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Décisions

Cass. com., 22 septembre 2015, n° 13-27.726

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Dominique Alligier (SARL)

Défendeur :

Rhône-Dauphiné express (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

M. Lecaroz

Avocat général :

M. Le Mesle

Avocats :

SCP Célice, Blancpain, Soltner etTexidor, Me Le Prado

Grenoble, ch. com., du 26 sept. 2013

26 septembre 2013

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 26 septembre 2013), que la société Drôme express, aux droits de laquelle est venue la société Rhône-Dauphiné express (la société Drôme express), a confié depuis 1986 des prestations de transport de marchandises à la société Dominique Alligier selon contrats de sous-traitance successifs ; que les sociétés ont conclu le 22 avril 2008 un contrat-cadre ; que par lettre recommandée du 6 mars 2009, la société Drôme express a mis fin au contrat-cadre avec un préavis de trois mois ; qu'estimant ce délai de préavis insuffisant au regard de la durée de la relation commerciale établie entre les parties, la société Dominique Alligier a assigné en paiement de dommages-intérêts la société Drôme express sur le fondement de l'article L. 442-6, I, 5°, du Code de commerce ;

Sur le premier moyen : - Attendu que la société Dominique Alligier fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes alors, selon le moyen, qu'à peine de nullité de sa décision, le juge ne peut statuer que sur les dernières conclusions déposées par les parties ; que la société Dominique Alligier avait signifié des conclusions le 12 juin 2013, dans lesquelles elle avait modifié les moyens soulevés dans ses précédentes écritures, en particulier en faisant valoir que le respect du préavis contractuel de rupture n'était pas suffisant pour exonérer le contractant ayant résilié une relation commerciale établie de la responsabilité qu'il était susceptible d'encourir au regard de l'article L. 442-6, I, 5°, du Code de commerce, et qu'il incombait aux juges du fond d'apprécier le caractère suffisant du délai de préavis de trois mois qui lui avait été accordé par la société Drôme express au regard, non seulement de l'ancienneté de la relation commerciale, mais également de la nature des produits ou services concernés, de leur notoriété, des investissements réalisés ou encore de l'importance du chiffre d'affaires représentée par le partenaire économique ; qu'en statuant au visa de conclusions de la société Dominique Alligier " en date du 7 janvier 2011 " et en faisant un bref exposé des prétentions et moyens ne correspondant pas à ceux invoqués par cette société dans ses conclusions signifiées le 12 juin 2013, la cour d'appel a violé les articles 455 et 954, alinéa 3, du Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'en dépit du visa erroné des conclusions de la société Dominique Alligier, la cour d'appel a statué sur toutes les prétentions de celles-ci, et au vu de tous les moyens formulés dans ses dernières conclusions, aucun défaut de réponse à un moyen n'étant invoqué ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen : - Attendu que la société Dominique Alligier fait le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen : 1°) que la circonstance que le préavis contractuel de rupture soit conforme aux délais prévus par le contrat-type applicable aux transports publics routiers de marchandises exécutés par des sous-traitants, approuvé par le décret du 26 décembre 2003, ne dispense pas le juge de rechercher si le préavis était suffisant au regard de la durée des relations commerciales ayant existé entre les parties ; que la société Dominique Alligier faisait valoir que le respect par la société Drôme express du préavis contractuellement fixé dans l'accord-cadre du 22 avril 2008, fût-il conforme au contrat-type approuvé par le décret du 26 décembre 2003, ne permettait pas d'établir que le préavis de trois mois qui lui avait été accordé était suffisant eu égard à l'ancienneté des relations commerciales entre les parties qui avaient commencé en 1986 ; que pour débouter la société Dominique Alligier de ses demandes indemnitaires, la cour d'appel a retenu que le délai du préavis conventionnel de rupture appliqué par la société Drôme express était " tiré d'un contrat-type normalement applicable approuvé par décret du 26 décembre 2003 et faisant dès lors la loi entre les parties " pour en déduire que la durée du préavis devait être considérée comme conforme aux usages du commerce et qu'il n'y avait pas lieu de faire application de l'article L. 442-6, I, 5°, du Code de commerce ; qu'en statuant de la sorte, quand le fait que le délai contractuel de rupture ait été fixé en référence au contrat-type approuvé par le décret du 26 décembre 2003 et doive par conséquent être considéré comme conforme aux usages professionnels ne dispensait pas le juge de rechercher, ainsi qu'il y était invité, si le délai de préavis était suffisant au regard de la durée de la relation ayant existé entre les sociétés Dominique Alligier et Drôme express, la cour d'appel a violé l'article L. 442-6, I, 5°, du Code de commerce, ensemble l'article 8-II de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 et l'article 12-2 du contrat-type approuvé par le décret n° 2003-1295 du 26 décembre 2003 ; 2°) qu'il résulte des constatations de l'arrêt que le délai de préavis dont la société Drôme express avait fait application était celui stipulé dans l'accord-cadre du 22 avril 2008, lequel avait été fixé conformément au contrat-type approuvé par le décret du 26 décembre 2003 et en référence à la durée d'exécution de cette convention ; qu'en abstenant de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée par la société Dominique Alligier, si le délai de préavis de trois mois accordé par la société Drôme express était suffisant au regard de la durée des relations commerciales ayant existé entre les parties, dont la cour d'appel a constaté qu'elles avaient débuté en 1986, soit bien antérieurement à la conclusion du contrat du 22 avril 2008, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 442-6, I, 5°, du Code de commerce, ensemble l'article 8-II de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 et l'article 12- du contrat-type approuvé par le décret n° 2003-1295 du 26 décembre 2003 ; 3°) que la société Dominique Alligier faisait valoir que le délai de préavis de trois mois qui lui avait été accordé par la société Drôme express n'avait pas été suffisant pour lui permettre de réorganiser son activité, dans la mesure où parallèlement à la rupture de leurs relations commerciales établies depuis 23 ans, la société Drôme express lui avait proposé de soumissionner à un appel d'offres dont le temps qui y avait été consacré, pendant la durée du préavis, l'avait empêché de rechercher de nouveaux clients ; qu'en jugeant que la société Drôme express n'avait pas engagé sa responsabilité à l'occasion de la rupture des relations commerciales qui l'unissaient à la société Dominique Alligier, dans la mesure où elle avait respecté le délai de préavis prévu au contrat du 22 avril 2008, sans rechercher si, au regard des circonstances dans lesquelles ce préavis avait été exécuté, le délai de trois mois accordé par la société Dominique Alligier était suffisant pour permettre à cette dernière de réorganiser son activité, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil, ensemble l'article 8-II de la loi no 82-1153 du 30 décembre 1982 et l'article 12-2 du contrat-type approuvé par le décret n° 2003-1295 du 26 décembre 2003 ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'un contrat-type, institué sur le fondement de l'article 8 II de la loi d'orientation des transports intérieurs du 30 décembre 1982 (la LOTI), règle pour l'avenir, dès l'entrée en vigueur du décret qui l'établit, les rapports que les parties n'ont pas définis au contrat de transport qui les lie ;

Et attendu, en second lieu, que l'article L. 442-6, I, 5°, du Code de commerce ne s'applique pas à la rupture des relations commerciales de transports publics routiers de marchandises exécutés par des sous-traitants lorsque le contrat-cadre liant les parties se réfère expressément au contrat-type institué par la LOTI, qui prévoit en son article 12.2 la durée des préavis de rupture ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.