TUE, 3e ch., 9 septembre 2015, n° T-91/13
TRIBUNAL DE L'UNION EUROPÉENNE
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
LG Electronics Inc.
Défendeur :
Commission européenne
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Papasavvas (Rapporteur)
Juges :
MM. Forwood, Bieliunas
Avocats :
Mes van Gerven, Franchoo
LE TRIBUNAL (troisième chambre),
Antécédents du litige
Requérante et produits concernés
1 La requérante, LG Electronics, Inc., est un fournisseur de matériel électronique grand public, d'appareils de communication mobile et d'appareils d'électroménager. Jusqu'au 1er juillet 2001, la requérante et sa filiale à part entière, LG Electronics Wales Ltd (Royaume-Uni) (ci-après " LGE Wales "), fabriquaient et vendaient des tubes à rayon cathodique (ci-après les " CRT ").
2 Les CRT sont des enveloppes en verre sous vide contenant un canon à électrons et un écran fluorescent, généralement équipées d'un dispositif interne ou externe pour accélérer et dévier les électrons. Lorsque des électrons émis par le canon à électrons touchent l'écran fluorescent, de la lumière est produite et crée l'image sur l'écran. À l'époque des faits, il existait deux types de CRT, à savoir les tubes couleur pour écrans d'ordinateur (Colour display tubes, ci-après les " CDT ") et les tubes couleur pour téléviseurs (Colour picture tubes, ci-après les " CPT "). Les CDT et les CPT sont des composants individuels qui sont combinés avec le châssis et d'autres composants nécessaires pour produire un téléviseur ou un écran d'ordinateur. Ils se déclinent en un certain nombre de dimensions différentes, petite, moyenne, grande et jumbo, exprimées en pouces.
3 Par un accord conclu le 11 juin 2001, avec prise d'effet au 1er juillet suivant (ci-après l'" accord sur l'entreprise commune "), la requérante et Koninklijke Philips Electronics NV (ci-après " Philips ") ont fusionné leurs activités mondiales dans le domaine des CRT au sein d'une entreprise commune, le groupe LPD, à la tête de laquelle se trouvait l'entreprise LG Philips Displays Holding BV (ci-après " LPD Holding "). La requérante a transféré l'intégralité de ses activités dans le domaine des CRT à l'entreprise commune. Elle a cependant continué à fabriquer et à vendre des téléviseurs et des écrans d'ordinateur comportant des CRT. Pour ce faire, elle s'approvisionnait en CRT auprès de tiers ainsi qu'auprès du groupe LPD.
4 Au 1er juillet 2001, les parts du groupe LPD étaient détenues par Philips et sa filiale allemande à part entière Philips GmbH, à savoir au total 50 % des parts plus une part pour le groupe Philips, ainsi que par la requérante et sa filiale à part entière LGE Wales, à savoir 50 % des parts moins une part pour ces deux entités. À partir du deuxième trimestre de l'année 2004, 50 % des parts plus une étaient détenues par Philips et 50 % des parts moins une par LGE Wales.
5 Le 30 janvier 2006, LPD Holding a été déclarée en faillite.
Procédure administrative
6 Le 9 mars 2007, Chunghwa Picture Tubes Co. Ltd, qui fabriquait et commercialisait des CRT, a formulé une demande de marqueur auprès de la Commission des Communautés européennes, au sens du paragraphe 15 de la communication de la Commission sur l'immunité d'amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 2006, C 298, p. 17, ci-après la " communication sur l'immunité d'amendes "). Elle a ensuite déposé, le 23 mars suivant, une demande orale pour une immunité d'amendes au titre de cette communication.
7 Le 23 novembre 2009, la Commission a adopté une communication des griefs adressée à la requérante ainsi qu'à Chunghwa Picture Tubes Co., Chunghwa Picture Tubes (Malaysia) Sdn. Bhd et CPTF Optronics Co. Ltd (ci-après, prises ensemble, " Chunghwa "), Samsung SDI Co. Ltd, Samsung SDI Germany GmbH, Samsung SDI (Malaysia) Bhd, Philips, PT LG Electronics Indonesia Ltd, LG Electronics European Holding BV, Thomson SA, Panasonic Corp., Toshiba Corp., [confidentiel] (1), [confidentiel] et MT Picture Display Co. Ltd.
8 Le 1er juin 2012, la Commission a adopté deux communications des griefs supplémentaires afin de compléter, d'amender et de clarifier les griefs adressés à Philips et à la requérante s'agissant de leur responsabilité respective dans les infractions concernant les CDT et les CPT, aussi bien avant qu'après la création du groupe LPD.
Décision attaquée
9 Par décision C (2012) 8839 final, du 5 décembre 2012, relative à une procédure d'application de l'article 101 TFUE et de l'article 53 de l'accord EEE (affaire COMP/39.437 - Tubes cathodiques pour téléviseurs et écrans d'ordinateur) (ci-après la " décision attaquée "), la Commission a constaté que les principaux producteurs à l'échelle mondiale de CRT avaient enfreint l'article 101 TFUE et l'article 53 de l'accord sur l'Espace économique européen (EEE) en participant à deux infractions séparées, constituant chacune une infraction unique et continue. Ces infractions concernaient, d'une part, le marché des CDT (ci-après l'" entente CDT ") et, d'autre part, le marché des CPT (ci-après l'" entente CPT ") et se seraient traduites par des accords et des pratiques concertées entre les producteurs de CRT en vue de fixer les prix, de partager les marchés et les clients par l'attribution de volumes de ventes, de clients et de parts de marché, de restreindre la production, d'échanger des informations commerciales sensibles et de contrôler la mise en œuvre des accords collusoires.
10 S'agissant, premièrement, de l'entente CPT, la Commission a considéré que les participants à l'entente étaient convenus des prix cibles ou des prix planchers pour différentes dimensions de CPT, qu'ils s'étaient employés à maintenir un écart de prix entre des produits identiques commercialisés en Europe et en Asie et qu'ils avaient minutieusement contrôlé les accords de tarification. Lesdits participants auraient également conclu des accords définissant quel producteur communiquerait une hausse de prix à quel client. Les producteurs de CPT seraient, par ailleurs, convenus de leurs parts de marché respectives et se seraient mis d'accord sur des restrictions de production coordonnées afin de réduire l'excédent d'offre et d'augmenter ou de maintenir les prix. Ils auraient, en outre, échangé des informations commerciales sensibles concernant la production et la capacité prévues, les ventes réalisées et planifiées, les prévisions relatives aux demandes futures, la tarification et la stratégie des prix, les conditions générales de vente, les clients ainsi que les négociations des prix et des volumes avec ces derniers.
11 Aux considérants 123 et 124 de la décision attaquée, la Commission a relevé que, au terme d'une période initiale au cours de laquelle les CPT auraient fait l'objet des mêmes réunions que celles portant sur les CDT, des réunions multilatérales régulières appelées les " CPT glass meetings " auraient commencé à être organisées en Asie (ci-après les " réunions verre asiatiques "), à l'automne 1998, entre les entreprises asiatiques Chunghwa, Samsung, la requérante, [confidentiel] et [confidentiel], sur une base mensuelle ou trimestrielle, réunions auxquelles se seraient ajoutés des contacts bilatéraux et des échanges d'informations commerciales fréquents entre producteurs à l'échelle mondiale. Puis, à compter de 1999, les entreprises asiatiques se seraient employées à élargir le cercle des membres de l'entente afin d'y inclure tous les principaux producteurs asiatiques de même que les producteurs européens. Elles auraient ainsi été rejointes par [confidentiel], Matsushita Electric Industrial Co. Ltd (ci-après " MEI "), Philips, Thomson et Toshiba. La participation des entreprises européennes, Philips et Thomson, aurait été prouvée à partir du lancement, au printemps 1999, d'une procédure antidumping en Europe concernant l'importation de CPT asiatiques de quatorze pouces. Depuis lors, des éléments de preuve attesteraient également de la tenue de réunions multilatérales en Europe (ci-après les " réunions verre européennes "). Par ailleurs, dans les années 2002-2003, les réunions verre asiatiques auraient changé de forme et auraient alors été organisées en deux plates-formes destinées aux producteurs de CPT implantés en Asie et comprenant, d'une part, des réunions entre Samsung, Matsushita Toshiba Picture Display Co. Ltd (ci-après " MTPD ") et le groupe LPD, dites " réunions SML ", lesquelles portaient sur les CPT de dimensions moyenne et grande et, d'autre part, des réunions du Sud-Est asiatique, entre Samsung, le groupe LPD, MTPD, Chunghwa et [confidentiel], dites " réunions ASEAN ", portant sur les CPT de petite et de moyenne dimensions.
12 La Commission a relevé que, bien que les réunions verre européennes relatives aux CPT aient été organisées et conduites séparément des réunions verre asiatiques, les filiales des mêmes entreprises et, à titre occasionnel, les mêmes collaborateurs avaient participé à ces réunions avec des concurrents tant en Europe qu'en Asie. Ainsi, la Commission a considéré que les réunions européennes et asiatiques étaient interconnectées, dans la mesure où les mêmes sujets y étaient examinés et où le même type d'informations y était échangé, et ce en dépit du fait que les documents s'y rapportant ne décrivaient pas l'existence d'une organisation centrale conjointe. À cet égard, la Commission a indiqué que les réunions verre européennes étaient une extension des réunions verre asiatiques et qu'elles se concentraient plus particulièrement sur les conditions de marché et les prix en Europe, alors que les contacts établis dans le contexte de l'entente en Asie étaient de nature mondiale et portaient donc également sur l'Europe. Par ailleurs, les accords concernant le marché européen auraient été conclus dans le cadre de réunions qui auraient eu lieu tant en Europe qu'en Asie et les prix pratiqués auraient fait l'objet d'un suivi régulier, les prix asiatiques ayant été utilisés comme indicateurs lors de l'examen du niveau des prix européens.
13 S'agissant, deuxièmement, de l'entente CDT, la Commission a estimé que les participants étaient convenus de fixer des prix cibles, de définir les motifs à fournir aux clients pour expliquer les augmentations de prix et, de surcroît, de décider que tel producteur communiquerait telle augmentation de prix à tel client. Des éléments de preuve datant de l'époque des faits suggéreraient également que les augmentations du prix des CDT étaient parfois répercutées sur le marché en aval de la production des tubes pour écrans d'ordinateur. Les producteurs de CDT participant à l'entente auraient également conclu des accords relatifs aux parts de marché. Dans ce cadre, ils seraient convenus que tel producteur vendrait ses produits à tel client bien précis. En outre, les producteurs de CDT seraient convenus de limitations de production coordonnées visant à réduire l'excédent d'offre et à atteindre les prix cibles et les parts de marché visées. De surcroît, les participants aux réunions relatives aux CDT auraient mis en place un processus pour vérifier le respect des restrictions de production convenues. Par ailleurs, les échanges d'informations détaillées sur les tarifs, les capacités, les productions et les demandes passées et futures auraient constitué une large part des contacts illicites entre les producteurs de CDT. Ces échanges d'informations auraient servi à la fois à contrôler les accords passés et à planifier conjointement les prix, les productions, les parts de marché et les attributions des futurs clients.
14 La Commission a considéré que les réunions multilatérales, dont l'existence serait établie à partir de l'année 1997 et qui seraient devenues régulières et plus formelles à partir de l'année 1998, constituaient la pierre angulaire de l'entente CDT. Les réunions étaient intitulées " five compan[ies] " (cinq entreprises), étant donné que Chunghwa, Samsung, la requérante, Philips et [confidentiel] y participaient régulièrement, ou " CDT Glass Meetings " (réunions verre CDT). La Commission a estimé que, dès l'année 1998, une structure à trois paliers avait été mise en place, laquelle comprenait des réunions au sommet, également appelées " réunions vertes " et consistant en des réunions généralement trimestrielles entre les plus hauts responsables des entreprises, des réunions au niveau de la direction, à savoir des réunions mensuelles dirigées par des cadres supérieurs des départements des ventes, et des réunions de travail, auxquelles participaient des directeurs de ventes locaux et régionaux. Les producteurs de CDT auraient également entretenu de fréquents contacts bilatéraux. La Commission a noté que, après le transfert, au 1er juillet 2001, des activités CRT de la requérante et de Philips au groupe LPD, le noyau de l'entente en cause s'était reconstitué autour de Chunghwa, de Samung, du groupe LPD et de [confidentiel] et que, à partir de l'année 2003, le nombre des membres de ce noyau s'était stabilisé à trois participants, à savoir Chunghwa, Samsung et le groupe LPD. À cet égard, des contacts noués avec des concurrents japonais, notamment MEI, Toshiba et [confidentiel], constitueraient une caractéristique spécifique de l'entente CDT.
15 S'agissant, troisièmement, de l'implication de la requérante dans les ententes, d'une part, la Commission a considéré que l'intéressée ainsi que ses filiales avaient participé aux ententes CDT et CPT jusqu'au transfert des activités CRT au groupe LPD, le 1er juillet 2001. En conséquence, la requérante a été tenue responsable, en tant que participante directe et en tant que société mère, des infractions commises du 24 octobre 1996 au 30 juin 2001, s'agissant des CDT, et du 3 décembre 1997 au 30 juin 2001, s'agissant des CPT. D'autre part, la Commission a estimé que la requérante et Philips devaient être tenues, en tant que sociétés mères, conjointement et solidairement responsables de la participation du groupe LPD aux ententes CDT et CPT du 1er juillet 2001 au 30 janvier 2006.
16 Les articles 1er à 3 du dispositif de la décision attaquée se lisent comme suit :
" Article [premier]
1 Les entreprises [en cause] ont enfreint l'article 101 [...] TFUE et l'article 53 de l'accord EEE en participant, durant les périodes indiquées, à un complexe unique et continu d'accords et de pratiques concertées dans le secteur des [CDT] :
[...]
d) LG Electronics[...] du 24 octobre 1996 au 30 janvier 2006.
2 Les entreprises [en cause] ont enfreint l'article 101 [...] TFUE et l'article 53 de l'accord EEE en participant, durant les périodes indiquées, à un complexe unique et continu d'accords et de pratiques concertées dans le secteur des [CPT] :
[...]
g) LG Electronics[...] du 3 décembre 1997 au 30 janvier 2006.
[...]
Article 2
1 En ce qui concerne l'infraction visée à l'article 1[er, paragraphe 1], les amendes suivantes sont infligées :
[...]
d) LG Electronics[...] : 116 536 000 euros ;
e) [...] Philips [...] et LG Electronics[...], conjointement et solidairement responsables : 69 048 000 euros ;
2 En ce qui concerne l'infraction visée à l'article 1[er, paragraphe 2], les amendes suivantes sont infligées :
[...]
d) LG Electronics[...] : 179 061 000 euros ;
e) Philips et LG Electronics[...], conjointement et solidairement responsables : 322 892 000 euros ;
[...]
Article 3
Les entreprises visées à l'article [1er] mettent fin immédiatement aux infractions visées audit article, dans la mesure où elles ne l'ont pas encore fait.
Elles s'abstiennent dorénavant de tout acte ou comportement visés à l'article [1er], ainsi que de tout acte ou comportement ayant un objet ou un effet identique ou similaire. "
Procédure et conclusions des parties
17 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 14 février 2013, la requérante a introduit le présent recours.
18 La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la troisième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.
19 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (troisième chambre) a décidé d'ouvrir la phase orale de la procédure et, dans le cadre des mesures d'organisation de la procédure prévues à l'article 64 de son règlement de procédure du 2 mai 1991, de demander la production d'un document à la requérante. Il a été déféré à cette demande dans le délai imparti.
20 Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal lors de l'audience du 12 novembre 2014 au cours de laquelle il a été décidé d'inviter les parties à déposer leurs observations éventuelles sur l'arrêt de la Cour du 12 novembre 2014, Guardian Industries et Guardian Europe/Commission (C 580/12 P, Rec), dans un délai de dix jours à compter de la date du prononcé de ce dernier, délai qui a été prorogé au 28 novembre 2014 à l'égard de la Commission, à la demande de celle-ci.
21 Par lettres déposées au greffe du Tribunal respectivement le 24 et le 28 novembre 2014, la requérante et la Commission ont déféré à cette demande.
22 La phase orale de la procédure a été clôturée le 5 décembre 2014.
23 Par une ordonnance du 26 mai 2015, le Tribunal a décidé la réouverture de la phase orale de la procédure en application de l'article 62 du règlement de procédure du 2 mai 1991.
24 Dans le cadre des mesures d'organisation de la procédure prévues à l'article 64 de son règlement de procédure du 2 mai 1991, le Tribunal a invité les parties à déposer leurs observations éventuelles sur les conclusions de l'avocat général Wathelet dans l'affaire InnoLux/Commission (C 231/14 P, Rec). Il a été déféré à cette demande dans le délai imparti. Les parties ont ensuite présenté leurs observations sur les réponses fournies dans le cadre de ladite mesure d'organisation de la procédure et, en particulier, sur le calcul et le montant des amendes.
25 La phase orale de la procédure a été clôturée le 10 juillet 2015.
26 La requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal :
- annuler, en tout ou partie, l'article 1er, paragraphe 1, sous d), et paragraphe 2, sous g), ainsi que l'article 2, paragraphe 1, sous d) et e), et paragraphe 2, sous d) et e), de la décision attaquée ;
- réduire le montant de l'amende infligée par l'article 2, paragraphe 1, sous d) et e), et paragraphe 2, sous d) et e), de ladite décision ;
- condamner la Commission aux dépens.
27 La Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal :
- rejeter le recours ;
- condamner la requérante aux dépens.
En droit
28 Il y a lieu d'examiner, dans un premier temps, les conclusions de la requérante visant à obtenir l'annulation de la décision attaquée en tant qu'elle la concerne, puis, dans un second temps, celles visant à ce que le Tribunal exerce sa compétence de pleine juridiction pour réformer, en les réduisant, les amendes que la Commission lui a infligées.
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision attaquée
29 A l'appui de ces conclusions, la requérante soulève les sept moyens suivants :
- la violation des droits de la défense, en ce que le groupe LPD a été écarté de la procédure ;
- l'erreur manifeste d'appréciation ainsi que la violation de l'article 101 TFUE, de l'article 23, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles [101 TFUE] et [102 TFUE] (JO 2003, L 1, p. 1), et du principe de la responsabilité personnelle, en ce qu'elle a été tenue responsable d'infractions commises par le groupe LPD ;
- la violation de l'article 25 du règlement n° 1/2003, dans la mesure où la décision attaquée a retenu sa responsabilité pour un comportement infractionnel antérieur au 1er juillet 2001 ;
- la violation des articles 101 TFUE et 296 TFUE, de l'article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 1/2003 (JO 2006, C 210, p. 2, ci-après les " lignes directrices de 2006 ") ainsi que du principe d'égalité de traitement, en ce que la décision attaquée a inclus les CRT intégrés au sein d'un même groupe à un produit final, à un téléviseur ou à un écran d'ordinateur et vendus ensuite aux clients de l'EEE par l'un des destinataires de la décision attaquée (ci-après les " ventes directes EEE par le biais de produits transformés ") dans le calcul de l'amende, d'une part, sans motivation suffisante ni preuve de la répercussion des augmentations des prix des CRT sur les prix des téléviseurs et des écrans d'ordinateur et, d'autre part, en excédant la compétence de la Commission ainsi qu'en traitant de manière inégale les entreprises intégrées et celles qui ne l'étaient pas ;
- la violation de l'article 101 TFUE, de l'article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, du principe de la responsabilité personnelle et des droits de la défense, ainsi que l'erreur manifeste d'appréciation, dans la mesure où la décision attaquée a pris en compte, dans le calcul du montant de l'amende, les ventes directes EEE par le biais de produits transformés réalisées par Philips ;
- la violation de l'article 296 TFUE, l'erreur manifeste d'appréciation ainsi que la violation des principes d'égalité de traitement et de bonne administration, dans la mesure où la décision attaquée n'a pas inclus les ventes directes EEE par le biais de produits transformés dans le calcul du montant de l'amende infligée à Samsung SDI Co., et ce sans motivation suffisante ;
- la violation de l'article 101 TFUE et de l'article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, ainsi que des principes d'égalité de traitement et de bonne administration, dans la mesure où la décision attaquée n'a pas été adressée à l'ensemble des auteurs des infractions.
30 En l'espèce, le Tribunal estime opportun de traiter d'abord le deuxième moyen, puis les premier, septième, troisième, quatrième et cinquième moyens et, enfin, le sixième moyen.
Sur le deuxième moyen, tiré de l'erreur manifeste d'appréciation ainsi que de la violation de l'article 101 TFUE, de l'article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 et du principe de la responsabilité personnelle, en ce que la requérante a été tenue responsable d'infractions commises par le groupe LPD
31 Ce moyen est divisé en deux branches, tirées, la première, de la violation de l'article 101 TFUE et de l'article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, en ce que la requérante n'aurait pas exercé d'influence déterminante sur le comportement du groupe LPD, et, la seconde, de la violation du principe de la responsabilité personnelle.
- Sur la première branche, tirée de la violation de l'article 101 TFUE et de l'article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, en ce que la requérante n'aurait pas exercé d'influence déterminante sur le comportement du groupe LPD
32 La requérante fait valoir, en substance, que la Commission n'a pas démontré qu'elle avait exercé une influence déterminante sur le comportement du groupe LPD.
33 À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la notion d'entreprise désigne toute entité exerçant une activité économique, indépendamment du statut juridique de cette entité et de son mode de financement. Cette notion doit être comprise comme désignant une unité économique, même si, du point de vue juridique, cette unité est constituée de plusieurs personnes physiques ou morales. Lorsqu'une telle entité économique enfreint les règles de la concurrence, il lui incombe, selon le principe de la responsabilité personnelle, de répondre de cette infraction (voir arrêt de la Cour du 19 juillet 2012, Alliance One International et Standard Commercial Tobacco/Commission et Commission/Alliance One International e.a., C 628/10 P et C 14/11 P, Rec, point 42, et la jurisprudence citée).
34 En particulier, le comportement d'une filiale peut être imputé à la société mère notamment lorsque, bien qu'ayant une personnalité juridique distincte, cette filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché, mais applique pour l'essentiel les instructions qui lui sont données par la société mère, eu égard en particulier aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent ces deux entités juridiques (voir arrêt de la Cour du 26 septembre 2013, EI du Pont de Nemours/Commission, C 172/12 P, non publié au Recueil, point 41, et la jurisprudence citée).
35 En effet, dans une telle situation, la société mère et sa filiale faisant partie d'une même unité économique et formant ainsi une seule entreprise au sens de l'article 101 TFUE, la Commission peut adresser une décision infligeant des amendes à la société mère sans qu'il soit requis d'établir l'implication personnelle de cette dernière dans l'infraction (arrêt EI du Pont de Nemours/Commission, point 34 supra, point 42).
36 Il convient également de noter que, afin de pouvoir imputer le comportement d'une filiale à la société mère, la Commission ne saurait se contenter de constater que la société mère est en mesure d'exercer une influence déterminante sur le comportement de sa filiale, mais doit également vérifier si cette influence a effectivement été exercée (arrêt EI du Pont de Nemours/Commission, point 34 supra, point 44).
37 Ainsi, la Cour a précisé que, pour démontrer l'influence déterminante de la société mère sur le comportement de sa filiale sur le marché, il convient de prendre en compte l'ensemble des éléments pertinents relatifs aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent une filiale à sa société mère, lesquels peuvent varier selon les cas et ne sauraient donc faire l'objet d'une énumération exhaustive (arrêt EI du Pont de Nemours/Commission, point 34 supra, point 43).
38 En outre, dans la jurisprudence, l'analyse de l'existence d'une entité économique unique entre plusieurs sociétés faisant partie d'un groupe a impliqué l'examen de la question de savoir si la société mère avait influencé la politique des prix de sa filiale, les activités de production et de distribution, les objectifs de vente, les marges brutes, les frais de vente, le " cash flow ", les stocks et le marketing (voir arrêt du Tribunal du 12 décembre 2012, 1. garantovaná/Commission, T 392/09, non publié au Recueil, point 31, et la jurisprudence citée).
39 La Cour a également estimé que, dans le cas où deux sociétés mères détenaient chacune 50 % de l'entreprise commune ayant commis une infraction aux règles du droit de la concurrence, c'était uniquement aux fins de la constatation de la responsabilité pour la participation à l'infraction à ce droit et seulement dans la mesure où la Commission avait démontré, sur la base d'un ensemble d'éléments factuels, l'exercice effectif de l'influence déterminante des deux sociétés mères sur l'entreprise commune que ces trois entités pouvaient être considérées comme faisant partie d'une même unité économique, formant ainsi une seule entreprise au sens de l'article 101 TFUE (arrêt EI du Pont de Nemours/Commission, point 34 supra, point 47).
40 Enfin, il convient de rappeler que, eu égard au fait que, en vertu de l'article 263 TFUE, le Tribunal doit se limiter à un contrôle de légalité de la décision attaquée sur la base des motifs contenus dans cet acte, l'exercice effectif d'un pouvoir de direction de la société mère sur sa filiale doit être apprécié en fonction des seuls éléments de preuve réunis par la Commission dans la décision qui impute la responsabilité de l'infraction à la société mère. Dès lors, la seule question pertinente est celle de savoir si la preuve de l'infraction est ou non rapportée au vu desdits éléments de preuve (voir arrêt du Tribunal du 12 juillet 2011, Fuji Electric/Commission, T 132/07, Rec. p. II 4091, point 185, et la jurisprudence citée).
41 Pour déterminer si la requérante et Philips avaient exercé une influence déterminante sur le comportement du groupe LPD, tout d'abord, la Commission s'est fondée sur les liens structurels et organisationnels existant entre ledit groupe et ses sociétés mères. Ensuite, elle a relevé que l'accord sur l'entreprise commune comprenait des clauses instaurant un traitement préférentiel mutuel entre cette entreprise et ses sociétés mères ainsi qu'une clause de non-concurrence. Enfin, elle a souligné que les sociétés mères avaient joué le rôle non seulement d'actionnaires, mais également de conseillers du groupe LPD, et que, en l'espèce, il était improbable que la requérante ait ignoré l'implication de l'entreprise commune dans les infractions en cause.
42 S'agissant des liens structurels et organisationnels existant entre le groupe LPD et ses sociétés mères, il ressort de l'accord sur l'entreprise commune que, ainsi que l'a relevé la Commission au considérant 828 de la décision attaquée, la structure de gouvernance dudit groupe était composée d'une assemblée générale des actionnaires, d'un comité d'actionnaires, d'un conseil de surveillance, d'un conseil d'administration et d'une équipe de direction du groupe, rebaptisée " conseil exécutif " par un amendement audit accord, daté du 10 septembre 2002.
43 De surcroît, l'article 6.3.1 de l'accord sur l'entreprise commune stipulait que le conseil de surveillance supervisait la gestion, la direction et le contrôle de l'entreprise commune et qu'il incombait à cet organe de donner une orientation stratégique au conseil exécutif ainsi que d'examiner et d'approuver en dernier ressort les plans proposés par ledit conseil. Le conseil de surveillance était composé de six membres, dont aucun ne devait être un cadre dirigeant du groupe LPD, et chaque société mère avait la charge de nommer la moitié de ses membres. Il ressort également de l'article 6.3.4 dudit accord que les réunions du conseil de surveillance étaient au moins trimestrielles et que l'ordre du jour devait obligatoirement comprendre un certain nombre de questions déterminantes comme l'examen et les adaptations des fonds de roulement, les budgets trimestriels, les décisions relatives aux dépenses extraordinaires en capital et toute autre question soumise par un membre du conseil de surveillance. Enfin, l'article 6.3.6 de l'accord sur l'entreprise commune stipulait que les résolutions du conseil de surveillance étaient prises par un vote favorable à la majorité ou à la majorité qualifiée de l'ensemble des membres. Ainsi, l'adoption d'une décision concernant une question soumise au conseil de surveillance exigeait un vote favorable d'au moins un membre nommé par chacune des sociétés mères.
44 Sur un plan opérationnel, la direction du groupe était assurée par un conseil d'administration et un conseil exécutif.
45 Selon l'article 6.3.7 de l'accord sur l'entreprise commune, le conseil d'administration était chargé de la gestion quotidienne du groupe LPD et était soumis à la surveillance, au contrôle et à la direction du conseil de surveillance. Ainsi que l'a noté, à juste titre, la Commission, le conseil d'administration était composé de six directeurs généraux, chaque société mère nommant la moitié d'entre eux.
46 Par ailleurs, le conseil exécutif du groupe LPD était responsable de la supervision de la gestion quotidienne de l'entreprise commune, laquelle comprenait le contrôle et la mise en œuvre de tous les points inscrits dans tout budget trimestriel examiné et autorisé par le conseil de surveillance, et avait le pouvoir d'adopter des décisions et de prendre des mesures s'agissant de toutes les questions qui n'étaient pas expressément réservées, par la loi ou par l'accord sur l'entreprise commune, à d'autres organes, et notamment au conseil d'administration et au conseil de surveillance. L'amendement susmentionné du 10 septembre 2002 stipulait surtout que, durant les cinq premières années de sa mise en œuvre, Philips désignerait le président-directeur général (PDG) du conseil exécutif de l'entreprise commune et que la requérante désignerait le membre nommé directeur-PDG adjoint. De même, il était prévu que les sociétés mères nommeraient d'un commun accord les membres qui occuperaient les postes clés, à savoir le directeur financier, le directeur des opérations et le directeur des ventes et que les autres membres dudit conseil seraient proposés par le PDG et le directeur-PDG adjoint et nommés par le conseil de surveillance.
47 Il résulte de ce qui précède que le groupe LPD était organisé d'une manière telle que les actionnaires étaient en mesure, d'une part, de contrôler l'adoption des décisions commerciales stratégiques, l'élaboration des plans opérationnels et stratégiques ainsi que la supervision de la gestion quotidienne, et, d'autre part, d'être informés du fonctionnement du groupe. Ainsi, dans les circonstances de l'espèce, l'analyse abstraite des dispositions de l'accord sur l'entreprise commune est un premier indice de ce que les sociétés mères exerçaient effectivement une influence déterminante sur le comportement du groupe LPD. À cet égard, il ressort de la jurisprudence que l'examen de l'exercice effectif d'une influence déterminante sur le comportement commercial de l'entreprise commune peut consister en une analyse abstraite des documents signés avant le début de son fonctionnement, à l'instar de l'analyse concernant le contrôle. En particulier, lorsque lesdites dispositions et stipulations prévoyaient que les votes de chaque société mère étaient nécessaires à l'adoption d'une résolution au sein d'un organe de l'entreprise commune, la Commission et le juge de l'Union européenne peuvent établir, en l'absence de preuves contraires, que lesdites résolutions étaient déterminées conjointement par les sociétés mères (arrêt du Tribunal du 11 juillet 2014, Sasol e.a./Commission, T 541/08, Rec, point 49).
48 Ce constat est conforté par les autres éléments mis en avant par la Commission pour établir l'existence d'une influence déterminante.
49 Premièrement, alors qu'il résulte de l'examen des dispositions de l'accord sur l'entreprise commune, exposées aux points 42 à 46 ci-dessus, que la fonction du conseil de surveillance était prééminente dans la structure du groupe LPD, il ressort des considérants 840 et 843 de la décision attaquée que des membres de ce conseil occupaient des postes de direction simultanément au sein de Philips et de la requérante. S'agissant, plus précisément, de la requérante, il ressort du considérant 842 de la décision attaquée qu'un des membres du conseil de surveillance, désigné par elle le 15 janvier 2005, exerçait simultanément des fonctions de vice-président de son département des activités d'affichage. À cet égard, force est de constater que, contrairement à ce qu'affirme la requérante, la décision attaquée ne mentionne pas que ce membre du conseil de surveillance était un employé du groupe LPD. En revanche, il convient de rappeler que la jurisprudence considère que l'importance de l'implication de la société mère dans la gestion de sa filiale peut, effectivement, être attestée par la présence, à la tête de la filiale, de nombreuses personnes occupant des fonctions de direction en son sein. En effet, un tel cumul de fonctions permet aux membres de la direction de la société mère de veiller, dans le cadre de l'exercice de leurs fonctions dirigeantes au sein de la filiale, à ce que la ligne d'action de cette dernière sur le marché soit conforme aux orientations dégagées par les instances dirigeantes de la société mère. Un tel objectif peut être atteint sans même que le ou les membres de la société mère assumant des fonctions de direction au sein de la filiale n'aient la qualité de mandataire social de la société mère (arrêt Fuji Electric/Commission, point 40 supra, point 184). Dans ces conditions, la présence, dans le conseil de surveillance de l'entreprise commune, d'une personne occupant simultanément des fonctions de vice-président au sein de l'un des départements de la société mère est un indice supplémentaire de l'influence déterminante exercée par la requérante sur le comportement du groupe LPD.
50 Deuxièmement, il ressort du considérant 832 de la décision attaquée, que, lorsqu'il s'est réuni entre le 27 octobre 2001 et le 12 janvier 2006, soit pendant la période couverte par les infractions en cause, le conseil de surveillance a abordé, notamment, des questions relatives aux évolutions du marché, aux ventes, aux prix de ventes, au volume des stocks, aux investissements dans de nouveaux produits et aux réorganisations nécessaires. La requérante fait valoir que ces questions concernaient uniquement la santé financière du groupe LPD. Sur ce point, il doit être rappelé qu'il ressort de la jurisprudence mentionnée au point 38 ci-dessus que l'existence d'une entité économique unique entre plusieurs sociétés peut être révélée par l'influence exercée par la société mère sur la politique des prix de sa filiale, les objectifs de vente, les frais de vente ou les stocks. Dès lors, les faits mentionnés au considérant 832 de la décision attaquée, au demeurant non contestés par la requérante, indiquent que, lorsqu'il se réunissait, le conseil de surveillance ne se limitait pas aux questions financières du groupe LPD, mais examinait également des points relatifs à la politique commerciale de ce groupe. Dans ces conditions, c'est sans commettre d'erreur que la Commission a relevé, au considérant 837 de la décision attaquée, qu'une telle circonstance mettait en évidence le fait que les missions imparties au conseil de surveillance ne se limitaient pas à celles dont le droit néerlandais chargeait habituellement ce type d'organe, mais lui permettaient aussi d'approuver les principales décisions de la direction et d'imposer l'orientation des activités de l'entreprise commune.
51 Troisièmement, il ressort du considérant 832 de la décision attaquée que le conseil de surveillance a effectivement pris des décisions mettant en évidence son influence sur le fonctionnement et l'organisation du groupe LPD. Ainsi, ledit conseil a décidé le changement de la structure organisationnelle de ce groupe en remplaçant l'équipe de direction par le conseil exécutif. Il a également décidé la fin de la gestion du groupe sur une base régionale et a mis en place une gestion centralisée. Or, l'intervention du conseil de surveillance dans la structure du groupe LPD est un élément pertinent dans le cadre de l'analyse des liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent une entreprise commune et sa société mère.
52 Quatrièmement, il y a lieu de relever que l'article 7.6 de l'accord sur l'entreprise commune stipulait que le groupe LPD était le fournisseur préférentiel des CRT de ses sociétés mères. Or, force est de constater, ainsi qu'il est relevé à juste titre dans la décision attaquée, que, lorsqu'une société mère est également fournisseur ou cliente de sa filiale, elle a un intérêt très spécifique à gérer les activités de production ou de distribution de cette filiale afin de tirer pleinement parti de la valeur ajoutée créée par l'intégration verticale ainsi réalisée (arrêt Fuji Electric/Commission, point 40 supra, point 184). Sur ce point, la requérante fait valoir que les transactions entre le groupe LPD et ses sociétés mères étaient conclues dans des conditions normales de concurrence. Pour autant, une telle circonstance, à la supposer établie, ne permet pas de remettre en cause le fait que la requérante possédait, en tant que cliente de CRT de l'entreprise commune, un intérêt certain à diriger les activités de production ou de distribution de cette dernière.
53 Il résulte de tout ce qui précède que la preuve de l'exercice effectif par la requérante d'une influence déterminante sur la ligne d'action suivie par le groupe LPD a été rapportée à suffisance de droit par la Commission au regard du faisceau constitué par les indices réunis dans la décision attaquée et rappelés aux points 42 à 52 ci-dessus.
54 Par conséquent, c'est sans commettre d'erreur que la Commission, d'une part, a estimé que la requérante avait exercé une influence déterminante sur le comportement du groupe LPD et, d'autre part, l'a tenue pour personnellement et solidairement responsable de la participation du groupe LPD aux infractions en litige.
55 Une telle conclusion ne saurait être remise en cause par les autres arguments de la requérante.
56 Premièrement, la requérante fait valoir que la Commission n'a pas établi qu'elle avait connaissance de la participation du groupe LPD à l'entente.
57 À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, il n'est pas exigé, pour imputer à une société mère les actes commis par sa filiale, de prouver que ladite société mère a été directement impliquée dans les comportements incriminés ou en a eu connaissance. Ce n'est pas une relation d'instigation relative à l'infraction entre la société mère et sa filiale ni, à plus forte raison, une implication de la première dans ladite infraction, mais le fait qu'elles font partie d'une même entreprise au sens de l'article 101 TFUE, qui habilite la Commission à adresser la décision imposant des amendes à la société mère (voir arrêt du Tribunal du 2 février 2012, EI du Pont de Nemours e.a./Commission, T 76/08, non publié au Recueil, point 76, et la jurisprudence citée). Dès lors, le fait que la requérante n'a pas eu connaissance de l'infraction commise par le groupe LPD, à le supposer établi, ne permet pas d'infirmer la conclusion formulée au point 54 ci dessus, selon laquelle la requérante a exercé une influence déterminante sur le comportement du groupe LPD.
58 À titre surabondant, il importe de rappeler que la requérante et ses filiales ont participé aux ententes CDT et CPT jusqu'au transfert des activités CRT au groupe LPD, le 1er juillet 2001, et que, en conséquence, la requérante a été tenue pour responsable, en tant que participante directe et en tant que société mère, des infractions commises du 24 octobre 1996 au 30 juin 2001, s'agissant des CDT, et du 3 décembre 1997 au 30 juin 2001, s'agissant des CPT. Cet état de fait, au demeurant non contesté par la requérante, permet de douter que la requérante n'avait aucune connaissance de la participation du groupe LPD aux infractions en cause.
59 Deuxièmement, la requérante avance que la Commission n'a pas démontré que le groupe LPD suivait une politique commerciale conforme à la sienne. Elle ajoute que, si la notion de politique commerciale doit faire l'objet d'une interprétation large, il n'en demeure pas moins que les éléments de preuve de la Commission devaient se rapporter à la politique commerciale du groupe LPD.
60 À cet égard, il convient de préciser que le comportement d'une filiale sur le marché ne saurait constituer le seul élément permettant d'engager la responsabilité de la société mère, mais qu'il est seulement l'un des signes de l'existence d'une unité économique (arrêt de la Cour du 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission, C 97/08 P, Rec. p. I 8237, point 73).
61 En effet, il y a lieu de tenir compte de l'ensemble des liens économiques, organisationnels et juridiques entre une société mère et sa filiale pour établir l'existence d'une unité économique (voir arrêt EI du Pont de Nemours/Commission, point 34 supra, point 41, et la jurisprudence citée).
62 Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que les éléments de preuve mis en avant par la Commission devaient se rapporter uniquement à la politique commerciale du groupe LPD.
63 Dans ces conditions, ainsi qu'il a été exposé aux points 53 et 54 ci-dessus, et sans même qu'il soit nécessaire, à la lumière des constatations effectuées aux points 42 à 52 ci-dessus, d'examiner les autres indices réunis à cet égard dans la décision attaquée, dont la pertinence a également été mise en cause par la requérante, il y a lieu de conclure que c'est à bon droit que la Commission a considéré que la requérante avait exercé une influence déterminante sur le groupe LPD. La première branche du deuxième moyen doit donc être écartée.
- Sur la seconde branche, tirée de la violation du principe de la responsabilité personnelle
64 La requérante fait valoir que, en lui imputant la responsabilité du comportement d'une autre entreprise, la Commission a violé le principe de la responsabilité personnelle.
65 À cet égard, il a été indiqué au point 53 ci-dessus que la Commission avait établi à suffisance de droit que la requérante avait exercé une influence déterminante sur le comportement du groupe LPD. En outre, dans l'arrêt rendu ce jour dans l'affaire T 92/13, Philips/Commission, le Tribunal a considéré que l'autre société mère, Philips, avait également exercé une influence déterminante sur le comportement du groupe LPD. Dès lors, ces trois entités appartenaient à une unité économique au sens de la jurisprudence citée au point 33 ci-dessus. Or, lorsqu'une telle entité économique enfreint les règles de la concurrence, il lui incombe, selon le principe de la responsabilité personnelle, de répondre de cette infraction (voir arrêt Akzo Nobel e.a./Commission, point 60 supra, point 56, et la jurisprudence citée). Par conséquent, en imputant à la requérante, en tant que membre de cette unité économique, la responsabilité du comportement infractionnel du groupe LPD, la Commission n'a pas violé le principe de la responsabilité personnelle.
66 Il résulte de ce qui précède que la seconde branche du deuxième moyen doit être écartée. Par suite, étant donné que la requérante ne développe aucune argumentation à l'appui de son grief tiré de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise la Commission, le deuxième moyen doit être rejeté.
Sur le premier moyen, tiré de la violation des droits de la défense, en ce que le groupe LPD a été écarté de la procédure
67 La requérante fait valoir, en substance, que, en s'abstenant d'adresser au groupe LPD tant la communication des griefs que la communication des griefs supplémentaire et la décision attaquée, la Commission a violé ses droits de la défense.
68 À cet égard, il y a lieu de rappeler que le respect des droits de la défense dans la conduite des procédures administratives en matière de politique de la concurrence constitue un principe général du droit de l'Union dont les juridictions de l'Union assurent le respect (voir arrêt de la Cour du 3 septembre 2009, Prym et Prym Consumer/Commission, C 534/07 P, Rec. p. I 7415, point 26, et la jurisprudence citée).
69 Selon une jurisprudence constante, le respect des droits de la défense exige que l'entreprise intéressée ait été mise en mesure, au cours de la procédure administrative, de faire connaître utilement son point de vue sur la réalité et la pertinence des faits et des circonstances alléguées ainsi que sur les documents retenus par la Commission à l'appui de son allégation de l'existence d'une infraction au traité (voir arrêt de la Cour du 9 juillet 2009, Archer Daniels Midland/Commission, C 511/06 P, Rec. p. I 5843, point 88, et la jurisprudence citée).
70 En outre, la jurisprudence considère qu'il y a violation des droits de la défense lorsqu'il existe une possibilité que, en raison d'une irrégularité commise par la Commission, la procédure administrative menée par elle aurait pu aboutir à un résultat différent. Une entreprise partie requérante établit qu'une telle violation a eu lieu lorsqu'elle démontre suffisamment non pas que la décision de la Commission aurait eu un contenu différent, mais bien qu'elle aurait pu mieux assurer sa défense en l'absence d'irrégularité procédurale, par exemple en raison du fait qu'elle aurait pu utiliser pour sa défense des documents dont l'accès lui a été refusé lors de la procédure administrative (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 2 octobre 2003, Thyssen Stahl/Commission, C 194/99 P, Rec. p. I 10821, point 31, et la jurisprudence citée).
71 La requérante soutient que, dès lors que le groupe LPD était sous le contrôle d'un administrateur judiciaire durant la procédure administrative, elle n'a pu avoir accès ni aux informations dont il disposait ni à son personnel. Elle affirme que, si ledit groupe avait été impliqué dans la procédure, elle aurait pu coopérer avec lui afin de s'assurer de la matérialité des faits invoqués par la Commission. En outre, la requérante allègue que, à tout le moins, le groupe LPD aurait pu se défendre contre les accusations de la Commission et mettre au jour des éléments de preuve qui auraient été utiles pour sa propre défense. Ainsi, la requérante estime que, en coopérant avec le groupe LPD ou en ayant accès aux preuves qu'il aurait pu produire ou même à son personnel, elle aurait pu infirmer certains faits relatifs aux infractions ou à l'existence d'une influence des sociétés mères sur le comportement de l'entreprise commune.
72 À titre liminaire, il importe de préciser qu'il est constant que la Commission n'a adressé au groupe LPD ni la communication des griefs, ni la communication des griefs supplémentaire, ni la décision attaquée et, partant, ne lui a pas imputé de responsabilité du fait de son comportement, motif pris de ce que ledit groupe était engagé dans une procédure de faillite.
73 En premier lieu, il convient d'examiner si, en s'abstenant d'adresser au groupe LPD tant la communication des griefs que la communication des griefs supplémentaire et la décision attaquée, la Commission a commis une irrégularité au sens de la jurisprudence citée au point 70 ci-dessus.
74 À cet égard, il ressort de l'examen du deuxième moyen que la requérante, Philips et le groupe LPD appartenaient à la même entreprise, au sens de la jurisprudence rappelée aux points 34 et 35 ci-dessus. Or, ainsi qu'il a été indiqué au point 57 ci-dessus, c'est précisément le fait qu'une société mère et sa filiale constituent une seule entreprise, au sens de l'article 101 TFUE, qui habilite la Commission à imputer à la première la responsabilité d'une infraction commise par la seconde (voir, en ce sens, arrêt EI du Pont de Nemours e.a./Commission, point 57 supra, point 76). Ainsi, du fait de cette imputation, la société mère est censée avoir commis elle-même l'infraction (arrêt de la Cour du 16 novembre 2000, Metsä-Serla e.a./Commission, C 294/98 P, Rec. p. I 10065, point 28).
75 Dans ces conditions, la Commission n'a violé ni l'article 101 TFUE ni l'article 53 de l'accord sur l'EEE en imputant à la requérante le comportement anticoncurrentiel du groupe LPD, s'agissant de la période comprise entre le 1er juillet 2001 et le 30 janvier 2006.
76 Sur ce point, la requérante ajoute que, lorsque la procédure administrative a débuté, elle n'appartenait plus à la même unité économique que le groupe LPD étant donné que ce dernier avait été placé sous le contrôle d'un administrateur judiciaire.
77 Toutefois, une telle circonstance, à la supposer établie, est dénuée de pertinence dans la mesure où la responsabilité de la requérante du fait du comportement infractionnel du groupe LPD a été retenue uniquement pour la période antérieure au placement de ce groupe sous le contrôle de l'administrateur judiciaire.
78 Est également dénué de pertinence le fait que l'argument invoqué par la Commission dans la décision attaquée pour ne pas impliquer le groupe LPD dans la procédure administrative, à savoir son incapacité à payer l'amende, diffère de celui figurant au considérant 523 de la communication des griefs, qui mentionnait la disparition dudit groupe. En effet, une telle circonstance ne permet pas d'affirmer, ainsi que le soutient la requérante, que le motif finalement retenu dans la décision attaquée pour ne pas imputer de responsabilité au groupe LPD n'est qu'un " prétexte ".
79 Par ailleurs, la requérante reproche à la Commission de faire usage, au considérant 862 de la décision attaquée, des termes " participation ininterrompue ", s'agissant de sa participation à l'infraction aussi bien avant qu'après le 1er juillet 2001, et ce dans le but de justifier l'absence d'imputation de responsabilité au groupe LPD. Selon la requérante, étant donné qu'elle n'a pas directement participé à l'infraction après le 1er juillet 2001, une telle insinuation est erronée et non étayée et ne pouvait fonder l'absence d'implication dudit groupe dans la procédure.
80 À cet égard, il suffit de constater qu'une telle mention ne signifie pas que la requérante a directement participé aux infractions en cause après le 1er juillet 2001, mais que, entre le 28 janvier 1997 et le 30 janvier 2006, s'agissant des CDT, et, entre le 21 septembre 1999 et le 30 janvier 2006, s'agissant des CPT, elle a participé, tantôt directement, tantôt en sa qualité de société mère, à des infractions uniques et continues.
81 Enfin, la requérante affirme que la Commission aurait dû adresser la communication des griefs et la décision attaquée au groupe LPD, dès lors que la responsabilité des sociétés mères n'est qu'une responsabilité dérivée. À l'appui de son argumentation, la requérante fait référence à l'arrêt de la Cour du 22 janvier 2013, Commission/Tomkins (C 286/11 P, Rec, points 37 et 39), lequel précise que, lorsque la responsabilité de la société mère résulte exclusivement de la participation de sa filiale à l'entente, cette responsabilité est dérivée et accessoire et dépend de celle de sa filiale.
82 Toutefois, l'arrêt Commission/Tomkins, point 81 supra, ne permet pas d'établir que la Commission aurait dû, en l'espèce, impliquer le groupe LPD dans la procédure administrative, dans la mesure où la Cour se borne à préciser qu'une société mère ne peut être tenue responsable pour une période durant laquelle la preuve que sa filiale a commis une infraction aux règles de concurrence de l'Union n'a pas été rapportée. Or, en l'espèce, il n'est pas contesté que le groupe LPD a adopté un comportement anticoncurrentiel durant la période pour laquelle la requérante a été tenue responsable, de sorte que cet argument doit être écarté.
83 Il résulte de ce qui précède qu'aucune irrégularité ne peut être reprochée à la Commission s'agissant de l'absence d'imputation au groupe LPD de la responsabilité de son comportement. Dès lors, en application de la jurisprudence citée au point 70 ci-dessus, les arguments de la requérante tendant à établir la violation de ses droits de la défense sont inopérants. En tout état de cause, force est de constater qu'ils sont également infondés.
84 Premièrement, la requérante fait valoir que, faute d'implication du groupe LPD dans la procédure, elle n'a pas pu assurer correctement sa défense dans la mesure où elle n'a pas eu la possibilité de prendre connaissance de certains documents ou de certaines informations émanant dudit groupe.
85 Tout d'abord, force est de constater que, par définition, ces éléments ne faisaient pas partie de ceux sur lesquels la Commission s'est fondée pour adopter la décision attaquée, de sorte que la requérante ne saurait reprocher à celle-ci d'avoir été empêchée de faire connaître utilement son point de vue sur la réalité et la pertinence des faits et des circonstances alléguées ainsi que sur les documents retenus par cette institution.
86 Ensuite, il convient de rappeler que, en vertu du devoir général de prudence qui incombe à toute entreprise, la requérante était tenue de veiller, même dans les circonstances du placement de l'entreprise commune en liquidation judiciaire, à la bonne conservation en ses livres et archives des éléments permettant de retracer son activité, afin, notamment, de disposer des preuves nécessaires dans l'hypothèse d'actions judiciaires ou administratives (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 30 septembre 2009, Hoechst/Commission, T 161/05, Rec. p. II 3555, point 171, et la jurisprudence citée). De surcroît, il appartenait, en tout état de cause, à la société mère de disposer, que ce soit par une conservation en ses archives ou par tout autre moyen, des éléments lui permettant de se défendre contre sa mise en cause personnelle en tant que société mère formant une unité économique avec sa filiale (arrêt du Tribunal du 27 juin 2012, Bolloré/Commission, T 372/10, Rec, point 137).
87 Au cas d'espèce, la requérante a été tenue pour responsable, en tant que société mère, des infractions commises par le groupe LPD du 1er juillet 2001 au 30 janvier 2006, date de la faillite de LPD Holding et du placement de cette société sous le contrôle d'un administrateur judiciaire. Dès lors, la responsabilité de la requérante a été engagée pour une période pendant laquelle celle-ci avait entretenu des relations étroites avec le groupe LPD et à propos de laquelle elle devait, en vertu du devoir de prudence, disposer d'éléments suffisants pour assurer correctement sa défense.
88 Deuxièmement, la requérante fait valoir qu'elle ne pouvait, notamment en raison du droit de la faillite néerlandais, s'assurer contractuellement un accès aux informations détenues par le groupe LPD. Elle invoque également l'absence de coopération de l'administrateur judiciaire du groupe LPD, lequel aurait refusé de lui apporter son aide.
89 Pour autant, de telles circonstances, à les supposer établies, ne dispensaient pas l'intéressée de l'observation du devoir général de prudence tel que rappelé au point 86 ci-dessus.
90 Au surplus, il importe de préciser que même si la Commission n'a pas formellement impliqué le groupe LPD dans la procédure administrative, elle a, néanmoins, sollicité ledit groupe afin d'obtenir des renseignements sur les faits de l'espèce et sur la structure de ce groupe, lesquels ont pu, indirectement, être utiles à la requérante pour élaborer sa défense. Ainsi, la Commission a formulé des demandes de renseignements auprès des différentes sociétés du groupe LPD pendant la première phase de la procédure administrative. Il ressort, en particulier, du considérant 912 de la décision attaquée, ce qui n'est pas contesté par la requérante, que la Commission a non seulement contacté les sociétés mères, mais également, et à plusieurs reprises, le groupe LPD, et qu'elle a eu, notamment, des échanges avec l'administrateur judiciaire dudit groupe et les représentants de LP Displays International Ltd, filiale à part entière de LP Displays International BV, laquelle est devenue la société holding de toutes les entreprises viables du groupe LPD après la faillite de LPD holding. Par ailleurs, il ressort du considérant 92 de ladite décision que la Commission a effectué des inspections dans les locaux du groupe LPD les 8 et 9 novembre 2007.
91 Il résulte de ce qui précède que la Commission n'a pas violé les droits de la défense de la requérante en s'abstenant d'imputer une responsabilité au groupe LPD. Par suite, le premier moyen doit être écarté.
Sur le septième moyen, tiré de la violation de l'article 101 TFUE et de l'article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, ainsi que des principes d'égalité de traitement et de bonne administration, dans la mesure où la décision attaquée n'a pas été adressée à l'ensemble des auteurs des infractions
92 Ce moyen est composé de deux branches, tirées, la première, de la violation de l'article 101 TFUE et de l'article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 et, la seconde, de la violation des principes d'égalité de traitement et de bonne administration.
- Sur la première branche, tirée de la violation de l'article 101 TFUE et de l'article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003
93 La requérante fait valoir qu'une personne morale gérant une entreprise ayant commis une infraction devrait en répondre dans la mesure où l'entreprise est toujours en activité. Elle en conclut que la décision attaquée aurait dû être adressée aux entités survivantes du groupe LPD ayant participé aux ententes ainsi qu'à LPD International BV en tant que nouvelle société mère faîtière du groupe LPD.
94 En l'espèce, il ressort de l'examen des premier et deuxième moyens que c'est sans commettre d'erreur que la Commission n'a pas imputé de responsabilité au groupe LPD.
95 Par suite, les arguments invoqués au soutien de la présente branche sont inopérants. En tout état de cause, force est de constater qu'ils sont infondés.
96 Premièrement, la requérante soutient que la décision de la Commission de ne pas imputer de responsabilité au groupe LPD l'a limitée dans son aptitude à former une action civile à l'encontre dudit groupe afin qu'il contribue au paiement de l'amende.
97 Sur ce point, il ne peut qu'être noté qu'une telle circonstance, au demeurant purement théorique compte tenu notamment de la situation financière du groupe LPD, est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée, étant donné que les conditions pour imputer à la requérante une responsabilité pour le comportement du groupe LPD étaient remplies.
98 Deuxièmement, la requérante fait valoir que le fait de ne pas avoir impliqué le groupe LPD dans la procédure a permis à la Commission de contourner la limite de 10 % prévue à l'article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003. Selon la requérante, dès lors que le groupe LPD avait participé aux infractions en cause en tant qu'entreprise distincte après le 30 juin 2001, aucune des amendes infligées pour cette période n'aurait dû excéder 10 % de son chiffre d'affaires.
99 À cet égard, il doit être rappelé que l'article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 dispose que la Commission peut infliger des amendes aux entreprises qui commettent une infraction à l'article 101 TFUE sous réserve que, pour chaque entreprise participant à l'infraction, l'amende n'excède pas 10 % de son chiffre d'affaires total réalisé au cours de l'exercice social précédent.
100 Cette limite supérieure du montant de l'amende vise à éviter que soient infligées des amendes dont il est prévisible que les entreprises, au vu de leur taille, telle que déterminée par leur chiffre d'affaires global, fût-ce de façon approximative et imparfaite, ne seront pas en mesure de s'acquitter. Il s'agit donc d'une limite, uniformément applicable à toutes les entreprises et articulée en fonction de la taille de chacune d'elles, visant à éviter des amendes d'un niveau excessif et disproportionné (voir arrêt de la Cour du 26 novembre 2013, Groupe Gascogne/Commission, C 58/12 P, Rec, point 48, et la jurisprudence citée).
101 Cette finalité doit toutefois se combiner avec le souci d'assurer à l'amende un caractère dissuasif suffisant, lequel justifie la prise en considération de la taille et de la puissance économique de l'entreprise concernée, c'est-à-dire des ressources globales de l'auteur de l'infraction (voir arrêt Groupe Gascogne/Commission, point 100 supra, point 49, et la jurisprudence citée).
102 En effet, c'est l'impact recherché sur l'entreprise concernée qui justifie la prise en considération de la taille et des ressources globales de cette entreprise afin d'assurer un effet dissuasif suffisant à l'amende, la sanction ne devant pas être négligeable au regard, notamment, de la capacité financière de ladite entreprise (voir arrêt Groupe Gascogne/Commission, point 100 supra, point 50, et la jurisprudence citée).
103 Dans ces conditions, lorsqu'il s'agit d'évaluer les ressources financières d'une entreprise à laquelle est imputée une infraction aux règles de concurrence du droit de l'Union, il apparaît justifié de prendre en compte le chiffre d'affaires cumulé de toutes les sociétés constituant l'entité économique unique agissant en tant qu'entreprise au sens de l'article 101 TFUE (ordonnance de la Cour du 3 mai 2012, World Wide Tobacco España/Commission, C 240/11 P, non publiée au Recueil, points 45 et 46, et arrêt de la Cour du 8 mai 2013, Eni/Commission, C 508/11 P, Rec, point 109).
104 Ce dernier chiffre constitue en effet le meilleur indicateur de la capacité de l'entreprise concernée à mobiliser les fonds nécessaires au paiement de l'amende (arrêt Groupe Gascogne/Commission, point 100 supra, point 53).
105 En l'espèce, dès lors qu'il a été indiqué, au point 63 ci-dessus, que la Commission avait établi à suffisance de droit l'imputabilité des infractions en cause aux sociétés mères du groupe LPD, lesquelles formaient, avec ledit groupe, une même unité économique, la Commission était en mesure, aux fins d'évaluer la capacité financière de cette unité, de prendre en considération le chiffre d'affaires de l'ensemble des sociétés la composant. Par ailleurs, force est de constater que le chiffre d'affaires pris en compte par la Commission aurait été identique si la responsabilité du groupe LPD avait été retenue.
106 Il résulte de ce qui précède que la première branche du septième moyen doit être écartée.
- Sur la seconde branche, tirée de la violation des principes d'égalité de traitement et de bonne administration
107 La requérante affirme que la Commission a violé les principes d'égalité de traitement et de bonne administration en traitant de manière incohérente des entreprises se trouvant dans des situations identiques ou fondamentalement similaires à celle dans laquelle se trouvaient le groupe LPD et ses sociétés mères.
108 À cet égard, il convient de rappeler que, lors d'une procédure administrative devant la Commission, celle-ci est tenue de respecter les garanties procédurales prévues par le droit de l'Union (arrêt du Tribunal du 14 mai 1998, Enso Española/Commission, T 348/94, Rec. p. II 1875, point 56).
109 Parmi les garanties conférées par l'ordre juridique de l'Union dans les procédures administratives figure notamment le principe de bonne administration, auquel se rattache l'obligation pour l'institution compétente d'examiner, avec soin et impartialité, tous les éléments pertinents du cas d'espèce (arrêt du Tribunal du 24 janvier 1992, La Cinq/Commission, T 44/90, Rec. p. II 1, point 86).
110 En outre, la Commission est tenue de respecter le principe d'égalité de traitement ou de non-discrimination, lequel exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu'un tel traitement ne soit objectivement justifié (arrêt de la Cour du 15 avril 2010, Gualtieri/Commission, C 485/08 P, Rec. p. I 3009, point 70).
111 Par ailleurs, il ressort clairement de la jurisprudence relative au principe d'égalité de traitement que, dès lors qu'une entreprise a, par son propre comportement, violé l'article 101, paragraphe 1, TFUE, elle ne saurait échapper à toute sanction au motif que d'autres opérateurs économiques ne se sont pas vu infliger d'amende alors même que le juge de l'Union n'est pas saisi de la situation de ces derniers (arrêt de la Cour du 31 mars 1993, Ahlström Osakeyhtiö e.a./Commission, C 89/85, C 104/85, C 114/85, C 116/85, C 117/85 et C 125/85 à C 129/85, Rec. p. I 1307, point 197).
112 Premièrement, la requérante fait valoir que la Commission a retenu la responsabilité de MTPD, l'entreprise commune créée par Toshiba et Panasonic, alors qu'elle n'a pas imputé de responsabilité au groupe LPD en tant qu'entreprise commune de Philips et d'elle-même.
113 À cet égard, il suffit de relever que, ainsi qu'il a été indiqué au point 5 ci-dessus, LPD Holding a été déclarée en faillite le 30 janvier 2006 et était donc dans l'impossibilité de s'acquitter d'une amende. Or, il ne ressort pas des pièces du dossier que MTPD ou ses filiales aient fait l'objet de procédures de faillite ou aient eu des dettes excédant la valeur du groupe à la date de la décision attaquée. Dès lors, les situations de MTPD et du groupe LPD n'étaient pas comparables et la Commission n'était pas tenue de les traiter de manière égale.
114 Deuxièmement, la requérante soutient que la Commission a opéré une discrimination entre elle et SEC, dès lors qu'elle lui a attribué une responsabilité en tant que société mère alors qu'elle n'a pas procédé de la sorte s'agissant de SEC.
115 Sur ce point, force est de constater que, dans la décision attaquée, la Commission a estimé que SEC n'avait pas exercé d'influence déterminante sur Samsung SDI Co. Dès lors, sans préjudice de l'examen du sixième moyen, SEC n'était pas dans une situation comparable à celle de la requérante.
116 Troisièmement, la requérante reproche à la Commission de ne pas avoir imputé de responsabilité à la société mère du groupe [confidentiel] pour l'infraction commise par [confidentiel], alors que, selon la requérante, la part détenue par [confidentiel] dans [confidentiel] était passée, pendant la période infractionnelle, de 48 à 65 %, soit à un niveau qui permettait à [confidentiel] d'exercer un contrôle effectif sur [confidentiel] et qui, à tout le moins, justifiait l'ouverture d'une enquête approfondie de la part de la Commission.
117 Toutefois, la seule circonstance que [confidentiel] détenait 65 % du capital de [confidentiel] ne suffit pas, à elle seule, pour établir l'influence déterminante de la première société sur la seconde. Dans ces conditions, et dès lors que la requérante n'apporte aucun élément de nature à établir que [confidentiel] exerçait effectivement une influence déterminante sur [confidentiel] au sens de la jurisprudence mentionnée au point 34 ci-dessus, elle n'est pas fondée à faire valoir qu'elle se trouvait dans une situation comparable à celle de [confidentiel].
118 Quatrièmement, la requérante soutient que c'est à tort que la Commission n'a pas imputé de responsabilité à [confidentiel] pour les infractions commises par sa fililale, [confidentiel], après le 28 février 2005, date à laquelle ladite filiale a été vendue par [confidentiel] au groupe [confidentiel], auquel appartenait [confidentiel].
119 Pour autant, la requérante n'établit pas que [confidentiel] aurait participé à l'entente après le 28 février 2005 alors qu'une telle circonstance ne ressort ni de la décision attaquée ni des autres pièces du dossier. En outre, elle n'établit ni même n'allègue que [confidentiel] exerçait une influence déterminante sur [confidentiel]. Dans ces conditions, [confidentiel] ne se trouvait pas dans une situation comparable à celle de la requérante et la Commission n'était pas tenue de les traiter de manière identique.
120 Il résulte de ce qui précède que, dès lors que la requérante n'apporte aucun élément de nature à établir que la Commission aurait violé le principe de bonne administration en s'abstenant d'examiner, avec soin et impartialité, tous les éléments pertinents du cas d'espèce, la présente branche doit être écartée ainsi que le septième moyen dans son ensemble.
Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l'article 25 du règlement n° 1/2003, dans la mesure où la décision attaquée a retenu la responsabilité de la requérante pour un comportement antérieur au 1er juillet 2001
121 La requérante soutient que, en lui imposant une amende pour sa participation à l'entente jusqu'au 1er juillet 2001, la Commission a violé les règles relatives à la prescription et, plus particulièrement, l'article 25, paragraphes 1 et 5, du règlement n° 1/2003. Elle affirme que le pouvoir de la Commission de lui infliger une amende a pris fin, en application de l'article 25, paragraphe 5, dudit règlement, le 1er juillet 2011, soit dix ans après la date à laquelle elle a cessé de participer directement aux infractions. Elle ajoute que, en vertu de l'article 25, paragraphe 1, dudit règlement, la Commission ne pouvait lui infliger une amende, dès lors que la procédure d'exécution avait commencé plus de cinq ans après la cessation de l'infraction.
122 À cet égard, il doit être rappelé que l'article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1/2003 fixe un délai de prescription de cinq ans pour les infractions du type de celles reprochées à la requérante. L'article 25, paragraphe 2, de ce texte indique que, pour les infractions continues ou répétées, la prescription ne court qu'à compter du jour où l'infraction a pris fin. En outre, l'article 25, paragraphe 3, du règlement mentionné ci-dessus prévoit que la prescription en matière d'imposition d'amendes ou d'astreintes est interrompue par tout acte de la Commission ou d'une autorité de concurrence d'un État membre visant à l'instruction ou à la poursuite de l'infraction. Enfin, conformément à l'article 25, paragraphe 5, deuxième phrase, du même règlement, la prescription est acquise au plus tard le jour où un délai égal au double du délai de prescription arrive à expiration sans que la Commission ait prononcé d'amende ou d'astreinte.
123 En l'espèce, il résulte de l'analyse du deuxième moyen que la Commission a, à bon droit, considéré que la requérante devait être tenue pour solidairement responsable du comportement du groupe LPD du 1er juillet 2001 au 30 janvier 2006 dans le cadre des ententes CDT et CPT. En outre, la requérante ne conteste pas la qualification d'infraction unique et continue des infractions commises entre le 24 octobre 1996 et le 30 janvier 2006, s'agissant des CDT, et entre le 3 décembre 1997 et le 30 janvier 2006, s'agissant des CPT. Il s'ensuit que, contrairement à ce que soutient la requérante, les infractions qui lui sont imputables n'ont pas pris fin le 1er juillet 2001, mais le 30 janvier 2006, et la Commission pouvait lui imposer une amende pour toute la période pendant laquelle lesdites infractions avaient été commises, en ce compris la période antérieure à la création du groupe LPD.
124 Il résulte de ce qui précède que les règles relatives à la prescription n'ont pas été violées et que le troisième moyen doit, en conséquence, être écarté.
Sur le quatrième moyen, tiré de la violation des articles 101 TFUE et 296 TFUE, de l'article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, des lignes directrices de 2006, ainsi que du principe d'égalité de traitement, en ce que la décision attaquée a inclus les ventes directes EEE par le biais de produits transformés dans le calcul du montant de l'amende, d'une part, sans motivation suffisante ni preuve de la répercussion des augmentations des prix des CRT sur les prix des téléviseurs et des écrans d'ordinateur et, d'autre part, en excédant la compétence de la Commission ainsi qu'en traitant de manière inégale les entreprises intégrées et celles qui ne l'étaient pas
125 Ce moyen est composé de quatre branches, tirées, la première, de la violation des lignes directrices de 2006, la deuxième, de la violation de l'article 101 TFUE ainsi que de l'article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, en ce que la Commission n'a pas établi la répercussion des augmentations des prix des CRT sur les prix des téléviseurs et des écrans d'ordinateur, la troisième, de l'incompétence de la Commission pour infliger des amendes fondées sur des ventes réalisées en dehors de l'EEE et, la quatrième, de la violation du principe d'égalité de traitement et de l'article 296 TFUE.
- Sur la première branche, tirée de la violation des lignes directrices de 2006
126 La requérante reproche, en substance, à la Commission d'avoir violé les lignes directrices de 2006, et, plus particulièrement, leur paragraphe 13, en prenant en compte les ventes directes EEE par le biais de produits transformés dans le calcul de l'amende.
127 À cet égard, il convient de rappeler que l'article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 1/2003 prévoit que, pour chaque entreprise et chaque association d'entreprises participant à l'infraction, l'amende n'excède pas 10 % de son chiffre d'affaires total réalisé au cours de l'exercice social précédent.
128 Ainsi que la Cour l'a déjà jugé, la Commission doit apprécier, dans chaque cas d'espèce et au vu de son contexte ainsi que des objectifs poursuivis par le régime de sanctions établi par le règlement n° 1/2003, l'impact recherché sur l'entreprise concernée, notamment en tenant compte d'un chiffre d'affaires qui reflète la situation économique réelle de celle-ci durant la période au cours de laquelle l'infraction a été commise (arrêts de la Cour du 7 juin 2007, Britannia Alloys & Chemicals/Commission, C 76/06 P, Rec. p. I-04405, point 25 ; Guardian Industries et Guardian Europe/Commission, point 20 supra, point 53 et du 23 avril 2015, LG Display et LG Display Taiwan/Commission, C 227/14 P, Rec., point 49).
129 Selon une jurisprudence constante, il est loisible, en vue de la détermination du montant de l'amende, de tenir compte aussi bien du chiffre d'affaires global de l'entreprise qui constitue une indication, fût elle approximative et imparfaite, de la taille de celle-ci et de sa puissance économique que de la part de ce chiffre qui provient des produits faisant l'objet de l'infraction et qui est donc de nature à donner une indication de l'ampleur de celle-ci (arrêts de la Cour du 7 juin 1983, Musique Diffusion française e.a./Commission, 100/80 à 103/80, Rec. p. 1825, point 121 ; Guardian Industries et Guardian Europe/Commission, point 20. supra, point 54 ainsi que LG Display et LG Display Taiwan/Commission, point 128 supra, point 50).
130 Il ressort également de la jurisprudence de la Cour que, si l'article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 laisse à la Commission une marge d'appréciation, il en limite néanmoins l'exercice en instaurant des critères objectifs auxquels celle-ci doit se tenir. Ainsi, d'une part, le montant de l'amende susceptible d'être infligée à une entreprise connaît un plafond chiffrable et absolu, de sorte que le montant maximal de l'amende pouvant être mis à la charge d'une entreprise donnée est déterminable à l'avance. D'autre part, l'exercice de ce pouvoir d'appréciation est également limité par les règles de conduite que la Commission s'est elle-même imposées, notamment dans les lignes directrices de 2006 (arrêts Guardian Industries et Guardian Europe/Commission, point 20 supra, point 55 ainsi que LG Display et LG Display Taiwan/Commission, point 128 supra, point 51).
131 Aux termes du paragraphe 13 desdites lignes directrices, " [e]n vue de déterminer le montant de base de l'amende à infliger, la Commission utilisera la valeur des ventes de biens ou services, réalisées par l'entreprise, en relation directe ou indirecte [...] avec l'infraction, dans le secteur géographique concerné à l'intérieur du territoire de l'EEE ". Ces mêmes lignes directrices précisent, à leur paragraphe 6, que " la combinaison de la valeur des ventes en relation avec l'infraction et de la durée [de celle-ci] est considérée comme une valeur de remplacement adéquate pour refléter l'importance économique de l'infraction ainsi que le poids relatif de chaque entreprise participant à l'infraction ".
132 Le paragraphe 13 des lignes directrices de 2006 a ainsi pour objectif de retenir comme point de départ pour le calcul de l'amende infligée à une entreprise un montant qui reflète l'importance économique de l'infraction et le poids relatif de cette entreprise dans celle-ci (arrêts de la Cour du 11 juillet 2013, Team Relocations e.a./Commission, C 444/11 P, non publié au Recueil, point 76 ; Guardian Industries et Guardian Europe/Commission, point 20 supra, point 57 ainsi que LG Display et LG Display Taiwan/Commission, point 128 supra, point 53).
133 En conséquence, la notion de valeur des ventes visée à ce paragraphe 13 englobe les ventes réalisées sur le marché concerné par l'infraction dans l'EEE, sans qu'il importe de déterminer si ces ventes ont été réellement affectées par cette infraction, la partie du chiffre d'affaires provenant de la vente des produits faisant l'objet de l'infraction étant la mieux à même de refléter l'importance économique de cette infraction (voir, en ce sens, arrêts Team Relocations e.a./Commission, point 132 supra, points 75 à 78 ; Guardian Industries et Guardian Europe/Commission, point 20 supra, points 57 à 59, de la Cour du 19 mars 2015, Dole Food et Dole Fresh Fruit Europe/Commission, C 286/13 P, Rec, points 148 et 149 ainsi que LG Display et LG Display Taiwan/Commission, point 128 supra, points 53 à 58 et 64).
134 La requérante affirme que, lorsqu'elle détermine le montant de base d'une amende, la Commission doit se conformer aux lignes directrices de 2006, lesquelles exigent que les amendes soient fondées sur les ventes qui font l'objet de l'infraction. Selon la requérante, il n'existerait pas de fondement permettant d'inclure le montant des ventes directes EEE par le biais de produits transformés dans la mesure où, lorsque les CRT sont incorporés dans des téléviseurs ou dans des écrans d'ordinateur et qu'ils sont vendus en tant que tels, il n'est plus possible de traiter leurs ventes comme des ventes de CRT.
135 En l'espèce, il ressort du considérant 1021 de la décision attaquée que, pour déterminer le montant de base de l'amende, la Commission a décidé de prendre en compte le chiffre d'affaires correspondant aux ventes dans lesquelles la " première vente réelle " de CRT, en tant que tels ou intégrés à un produit final, téléviseur ou écran d'ordinateur, était intervenue dans l'EEE au cours de la période de l'infraction et était le fait d'un des destinataires de la décision attaquée. À partir de cette prémisse, la Commission a déterminé trois catégories de ventes, à savoir les " ventes directes EEE ", correspondant aux CRT directement vendus aux clients de l'EEE par l'un des destinataires de la décision attaquée, les " ventes directes EEE par le biais de produits transformés ", correspondant aux CRT intégrés au sein d'un même groupe à un produit final, à un téléviseur ou à un écran d'ordinateur et vendus ensuite aux clients de l'EEE par l'un des destinataires de la décision attaquée, et les " ventes indirectes ", correspondant aux CRT vendus par l'un des destinataires de la décision attaquée à des clients hors de l'EEE, lesquels intégraient les CRT aux produits finals, à savoir aux téléviseurs et aux écrans d'ordinateur, et les vendaient ensuite dans l'EEE. En l'espèce, il est constant que la Commission a uniquement pris en compte les ventes directes EEE et les ventes directes EEE par le biais de produits transformés pour le calcul du montant de l'amende.
136 Il résulte de ce qui précède que les ventes de la requérante prises en compte aux fins de la fixation du montant de l'amende au titre des ventes directes EEE par le biais de produits transformés ont été réalisées non pas sur le marché du produit concerné par l'infraction, en l'occurrence le marché des CRT cartellisés, mais sur un marché de produits distinct de celui-ci, à savoir le marché en aval des téléviseurs et des écrans d'ordinateur incorporant les CRT cartellisés, lesdits CRT cartellisés ayant fait l'objet, dans un tel cas, d'une vente interne en dehors de l'EEE réalisée à l'intérieur de l'unité économique formée par le groupe LPD et ses sociétés mères.
137 Il ressort cependant des considérants 1026 et 1029 de la décision attaquée que les ventes des téléviseurs et des écrans d'ordinateur intégrant les CRT cartellisés ont été prises en compte non pas à concurrence de leur valeur entière, mais à concurrence de la seule fraction de cette valeur qui pouvait correspondre à la valeur des CRT cartellisés intégrés dans les téléviseurs et les écrans d'ordinateur, lorsque ces derniers ont été vendus par l'entreprise dont relève la requérante à des tiers indépendants établis dans l'EEE. Cette constatation n'a pas été contestée.
138 Par ailleurs, si, certes, la notion de " valeur des ventes " visée au paragraphe 13 des lignes directrices de 2006 ne saurait s'étendre jusqu'à englober les ventes réalisées par l'entreprise en cause qui ne relèvent en rien du champ d'application de l'entente reprochée (voir arrêts Team Relocations e.a./Commission, point 132 supra, point 76 ; Guardian Industries et Guardian Europe/Commission, point 20 supra, point 57 ainsi que LG Display et LG Display Taiwan/Commission, point 128 supra, point 53), il serait contraire à l'objectif poursuivi par l'article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 que les participants à une entente qui sont intégrés verticalement puissent, du seul fait qu'ils ont incorporé les produits faisant l'objet de l'infraction dans des produits finis en dehors de l'EEE, voir exclure du calcul de l'amende la fraction de la valeur de leurs ventes de ces produits finis réalisées dans l'EEE pouvant correspondre à la valeur des produits faisant l'objet de l'infraction.
139 En effet, comme la Cour l'a également déjà jugé, les entreprises intégrées verticalement peuvent tirer profit d'un accord de fixation horizontale des prix conclu en infraction à l'article 101 TFUE non seulement lors des ventes à des tiers indépendants sur le marché du produit faisant l'objet de cette infraction, mais également sur le marché en aval des produits transformés dans la composition desquels entrent ces produits, et ce à deux titres différents. Soit ces entreprises répercutent les majorations du prix des intrants qui résultent de l'objet de l'infraction sur celui des produits transformés, soit elles ne les répercutent pas, ce qui revient alors à leur conférer un avantage de coût par rapport à leurs concurrents qui se procurent ces mêmes intrants sur le marché des produits faisant l'objet de l'infraction (arrêt Guardian Industries et Guardian Europe/Commission, point 20 supra, point 60).
140 Il s'ensuit que c'est à bon droit que la Commission a considéré que les ventes des produits finis, bien que n'ayant pas été réalisées sur le marché du produit concerné par l'infraction, ont néanmoins faussé le jeu de la concurrence dans l'EEE, en violation de l'article 101 TFUE, au détriment, notamment, des consommateurs. La Commission n'a donc pas commis d'erreur de droit en considérant que les ventes des produits finis étaient en relation avec l'infraction dans l'EEE, au sens du paragraphe 13 des lignes directrices de 2006.
141 Il résulte de ce qui précède que la première branche du quatrième moyen doit être rejetée.
- Sur la deuxième branche, tirée de la violation de l'article 101 TFUE ainsi que de l'article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, en ce que la Commission n'a pas établi la répercussion des augmentations des prix des CRT sur les prix des téléviseurs et des écrans d'ordinateur
142 La requérante soutient que, à supposer que la Commission était fondée à prendre en compte, pour déterminer le montant de base de l'amende, la valeur des ventes directes EEE par le biais de produits transformés, elle était tenue d'établir que les augmentations des prix des CRT avaient eu un impact sur les prix des téléviseurs et des écrans d'ordinateur.
143 À cet égard, il suffit de noter que, contrairement à ce que fait valoir la requérante et au regard de la jurisprudence rappelée au point 139 ci-dessus, la Commission n'était pas tenue de démontrer que l'incorporation des CRT cartellisés dans les téléviseurs et les écrans d'ordinateur avait eu un impact sur les prix de ces derniers. Au demeurant, dès lors que, ainsi qu'il a été rappelé au point 137 ci-dessus, la Commission n'a pas pris en compte la valeur du produit transformé dans son ensemble, mais seulement la valeur des CRT qui y étaient intégrés, une telle argumentation doit, en tout état de cause, être rejetée.
144 Dans ces conditions, la deuxième branche du quatrième moyen ne peut qu'être écartée.
- Sur la troisième branche, tirée de l'incompétence de la Commission pour infliger des amendes fondées sur des ventes réalisées en dehors de l'EEE
145 La requérante soutient que la Commission n'était pas compétente pour infliger des amendes en raison de ventes de CRT réalisées en dehors de l'EEE, et ce même lorsque les téléviseurs ou les écrans d'ordinateur incluant ces CRT étaient vendus, par la suite, dans l'EEE.
146 À cet égard, il convient de rappeler que, lorsque des entreprises, établies en dehors de l'EEE, mais qui produisent des biens qui sont vendus dans l'EEE à des tiers, se concertent sur les prix qu'elles consentent à leurs clients établis dans l'EEE et mettent en œuvre cette concertation en vendant à des prix effectivement coordonnés, elles participent à une concertation qui a pour objet et pour effet de restreindre le jeu de la concurrence sur le marché intérieur, au sens de l'article 101 TFUE, et que la Commission est territorialement compétente à poursuivre (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 27 septembre 1988, Ahlström Osakeyhtiö e.a./Commission, 89/85, 104/85, 114/85, 116/85, 117/85 et 125/85 à 129/85, Rec. p. 5193, ci-après l' " arrêt Pâte de bois I ", points 13 et 14).
147 Il ressort également de la jurisprudence qu'une infraction à l'article 101 TFUE implique deux éléments de comportement, à savoir la formation de l'entente et sa mise en œuvre. Faire dépendre l'applicabilité des interdictions édictées par le droit de la concurrence du lieu de formation de l'entente aboutirait à l'évidence à fournir aux entreprises un moyen facile de se soustraire auxdites interdictions. Ce qui compte est donc le lieu où l'entente est mise en œuvre. Par ailleurs, afin de déterminer si ce lieu se situe dans l'EEE, il importe peu que les participants à l'entente aient fait appel ou non à des filiales, agents, sous-agents ou succursales établis dans l'EEE en vue d'établir des contacts entre eux et les acheteurs qui y sont établis (arrêt Pâte de bois I, point 146 supra, points 16 et 17).
148 Dès lors que la condition relative à la mise en œuvre est satisfaite, la compétence de la Commission pour appliquer les règles de concurrence de l'Union à l'égard de tels comportements est couverte par le principe de territorialité qui est universellement reconnu en droit international public (arrêt Pâte de bois I, point 146 supra, point 18).
149 Par ailleurs, le critère de la mise en œuvre de l'entente en tant qu'élément de rattachement de celle-ci au territoire de l'Union est satisfait par la simple vente dans l'Union du produit cartellisé, indépendamment de la localisation des sources d'approvisionnement et des installations de production (arrêt du Tribunal du 27 février 2014, InnoLux/Commission, T 91/11, Rec, point 63).
150 Il s'ensuit que c'est à bon droit que la Commission a considéré que, lorsqu'une entreprise intégrée verticalement incorpore les produits faisant l'objet de l'infraction aux produits finis dans ses unités de production situées en dehors de l'EEE, la vente par cette entreprise de ces produits finis dans l'EEE à des tiers indépendants est susceptible d'affecter la concurrence sur le marché de ces produits et, partant, qu'une telle infraction peut être considérée comme ayant eu des répercussions dans l'EEE, même si le marché des produits finis en question constitue un marché distinct du marché concerné par ladite infraction.
151 La troisième branche du quatrième moyen doit donc être écartée.
- Sur la quatrième branche, tirée de la violation du principe d'égalité de traitement et de l'article 296 TFUE
152 En premier lieu, la requérante invoque, en substance, une violation du principe d'égalité de traitement entre les entreprises verticalement intégrées et celles qui ne l'étaient pas.
153 À cet égard, il importe de relever que, s'agissant de la détermination du montant de l'amende, le principe d'égalité de traitement s'oppose à ce que la Commission opère, par l'application de méthodes de calcul différentes, une discrimination entre les entreprises qui ont participé à un accord ou à une pratique concertée contraire à l'article 101, paragraphe 1, TFUE (voir arrêt Alliance One International et Standard Commercial Tobacco/Commission et Commission/Alliance One International e.a., point 33 supra, point 58, et la jurisprudence citée).
154 La requérante affirme que les ventes directes EEE par le biais de produits transformés ont uniquement été prises en considération dans le calcul de l'amende lorsque les fabricants de téléviseurs et d'écrans d'ordinateur situés hors de l'EEE faisaient partie du même groupe que les fabricants de CRT. Elle précise que de telles ventes n'ont pas été retenues lorsqu'une telle relation n'existait pas entre les fabricants de téléviseurs et d'écrans d'ordinateur situés hors de l'EEE et les fabricants de CRT. Selon la requérante, une telle approche aboutit à une violation du principe d'égalité de traitement entre les entreprises intégrées et celles qui ne le sont pas.
155 À titre liminaire, il convient de préciser que, au considérant 1022 de la décision attaquée, la Commission a justifié le choix de sa méthodologie fondée sur la " première vente réelle " par une volonté de ne pas discriminer les entreprises non verticalement intégrées.
156 Par ailleurs, il y a lieu de constater que la requérante reproche en réalité à la Commission de ne pas avoir pris en compte les ventes indirectes dans le calcul du montant de l'amende infligée aux entreprises non verticalement intégrées.
157 À cet égard, d'une part, il y a lieu de relever que, contrairement à ce que semble suggérer la requérante, les ventes indirectes sont susceptibles de concerner toutes les entreprises, et pas seulement celles qui ne font pas l'objet d'une intégration verticale. Dès lors, prendre en compte les ventes indirectes uniquement s'agissant de ces dernières reviendrait à créer une véritable discrimination entre ces deux types d'entreprises, au détriment des entreprises non verticalement intégrées.
158 D'autre part, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la Commission bénéficie d'un large pouvoir d'appréciation pour ce qui est de la méthode de calcul des amendes. Cette méthode, circonscrite par les lignes directrices de 2006, comporte différents éléments de flexibilité permettant à la Commission d'exercer son pouvoir d'appréciation en conformité avec les dispositions du règlement n° 1/2003 (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 3 septembre 2009, Papierfabrik August Koehler e.a./Commission, C 322/07 P, C 327/07 P et C 338/07 P, Rec. p. I 7191, point 112, et du 14 octobre 2010, Deutsche Telekom/Commission, C 280/08 P, Rec. p. I 9555, point 271). En outre, la Commission n'est pas obligée de constater et de sanctionner tout comportement anticoncurrentiel (arrêt du Tribunal du 15 juin 2005, Tokai Carbon e.a./Commission, T 71/03, T 74/03, T 87/03 et T 91/03, non publié au Recueil, point 369).
159 Or, en l'espèce, il a été exposé au point 135 ci-dessus, que la Commission a appliqué la même méthodologie à toutes les entreprises, en prenant en compte, pour chacune d'entre elles, la " première vente réelle " et en établissant, à partir de ce même critère, trois catégories. Dans ces conditions, le fait que la catégorie des ventes directes EEE par le biais de produits transformés n'était applicable qu'à certains des participants à l'entente, à savoir à l'ensemble des entreprises verticalement intégrées, ne constitue pas une discrimination, dès lors que la Commission a apprécié l'applicabilité de cette catégorie à chacun des participants sur la base des mêmes critères objectifs. De manière analogue, le fait que l'absence de prise en compte des ventes indirectes peut avoir bénéficié à certains participants de manière plus importante qu'à la requérante ne constitue pas non plus, en soi, une discrimination (arrêt InnoLux/Commission, point 149 supra, point 80).
160 Dans ces conditions, aucune violation du principe d'égalité de traitement ne peut être reprochée à la Commission.
161 En second lieu, la requérante fait valoir que la décision attaquée a été prise en violation de l'article 296 TFUE dans la mesure où elle n'expose pas les motifs pour lesquels les ventes indirectes n'ont pas été prises en compte dans la détermination du montant de base de l'amende.
162 Selon une jurisprudence constante, la motivation exigée par l'article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l'acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l'institution, auteur de l'acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d'exercer son contrôle. L'exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l'espèce, notamment du contenu de l'acte, de la nature des motifs invoqués et de l'intérêt que les destinataires ou d'autres personnes concernées directement et individuellement par l'acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n'est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d'un acte satisfait aux exigences de l'article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l'ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt de la Cour du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink's France, C 367/95 P, Rec. p. I 1719, point 63, et la jurisprudence citée).
163 À cet égard, il convient de noter qu'il ressort des considérant 1021 à 1032 de la décision attaquée que la Commission a, notamment, exposé les raisons pour lesquelles elle avait, pour déterminer le montant de base de l'amende, pris en compte les ventes directes EEE et les ventes directes EEE par le biais de produits transformés. La requérante a donc été en mesure de comprendre la façon dont avait été déterminé le montant de base de son amende. Par ailleurs, il ressort plus particulièrement du considérant 1026 de la décision attaquée que la Commission a précisé que, s'agissant des ventes directes EEE et des ventes directes EEE par le biais des produits transformés, un lien direct avec le territoire de l'EEE était établi, soulignant l'absence d'un tel lien dans l'hypothèse de la prise en compte des ventes indirectes. Par suite, la décision attaquée est suffisamment motivée s'agissant de la détermination des ventes à prendre en compte dans le calcul du montant de base de l'amende.
164 Il résulte de ce qui précède que la quatrième branche doit être écartée ainsi que le quatrième moyen dans son ensemble.
Sur le cinquième moyen, tiré de la violation de l'article 101 TFUE, de l'article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, du principe de la responsabilité personnelle et des droits de la défense, ainsi que de l'erreur manifeste d'appréciation, dans la mesure où la décision attaquée a inclus, dans le calcul du montant de l'amende, les ventes directes EEE par le biais de produits transformés réalisées par Philips
165 Ce moyen est divisé en deux branches, tirées, la première, de la violation de l'article 101 TFUE et de l'article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, en ce que les sociétés mères du groupe LPD ont été tenues solidairement responsables de la partie de l'amende relative aux ventes directes EEE par le biais de produits transformés, et, la seconde, de la violation des droits de la défense et du principe de la responsabilité personnelle ainsi que de l'erreur manifeste d'appréciation, en ce que, s'agissant de ce type de ventes, la Commission n'aurait pas suivi, dans la décision attaquée, l'approche qu'elle avait annoncée dans la demande de renseignements envoyée le 4 mars 2011.
- Sur la première branche, tirée de la violation de l'article 101 TFUE et de l'article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, en ce que les sociétés mères du groupe LPD ont été tenues solidairement responsables de la partie de l'amende relative aux ventes directes EEE par le biais de produits transformés
166 La requérante soutient que les sociétés mères du groupe LPD n'auraient pas dû être tenues solidairement responsables de la partie de l'amende relative aux ventes directes EEE par le biais de produits transformés.
167 À titre liminaire, il y a lieu de souligner que le montant de l'amende infligée à la requérante a notamment été calculé à partir de la valeur des ventes directes EEE par le biais de produits transformés, c'est-à-dire des CRT vendus par le groupe LPD à chacune de ses sociétés mères, qui les vendaient ensuite aux clients de l'EEE. Or, la requérante affirme que les sociétés mères n'ont jamais adopté de politique commerciale uniforme concernant leurs activités respectives dans le domaine des téléviseurs et des écrans d'ordinateur alors que l'existence d'une telle politique commune est une condition nécessaire pour assimiler les ventes directes EEE par le biais de produits transformés réalisées par l'intermédiaire de chacune des sociétés mères à des ventes réalisées par une même entreprise. La requérante en conclut que l'amende qui lui a été infligée aurait dû être calculée sur la seule base des ventes directes EEE par le biais de produits transformés réalisées par son intermédiaire.
168 À cet égard, force est de constater que l'argumentation de la requérante confond la question de l'imputation de la responsabilité du comportement du groupe LPD avec celle de la détermination du montant de l'amende infligée.
169 Ainsi, s'agissant de l'imputation de la responsabilité du comportement du groupe LPD, il a été indiqué, dans le cadre de l'examen du deuxième moyen, que, dès lors que le groupe LPD et ses sociétés mères appartenaient à la même unité économique au moment de la réalisation de l'infraction, c'était sans commettre d'erreur que la Commission avait mis à la charge conjointe et solidaire desdites sociétés mères la totalité de l'amende relative aux pratiques anticoncurrentielles du groupe LPD.
170 Par ailleurs, s'agissant de la détermination du montant de l'amende, il a été indiqué, lors de l'examen du quatrième moyen, que la Commission n'avait pas davantage commis d'erreur en incluant, dans le calcul du montant de base de l'amende, les ventes directes EEE par le biais de produits transformés réalisées par l'unité économique formée par le groupe LPD et ses sociétés mères, c'est-à-dire aussi bien celles réalisées par l'intermédiaire de la requérante que celles réalisées par l'intermédiaire de Philips.
171 Dans ces conditions, c'est à bon droit que la Commission a mis à la charge conjointe et solidaire de la requérante les ventes directes EEE par le biais de produits transformés réalisées par le groupe LPD même lorsque ces ventes avaient été effectuées par l'intermédiaire de Philips. La première branche du cinquième moyen doit donc être écartée.
- Sur la seconde branche, tirée de la violation des droits de la défense et du principe de la responsabilité personnelle ainsi que de l'erreur manifeste d'appréciation, en ce que, s'agissant des ventes directes EEE par le biais de produits transformés, la Commission n'aurait pas suivi, dans la décision attaquée, l'approche qu'elle avait annoncée dans la demande de renseignements relative à ce sujet, envoyée le 4 mars 2011
172 En premier lieu, la requérante invoque la violation de ses droits de la défense. Elle reproche, en substance, à la Commission d'avoir changé d'approche entre la demande de renseignements qu'elle lui a envoyée le 4 mars 2011 et la décision attaquée s'agissant des ventes directes EEE par le biais de produits transformés, sans lui avoir permis de s'exprimer à ce sujet.
173 En l'espèce, il est constant que, par une lettre envoyée le 4 mars 2011, la Commission a, tout d'abord, rappelé à la requérante que la détermination du montant de l'amende se ferait dans le respect de l'article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 1/2003 et que serait prise en compte la valeur des ventes des biens ou des services, réalisées par l'entreprise, en relation directe ou indirecte avec l'infraction, à l'intérieur du territoire géographique pertinent. La Commission a, ensuite, expliqué qu'elle n'excluait pas de prendre en compte la valeur des ventes réalisées pendant toute la période des infractions en cause, puis elle a indiqué la manière dont elle procéderait si les données requises n'étaient pas fournies par la requérante. Enfin, la Commission a demandé à la requérante de lui fournir des données relatives aux ventes directes EEE par le biais de produits transformés ainsi qu'aux ventes internes et a précisé ce qu'il fallait entendre par ces deux notions.
174 La requérante fait valoir que, dès lors que les " définitions " contenues dans la lettre du 4 mars 2011 ne portaient pas sur les ventes réalisées par le groupe LPD à Philips, la Commission ne pouvait, sans violer ses droits de la défense, retenir ces dernières dans la décision attaquée pour calculer le montant de l'amende, et ce sans lui avoir, au préalable, donné l'occasion de formuler des observations sur ce point.
175 Premièrement, force est de constater que les " définitions " formulées par la Commission dans sa lettre du 4 mars 2011 ne sauraient être considérées comme faisant partie de l'exposé de sa méthodologie pour le calcul du montant des amendes, mais avaient en réalité pour objectif, tel que cela était expressément indiqué dans ladite lettre et ainsi que le souligne la Commission dans ses écritures, d'indiquer à la requérante la nature des renseignements qu'elle devait fournir.
176 Deuxièmement, et en tout état de cause, il convient de noter que, postérieurement à la lettre du 4 mars 2011, la requérante a eu l'occasion de s'exprimer, à plusieurs reprises, sur la méthodologie retenue par la Commission pour le calcul du montant de l'amende. Ainsi, la Commission relève, sans être contredite, que la requérante a commenté, dans sa réponse à la communication des griefs, la possibilité pour la Commission d'utiliser les fournitures internes de CRT à ses deux sociétés mères comme base pour le calcul de la valeur des ventes pertinentes. En outre, la requérante a formulé, en réponse à la lettre du 4 mars 2011, des observations dans lesquelles elle excluait que la Commission prenne en compte, dans le calcul du montant de l'amende, les ventes directes EEE par le biais de produits transformés réalisées par Philips. Enfin, en réponse à une lettre de la Commission, du 24 août 2011, il est constant que la requérante a, par un courrier du 7 septembre suivant, formulé des observations abondantes sur l'approche de la Commission en matière de calcul du montant des amendes, exposant les raisons pour lesquelles, si les ventes directes EEE par le biais de produits transformés devaient être prises en compte, il conviendrait de ne pas inclure, dans le calcul du montant de l'amende qui lui serait infligée, lesdites ventes dans la mesure où elles auraient été réalisées par Philips. De surcroît, il n'est pas contesté que la requérante a eu l'occasion d'exprimer à nouveau son point de vue lors d'une réunion avec le directeur de la direction des ententes de la direction générale (DG) " Concurrence ", le 6 décembre 2011, à l'occasion de laquelle elle a répété qu'elle n'avait jamais formé d'unité économique avec Philips et que le montant des éventuelles amendes qui lui seraient infligées devrait être fondé sur le montant des ventes propres à chaque entreprise.
177 Dans la réplique, la requérante objecte que les observations qu'elle a formulées l'ont été alors qu'elle avait été induite en erreur par la Commission sur la méthodologie que cette dernière suivrait dans la décision attaquée. Sur ce point, il suffit de constater qu'une telle circonstance manque en fait dès lors que, ainsi qu'il a été indiqué au point 175 ci-dessus, les définitions présentes dans la lettre du 4 mars 2011 ne sauraient être assimilées à un exposé de la méthodologie adoptée par la Commission pour calculer le montant des amendes.
178 Dans ces conditions, la requérante ne saurait invoquer une quelconque violation de ses droits de la défense.
179 En second lieu, la requérante fait valoir que le fait que l'amende qui lui a été infligée comprenait les ventes directes EEE par le biais de produits transformés réalisées par l'intermédiaire de Philips relève d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une violation du principe de la responsabilité personnelle.
180 À cet égard, il suffit de rappeler qu'il ressort de l'examen de la première branche du présent moyen qu'aucun reproche ne peut être fait à la Commission s'agissant, d'une part, de l'imputation de la responsabilité du comportement infractionnel du groupe LPD à la requérante et, d'autre part, de la prise en compte, dans le calcul du montant de l'amende, des ventes directes EEE par le biais de produits transformés, y compris lorsqu'elles ont été réalisées par l'intermédiaire de Philips.
181 Dès lors, la seconde branche du cinquième moyen doit être écartée ainsi que ledit moyen dans son ensemble.
Sur le sixième moyen, tiré de la violation de l'article 296 TFUE, de l'erreur manifeste d'appréciation ainsi que de la violation des principes d'égalité de traitement et de bonne administration, dans la mesure où la Commission n'a pas inclus les ventes directes EEE par le biais de produits transformés dans le calcul du montant de l'amende infligée à Samsung SDI Co., et ce sans motivation suffisante
182 Ce moyen est composé de trois branches, tirées, la première, de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise la Commission en estimant que SEC n'avait pas exercé d'influence déterminante sur le comportement de Samsung SDI Co., la deuxième, de la violation du principe d'égalité de traitement et, la troisième, de la violation du principe de bonne administration et de l'article 296 TFUE.
- Sur la première branche, tirée de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise la Commission en estimant que SEC n'avait pas exercé d'influence déterminante sur le comportement de Samsung SDI Co.
183 La requérante affirme que la Commission a conclu à tort que SEC n'avait pas exercé d'influence déterminante sur le comportement de Samsung SDI Co. Elle ajoute que, même à supposer que la responsabilité de SEC ne puisse être engagée du fait du comportement de Samsung SDI Co., la Commission aurait dû examiner s'il y avait lieu de considérer les ventes réalisées entre SEC et Samsung SDI Co. comme des ventes intragroupes et d'inclure leur montant dans le calcul du montant de l'amende infligée à Samsung SDI Co. au titre des ventes directes EEE par le biais de produits transformés.
184 À cet égard, il résulte de la jurisprudence citée aux points 33 à 35 ci-dessus que, contrairement à ce que fait valoir la requérante, les questions de la responsabilité de SEC du fait du comportement de Samsung SDI Co. et de l'inclusion, dans le calcul du montant de l'amende infligée à cette dernière, des ventes directes EEE par le biais de produits transformées réalisées par l'intermédiaire de SEC ne sauraient être traitées sur le même plan. En effet, contrairement à ce que fait valoir la requérante, la réponse à la première question conditionne la réponse à la seconde. Ainsi, si SEC n'exerçait pas d'influence déterminante sur Samsung SDI Co., alors les deux entreprises ne constituaient pas une même unité économique et il n'était pas possible, pour la Commission, d'inclure le montant des ventes réalisées entre SEC et Samsung SDI Co. dans le calcul du montant de l'amende infligée à cette dernière au titre des ventes directes EEE par le biais de produits transformés.
185 Il convient donc d'examiner si la Commission a commis une erreur manifeste d'appréciation en considérant que SEC n'avait pas exercé d'influence déterminante sur Samsung SDI Co.
186 À cet égard, la requérante fait valoir que, selon le droit coréen, SEC exerçait une influence dominante sur Samsung SDI Co. Ainsi, elle relève que la Korean Fair Trade Commission (commission coréenne pour le commerce équitable) classait invariablement Samsung SDI Co. et SEC dans un même groupe. Elle ajoute que plusieurs éléments figurant au dossier de la Commission ont établi l'existence d'une influence déterminante de SEC sur Samsung SDI Co. Elle cite, notamment, l'existence de relations circulaires et de participations croisées entre les sociétés du groupe Samsung, le fait que ledit groupe était contrôlé par la même famille, qu'il élaborait sa stratégie de manière centralisée, que les activités commerciales de Samsung SDI Co. faisaient partie intégrante du plan d'investissement quinquennal en matière de recherche et de développement du groupe Samsung annoncé en 2005, qu'il existait un chevauchement des postes d'encadrement, notamment entre Samsung SDI Co. et SEC, et que la politique d'embauche du personnel de Samsung SDI Co. était intégrée dans le processus d'embauche du groupe Samsung.
187 Pour autant, il y a lieu de constater que la requérante ne conteste pas l'exactitude des éléments mentionnés au considérant 745 de la décision attaquée, aux termes desquels les parts détenues par SEC dans le capital de Samsung SDI Co. étaient inférieures à 20 % pendant la période couverte par les infractions en cause, sans aucun droit spécial dérivant de ce pourcentage, qui aurait permis à SEC soit de déterminer la conduite commerciale de Samsung SDI Co., soit de bloquer ses décisions stratégiques. En effet, la requérante se contente d'affirmer que ces éléments ne suffisent pas pour considérer que Samsung SDI Co. et SEC ne constituaient pas une même entreprise au sens du droit de la concurrence compte tenu des éléments mentionnés au point 186 ci-dessus.
188 Or, force est de constater que, s'il ressort de tous les éléments mis en avant par la requérante que Samsung SDI Co., SEC et les autres entreprises citées par elle entretenaient des relations commerciales particulièrement étroites, la requérante n'établit pas que SEC exerçait effectivement une influence déterminante sur Samsung SDI Co. et, partant, que ces deux sociétés constituaient une unité économique au sens de la jurisprudence citée au point 35 ci-dessus. Par conséquent, c'est sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation que la Commission a considéré que SEC ne pouvait être tenue responsable du comportement de Samsung SDI Co. Dès lors, c'est à bon droit que la Commission n'a pas inclus les ventes réalisées entre SEC et Samsung SDI Co. dans le calcul du montant de l'amende infligée à Samsung SDI Co. au titre des ventes directes EEE par le biais de produits transformés. La première branche du sixième moyen doit donc être écartée.
- Sur la deuxième branche, tirée de la violation du principe d'égalité de traitement
189 La requérante fait valoir que, s'agissant de la prise en compte des ventes directes EEE par le biais de produits transformés pour le calcul du montant de l'amende, la Commission n'a pas appliqué les mêmes méthodes à toutes les entreprises, et, notamment, à Samsung SDI Co.
190 Toutefois, force est de constater que cette question a été examinée lors de l'analyse de la quatrième branche du quatrième moyen. Dès lors, pour les motifs exposés aux points 155 à 158 ci-dessus, la deuxième branche du sixième moyen doit être écartée.
- Sur la troisième branche, tirée de la violation de l'article 296 TFUE et du principe de bonne administration
191 La requérante affirme que la Commission a violé l'article 296 TFUE en s'abstenant d'indiquer les motifs pour lesquels elle n'avait pas inclus le montant des ventes réalisées entre SEC et Samsung SDI Co. dans le calcul du montant de l'amende infligée à Samsung SDI Co. au titre des ventes directes EEE par le biais de produits transformés.
192 À cet égard, force est de constater qu'un tel grief manque en fait. D'une part, il ressort du considérant 1020 de la décision attaquée que la Commission a précisé que les ventes directes EEE par le biais de produits transformés correspondaient aux CRT intégrés, au sein d'un même groupe, à un produit final et vendus ensuite aux clients de l'EEE par l'un des destinataires de ladite décision. Partant, la décision attaquée indique implicitement, mais nécessairement, que ces types de ventes ne concernent que les entreprises appartenant à un même groupe. D'autre part, le considérant 1030 de cette décision précise les motifs pour lesquels Samsung SDI Co. et SEC n'ont pas été considérés comme faisant partie du même groupe. Dans ces conditions, la décision attaquée permet de comprendre de façon suffisamment claire et non équivoque les raisons pour lesquelles le montant des ventes directes EEE par le biais de produits transformés n'a pas été pris en compte dans le calcul du montant de base de l'amende infligée à Samsung SDI Co.
193 Il résulte de ce qui précède que, dès lors que la requérante n'apporte aucun élément de nature à établir que la Commission aurait violé le principe de bonne administration en s'abstenant d'examiner, avec soin et impartialité, tous les éléments pertinents du cas d'espèce, la présente branche doit être écartée ainsi que le sixième moyen dans son ensemble.
194 Il résulte de ce qui précède que les conclusions tendant à l'annulation de la décision attaquée doivent être rejetées.
Sur les conclusions tendant à une réduction du montant de l'amende
195 À l'appui de ces conclusions, la requérante soulève un moyen unique, tiré du caractère disproportionné et excessif du montant de l'amende qui lui a été infligée.
196 Il convient de rappeler que, en vertu de l'article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, la Commission peut, par voie de décision, infliger aux entreprises ayant commis, de propos délibéré ou par négligence, une infraction aux dispositions de l'article 101, paragraphe 1, TFUE des amendes n'excédant pas, pour chaque entreprise et association d'entreprises participant à l'infraction, 10 % du chiffre d'affaires total réalisé au cours de l'exercice social précédent. Le paragraphe 3 dudit article prévoit que le montant de l'amende est déterminé en prenant en considération à la fois la gravité de l'infraction et sa durée.
197 Selon une jurisprudence constante, le montant de l'amende doit être gradué en fonction des circonstances de la violation et de la gravité de l'infraction, l'appréciation de cette dernière devant être effectuée en tenant compte, notamment, de la nature des restrictions apportées à la concurrence (arrêt de la Cour du 15 juillet 1970, ACF Chemiefarma/Commission, 41/69, Rec. p. 661, point 176, et arrêt du Tribunal du 22 octobre 1997, SCK et FNK/Commission, T 213/95 et T 18/96, Rec. p. II 1739, point 246). Si le choix du montant de l'amende constitue un instrument de la politique de la Commission en matière de concurrence afin d'orienter le comportement des entreprises dans le sens du respect des règles dans ce domaine (arrêts du Tribunal du 6 avril 1995, Martinelli/Commmission, T 150/89, Rec. p. II 1165, point 59, et du 11 décembre 1996, Van Megen Sports/Commission, T 49/95, Rec. p. II 1799, point 53), il incombe néanmoins au Tribunal de contrôler si le montant de l'amende infligée est proportionné par rapport à la gravité et à la durée de l'infraction (arrêt du Tribunal du 21 octobre 1997, Deutsche Bahn/Commission, T 229/94, Rec. p. II 1689, point 127). Le Tribunal doit, notamment, mettre en balance la gravité de l'infraction et les circonstances invoquées par la requérante (arrêt de la Cour du 14 novembre 1996, Tetra Pak/Commission, C 333/94 P, Rec. p. I 5951, point 48).
198 En l'espèce, la Commission a fixé le montant des amendes infligées à la requérante, en prenant en considération la gravité et la durée des infractions en cause, à la somme de 116 536 000 euros, s'agissant des CDT, et à celle de 179 061 000 euros, s'agissant des CPT. Elle a également condamné conjointement et solidairement la requérante et Philips à une amende de 69 048 000 euros, s'agissant des CDT, et de 322 892 000 euros, s'agissant des CPT.
199 Afin d'établir le caractère disproportionné des amendes qui lui ont été infligées, la requérante soutient, en premier lieu, que le montant élevé de l'amende est dû en grande partie à la prise en compte des ventes de téléviseurs et d'écrans d'ordinateur réalisées par Philips sur le territoire de l'EEE, ventes dans lesquelles elle n'était pas impliquée, mais qui ont malgré tout été intégrées dans le calcul du montant de cette amende. La requérante affirme ainsi qu'elle est tenue au paiement de la somme de 268 millions d'euros en raison desdites ventes et qu'elle doit également s'acquitter d'une somme supplémentaire correspondant à la réduction de 30 % accordée à Philips au titre de la communication sur l'immunité d'amendes. La requérante ajoute que, alors que, pendant la période de l'entreprise commune, les ventes de CPT dans l'EEE par le biais de produits transformés réalisées par Philips étaient 36 fois supérieures aux siennes, l'amende qui lui a été infligée s'élève presque au double de celle dont a eu à s'acquitter Philips.
200 À cet égard, il suffit de rappeler que cette argumentation a été écartée lors de l'examen de la première branche du cinquième moyen au terme duquel le Tribunal a considéré que c'était à bon droit que la Commission avait mis à la charge conjointe et solidaire de la requérante les ventes directes EEE par le biais de produits transformés réalisées par le groupe LPD, et ce même lorsque ces ventes avaient été effectuées par l'intermédiaire de Philips.
201 Par ailleurs, si la requérante fait valoir que le montant de son amende a été majoré du fait de la réduction de 30 % accordée à Philips au titre de la communication sur l'immunité d'amendes, force est de constater qu'elle n'établit ni même n'allègue que la Commission a commis une erreur manifeste d'appréciation en accordant une telle réduction à Philips.
202 En deuxième lieu, la requérante fait valoir que l'inclusion, dans le calcul du montant de l'amende qui lui a été infligée, de la valeur des ventes directes dans l'EEE par le biais de produits transformés, alors que la valeur de telles ventes n'a pas été prise en considération dans la détermination du montant de l'amende infligée à Samsung SDI Co., constitue une discrimination à son égard. La requérante ajoute que la Commission n'a pas suffisamment enquêté sur les liens unissant Samsung SDI Co. et SEC.
203 Sur ce point, il suffit de rappeler que ces arguments ont été écartés lors de l'examen du sixième moyen.
204 En troisième lieu, la requérante reproche à la Commission de lui avoir infligé une amende qui dépassait fortement l'objectif de dissuasion, dans la mesure où il n'a pas été démontré que les ententes avaient affecté les ventes de téléviseurs et d'écrans d'ordinateur, notamment au moyen de la répercussion des surcoûts.
205 Sur ce point, il a été indiqué au point 143 ci-dessus que la Commission n'était pas tenue de démontrer que l'incorporation des CRT cartellisés dans les téléviseurs et les écrans d'ordinateur avait eu un impact sur les prix de ces derniers. En outre, il a été relevé au point 137 ci-dessus que les ventes des téléviseurs et des écrans d'ordinateur intégrant les CRT cartellisés avaient été prises en compte non pas à concurrence de leur valeur entière, mais à concurrence de la seule fraction de cette valeur qui pouvait correspondre à la valeur des CRT cartellisés intégrés dans les téléviseurs et les écrans d'ordinateur, lorsque ces derniers avaient été vendus par l'entreprise dont relève la requérante à des tiers indépendants établis dans l'EEE. Dans ces conditions, la circonstance que les ententes en cause n'ont pas eu d'influence sur les prix des écrans de téléviseur ou des écrans d'ordinateur ne suffit pas à démontrer le caractère excessif du montant de l'amende.
206 En quatrième lieu, la requérante argue du caractère déraisonnable de la durée de la procédure administrative, laquelle a duré plus de cinq ans, dont trente-six mois entre la communication des griefs et la décision attaquée.
207 Selon une jurisprudence constante, l'observation d'un délai raisonnable dans la conduite des procédures administratives en matière de politique de la concurrence constitue un principe général du droit de l'Union, dont les juridictions de l'Union assurent le respect (arrêt de la Cour du 21 septembre 2006, Technische Unie/Commission, C 113/04 P, Rec. p. I 8831, point 40).
208 Le caractère raisonnable du délai est apprécié en fonction des circonstances propres à chaque affaire, et notamment de l'enjeu du litige pour l'intéressé, de la complexité de l'affaire ainsi que du comportement du requérant et de celui des autorités compétentes. La liste de ces critères n'est pas exhaustive et l'appréciation du caractère raisonnable du délai n'exige pas un examen systématique des circonstances de la cause au regard de chacun d'eux lorsque la durée de la procédure apparaît justifiée au regard d'un seul. Ainsi, la complexité de l'affaire peut être retenue pour justifier un délai de prime abord trop long (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 25 janvier 2007, Sumitomo Metal Industries et Nippon Steel/Commission, C 403/04 P et C 405/04 P, Rec. p. I 729, points 116 à 117, et la jurisprudence citée).
209 Par ailleurs, il ressort de la jurisprudence que la violation du principe du délai raisonnable est susceptible d'entraîner deux types de conséquences juridiques. D'une part, lorsque la violation du délai raisonnable a eu une incidence sur l'issue de la procédure, une telle violation est de nature à entraîner l'annulation de la décision attaquée (voir arrêt Technische Unie/Commission, point 207 supra, point 48, et la jurisprudence citée).
210 D'autre part, lorsque la violation du délai raisonnable est sans incidence sur l'issue de la procédure, une telle violation peut conduire le Tribunal, dans le cadre de l'exercice de sa compétence de pleine juridiction, à redresser de manière adéquate la violation résultant du dépassement du délai raisonnable de la procédure administrative en réduisant, le cas échéant, le montant de l'amende infligée (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 16 juin 2011, Heineken Nederland et Heineken/Commission, T 240/07, Rec. p. II 3355, points 429 et 434).
211 Aux fins de l'application de ce principe, il convient d'opérer une distinction entre les deux phases de la procédure administrative, à savoir la phase d'instruction antérieure à la communication des griefs et celle correspondant au reste de la procédure administrative, chacune de celles-ci répondant à une logique interne propre (arrêt Technische Unie/Commission, point 207 supra, point 42).
212 La première période, qui s'étend jusqu'à la communication des griefs, a pour point de départ la date à laquelle la Commission, faisant usage des pouvoirs que lui a conférés le législateur, prend des mesures impliquant le reproche d'avoir commis une infraction et doit permettre à celle-ci de prendre position sur l'orientation de la procédure. La seconde période, quant à elle, s'étend de la communication des griefs à l'adoption de la décision finale. Elle doit permettre à la Commission de se prononcer définitivement sur l'infraction reprochée (arrêt Technische Unie/Commission, point 207 supra, point 43). À cet égard, il convient de préciser que les entreprises ont un intérêt spécifique à ce que la seconde étape de la procédure soit conduite avec une diligence particulière, dès lors que, par l'adoption de la communication des griefs, la Commission manifeste sa volonté de procéder à une décision de constatation d'infraction et que ce n'est qu'à compter de la réception de ladite communication des griefs qu'une entreprise peut prendre connaissance de l'objet de la procédure qui est engagée contre elle et des comportements qui lui sont reprochés.
213 La requérante reproche principalement à la Commission le caractère déraisonnable de la seconde période de la procédure administrative. À cet égard, elle affirme que le délai qui s'est écoulé entre la notification de la communication des griefs, le 23 novembre 2009, et l'adoption de la décision attaquée, le 5 décembre 2012, soit plus de 36 mois, est déraisonnable. Elle ajoute que la Commission aurait dû profiter de ce délai pour faire parvenir la communication des griefs au groupe LPD et précise qu'elle n'a pas contribué à allonger la durée de cette procédure.
214 En l'espèce, il y a lieu de préciser que la première phase de la procédure administrative s'est déroulée du 8 novembre 2007, date des inspections effectuées par la Commission dans les locaux de plusieurs entreprises, et le 23 novembre 2009, date de la notification de la communication des griefs. En outre, la seconde phase de la procédure administrative a duré trois ans et douze jours, puisqu'elle s'est déroulée entre le 23 novembre 2009 et le 5 décembre 2012.
215 Premièrement, il y a lieu de constater que, durant la première phase de la procédure administrative, la Commission n'a pas manqué de diligence et a, les 8 et 9 novembre 2007, procédé à des inspections, au titre de l'article 20, paragraphe 4, du règlement n° 1/2003. Puis, entre le 8 novembre 2007 et le 2 juillet 2009, la Commission a formulé plusieurs demandes d'informations auprès de tous les producteurs de CRT. Elle a, ensuite, enregistré les demandes de clémence de Samsung, le 11 novembre 2007, de MEI et de ses filiales, le 12 novembre 2007, de Philips, le 27 novembre 2007, et de Thomson, le 14 mars 2008. Or, ainsi que le relève la Commission, le nombre significatif des demandes de clémence l'a obligée à faire face à un dossier volumineux faisant état de plus d'un millier de contacts collusoires et dont les informations ont dû être analysées et souvent complétées, y compris par des demandes d'informations supplémentaires.
216 Deuxièmement, il convient de relever que, durant la seconde phase de la procédure administrative, la Commission a également fait preuve de diligence. Ainsi, après l'adoption de la communication des griefs, le 23 novembre 2009, la Commission a informé les destinataires de ce document qu'ils avaient la possibilité d'accéder aux pièces de l'enquête ; elle a recueilli les observations formulées par écrit de certains de ces destinataires ; elle a organisé une audition orale, les 26 et 27 mai 2010 ; elle a reçu des observations supplémentaires de la part de Toshiba et de Panasonic, puis de MTPD, ainsi que des éléments de preuve ; elle a envoyé, le 22 décembre 2010, un exposé des faits à Toshiba et à Panasonic, puis à MTPD, concernant leur influence décisive sur MTPD, auquel Toshiba a répondu, le 4 février 2011 ; elle a informé les destinataires de la communication des griefs qu'ils avaient la possibilité d'accéder, du 9 au 12 novembre 2010, aux déclarations d'un employé de Toshiba ; elle a envoyé, le 4 mars 2011, des demandes aux destinataires de la communication des griefs les invitant à fournir des informations sur leurs ventes et leurs chiffres d'affaires globaux, lesquelles ont été suivies de demandes additionnelles visant à compléter ou à clarifier les données fournies ; elle a adopté deux communications des griefs supplémentaires visant à compléter, à amender et à clarifier les griefs adressés à Philips et à LGE ; elle a informé ces derniers de la possibilité d'accéder au dossier ; elle a recueilli leurs observations par écrit et les a auditionnés, le 6 septembre 2012, et, enfin, elle a, le 5 juillet 2012, envoyé à tous les destinataires un nouvel exposé des faits, auquel Toshiba, Samsung SDI Co. et Panasonic, puis MTPD, ont répondu, respectivement le 19, le 27 et le 31 juillet 2012. Finalement, la décision attaquée a été adoptée le 5 décembre 2012.
217 Il résulte de ces constatations que, dans les circonstances de l'espèce, la durée de la procédure administrative n'a pas présenté de caractère déraisonnable. La requérante ajoute que la communication des griefs supplémentaire différait peu de la communication des griefs et se concentrait sur sa responsabilité et sur celle de Philips. Toutefois, force est de constater qu'une telle circonstance ne suffit pas à démontrer le caractère déraisonnable de la durée de la procédure administrative, compte tenu des faits relevés aux points précédents, tenant à la complexité du dossier et à la diligence avec laquelle la Commission a conduit la procédure.
218 Ainsi, à la lumière de l'ensemble des constatations opérées aux points 215 et 216 ci-dessus, il y a lieu de considérer que la procédure administrative, prise dans son ensemble, n'a pas été d'une durée déraisonnable eu égard aux circonstances de l'espèce.
219 En cinquième lieu, la requérante demande au Tribunal de diminuer le montant de l'amende, dans l'exercice de sa compétence de pleine juridiction, dans l'hypothèse où il conclurait, à la suite d'un moyen invoqué par Philips dans l'arrêt rendu ce jour dans l'affaire T 92/13, Philips/Commission, à une réduction du montant de l'amende infligée à cette société.
220 À cet égard, force est de constater que, dans l'arrêt invoqué au point précédent, le Tribunal rejette tant les conclusions aux fins d'annulation de la décision attaquée en tant qu'elle concerne Philips que celles tendant à la réformation du montant de l'amende, de sorte qu'un tel argument ne peut qu'être écarté.
221 En dernier lieu, aucun autre motif ne justifie que le Tribunal réforme la décision attaquée en ce qui concerne le montant de l'amende.
222 Le Tribunal estime, enfin, qu'aucun motif lié à un moyen d'ordre public, qu'il est tenu de soulever d'office (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 8 décembre 2011, KME Germany e.a./Commission, C 272/09 P, Rec. p I 12789, point 104), ne justifie qu'il fasse usage de son pouvoir de réformation pour supprimer ou réduire le montant de l'amende.
223 Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le moyen unique avancé à l'appui des conclusions tendant à la réduction du montant de l'amende doit être rejeté ainsi que lesdites conclusions dans leur ensemble et, partant, le présent recours.
Sur les dépens
224 Aux termes de l'article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (troisième chambre) déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) LG Electronics, Inc. est condamnée aux dépens.