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Décisions

CA Douai, 2e ch. sect. 1, 8 octobre 2015, n° 14-07817

DOUAI

Ordonnance

PARTIES

Demandeur :

Société Coopérative d'Approvisionnement de l'Ile-de-France (SA)

Défendeur :

Cachan Distribution (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Delattre

Avocats :

Mes Deleforge, Parleani, Janssens, Congos, Rota, Pihery

T. com. Lille, du 6 nov. 2014

6 novembre 2014

Vu le jugement contradictoire du 6 novembre 2014 du Tribunal de commerce de Lille Métropole qui a dit que les deux assignations diligentées les 29 décembre 2011 et 22 mai 2012 par SCADIF à l'encontre de Cachandis en paiement de marchandises et de deux pénalités ne sont pas prescrites, dit que l'article 11 des statuts de la SCADIF a été ratifié par Cachandis et lui est opposable, dit que le procès-verbal du conseil d'administration du 4 juillet 2002 respecte bien les prescriptions de l'article R. 225-23 du Code de commerce et que ses décisions s'appliquent à Cachandis, dit que l'article 11 des statuts de la SCADIF n'est pas contraire aux dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce et est opposable à Cachandis, débouté cette dernière de sa demande de production par la SCADIF de ses accords fournisseurs ainsi que celle d'un état des marges arrières perçues postérieurement au 31 décembre 2003, condamné Cachandis à payer à la SCADIF les sommes de 589 744,64 euro TTC au titre des factures de marchandises impayées avec intérêts au taux légal à compter du 29 décembre 2011, 615 383,89 euro TTC au titre de la première pénalité contractuelle à payer par compensation avec le compte de reversement détenu par la SCADIF au profit de Cachandis, 360 301 euro TTC au titre de la deuxième pénalité contractuelle avec intérêts au taux légal à compter du 22 mai 2012, 20 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'à supporter la charge des dépens ;

Vu l'appel interjeté le 24 décembre 2014 par la société anonyme Cachan Distribution au sigle Cachandis;

Vu les conclusions au fond déposées pour cette dernière les 23 mars 2015 et 15 juillet 2015 ;

Vu les conclusions d'incident déposées le 21 août 2015 pour la société anonyme coopérative Société Coopérative d'Approvisionnement de l'Ile-de-France, aux termes desquelles ils demandent au conseiller de la mise en état de dire irrecevable l'appel interjeté par la société Cachandis devant la Cour d'appel de Douai, la Cour d'appel de Paris ayant seule le pouvoir juridictionnel d'examiner les appels interjetés à l'encontre des jugements rendus par les juridictions spécialisées visées par l'annexe 4-2 de l'article R. 420-3 du Code de commerce, de débouter la société Cachandis de ses demandes et de la condamner à lui payer la somme de 15 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile dont recouvrement au profit de la SCP Deleforge & Franchi, aux motifs que la société Cachandis a invoqué en première instance les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce, que le jugement dont appel a ainsi été rendu par le Tribunal de commerce de Lille en tant que juridiction spécialisée visée à l'article R. 420-3 du Code de commerce, qu'en vertu de l'article R. 420-5 du Code de commerce seule la Cour d'appel de Paris peut connaître de l'appel interjeté contre le jugement de cette juridiction spécialisée, qu'il s'agit de dispositions d'ordre public, que la société Cachandis savait qu'il fallait saisir la Cour d'appel de Paris et non de Douai, qu'elle l'a néanmoins contrainte à régulariser une procédure devant la Cour d'appel de Douai tout en reconnaissant la compétence de la Cour d'appel de Paris, ce qui justifie l'allocation d'une somme importante au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Vu les conclusions d'incident en réponse déposées le 10 septembre 2015 pour la société Cachandis, aux termes desquelles il est demandé au conseiller de la mise en état de la dire recevable et bien fondée, de constater l'erreur de l'huissier instrumentaire mandaté par la coopérative SCADIF en ce que son procès-verbal de signification mentionnait la compétence de la Cour d'appel de Douai, de dire que le jugement déféré s'étant prononcé sur le fondement de l'article L. 420-1 du Code de commerce relatif au droit des ententes anti-concurrentielles, la Cour d'appel de Paris a désormais un pouvoir juridictionnel exclusif pour trancher l'ensemble du présent litige, de dire que l'ensemble des demandes formulées par la coopérative SCADIF dans ses conclusions au fond signifiées le 21 mai 2015 devant la Cour d'appel de Douai ne peuvent être tranchées par cette dernière, de prendre acte que la société coopérative SCADIF se range à la thèse de la société Cachan Distribution consistant à voir l'ensemble du litige tranché par la Cour d'appel de Paris, de débouter la société coopérative SCADIF de ses demandes accessoires au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, de la condamner à lui verser la somme de 5 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'à supporter les dépens, aux motifs qu'en vertu des dispositions de l'article R. 420-5 du Code de commerce, la Cour d'appel de Paris est seule compétente pour statuer sur le présent litige, dès lors que les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce sont invoquées, que les demandes importantes au titre des frais irrépétibles sont injustifiées dès lors que l'acte de signification de l'huissier mandaté par la coopérative SCADIF mentionnait un recours possible devant la Cour d'appel de Douai, qu'elle a saisi cette dernière parce que le litige porte également sur une créance de marchandises impayées et afin de préserver ses droits, que néanmoins cette créance au titre de marchandises impayées constitue une demande connexe à celle relative aux pénalités sollicitées sur le fondement de l'article 11 des statuts qu'il est demandé d'apprécier au regard de l'article L. 420-1 du Code de commerce, ce qui justifie le renvoi devant la juridiction spécialisée ;

Référence étant faite au jugement entrepris pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, il suffit de rappeler que le 24 janvier 2002 la société Cachandis, qui exploitait un supermarché sous l'enseigne Leclerc à Cachan (94), notifiait à la coopérative SCADIF son retrait, afin d'exploiter à compter du 6 mars 2002 un supermarché sous l'enseigne Atac, que par actes d'huissier de justice des 29 décembre 2011 et 22 mai 2012, la coopérative SCADIF faisait assigner la société Cachandis devant le Tribunal de commerce de Lille Métropole aux fins d'obtenir sa condamnation à lui payer les sommes de 1 227 317, 53 euro TTC et 360 301 euro en principal au titre de marchandises impayées et pénalités stipulées à l'article 11 des statuts de la coopérative SCADIF, la société Cachandis prétendant quant à elle être créancière d'une somme importante au titre de ristournes et avantages commerciaux, procédure qui donnait lieu au jugement déféré.

SUR CE

En vertu des articles L. 420-7 et R. 420-3 du Code de commerce, les litiges relatifs à l'application des règles contenues dans les articles L. 420-1 à L. 420-5 sont attribués à des juridictions spécialisées dont le Tribunal de commerce de Lille pour les ressorts des Cours d'appel d'Amiens, de Douai, de Reims et de Rouen ;

En vertu de l'article R. 420-5 du Code de commerce, seule la Cour d'appel de Paris est compétente pour connaître des décisions rendues par ces juridictions ;

Il résulte du jugement déféré et des conclusions au fond déposées par la société Cachandis devant la cour d'appel de céans, que cette dernière invoque l'application des dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce ;

Les premiers juges ont estimé que l'article 11 des statuts de la SCADIF n'était pas contraire aux dispositions de l'article L. 420-1 du commerce, et ont, en application de cet article, condamné la société Cachandis à payer des pénalités à hauteur de 615 384 euro et 360 301 euro ;

Dès lors que la société Cachandis revendique toujours l'application de l'article L. 420-1 du Code de commerce, et que le jugement déféré a statué sur l'application de ces dispositions, seule la Cour d'appel de Paris est compétente pour statuer sur cette demande ;

La coopérative SCADIF sollicite également la condamnation de la société Cachandis au titre de marchandises impayées, estimant que cette dernière n'a pas respecté le contrat qui les unissait ;

Il s'agit d'une demande connexe à celle formulée au titre des pénalités prévues par l'article 11 des statuts de la coopérative SCADIF, de sorte que pour une bonne administration de la justice, il n'est pas opportun de procéder à une disjonction, qui n'est d'ailleurs pas sollicitée ;

L'invocation par les parties des dispositions des articles L. 420-1, L. 420-7, R. 420-3 et R. 420-5 du Code de commerce, pour opposer la compétence de la Cour d'appel de Paris constitue une fin de non-recevoir pour défaut de pouvoir juridictionnel de la juridiction saisie ;

Dans ces conditions, la demande de la société Cachandis visant à ce que la cour de céans constate l'erreur de l'huissier de justice mandaté par la coopérative SCADIF en ce que son procès-verbal de signification mentionnait la compétence de la Cour d'appel de Douai, sera déclarée irrecevable à l'instar de sa demande visant à la déclarer recevable et bien fondée ;

Il en est de même s'agissant de la demande de la société Cachandis visant à ce que la cour de céans " prenne acte ", une telle demande n'ayant en outre aucun caractère juridictionnel ;

En conséquence, il convient de déclarer irrecevable l'appel interjeté par la société Cachandis devant la Cour d'appel de Douai ;

La société Cachandis, dont l'appel est déclaré irrecevable sera condamnée aux dépens et déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la société SCADIF les frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; il lui sera alloué la somme de 500 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs, Déclare recevable et bien fondée la demande incidente de la Société Coopérative d'Approvisionnement de l'Ile-de-France, Déclare irrecevable l'appel interjeté le 24 décembre 2014 par la société Cachan Distribution, En conséquence, Déclare irrecevables les demandes visant à " constater ", et à " prendre acte " de la société Cachan Distribution, Déboute la société Cachan Distribution de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la société Cachan Distribution, à payer à la Société Coopérative d'Approvisionnement de l'Ile-de-France la somme de 500 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la société Cachan Distribution aux dépens de la procédure d'appel, Autorise, si elle en a fait l'avance sans en avoir reçu provision, la SCP Deleforge & Franchi, Avocats, à recouvrer les dépens d'appel conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.