l'article 902 du Code de procédure civile ;
Sur la demande de report de l'ordonnance de clôture
Attendu que les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacun soit à même d'organiser sa défense ; qu'il appartient au juge de veiller à ce que ces dispositions sont mutuellement observées par les parties ;
Qu'en l'espèce, la cour relève que la SAS ITF a déposé d'ultimes conclusions les 4 et 5 mai 2015 lesquelles sont en tous points identiques ; qu'elles ont été déposées en réplique aux dernières écritures de la partie appelante signifiées le 16 avril 2015, ne soulèvent ni prétentions ni moyens nouveaux et ne diffèrent qu'à la marge des précédentes écritures déposées le 8 janvier 2015, de sorte qu'elles n'appelaient aucune réponse, n'étant en outre accompagnées d'aucune communication de pièces nouvelles ;
Qu'il s'ensuit que les dernières conclusions déposées la veille de l'ordonnance de clôture, dont les parties avaient été avisées de la date, sont recevables et qu'il n'y a pas lieu à report de l'ordonnance de clôture ;
Sur l'opposabilité de l'arrêt
Attendu qu'en vertu de l'article 331 alinéa 2 du Code de procédure civile, un tiers peut être mis en cause par la partie qui y a un intérêt afin de lui rendre commune la décision à intervenir ;
Qu'il sera fait droit à la demande de tendant à voir dire le présent arrêt opposable à M. Pascal Guigon, en sa qualité de liquidateur judiciaire désigné dans la procédure collective ouverte à l'égard de la SARL BCT, lequel a été intimé par la partie appelante ;
Sur la faute alléguée de la SAS BCT
Attendu que l'appelant soutient que la SAS BCT n'a pas fait preuve de loyauté et de bonne foi dans l'exécution de son contrat de franchise en procédant à des opérations de communication à son insu, et lui a causé un préjudice, dont il sollicite réparation à hauteur de la somme de 133 124,16 euro, par une condamnation in solidum entre ce concurrent et le franchiseur ;
Que si le contrat de franchise signé le 6 avril 2009 entre la SAS BCT et la SAS ITF n'est pas communiqué aux débats il n'est pas contesté qu'il soit, à tout le moins sur la question en litige, identique à celui souscrit par la SARL Actis travaux & Co le 8 avril 2009 ; qu'aux termes de ce dernier, il ressort que le franchisé peut réaliser des actions de prospection, de communication et de publicité sur l'ensemble des territoires même en présence d'un autre franchisé du réseau " Illico travaux " ; qu'il s'engage alors à prévenir le franchisé présent sur le territoire où il entend mener des actions sans que ce dernier puisse s'y opposer, afin de lui proposer une action commune à frais partagés, que ce dernier sera toujours libre de refuser, auquel cas les supports de communication ne mentionneront que les coordonnées du franchisé initiateur de l'opération ;
Que s'il apparaît que la SARL BCT n'a pas initialement systématiquement avisé la SARL Actis travaux & Co, il ressort des pièces versées aux débats que cette dernière faisait également l'objet de griefs de la part de son concurrent sur l'absence de collaboration à l'occasion notamment d'une action commune sur un salon bisontin, ce qui a conduit la SAS ITF a organiser une rencontre de ses deux franchisés le 1er mars 2010 pour leur enjoindre tous deux de respecter leurs obligations à cet égard ;
Qu'il est produit des courriels émanant de la SARL BCT en date des 23 mars, 28 avril, 9 juin et 16 juillet 2010, informant son concurrent d'actions à venir sur le territoire contractuel de ce dernier permettant de déduire que le rappel des obligations contractuelles a été ensuite suivi d'effet, à l'exception d'un encart publicitaire dont l'ordre d'insertion avait vraisemblablement été donné antérieurement à la réunion ; que si la SARL Actis travaux & Co a accepté à une seule occasion de mener une action commune à frais partagés avec la SARL BCT, cela n'a pas été renouvelé à la suite des informations préalables reçues, M. Cyrille Berçot ayant expressément indiqué au représentant de la SARL BCT qu'il n'entendait pas participer indirectement par ses actions publicitaires au développement de ses concurrents ;
Qu'en tout état de cause, si l'obligation d'information n'a pas toujours été observée par la SARL BCT antérieurement à la réunion du 1er mars 2010, la cour observe que la quasi-totalité de ces actions publicitaires mentionnaient en sus des coordonnées de la SARL BCT, et à la différence de celles initiées par l'appelante, le site internet Illico Travaux et le numéro vert national, qui redirigeaient la clientèle vers l'agence dans le ressort duquel elle se situait, en sorte que la SARL Actis travaux & Co a bénéficié indirectement des actions menées par son concurrent et de la notoriété du réseau qu'elles induisaient ; qu'au surplus, il n'est pas inutile de relever qu'il ne s'agissait pas en l'occurrence d'opérations de démarchage direct ou d'envoi de prospectus à des personnes identifiées sur le territoire contractuel de la société appelante mais de démarches publicitaires qui, par leur support local ou régional, couvraient indirectement un territoire plus large que celui contractuellement dévolu à la SARL BCT ;
Attendu par ailleurs que, si la SARL Actis travaux & Co affirme que la SARL BCT aurait encore fait preuve de déloyauté en démarchant une société ENRJ avec laquelle elle était déjà en contact en vue d'un partenariat, M. Frédéric Soueges, gérant de cette société, atteste le 27 septembre 2012 qu'après avoir traité quelques dossiers avec M. Cyrille Berçot il n'a pas souhaité poursuivre ce partenariat en raison d'une pratique non conforme à ses exigences en termes de définition du projet et du besoin du client ; qu'il s'ensuit donc que la cessation des relations s'explique par une divergence de pratiques et non par un détournement de clientèle de la part de la SARL BCT;
Que l'appelant n'apporte pas la démonstration que ce défaut ponctuel d'information de la part de la SARL BCT aurait conduit à un détournement de clientèle à son détriment et ne caractérise nullement l'existence d'un comportement déloyal de son concurrent à cette fin, qui lui aurait causé un préjudice direct ; que dès lors, l'appelant ne peut sérieusement prétendre que la SARL BCT serait en partie responsable de la liquidation judiciaire de sa société, compte tenu de l'aléa que comporte la rentabilité espérée par tout commerçant ; qu'il n'est d'ailleurs pas inutile de relever à cet égard qu'en dépit de son action plus offensive en matière d'opérations publicitaires la SARL BCT a fait également l'objet d'une liquidation judiciaire, ce qui est de nature à corroborer que la cause de l'échec de M. Cyrille Berçot est davantage à rechercher dans la conjoncture économique, affectant nécessairement le domaine des travaux des particuliers ;
Que le jugement entrepris, qui a rejeté les prétentions de M. Cyrille Berçot tant ès qualités de liquidateur de la SARL Actis travaux & Co qu'en son nom personnel, sera confirmé de ces chefs ;
Sur la faute alléguée de la SAS ITF
Attendu qu'en vertu de l'article 1134 du Code civil les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi ;
Qu'en l'espèce, M. Cyrille Berçot soutient que la SAS ITF a manqué à ses obligations contractuelles à l'égard de la SARL Actis travaux & Co en s'abstenant, d'une part, de faire respecter les termes du contrat de franchise par la SARL BCT par la prise de sanctions adéquates, et d'autre part, de porter assistance à la SARL Actis travaux & Co dans les difficultés rencontrées ;
Qu'il sollicite par conséquent la résiliation du contrat de franchise aux torts exclusifs du franchiseur et sa condamnation in solidum avec la SARL BCT à l'indemniser de son préjudice ès qualités de liquidateur amiable de la SARL Actis travaux & Co et en son nom personnel ;
Attendu à titre liminaire, qu'il convient d'accueillir la fin de non-recevoir soulevée par l'intimée tirée de l'irrecevabilité des prétentions de M. Cyrille Berçot en son nom personnel ; qu'en effet, si l'intéressé sollicite à titre principal l'allocation d'une somme de 17 906 euro au titre de la rémunération qu'il aurait dû percevoir selon lui en qualité de dirigeant pour la première année d'exploitation, cette prétention est irrecevable en ce qu'elle repose sur un préjudice qui n'est que le corollaire du préjudice prétendument subi par la société elle-même, dont l'intéressé était le gérant ;
Attendu que la SAS ITF, informée début 2010 par ses deux franchisés du différend qui les opposait, a organisé une réunion le 1er mars 2010 afin de rappeler à chacun les termes du contrat de franchise au regard notamment des modalités d'actions publicitaires ou de prospection et réinstaurer une synergie entre ces deux courtiers du réseau ; qu'informée par l'appelant d'une persistance prétendue des pratiques de son concurrent, elle a en outre rappelé les termes de l'article 7 du contrat à la SARL BCT par correspondance du 22 juin 2010 en la mettant en demeure de s'y conformer sous peine de résiliation de son contrat de franchise ;
Que la SARL Actis travaux & Co a informé la SAS ITF de la résiliation de son contrat de franchise à la date du 1er juillet 2010 ; que, ce faisant, elle est sortie du réseau de son propre chef sans attendre les effets de la réunion et de la mise en demeure précitées ; qu'elle ne saurait donc faire grief au franchiseur, dont il est suffisamment démontré qu'il a agi en temps utile, de n'avoir pas sanctionné la SARL BCT par une résiliation de son contrat alors même qu'aucune faute grave ne justifiait alors une telle sanction radicale ;
Attendu que la SARL Actis travaux & Co fait enfin valoir, au visa de l'article L. 330-3 du Code de commerce sans toutefois se prévaloir de la nullité du contrat, que la SAS ITF aurait manqué à son devoir d'information précontractuelle en lui présentant des perspectives de rentabilité trompeuses sans étude de marché et en lui taisant les difficultés rencontrées par le réseau " Illico Travaux " ;
Que sur ce point l'intimée fait observer à bon droit que ce moyen, s'il est susceptible de fonder une action en nullité du contrat pour vice du consentement dont il n'est pas excipé en la cause, il ne peut donner lieu à une résiliation aux torts du cocontractant ;
Que force est de relever surabondamment qu'en s'engageant pour le compte de la SARL Actis travaux & Co par contrat signé le 8 avril 2009 M. Cyrille Berçot a expressément reconnu avoir " reçu une information précontractuelle exhaustive, incluant celle requise en application de l'article L. 330-3 du Code de commerce et de l'article 1er du décret du 4 avril 1991 ", " pris contact avec au moins 3 franchisés Illico Travaux de son choix " et été expressément invité à " relire avec une particulière attention l'article 3 du contrat intitulé " Réflexion et information préalable " et à soumettre sa réflexion ainsi que le document d'information précontractuelle à des conseils juridiques et comptables maîtrisant le concept de franchise " ;
Qu'il produit lui-même le document d'information pré-contractuelle comptant 106 pages, particulièrement circonstancié ; que la SAS ITF verse aux débats un document intitulé " état sommaire du marché local Doubs (25) " au 2 mars 2009 dûment signé par M. Cyrille Berçot le 15 mars 2009 présentant diverses données chiffrées démographiques et économiques, une indication quant à la concurrence locale et des indicateurs de développement du marché ;
Qu'il ne peut dans ces conditions sérieusement faire grief à la SAS ITF d'avoir été défaillante dans son obligation précontractuelle d'information, alors qu'il est communément admis en la matière que le candidat doit compléter lui-même, si nécessaire, les informations ainsi transmises par une étude de marché afin d'apprécier la viabilité de l'activité commerciale à laquelle il se destine;
Attendu qu'il résulte de ce qui précède que l'appelant, à défaut de caractériser l'existence d'une faute contractuelle imputable à la SAS ITF, est mal fondé en sa demande tendant à voir prononcer aux torts de cette dernière la résiliation anticipée du contrat de franchise ;
Qu'en l'absence de faute démontrée imputable au franchiseur, la partie appelante doit être déboutée de ses prétentions indemnitaires ; que le jugement déféré, qui l'a déboutée de ses demandes à l'encontre de la SAS ITF, sera donc confirmé de ce chef ;
Sur le préjudice lié à la résiliation anticipée du contrat de franchise
Attendu qu'il n'est pas contesté que la SARL Actis travaux & Co a résilié le contrat de franchise la liant à la SAS ITF le 1er juillet 2010 alors que ce contrat souscrit le 8 avril 2009 l'avait été pour une durée de sept ans ; qu'il a été précédemment retenu l'absence de preuve de l'existence de fautes imputables au franchiseur, de sorte que cette résiliation anticipée est intervenue à l'initiative du franchisé, qui doit donc en assumer les conséquences financières, à défaut de démontrer une inexécution de la part de son cocontractant ;
Que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a prononcé la résiliation aux torts exclusif du franchisé ;
Attendu qu'aux termes de l'article 19 dudit contrat, sa résiliation anticipée implique, sauf faute du franchiseur, que le franchisé s'acquitte au jour de la résiliation effective, outre de la totalité des sommes lui restant dues, la totalité des sommes que le franchiseur aurait perçues si le contrat s'était poursuivi jusqu'à son terme au titre des redevances mensuelles fixes et des redevances mensuelles variables ;
Attendu qu'en l'espèce, la SAS ITF conclut à cet égard expressément dans le dispositif de ses dernières écritures à la confirmation du jugement entrepris " en ce qu'il a ... condamné M. Cyrille Berçot ès qualités de liquidateur de la SARL Actis travaux & Co, à lui payer la somme de 1 745,78 euro au titre des redevances contractuelles restées impayées au mois de juin 2010 " ; que la cour ne statuant que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions des parties, il n'y a pas lieu d'examiner les développements figurant dans le corps de celles-ci relativement à l'indemnité de résiliation anticipée ; que le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point ;
Sur les actes de dénigrement
Attendu que la SAS ITF et la SARL BCT ont fait valoir devant les premiers juges que des propos critiques malveillants et réitérés tenus par M. Cyrille Berçot tant à destination des membres du réseau que dans la presse locale (Est Républicain) étaient constitutifs d'un dénigrement du réseau Illico travaux et leur avait causé un préjudice par l'atteinte à l'image de la marque que cela avait généré ; que le jugement entrepris leur a alloué à ce titre une indemnité de 5 000 euro chacune, pour la seconde à M. Pascal Guigon, en sa qualité de liquidateur de la SARL BCT ;
Que M. Cyrille Berçot conteste le moindre dénigrement de sa part, arguant qu'il n'a fait que dénoncer une situation dont il a été victime, et fait valoir qu'aucun préjudice n'est en tout état de cause caractérisé ;
Qu'il ressort de l'examen des pièces produites que M. Cyrille Berçot, postérieurement à la résiliation anticipée de son contrat de franchise, a interrogé les membres du réseau par courriel du 31 juillet 2010 en ces termes : " Je vous annonce mon départ volontaire et imminent du réseau Illico travaux. J'ai juste une seule question à vous poser : est-ce que tout va bien dans votre entreprise et avec votre franchise " " Vous pouvez me contacter sur mon portable ou sur l'adresse de la carte électronique jointe. P.S : ce message n'a pas pour but de nuire ou détourner la marque Illico travaux " ;
Que par courriel du 6 avril 2011, transmis aux mêmes destinataires, l'intéressé a informé les franchisés de son contact pris auprès d'un avocat parisien spécialisé dans la défense du franchisé, qui lui aurait fait part de l'absence de sérieux de l'entreprise ITF ; qu'il les a en outre avisés de son intention de déposer plainte pour abus de confiance et escroquerie et a invité ses interlocuteurs à lui signaler l'évolution de leur situation ou toutes expériences à partager ; qu'enfin, M. Cyrille Berçot a fait paraître un article de presse dans l'Est Républicain du 14 décembre 2011 aux termes duquel il affirme que la SAS ITF vend du "vent" à ses franchisés, qu'il a été victime de la concurrence déloyale d'un autre franchisé sans réaction du franchiseur et y fait enfin état de son action judiciaire et de son intention de créer une association avec d'autres franchisés afin que " d'autres ne tombent pas dans le panneau " ; que cet article a donné lieu à une demande d'exercice d'un droit de réponse par la part de la SAS ITF ;
Attendu que les premiers juges ont pertinemment considéré que ces propos, par leur insinuation pour certains et leur affirmation péremptoire pour d'autres, étaient constitutifs d'un dénigrement pour avoir répandu publiquement des propos malveillants fondés sur un postulat erroné, et que ces propos avaient causé un préjudice aux sociétés ITF et BCT, notamment par l'article de presse précité qui a nécessairement eu un impact négatif, tant vis-à-vis du franchiseur, que du second franchisé du secteur bisontin ;
Que le jugement querellé, qui a fait une exacte appréciation des faits de la cause en allouant à chacune des deux sociétés une somme de 5 000 euro, sera confirmé de ce chef ;
Sur le pillage de savoir-faire
Attendu que la SAS ITF fait valoir que M. Cyrille Berçot, ès qualités, est à l'origine d'un parasitisme économique en ce qu'il a fait bénéficier la société Fox habitat, société dont il a ensuite été le gérant, du savoir-faire de l'activité de courtage de la SAS ITF, activité dans laquelle il était novice avant d'accéder au réseau Illico travaux ; qu'elle sollicite donc l'allocation de dommages-intérêts à ce titre sur le fondement de l'article 1145 du Code civil ;
Que l'appelant rétorque que la société Fox habitat n'exerce aucune activité de courtage et qu'aucun détournement de savoir-faire n'est avéré en l'espèce ;
Attendu qu'en vertu de l'article 14 du contrat de franchise le franchisé et son gérant majoritaire s'engagent à ne plus utiliser ni permettre l'utilisation des informations confidentielles auquel le contrat leur donnera accès ; que l'article 20 précise que les mêmes ne pourront plus utiliser le savoir-faire spécifique Illico travaux après la cessation des relations contractuelles et s'interdiront d'utiliser la marque, l'enseigne, les logos, le logiciel et la signalétique du réseau ; que cet article prohibe encore pendant un an après la cessation des relations l'affiliation, l'adhésion ou la participation d'une manière quelconque à un groupement ou fonds de commerce ayant une activité proche ou similaire de l'activité de courtage de travaux sur le territoire dévolu par le contrat ;
Qu'il est patent en la cause que M. Cyrille Berçot a créé le 31 décembre 2009 une SARL Fox habitat dont le code activité est selon son immatriculation au RCS " Promotion immobilière de logements " ; que néanmoins il ressort d'une correspondance adressée le 19 octobre 2010 à un ancien partenaire du réseau Illico travaux sous la forme d'une lettre circulaire en l'absence de destinataire identifié que l'appelant informe son destinataire de sa séparation avec la franchise Illico travaux et du " maintien de l'entreprise Actis travaux & Co " et de la conservation de ses partenaires dans sa base de données ; que les plaquettes publicitaires de cette société utilisent la terminologie suivante : " Vous cherchez des bons plans pour vos travaux ", " obtenez les meilleures offres dans chaque corps de métier du bâtiment sans sous-traitance ", " Fox habitat vous permet d'obtenir des devis d'artisans compétitifs et trouver la meilleure offre pour vos travaux " " Nos objectifs : vous obtenir des avantages exclusifs et un excellent rapport qualité prix pour vos travaux, équipement du bâtiment ou immobilier, vous proposer un réseau d'hommes compétents, vaste et référencé, nous rayonnons sur le 25, 39, 70 et 90 et particulièrement autour de Besançon " ;
Attendu qu'il en résulte à l'évidence que l'activité réelle de la SARL Fox habitat est, à tout le moins en partie, similaire de l'activité de courtage en travaux, qu'elle a été exercée dès avant la rupture du contrat de franchise avec la SAS ITF et que son gérant met en avant l'expérience dans le courtage sans jamais utiliser le terme ;
Qu'il s'ensuit que M. Cyrille Berçot ès qualités, n'a pas scrupuleusement observé les obligations contractuelles de ne pas faire ci-dessus rappelées, qui étaient les siennes en vertu du contrat litigieux et que le parasitisme économique est avéré ; qu'en limitant cependant le quantum de l'indemnisation du préjudice résultant de cette violation contractuelle, les premiers juges ont parfaitement apprécié les éléments de la cause ;
Que le jugement entrepris qui a condamné M. Cyrille Berçot, ès qualités, à payer à la SAS ITF la somme de 10 000 euro à titre de dommages-intérêts, sera confirmé sur ce point ;
Sur les demandes accessoires
Attendu que M. Cyrille Berçot qui succombe en ses prétentions à hauteur de cour, sera condamné solidairement à titre personnel et en sa qualité de liquidateur amiable de la SARL Actis travaux & Co à payer à la SAS ITF une somme de 1 500 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile ; qu'il supportera en outre les dépens d'appel ;
Attendu enfin que les dispositions du jugement déféré non soumises à la critique des parties seront confirmées.
Par ces motifs : LA COUR, statuant par arrêt réputé-contradictoire, après débats en audience publique et après en avoir délibéré, Dit n'y avoir lieu à report de l'ordonnance de clôture, Déclare le présent arrêt opposable à M. Pascal Guigon, mandataire liquidateur de la SARL BCT, Confirme le jugement rendu le 23 septembre 2013 par le tribunal de commerce de Besançon sauf en ce qu'il a débouté M. Cyrille Berçot de sa demande formée à titre personnel, L'infirme de ce seul chef et statuant de nouveau, Déclare irrecevable la demande de condamnation formée à titre personnel par M. Cyrille Berçot, Condamne solidairement M. Cyrille Berçot à titre personnel et en sa qualité de liquidateur amiable de la SARL Actis travaux & Co à payer à la SAS ITF la somme de mille cinq cents euros (1 500 euro) en application de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne M. Cyrille Berçot, tant à titre personnel qu'ès qualités de liquidateur amiable de la SARL Actis travaux & Co, aux dépens d'appel.