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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 10 septembre 2015, n° 14-03318

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Migliorini, IN 3 (SARL)

Défendeur :

Phonegroup (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Perrin

Conseillers :

M. Birolleau, Mme Lucat

Avocats :

Mes Vignes, Ansel, Bonaldi, Matteoda

T. com. Paris, 13e ch., du 21 oct. 2013

21 octobre 2013

Faits et procédure

La société de droit suisse Phonegroup, société de télécommunication spécialisée dans la vente des produits Phonegroup (revente de numérations à valeur ajoutée et fourniture de logiciels) et dans le développement, depuis 2005, d'une activité d'opérateur téléphonique, a conclu, en 2007, un contrat de prestations de services avec Monsieur Patrick Migliorini, partenaire commercial de la société Phonegroup depuis 2003, avec effet rétroactif au 3 janvier 2005, aux termes duquel Monsieur Migliorini était chargé de trouver, pour la société Phonegroup, des partenariats avec des opérateurs téléphoniques.

En 2007, Monsieur Migliorini a constitué une nouvelle société, IN 3 SARL, qui a effectué des prestations de services pour la société Phonegroup.

A partir de 2010, les relations entre la société Phonegroup et M. Migliorini se sont toutefois dégradées, Phonegroup reprochant à Monsieur Migliorini de ne pas utiliser l'adresse électronique de la société Phonegroup et de manquer de disponibilité, Monsieur Migliorini se plaignant pour sa part de difficultés à se faire payer ses commissions par Phonegroup.

Par exploit d'huissier du 11 septembre 2012, Monsieur Migliorini et la société IN 3 ont fait assigner la société Phonegroup devant le Tribunal de commerce de Paris en paiement des factures émises et en condamnation pour rupture brutale de relations commerciales.

Par jugement rendu le 21 octobre 2013, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de commerce de Paris a :

- débouté Monsieur Migliorini et la SARL IN 3 de leurs demandes de dommages et intérêts ;

- condamné la société Phonegroup à payer 33 243,39 euro à Monsieur Migliorini ;

- condamné la société Phonegroup à payer 67 800,63 euro à la société IN 3 ;

- condamné la société Phonegroup à fournir à Monsieur Migliorini et à la société IN 3 copie des factures émises par elle pendant la période du 1er août au 7 septembre 2010, vers les opérateurs apportés par M. Patrick Migliorini et la société IN 3, dans la formulation de la demande, soit " pour tous les contrats conclus et notamment pour le Zaïre, le Maroc, le Venezuela, le Nicaragua, Dominica, Antartica, Oration, Ellipso, et toutes les solutions Globalstar ainsi que les éléments permettant de facturer les mouvements concernant les opérateurs Belgacom, Tata, Wis, Globalstar, Oration et Merkurtel ", ordonné cette condamnation sous astreinte de 20 euro par jour à compter du trentième jour suivant la signification du présent jugement et pendant un délai de trois mois, passé lequel il sera à nouveau fait droit, déboutant du surplus ;

- condamné la société Phonegroup à payer 1 500 euro à M. Patrick Migliorini et 1 500 euro à la société IN 3, au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement ;

- débouté les parties de leurs demandes autres plus amples ou contraires ;

- dit que les dépens seront supportés pour moitié par chacune des parties, dont ceux à recouvrement par le greffe, liquidés à la somme de 105,49 euro dont 17,07 euro de TVA.

Monsieur Migliorini et la société IN 3 ont interjeté appel de ce jugement le 13 février 2014.

Par leurs dernières conclusions signifiées le 18 mai 2015, ils demandent à la cour de :

- dire et déclarer bien fondée la demande de Monsieur Migliorini et de la société IN 3 à l'encontre de la société Phonegroup ;

- débouter la société Phonegroup de sa demande reconventionnelle ;

A titre principal :

- confirmer le jugement en ce qu'il a :

* condamné la société Phonegroup à payer les sommes suivantes, avec intérêt au taux légal à compter de la date de l'émission de chaque facture et ce jusqu'au parfait paiement :

* à Monsieur Patrick Migliorini la somme de 33 243,39 euro TTC ;

* à la société IN 3 la somme de 67 800,63 euro TTC ;

- ordonner la capitalisation des intérêts en vertu de l'article 1154 du Code civil à compter de la date de l'assignation de première instance en date du 11 avril 2012 ;

Ajoutant :

- condamner la société Phonegroup à payer à Monsieur Migliorini et à la société IN 3 la somme de 10.000 euro à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

- condamner la société Phonegroup à payer à Monsieur Migliorini la somme de 6 208,84 euro correspondant à 2 mois et 7 jours de facturation de commissions ;

- condamner la société Phonegroup à verser à la société IN 3 la somme de 22 220,84 euro correspondant à 2 mois et 7 jours de facturation de commissions ;

Infirmant et statuant à nouveau :

- condamner la société Phonegroup à payer à la société IN 3 la somme de 238 791,12 euro à titre de dommages et intérêts calculés sur la base de deux années de préavis non respectées ;

- condamner la société Phonegroup à payer à Monsieur Migliorini la somme de 66 721,92 euro à titre de dommages et intérêts calculés sur la base de deux années de préavis non respectées ;

A titre subsidiaire :

- désigner un expert financier, avec pour mission notamment de :

* prendre connaissance du dossier ;

* se rendre dans les locaux de la société Phonegroup ;

* se faire remettre l'ensemble des pièces comptables de l'année 2010, notamment pour tous les contrats conclus et notamment pour le Zaïre, le Maroc, le Venezuela, le Nicaragua, Dominica, Antartica, Oration, Ellipso et toutes les solutions Globalstar ainsi que les éléments permettant de facturer les mouvements concernant les opérateurs Belgacom, Tata, Wis, Globalstar, Oration et Merkurtel ;

* calculer les sommes dues à Monsieur Migliorini et à la société IN 3 ;

* faire les comptes entre les parties, le cas échéant ;

* se faire remettre par chacun des parties tous documents utiles pour évaluer les chiffres d'affaires annuels de Monsieur Migliorini et de la société IN 3 générés par l'activité Phonegroup, dégager la marge et calculer les préjudices subis par Monsieur Migliorini et la société IN 3 du fait de la rupture brutale des relations commerciales ;

En tout état de cause :

- condamner la société Phonegroup aux entiers dépens de l'instance, y compris les frais d'expertises éventuelles au profit de Maître Marie-Catherine Vignes, avocat aux offres du droit, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ;

- condamner la société Phonegroup, à payer à Monsieur Migliorini et à la société IN 3 la somme de 25 000 euro chacun au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Les appelants soutiennent qu'il existait bien une relation juridique entre la société Phonegroup et la société IN 3, de sorte que le paiement des factures émises par IN 3 est dû. Elles font valoir que la société Phonegroup n'a pas déféré à sa condamnation et qu'ainsi la facturation par la société IN 3 et par M. Migliorini au titre de la période de juin à septembre 2010 ne peut donc pas être émise. Elles demandent donc une condamnation de la société Phonegroup à payer sur la base de la facturation mensuelle effectuée de janvier à juin 2010 une somme correspondant à 2 mois et 7 jours de commissions à la société IN 3 et à M. Migliorini, au titre de la période de juin 2010 au 7 septembre 2010.

Elles sollicitent l'infirmation du jugement en ce qu'il les a déboutées de leurs demandes de dommages et intérêts au titre de la rupture brutale du contrat. Elles affirment que la rupture brutale des relations commerciales est exclusivement imputable à la société Phonegroup en ce qu'elle a fait volontairement blocage au paiement des factures dues à raison de prestations effectuées, sans respect d'un quelconque préavis, et en exerçant des menaces à leur encontre. Elles soutiennent également que Monsieur Migliorini ne saurait être reconnu comme ayant à aucun moment manqué à ses obligations contractuelles, puisque celui-ci a continué à exercer ses prestations après l'entretien qui s'est déroulé à Milan. Les appelantes demandent par voie de conséquence la condamnation de la société Phonegroup pour rupture brutale de relations commerciales.

La société Phonegroup, appelante à titre incident, par ses dernières conclusions signifiées le 2 juin 2015, demande à la cour de :

- confirmer le jugement du Tribunal de commerce de Paris en date du 21 octobre 2013 en ce qu'il a débouté Monsieur Migliorini et la société IN 3 SARL de leurs demandes de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat signé avec le seul Patrick Migliorini le 3 janvier 2005 ;

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé qu'il n'existe aucune stipulation contractuelle sur les conséquences de l'expiration du contrat signé avec Monsieur Patrick Migliorini et a débouté en conséquence Monsieur Patrick Migliorini et la société IN 3 de leurs demandes de communication de factures émises après le 7 septembre 2010 ;

- infirmer le jugement pour le surplus ;

Et, statuant à nouveau :

- débouter Monsieur Patrick Migliorini de sa demande de paiements de factures non dues et ce pour un montant de 33 243,39 euro ;

- débouter la société IN 3 SARL de sa demande de paiements de factures non dues et ce pour un montant de 67 800,63 euro ;

- constater que la société Phonegroup a remis les factures émises pour ses opérateurs pendant la période du 1er août au 7 septembre 2010 et en conséquence débouter Monsieur Patrick Migliorini et la société IN 3 SARL de leurs demandes de copies de factures émises par la société Phonegroup pour ses opérateurs pendant la période du 1er août au 7 septembre 2010 ;

- débouter Monsieur Patrick Migliorini de sa demande de paiements de factures non dues et ce pour un montant de 22 220,84 euro pour la période de juin au 7 septembre 2010 ;

- débouter la société IN 3 SARL de sa demande de paiements de factures non dues et ce pour un montant de 6 208,84 euro pour la période de juin au 7 septembre 2010 ;

- débouter Monsieur Patrick Migliorini et la société IN 3 SARL de leurs demandes nouvelles de désignation d'un expert financier pour se rendre dans les locaux de la société Phonegroup pour se faire remettre la comptabilité de l'année 2010 ;

- débouter Monsieur Patrick Migliorini et la société IN 3 SARL de leurs demandes de dommages et intérêts pour résistance abusive de la société Phonegroup ;

A titre reconventionnel et en tout état de cause :

- dire que Monsieur Patrick Migliorini a commis des fautes préjudiciables à l'encontre de la société Phonegroup ;

- dire que la société IN 3 SARL a commis des fautes préjudiciables à l'encontre de la société Phonegroup ;

En conséquence,

- condamner solidairement Monsieur Migliorini et la société IN 3 SARL au paiement au profit de la société Phonegroup, d'une somme qui ne saurait être évaluée à moins de 200 000 euro à titre de dommages et intérêts, en réparation des préjudices financiers et moraux subis par la société Phonegroup ;

- dire que l'action engagée par Monsieur Migliorini et la société IN 3 SARL à l'encontre de la société Phonegroup, est abusive ;

En conséquence,

- condamner solidairement Monsieur Migliorini et la société IN 3 SARL au paiement au profit de la société Phonegroup, de la somme de 50 000 euro à titre de dommages et intérêts, en réparation des préjudices subis toutes causes confondues ;

- condamner Monsieur Migliorini à verser à la société Phonegroup, la somme de 12.000,00 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- condamner la société IN 3 SARL à verser à la société Phonegroup, la somme de 12.000,00 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- condamner solidairement Monsieur Migliorini et la société IN 3 SARL aux entiers dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

S'agissant des demandes de paiement de factures de la part de Monsieur Migliorini et la société IN 3, l'intimée soutient que Monsieur Migliorini ne rapporte pas la preuve des prestations justifiant l'émission des factures visées, que le courriel sur lequel Monsieur Migliorini fonde sa demande n'est pas un document contractuel susceptible de l'engager et qu'en tout état de cause, l'appelant ne rapporte pas la preuve d'avoir fourni des prestations de qualité.

En ce qui concerne la société IN 3, l'intimée soutient qu'aucun contrat n'a jamais été signé avec cette dernière, le seul contrat valable étant celui signé avec Monsieur Migliorini, que la société IN 3 est tierce à ce contrat et ne peut donc se prévaloir de l'application à son profit du contrat signé entre Monsieur Migliorini et la société Phonegroup. Elle explique également que le courriel du 7 mai à partir duquel le Tribunal de commerce de Paris a reconnu un décompte des minutes restant à facturer pour l'année 2009 ne concernait pas la société IN 3, mais d'autres sociétés.

L'intimée explique ensuite que, dans l'hypothèse où la cour ne suivrait son raisonnement sur ce dernier point, elle retiendra qu'IN 3 ne rapporte pas la preuve d'avoir été engagée à effectuer des prestations spécifiques pour Phonegroup. Elle demande dans ces conditions à la cour de débouter la société IN 3 de sa demande de paiement à son encontre, les factures étant irrecevables et non dues.

Sur la rupture des relations contractuelles, l'intimée affirme que Monsieur Migliorini a commis de nombreuses fautes professionnelles, dont un manquement à son obligation d'exécution de bonne foi du contrat, notamment avec la création de trois sociétés concurrentes (dont la société POM Telecom), ce qui est de nature à justifier la rupture dudit contrat. Elle fait valoir que Monsieur Migliorini ne rapporte ni la preuve du caractère brutal de la rupture, ni la preuve d'un préjudice.

Concernant la société IN 3, l'intimée soutient qu'il n'existe aucun lien de droit entre ladite société et elle, et que la société IN 3 en tant que tierce au contrat conclu avec Monsieur Migliorini ne saurait se prévaloir de son application à son profit.

Sur la communication de factures du 1er août au 7 septembre 2010, l'intimée rappelle que Monsieur Migliorini et la société IN 3 ne justifient d'aucune prestation pour la période du 1er août au 7 septembre 2010 ; ainsi, elle demande à la cour de débouter M. Migliorini et la société IN 3 de leurs demandes de paiement des sommes correspondant à 2 mois et 7 jours de facturation de commissions.

Sur la demande de désignation d'un expert financier, la société Phonegroup conclut à l'absence de nécessité de désignation d'un expert ; elle rappelle que toutes les factures ayant permis le calcul des sommes dues à Monsieur Migliorini ont déjà été versées aux débats, et que la société IN 3 ne pourrait se prévaloir du contrat signé entre M. Migliorini et la société Phonegroup.

Elle soutient enfin avoir subi un préjudice important du fait du comportement négligent et déloyal de Monsieur Migliorini, en ce que ce dernier :

- n'a pas utilisé l'adresse courriel officielle de la société Phonegroup, ce qui a été source de confusion et a causé à Phonegroup un préjudice d'image ;

- a utilisé ses connaissances acquises dans le cadre de son partenariat avec Phonegroup pour développer parallèlement ses propres activités et a tenté de capter les clients de cette dernière, via la création de trois sociétés, la société IN 3, la société POM&CO et la société POM Telecom.

MOTIFS

Sur la demande de paiement des factures émises par Monsieur Migliorini Considérant que l'article 1315 du Code civil dispose que "celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver" ;

Considérant que Monsieur Migliorini demande le paiement des factures n° 1/2010 pour la période de 2009, d'un montant de 11.223,03 euro, n° 2/2010 pour la période de janvier à mai 2010, d'un montant de 14 249,00 euro, n° 3/2010 en complément à la période 2009, d'un montant de 5 339,86 euro, et n° 4/2010 pour le mois de juin 2010, d'un montant 2 431,50 euro, soit un montant total 33 243,39 euro ; que ces sommes correspondent aux commissions que revendique Monsieur Migliorini sur les ventes de produits Phonegroup (logiciels et numération à valeur ajoutée) ;

Considérant que Phonegroup - qui fonde son rejet des factures en cause essentiellement sur le manque de disponibilité du prestataire et sur son refus de reprendre contact avec Phonegroup (" Nous ne paierons aucune facture ni de la société, ni à toi personnellement tant que tu ne prendras avec notre société et fixé un rendez-vous pour expliquer d'une manière calme et transparente tes comportements de ces derniers mois " - courriel de Phonegroup à Monsieur Migliorini du 24 août 2010 - pièce n° 10 communiquée par Monsieur Migliorini et IN 3) - ne conteste ni le droit à commission du prestataire, ni les taux de commission pris en compte par Monsieur Migliorini, conformes au barème communiqué le 4 juin 2010 par Phonegroup, ni le mode de calcul des commissions réclamées ; que c'est en conséquence à raison que les premiers juges ont dit que le paiement réclamé était dû ; que le jugement sera confirmé sur ce point ; que cette condamnation sera assortie des intérêts au taux légal à compter, non de la date d'émission de chaque facture - la créance ne portant intérêt, en application de l'article 1153 du Code civil, que du jour où a été délivrée au débiteur une sommation de payer - mais que la date d'assignation ; que la cour ordonnera la capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 du Code civil ; qu'il sera ajouté en ce sens au jugement ;

Sur la demande de paiement des factures émises par la société IN 3

Considérant que IN 3 réclame le paiement des factures n° 2009 08 06 d'un montant de 5 551,28 euro, n° 2009 11 12 d'un montant de 820,14 euro, n° 2009 12 15 d'un montant de 7 241,26 euro, n° 2010 05 06 d'un montant de 9 117,43 euro, n° 2010 06 07 d'un montant de 8 126,71 euro, n° 2010 07 08 du 5 juillet 2010 d'un montant de 14 281,39 euro, n° 2010 07 09 du 15 juillet 2010 d'un montant de 457,74 euro, n° 2010 07 10 d'un montant de 8 889,58 euro, n° 2010 07 11 d'un montant de 2 852,70 euro, n° 2010 07 12 d'un montant de 2 790,77 euro, n° 2010 07 13 d'un montant de 8 183,81 euro, n° 2010 07 14 avoir d'un montant de - 513,18 euro, soit un montant total de 67 800,63 euro ;

Considérant que Phonegroup ne saurait invoquer l'absence de relation contractuelle avec IN 3 dès lors qu'elle a réglé plusieurs de ses factures les 20 mars, 10 et 16 juillet, 16 septembre, 19 novembre et 1er décembre 2009 (pièces n° 3 communiquées par Monsieur Migliorini et IN 3) ; qu'elle ne conteste, pas plus que pour Monsieur Migliorini, les montants facturés, usant de son opposition au paiement des factures de IN 3 pour contraindre Monsieur Migliorini à accepter de reprendre contact avec Phonegroup ; que, les prestations de IN 3 n'étant pas discutées, la décision déférée sera confirmée en ce qu'elle a fait droit à la demande de paiement de IN 3 ; que cette condamnation sera assortie des intérêts au taux légal à compter, non de la date d'émission de chaque facture - la créance ne portant intérêt, en application de l'article 1153 du Code civil, que du jour où a été délivrée au débiteur une sommation de payer - mais que la date d'assignation ; que la cour ordonnera la capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 du Code civil ; qu'il sera ajouté en ce sens au jugement ;

Sur la rupture de la relation commerciale

Considérant que l'article L 442-6 I, 5° du Code de commerce dispose qu' "engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte, notamment, de la durée de la relation commerciale. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution, par l'autre partie, de ses obligations ou en cas de force majeure" ;

Considérant que, par lettre en date du 7 septembre 2010, Phonegroup a notifié à Monsieur Migliorini qu'il était mis un terme à la relation contractuelle et a visé le fait que Monsieur Migliorini " avait interrompu de fait les rapports avec Phonegroup en omettant de rendre compte à la Société de votre activité, de communiquer sur les éventuels contacts avec les clients, de vous présenter aux rendez-vous pourtant fixés d'un commun accord et même de répondre aux communications téléphoniques et électroniques avec la société " ;

Considérant qu'il n'est pas contestable que la rupture notifiée le 7 septembre 2010 a été brutale, aucun des courriers antérieurs de Phonegroup à Monsieur Migliorini n'annonçant la fin des relations, ni le courrier de Phonegroup du 16 juin 2010 (" Nous cueillons cette occasion pour vous demander de nous adresser une communication par laquelle vous nous autorisez à solder la société IN 3 SARL, à défaut nous ne serons plus en mesure d'autoriser les paiements ") (pièce n° 6 communiquée par Monsieur Migliorini), ni celui du 24 août 2010 (" Nous ne connaissons personne et n'avons reçu aucun type de service de IN 3. Nous t'invitons officiellement et pour la dernière fois à prendre rendez-vous et à te présenter au bureau d'ici le 31 août pour résoudre définitivement aussi bien la question de tes implications professionnelles qu'administratives par rapport à toi ") (pièce n° 10 communiquée par Monsieur Migliorini) ;

Considérant que la rupture de la relation intervenue le 7 septembre 2010 était dépourvue de préavis ; que Phonegroup ne rapporte la preuve d'aucun des manquements contractuels de Monsieur Migliorini invoqués :

- ni le développement, par Monsieur Migliorini, de ses propres activités sans en référer à Phonegroup, cette dernière étant pleinement informée de l'activité de la société IN 3 ;

- ni le défaut de disponibilité du prestataire, alors que le contrat de prestation de service stipule que " dans l'exercice de son activité, Monsieur Migliorini opérera en totale autonomie, sans contraintes d'horaires ou de présence, avec le choix discrétionnaire d'absences ou de périodes de congés sans devoir se soumettre à un quelconque pouvoir hiérarchique et disciplinaire de la part de la société ; excluant d'ores et déjà une quelconque contrainte de subordination. " et qu'il n'est pas contesté que Monsieur Migliorini a mené à bien la signature, pour le compte de Phonegroup, de deux contrats dans le courant du mois d'août 2010 ;

Qu'aucun des motifs allégués ne pouvait donc justifier une rupture sans préavis ;

Considérant qu'un préavis de six mois doit être regardé comme suffisant au regard de l'ancienneté de la relation commerciale de 7 années ;

Considérant qu'en cas d'insuffisance du préavis, le préjudice en résultant est évalué en considération de la marge brute correspondant à la durée du préavis jugé nécessaire ;

Mais considérant que, si Monsieur Migliorini et IN 3 font état de leur chiffre d'affaires réalisé en 2010, ils ne justifient en aucune façon de la marge brute réalisée ; qu'il n'appartient pas à la cour, en application de l'article 146, alinéa 2, du Code de procédure civile, de suppléer, par le recours à une mesure d'expertise, la carence des appelants dans l'administration de la preuve ; que, par motifs substitués, le jugement sera confirmé sur le rejet de la demande de ce chef de Monsieur Migliorini et d'IN 3 ;

Sur la demande reconventionnelle de Phonegroup

Considérant que Phonegroup fait grief à Monsieur Migliorini d'avoir créé plusieurs sociétés pour concurrencer l'activité de Phonegroup : IN 3, POM § Co, POM Telecom ; qu'elle ne rapporte toutefois la preuve ni d'actes de concurrence déloyale commis par ces sociétés, ni du préjudice que lui auraient causé les agissements invoqués ; que la preuve d'un préjudice n'est de même rapportée ni par suite d'un défaut d'utilisation de l'adresse courriel officielle de la société Phonegroup, ni au titre d'un défaut de disponibilité ; que la décision déférée sera confirmée en ce qu'elle a débouté Phonegroup de sa demande sur ce point ; qu'elle le sera également sur la demande de Phonegroup tendant à la condamnation de Monsieur Migliorini et d'IN 3 pour abus d'action ; que, la disposition du jugement entrepris condamnant Phonegroup à fournir à Monsieur Migliorini et à la société IN 3 la copie des factures émises par elle pendant la période du 1er août au 7 septembre 2010 n'étant pas contestée, elle sera confirmée ;

Considérant que l'équité commande de condamner, au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Phonegroup à payer à Monsieur Migliorini la somme de 1 000 euro et à IN 3 celle de 1 000 euro ;

Par ces motifs LA COUR statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, Confirme le jugement entrepris. Y ajoutant, Dit que les condamnations prononcées à l'encontre de la société Phonegroup seront assorties des intérêts au taux légal à compter de la date de l'assignation. Ordonne la capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 du Code civil. Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires. Condamne, en application de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel, la société Phonegroup à payer à Monsieur Migliorini la somme de 1 000 euro et à IN 3 celle de 1 000 euro. Condamne la société Phonegroup aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.