CA Lyon, 1re ch. civ. A, 8 octobre 2015, n° 14-01826
LYON
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Cherpeau
Défendeur :
Pyragric Industrie (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Gaget
Conseillers :
MM. Martin, Semeriva
Avocats :
Selarl Forestier-Lelievre, SCP Jallot, Me Tayoro
Vu le jugement en date du 29 octobre 2013 du Tribunal de commerce de Lyon qui condamne la société Pyragric Industrie à verser différentes sommes au titre de la rupture du contrat commercial de Miguel Cherpeau et qui condamne ce dernier à verser la somme de 1 698,32 euro à la société Pyragric Industrie aux motifs qu'il reconnaît avoir directement encaissé cette somme sur l'affaire de la Mairie de Prunay ;
Vu l'appel régulièrement formé par Miguel Cherpeau le 20 janvier 2014 ;
Vu les conclusions en date du 24 septembre 2014 par lesquelles Miguel Cherpeau tend à la confirmation du jugement en ce qu'il a considéré que la rupture des trois contrats d'agent commercial est imputable à la société Pyragric Industrie et tend à sa réformation en ce qu'il a rejeté ses autres demandes aux motifs qu'au titre de la rupture du contrat imputable à la société Pyragric Industrie, cette dernière lui doit différentes sommes au titre des stipulations contractuelles du mandat commercial ;
Vu ces mêmes conclusions par lesquelles Miguel Cherpeau demande à la cour de condamner la société Pyragric Industrie à lui verser les sommes suivantes :
- 1 112,28 euro correspondant aux frais de transport, d'accessoires et de bandes-son de 2006 à 2010,
- 2 063,16 euro correspondant aux commissions Master Tech et Armurerie Janny,
- 1 094, 44 euro correspondant aux frais de transport pour le retour du matériel de tir,
- 41 537, 86 euro au titre de l'indemnité liée à la rupture du contrat assortie du taux légal à compter de l'introduction de l'instance devant le tribunal de commerce de Lyon,
- 3 500 euro au titre du préjudice moral,
- 20 768,93 euro au titre de la clause de non-concurrence
- 2 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile;
et demande à la cour de juger que Miguel Cherpeau reconnaît devoir la somme de 1 698,32 euro à la société Pyragric Industrie et d'ordonner la compensation des sommes dues réciproquement ;
Vu les conclusions en date du 28 mai 2014 par lesquelles la société Pyragric Industrie tend à la réformation du jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer différentes sommes à Miguel Cherpeau au titre de la rupture du mandat commercial aux motifs que la société Pyragric Industrie n'est pas à l'origine de la rupture du contrat et tend à la confirmation du jugement attaqué en ce qu'il a fait droit à sa demande reconventionnelle ;
Vu les mêmes conclusions par lesquelles la société Pyragric Industrie demande à la cour de condamner Miguel Cherpeau à lui verser les sommes suivantes :
- 1 849 euro au titre de la somme indûment perçue au titre de l'opération commune de Prunay,
- 5 000 euro pour comportement déloyal,
- 2 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Vu l'ordonnance de clôture en date du 14 novembre 2014.
DECISION
1. Le 29 septembre 2001, Miguel Cherpeau et la société Pyragric Industrie Industrie ont conclu trois contrats d'agent commercial pour la promotion et la vente de feux d'artifice de grand spectacle pour les départements 36, 37 et 41.
2. A partir de l'année 2003, Miguel Cherpeau a rencontré des problèmes de stockage des produits qu'il commercialisait et en a informé la société Pyragric Industrie. En l'absence de réponse de cette dernière, Miguel Cherpeau a mis fin à ses mandats par lettre en date du 31 mai 2010 avec effet au 1er juillet 2010. A la demande de la société Pyragric Industrie, Miguel Cherpeau a accepté de poursuivre son contrat jusqu'au 15 juillet 2010.
3. Miguel Cherpeau considère que la société Pyragric Industrie n'a pas respecté ses engagements contractuels et par lettre du 2 novembre 2010, il a réclamé à cette société le paiement de la somme de 49 364,49 euro au titre de l'indemnité consécutive à l'arrêt du contrat. Dans le refus de la société Pyragric Industrie, Miguel Cherpeau l'a assignée.
Sur la cause de la rupture des contrats de mandat commercial
4. Miguel Cherpeau qui a demandé à la société Pyragric Industrie de mettre fin à ses contrats de mandat, affirme que la rupture des mandats trouve son origine dans le comportement fautif de la société Pyragric Industrie qui n'a pas répondu à ses demandes, particulièrement concernant le stockage des feux d'artifices, et de ce fait il soutient qu'il est en droit d'obtenir des indemnités de rupture des mandats commerciaux. De son côté, la société Pyragric Industrie soutient que la rupture des mandats ne relève que de la volonté de Miguel Cherpeau à y mettre fin et que dans cette mesure, il ne peut réclamer d'indemnité pour la rupture des mandats.
5. L'article 11 des contrats d'agent commercial stipule que l'agent commercial "entreposera à ses frais le matériel nécessaire à la réalisation des tirs de feux d'artifice grand spectacle". Cette clause est interprétée différemment par les parties. Pour la société Pyragric Industrie, cette clause oblige le mandataire à stocker lui-même les feux d'artifice, ce que conteste Miguel Cherpeau.
6. Comme l'a retenu à bon droit le premier juge, l'agent commercial avait la seule charge de stocker le matériel permettant la réalisation des tirs de feux d'artifice et non les feux d'artifice eux-mêmes qui doivent être stockés selon une réglementation particulière. Le stockage des feux d'artifice incombait à la société Pyragric Industrie et non à Miguel Cherpeau. La société Pyragric Industrie reconnaît d'ailleurs dans ses propres écritures, en page 7, qu'il existe une différence entre le matériel permettant la réalisation des tirs de feux d'artifice et les feux d'artifice eux-mêmes.
7. Les difficultés de stockage des feux d'artifice ont rendu impossible la poursuite de l'activité de Miguel Cherpeau comme le prévoit l'article L. 134-13 du Code de commerce. C'est bien la raison déterminante qui l'a poussé à mettre fin à ses mandats. De ce fait, la lettre de Miguel Cherpeau doit s'analyser comme une cessation à l'initiative de l'agent justifiée par des circonstances imputables au mandant, ici Pyragric Industrie.
8. En conséquence, la réparation du préjudice subi par l'agent commercial en cas de cessation des mandats, prévue à l'article L. 134-2 du Code de commerce est bien due par la société Pyragric Industrie à Miguel Cherpeau. La confirmation du jugement s'impose sur ce point.
Sur la réparation du préjudice subi par Miguel Cherpeau du fait de la rupture des mandats
9. Miguel Cherpeau justifie du montant des chiffres d'affaires pour les années 2008 et 2009. Celui-ci s'élèvent respectivement à la somme de 67 168 euro pour 2008 et 75 167 euro pour 2009, soit une moyenne de 71 167 euro.
10. Comme l'a retenu à bon droit le premier juge, la commission d'agent commercial de Miguel Cherpeau était de 29 %, 20 % concernant les frais engagés pour le démarrage et la réalisation des feux et 9 % pour les commissions d'agent. Dans le cadre de l'indemnisation, seule la commission d'agent peut être retenue puisque l'agent n'engage pas de frais de démarrage et de réalisation de feux d'artifice. Il convient d'accorder à Miguel Cherpeau 2 années de commission, soit 9 % de 71 167 euro, soit 6 405,03 euro fois 2, soit 12 810 euro. La société Pyragric Industrie est donc condamnée à verser la somme de 12 810 euro à Miguel Cherpeau à ce titre. La confirmation du jugement s'impose sur ce point.
11. S'agissant de la clause de non-concurrence, la rupture du contrat étant imputable à la société Pyragric Industrie, la cour constate que Miguel Cherpeau a perdu la possibilité d'exercer son activité pendant la période d'application de celle-ci, par la faute de la société Pyragric Industrie. La clause contractuelle prévoit une durée de deux années. Il convient donc d'accorder à Miguel Cherpeau la somme de deux années de commissions, soit la somme préalablement calculée de 12 810 euro à ce titre. Le jugement doit être réformé sur ce point.
12. Miguel Cherpeau ne justifie pas de la réalité du préjudice moral subi, de ce fait, cette demande mal fondée est rejetée.
Sur les demandes de frais de transport et des autres commissions
13. Miguel Cherpeau fait état de divers frais qui seraient dûs par la société Pyragric Industrie au titre de son mandat : 1 112,28 euro correspondant à des frais de transport, d'accessoires et de bande-son de 2006 à 2010, 2 063,16 euro correspondant aux commission Master Tech et Armurerie Janny et 1 094,44 euro correspondant aux frais de transport pour le retour du matériel de tir.
14. Concernant d'abord les frais de transports d'accessoires et de bande-son, il convient de retenir l'analyse du premier juge qui a justement relevé que ces frais ont été déduits du montant des ventes et non des commissions. De ce fait, il convient d'accorder à Miguel Cherpeau la somme de 29 % des 930 euro déduits à tort par Pyragric Industrie sur le chiffre d'affaire réalisé par l'agent commercial. La cour condamne la société Pyragric Industrie à verser la somme de 930 euro à Miguel Cherpeau à ce titre.
15. Concernant les commissions Master tech et Armurerie Janny ensuite, c'est à bon droit que le tribunal a retenu que conformément à l'article 8 du contrat commercial qui reste valable malgré la rupture, le droit à commission n'est acquis par l'agent qu'après paiement du mandant par le client. La société Pyragric Industrie justifie avoir engagé des contentieux à l'encontre de ces deux clients dont seulement un s'est partiellement acquitté de sa dette, pour un montant de 800 euro TTC soit 668,89 euro HT. Il convient donc d'accorder à Miguel Cherpeau la somme de 159,14 euro correspondant à la commission de ce dernier de 29 % sur la somme de 668,89 euro, déduction faite des frais de recouvrement. La cour condamne donc la société Pyragric Industrie à verser la somme de 159,14 euro à Miguel Cherpeau à ce titre.
16. Concernant les frais de retour du matériel, c'est encore à bon droit que le jugement a fait usage de l'article 17 du contrat d'agent commercial qui reste valable malgré la rupture et qui prévoit que le mandataire restitue à ses frais le matériel. De plus, Miguel Cherpeau ne justifie pas de ce montant. Cette demande mal fondée est rejetée. Le jugement doit être confirmé sur ces trois points.
Sur la demande reconventionnelle de la société Pyragric Industrie
17. Dans le dossier Mairie de Prunay, Miguel Cherpeau reconnaît avoir encaissé directement les fonds versé par le client sans en informer Pyragric Industrie et sans restituer ce montant. Miguel Cherpeau reconnaît devoir la somme de 1 698,32 euro. La société Pyragric Industrie réclame de son côté la somme de 1 849 euro à ce titre.
18. La cour constate que le montant total du paiement de la commune de Prunay n'est pas contesté et s'élève à la somme 2 392 euro. Déduction faite de la commission de 29 % de Miguel Cherpeau, la somme due par ce dernier à la société Pyragric Industrie est bien de 1 698,32 euro. Miguel Cherpeau est donc condamné à verser la somme de 1 698,32 euro à la société Pyragric Industrie à ce titre. La confirmation du jugement s'impose sur ce point.
19. La société Pyragric Industrie demande à la cour de condamner Miguel Cherpeau à lui verser la somme de 5 000 euro au titre de son comportement déloyal. Mais la société Pyragric Industrie ne rapporte pas la preuve de la déloyauté du comportement de Miguel Cherpeau dans ce paiement indu. Cette demande mal fondée est rejetée.
20. La cour confirme la compensation des créances réciproques.
21. L'équité commande d'allouer la somme de 2 000 euro à Miguel Cherpeau au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
22. La société Pyragric Industrie qui perd en appel est condamnée aux dépens de cette procédure.
Par ces motifs LA COUR, Confirme le jugement du tribunal de commerce de Lyon en date du 29 octobre 2013 en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a limité le montant de l'indemnisation au titre de la clause de non-concurrence à la somme de 6 405 euro, Statuant à nouveau sur ce point, Condamne la société Pyragric Industrie à verser la somme de 12 810 euro à Miguel Cherpeau au titre de la clause de non-concurrence, Y ajoutant, Condamne la société Pyragric Industrie à verser la somme de 2 000 euro à Miguel Cherpeau au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la société Pyragric Industrie aux dépens de l'appel, Autorise les mandataires des parties qui en ont fait la demande à les recouvrer aux formes et aux conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.