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Décisions

Cass. com., 29 septembre 2015, n° 13-25.043

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

EMC distribution (SAS)

Défendeur :

Ministre de l'Economie et des Finances

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Le Bras

Avocat général :

M. Debacq

Avocats :

SCP Piwnica, Molinié, SCP Meier-Bourdeau, Lécuyer

Cass. com. n° 13-25.043

29 septembre 2015

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 juillet 2013), que le ministre chargé de l'Economie (le ministre), reprochant à la société EMC distribution (la société EMC), centrale de référencement du groupe de distribution Casino, une pratique créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, résultant de deux clauses inscrites dans le contrat intitulé " Accord Commercial marque nationale 2009 " régissant les relations entre cette société et ses fournisseurs, a assigné celle-ci en nullité de ces clauses, en cessation des pratiques et en paiement d'une amende civile ; que le ministre a renoncé, en cours d'instance, à sa demande de nullité ;

Sur le premier moyen : - Attendu que la société EMC fait grief à l'arrêt de dire recevable l'action du ministre, de dire encore que la société EMC a tenté d'imposer à ses fournisseurs des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et les obligations des parties en insérant dans son contrat-type d'achat, intitulé " accord commercial marque nationale ", les clauses " retour des invendus " et " changement de tarifs et conditions ", de lui enjoindre de ne pas réintroduire " à l'avenir " ces clauses dans ses contrats-types conclus avec ses fournisseurs et de la condamner au paiement d'une amende civile alors, selon le moyen, que la recevabilité de l'action du ministre, prévue à l'article L. 442-6 III du Code de commerce, est subordonnée à l'information des parties au contrat litigieux ; que cette obligation d'information s'impose en tout état de cause, y compris lorsque le ministre ne demande que la cessation de la pratique incriminée et le paiement d'une amende civile dès lors que ces demandes impliquent nécessairement une appréciation de la licéité de la pratique mise en jeu dans les contrats conclus de nature à influer sur une éventuelle décision à venir sur les droits et obligations des parties aux contrats conclus ; qu'en jugeant néanmoins que la demande du ministre était recevable peu important qu'il n'ait pas informé les parties aux contrats, la cour d'appel a violé l'article 6 § I de la Convention européenne des droits de l'Homme, le principe de la liberté contractuelle et l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu qu'il résulte de la réserve d'interprétation émise par le Conseil constitutionnel dans sa décision 2011-126 QPC du 13 mai 2011 que c'est seulement lorsque l'action engagée par l'autorité publique tend à la nullité des conventions illicites, à la restitution des sommes indûment perçues et à la réparation des préjudices que ces pratiques ont causés que les parties au contrat doivent en être informées ; qu'ayant constaté que le ministre avait renoncé en cours d'instance à poursuivre l'annulation des clauses litigieuses, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que son action, qui ne tendait plus qu'à la cessation des pratiques et au prononcé d'une amende civile, était recevable ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen : - Attendu que la société EMC fait le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen : 1°) que si le ministre chargé de l'Economie peut, en application de l'article L. 442-6 III du Code de commerce, exercer l'action en responsabilité, prévue à l'article L. 442-6 I du même Code et demander, à l'occasion de cette action, que soit ordonnée la cessation des pratiques mentionnées, que soit constatée la nullité, pour toutes ces pratiques, des clauses ou contrats illicites, la répétition de l'indu, le prononcé d'une amende civile et la réparation des préjudices subis, ce texte ne lui confère aucune action, aucun droit d'agir, en dehors de tout contrat litigieux, aux fins d'obtenir préventivement la suppression de clauses estimées illicites dans un contrat-type proposé à la négociation entre professionnels ; que l'arrêt a constaté que le ministre chargé de l'Economie demandait la cessation de la pratique du distributeur consistant à faire figurer deux clauses, intitulées " Retour des invendus " et " Changement de tarifs et conditions ", dans ses contrats-types, demande " fondée sur la seule analyse des clauses des accords nationaux annuels proposés par la société EMC Distribution à ses fournisseurs " ; qu'en déclarant cette action recevable bien que le ministre ne dispose pas d'action préventive, la cour d'appel a ajouté aux dispositions de l'article L. 442-6 III du Code de commerce, en violation de ce texte ; 2°) qu'il est défendu au juge de statuer par voie générale et réglementaire sur les causes qui lui sont soumises ; qu'à supposer même que le ministre chargé de l'Economie dispose d'une action préventive lui permettant de demander la cessation de la pratique consistant à intégrer dans le contrat-type proposé par le distributeur à ses fournisseurs des clauses considérés comme illicites, la suppression, à la date où le juge a statué, des clauses litigieuses, dans les contrats proposés et encore en cours d'exécution, prive la demande préventive de tout objet ; que la cour d'appel a constaté, et le fait était constant, que la société EMC Distribution avait d'ores et déjà supprimé du contrat-type les dispositions critiquées à la date où elle a statué ; qu'en déclarant cependant recevable et en faisant droit à la demande du ministre tendant à ce qu'il soit enjoint cependant au distributeur de ne pas réintroduire à l'avenir les clauses litigieuses dans les contrats-types conclus avec ses fournisseurs, la cour d'appel a violé les articles 5 du Code civil, L. 442-6 II et L. 442-6 III du Code de commerce et 12 du Code de procédure civile ;

Mais attendu que l'article L. 442-6 du Code de commerce, qui prohibe le fait de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, dispose que le ministre peut demander à la juridiction saisie d'ordonner la cessation des pratiques illicites ; qu'ayant relevé que la demande de cessation des pratiques formée par ce dernier était fondée sur l'analyse de clauses précises du contrat intitulé " Accord commercial marque nationale 2009 " conclu par la société EMC avec ses fournisseurs, la cour d'appel, sans encourir le grief de la seconde branche, a fait l'exacte application de ce texte en déclarant la demande recevable en ce qu'elle tendait à la suppression pour l'avenir de telles clauses, peu important qu'elles aient d'ores et déjà été supprimées par la société EMC ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le quatrième moyen : - Attendu que la société EMC fait encore le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen : 1°) que l'article L. 442-6 I 2° du Code de commerce prohibe le fait de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire à des obligations créant un " déséquilibre significatif " dans les droits et obligations des parties ; que l'article L. 442-6 II du Code de commerce énonce limitativement les clauses contractuelles qui sont nulles per se ; que le législateur a refusé de mettre au nombre de ces clauses, la clause dite de " retour d'invendus " prévoyant la reprise, à leurs frais, par les fournisseurs des produits invendus en fin de saison ou d'exercice ; qu'en se fondant, pour dire que la clause intitulée " Retour des invendus " inscrite dans les contrats-types proposés en 2009 par le distributeur, créait un déséquilibre significatif des droits et obligations des parties, exclusivement sur les termes de cette clause, la cour d'appel, qui a retenu l'illicéité de la clause en elle-même, sans considération des droits et obligations des parties tels que résultant des contrats conclus, a violé les dispositions des articles L. 442-6 I 2° et L. 442-6 II du Code de commerce ; 2°) que l'article L. 442-6 I 2° du Code de commerce prohibe le fait de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire à des obligations créant un " déséquilibre significatif " dans les droits et obligations des parties ; que, dans ses conclusions devant la cour d'appel, la société EMC Distribution faisait valoir l'absence d'un tel déséquilibre dans la mesure où la clause de reprise d'invendus n'était applicable, selon ses termes, qu'aux seuls produits encore en stock en fin d'année, ou en fin de saison pour les produits saisonniers, soit une très faible proportion des produits vendus et où la reprise des produits par le fournisseur était de son intérêt, lui assurant un moyen simple et peu coûteux de convaincre le distributeur d'assurer l'exposition maximale de ses produits au détriment de produits concurrents que le distributeur aurait pu mieux vendre ; qu'en se bornant, pour dire que la clause litigieuse créait un " déséquilibre significatif " entre les droits et obligations des parties, à affirmer de manière générale que " le distributeur détient presque tous les leviers lui permettant, à ce stade, d'agir sur les ventes ", que " le fournisseur qui a vendu ses produits ne dispose d'aucune visibilité sur les quantités invendues qui lui seront retournées par le distributeur et ne peut agir pour favoriser la revente des produits qu'il a déjà cédés au fournisseur ", que " la clause de retour des invendus met à la charge des fournisseurs une obligation sans qu'aucune contrepartie ne leur soit accordée ", qu' " une fois le produit livré et donc devenu la propriété du distributeur, le fournisseur perd toute maîtrise des conditions de vente et de promotion " et que " le fait que cette clause permette d'inciter le distributeur à continuer de stocker jusqu'au dernier jour de l'année ou de la saison de vente, permettant ainsi au fournisseur de bénéficier de commandes et de l'exposition de leurs produits en fin d'exercice, est un intérêt mineur qui ne constitue pas une contrepartie sérieuse à la charge que représente l'obligation de reprise des invendus ", sans rechercher concrètement, au vu des contrats conclus, quelle était la part des produits concernés par l'obligation, le coût pour le fournisseur de reprise des invendus et la perte de marge pour le distributeur n'ayant pas proposé aux consommateurs, en lieu et place des produits invendus, de produits concurrents, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard du texte susvisé ; 3°) qu'il appartient au ministre, qui entend voir constater et sanctionner l'existence d'un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, d'établir, au regard de l'ensemble de ces droits et obligations, tels qu'issus du contrat, l'existence de ce déséquilibre ; qu'en affirmant, pour dire que la société EMC Distribution avait, par l'insertion dans son contrat-type d'achat la clause intitulée " Retour des invendus ", tenté d'imposer à ses fournisseurs des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, que la société n'invoque, et encore moins ne démontre, d'autres avantages qui auraient permis d'apporter une compensation réelle à la charge de reprise des invendus, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, en violation des articles 1315 du Code civil et L. 442-6 I 2° du Code de commerce ; 4°) que l'article L. 442-6 I 2° du Code de commerce prohibe le fait de " soumettre ou de tenter de soumettre " un partenaire à une obligation créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ; qu'il résulte de ce texte que l'infraction comporte deux éléments constitutifs distincts, d'une part, l'existence de pratique ou de clause contractuelle créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties et, d'autre part, le fait par une partie d'imposer, ou de tenter d'imposer, à l'autre partie au contrat ce déséquilibre ; qu'en affirmant, pour dire que la société EMC Distribution avait tenté d'imposer à ses fournisseurs la clause intitulée " retour des invendus ", que " le fait pour un distributeur d'inscrire une clause dans le contrat-type proposé à ses fournisseurs donne à cette clause la portée d'un principe auquel ces derniers ne peuvent déroger qu'au terme d'une négociation, ce qui n'est dans beaucoup de cas pas à leur portée ", la cour d'appel, qui a exclu, contra legem et par principe, l'existence d'une négociation entre les parties et a déduit le fait de " soumettre ou tenter de soumettre " le partenaire commercial de la seule existence, dans le contrat-type proposé, de la clause, dont elle a estimé qu'elle créait un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, a violé l'article L. 442-6 I 2° du Code de commerce ; 5°) qu'il appartient au ministre, qui entend voir constater et sanctionner l'existence d'une pratique abusive et déloyale, constituée par le fait, pour une partie à la relation commerciale de soumettre ou tenter de soumettre son partenaire à une obligation créant une déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, d'établir l'existence de la contrainte ou tentative de contrainte de la part d'une partie sur son cocontractant ; qu'en énonçant, pour dire que la société EMC Distribution avait tenté d'imposer à ses fournisseurs la clause intitulée " retour des invendus ", que la société n'apportait pas la preuve que les fournisseurs qui voulaient supprimer cette clause pouvaient le faire facilement et qu'il n'est pas nécessaire pour l'administration de rapporter la preuve de manœuvres spécifiques à ce sujet, la cour d'appel a encore interverti la charge de la preuve, en violation des articles 1315 du Code civil et L. 442-6 II du Code de commerce ;

Mais attendu que l'arrêt relève que la société EMC n'invoque pas des avantages qui auraient permis d'apporter une compensation réelle à la charge de reprise des invendus ; qu'il retient, au vu de contrats conclus avec des fournisseurs de produits alimentaires, qu'il n'est pas démontré que la clause ne s'appliquerait pas à ces produits ; qu'il retient encore que la société EMC n'apporte pas la preuve que des exceptions à l'obligation que fait peser la clause de retour des invendus sur les fournisseurs ont pu être négociées par certains d'entre eux ; qu'il retient enfin que le seul accord avec le fournisseur de jouets LF France est insuffisant, à lui seul, à établir que la société EMC ferait facilement droit à une demande de suppression de la part de ses autres fournisseurs ; qu'en cet état, la cour d'appel, qui n'a pas inversé la charge de la preuve, a, procédant à une appréciation concrète et globale des contrats en cause, caractérisé le déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, résultant de la clause " retour des invendus " ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le cinquième moyen : - Attendu que la société EMC fait le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen : 1°) que l'article L. 442-6 I 2° du Code de commerce prohibe le fait de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire à des obligations créant un " déséquilibre significatif " dans les droits et obligations des parties ; qu'il résulte de ce texte que le " déséquilibre significatif " doit s'apprécier, in concreto, en prenant en compte l'ensemble des " droits et obligations des parties ", tel qu'il ressort du contrat, pris en son ensemble et au regard du " partenaire " avec lequel il est conclu ; qu'en se bornant, pour dire qu'il résultait de la clause intitulée " Changement de tarifs et conditions " un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, figurant au contrat-type proposé par le distributeur à ses fournisseurs, à analyser les termes de cette clause, sans rechercher au regard des contrats conclus, des parties à ces contrats et des autres stipulations contractuelles, s'il existait un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties à ces contrats, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ; 2°) qu'il appartient au ministre, qui entend voir constater et sanctionner l'existence d'un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, d'établir, au regard de l'ensemble des droits et obligations des parties, tels qu'issus du contrat, l'existence de ce déséquilibre ; qu'en affirmant, pour dire que la société EMC Distribution avait tenté, par l'insertion dans son contrat-type d'achat la clause intitulée " Changement de tarifs et conditions ", d'imposer à ses fournisseurs des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, que la société ne démontre pas que la clause serait nécessaire à l'équilibre de la convention ou que ce déséquilibre serait compensé par d'autres dispositions du contrat, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, en violation des articles 1315 du Code civil et L. 442-6 I 2° du Code de commerce ; 3°) que l'article L. 442-6 I 2° du Code de commerce prohibe le fait de " soumettre ou de tenter de soumettre " un partenaire à une obligation créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ; qu'il résulte de ce texte que l'infraction comporte deux éléments constitutifs distincts, d'une part, l'existence de pratique ou de clause contractuelle créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties et, d'autre part, le fait, pour une partie au contrat de soumettre, ou tenter de soumettre, son cocontractant à ce déséquilibre ; qu'en affirmant, pour dire que la société EMC Distribution avait tenté d'imposer à ses fournisseurs la clause intitulée " Changement de tarifs et conditions ", que " le fait pour une enseigne de la grande distribution d'inscrire une clause dans le contrat-type proposé à ses fournisseurs donne à cette clause la portée d'un principe auquel ces derniers ne peuvent déroger qu'au terme d'une négociation, ce qui n'est dans beaucoup de cas pas à leur portée ", la cour d'appel, qui a exclu, contra legem et par principe, l'existence d'une négociation entre les parties et a déduit le fait de " soumettre ou tenter de soumettre " le partenaire commercial de la seule existence de la clause, dont elle a estimé qu'elle créait un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, a violé l'article L. 442-6 I 2° du Code de commerce ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt relève que la société EMC ne démontre pas que la clause "changement de tarifs et conditions" est nécessaire à l'équilibre de la convention ou que ce déséquilibre est compensé par d'autres dispositions du contrat ; qu'il relève encore que la clause de diminution des tarifs ne fait naître aucune obligation pour la société EMC de répercuter les baisses de tarifs ainsi obtenues sur ses prix au consommateur ; qu'en cet état, la cour d'appel, qui n'a pas inversé la charge de la preuve, a, procédant à une appréciation concrète et globale des contrats en cause, caractérisé le déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, résultant de la clause " changement de tarifs et conditions " ;

Et attendu, en second lieu, qu'ayant retenu, après avoir constaté que la clause figurait dans le contrat intitulé " Accord Commercial Marque Nationale 2009 ", que le fait pour un distributeur d'inscrire une clause qui instaure un déséquilibre manifeste dans les droits et obligations des parties dans un tel contrat, donne à cette clause la portée d'un principe auquel les fournisseurs ne peuvent déroger qu'aux termes d'une négociation qui n'est, dans beaucoup de cas, pas à leur portée, la cour d'appel a déduit à bon droit de l'insertion de la clause litigieuse dans un contrat-type que la société EMC a tenté d'imposer à ses fournisseurs des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le troisième moyen : - Attendu que la société EMC fait encore le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen : 1°) qu'aux termes de l'article L. 442-6 I 2° du Code de commerce, engage la responsabilité de son auteur, le fait " de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties " ; qu'il résulte de ce texte que le " déséquilibre significatif " doit s'apprécier, in concreto, en prenant en compte l'ensemble des " droits et obligations des parties ", tel qu'il ressort du contrat, pris dans sa globalité, et au regard du " partenaire " avec lequel il est conclu ; qu'en énonçant cependant, pour dire que la société EMC Distribution avait tenté d'imposer à ses fournisseurs des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties en insérant dans son contrat-type d'achat les clauses intitulées " Retour des invendus " et " Changement de tarifs et conditions ", que ce texte ne saurait toutefois, par principe, interdire une appréhension plus globale d'un ensemble de situations lorsque, comme c'est le cas en l'espèce, il est dénoncé un déséquilibre causé par certaines clauses d'un contrat-type qui s'adresse indifféremment à des fournisseurs, dont certains sont davantage en situation de négocier que d'autres et quelles que soient les marchandises concernées, la cour d'appel a violé les dispositions du texte susvisé, ensemble et par fausse application celles de l'article L. 442-6 II du même Code ; 2°) que toute infraction, susceptible d'une sanction ayant le caractère de punition, doit être définie dans des termes suffisamment clairs et précis ; que le Conseil constitutionnel a décidé, le 13 janvier 2011, que la définition des pratiques prohibées par l'article L. 442-6 I 2° du Code de commerce était suffisamment claire et précise dès lors que le législateur s'est référé à la notion juridique de " déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties " qui est une notion juridique déjà connue, puisque prévue à l'article L. 132-1 du Code de la consommation et que cette notion a déjà fait l'objet de nombreuses précisions par la jurisprudence ; qu'il résulte tant des dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la consommation que des décisions juridictionnelles rendues sur le fondement de ce texte, que la notion juridique de " déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties " est une notion prenant en compte l'ensemble des " droits et obligations des parties ", tel qu'il ressort du contrat, pris en son ensemble et au regard du " partenaire " avec lequel il est conclu ; qu'en retenant néanmoins, pour dire que la société EMC Distribution avait tenté d'imposer à ses fournisseurs des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties en insérant dans son contrat-type d'achat les clauses intitulées " Retour des invendus " et " Changement de tarifs et conditions ", que le juge peut apprécier l'existence d'un " déséquilibre significatif entre les droits et parties " au seul vu d'une clause figurant dans le contrat-type proposé aux fournisseurs, la cour d'appel a violé les articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme et l'article L. 442-6 I 2° du Code de commerce ; 3°) qu'il appartient au ministre, qui entend voir constater et sanctionner l'existence d'un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, d'établir, au regard de l'ensemble des droits et obligations des parties, tels qu'issus du contrat, l'existence d'un déséquilibre significatif ; qu'en affirmant, pour dire que la société EMC Distribution avait tenté d'imposer à ses fournisseurs des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties en insérant dans son contrat-type d'achat les clauses intitulées " Retour des invendus " et " Changement de tarifs et conditions ", que s'il peut être admis que le déséquilibre instauré par une clause puisse être corrigé par l'effet d'une autre, encore faut-il que cette situation de rééquilibrage soit démontrée, la cour d'appel a interverti la charge de la preuve, en violation des articles 1315 du Code civil et L. 442-6 I 2° du Code de commerce ;

Mais attendu que le rejet des quatrième et cinquième moyens rend inopérant le moyen, en ce qu'il critique les motifs par lesquels la cour d'appel s'est limitée à décrire en termes généraux la méthode appropriée d'appréciation du déséquilibre significatif et dont elle a fait application dans son examen, in concreto, des clauses litigieuses, en prenant en compte l'ensemble des droits et obligations des parties, tel qu'il ressort du contrat, pris dans sa globalité ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.