CA Rennes, 3e ch. com., 3 novembre 2015, n° 13-07672
RENNES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Esthétique Bretagne (Sté)
Défendeur :
Alésia Minceur (SARL), Poligone et Associés (SARL), Groupe Excel-Cabinet LPO (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Poumarède
Conseillers :
Mmes André, Gueroult
Avocats :
Mes Aouizerate, Demidoff, Brebion, Rolland, Soubeille, Amoyel Viquelin, Delacourt
I - EXPOSE DU LITIGE
Le 24 juillet 2011, M. G. s'est inscrit sur le site " Franchise Direct.fr " pour fournir une activité professionnelle à son épouse.
Le 8 août 2011 il a manifesté son intérêt pour le réseau Radical Epil du groupe Alésia Minceur et son gérant M. R. lui a fait parvenir le même jour un dossier de présentation Radical Epil.
Suite à un rendez-vous avec M. T. représentant Alésia Minceur le 22 août 2011 M. G. faisait part à M. R. de sa volonté de créer une enseigne Radical Epil à Lorient.
M. R. lui transmettait le même jour le document d'information précontractuelle (DIP) concernant le réseau Radical Epil conformément aux dispositions de l'article L. 330-3 du Code de commerce.
M. G. signait ce document et adressait le 15 septembre 2011 la somme de 5 980 euro afin de réserver provisoirement la zone de Lorient.
Après avoir reçu le document intitulé " procédure d'ouverture Radical Epil" le 29 août 2011, proposant de monter un prévisionnel auprès de la comptable de la société Alésia Minceur, M. et Mme G. ont été assistés dans la recherche d'un local.
Un nouveau DIP concernant le réseau Cellu Chic a ensuite été adressé à M. G. le 14 septembre 2011 qui l'a retourné avec un nouveau chèque de réservation.
Un second document intitulé " procédure d'ouverture Celluchic " a été adressé à M. G. le 21 septembre 2011.
Le cabinet Poligone a établi, à partir des éléments d'information sollicités de M. G., le dossier pour les banques ainsi qu'un prévisionnel et a assisté le couple dans la création de sa société.
Le 31 octobre 2011, M. G. a réservé un local de 80 m² <adresse>.
Le 1er novembre 2011, M. R. faisait parvenir à M. G. les projets de contrats de licence de marque pour les activités Radical Epil et Cellu Chic.
Le bail commercial a été signé le 22 décembre 2011.
Le CIC Ouest, après nouveau prévisionnel établi par le cabinet LPO le 9 décembre 2011, a mentionné son accord 21 décembre 2011 pour l'octroi d'un prêt de 49 000 euro avec caution bancaire de M. G. à hauteur de 17 640 euro.
La société Alésia Minceur a établi à la date du 15 février 2012 les documents d'information précontractuelle au nom de Mme G., gérante de la SARL Esthétique Bretagne, constituée. Le même jour, Mme G. a signé le DIP et les deux contrats.
Dans les jours suivants, la société Esthétique Bretagne a procédé au paiement du solde des droits d'entrée soit 2 392 euro TTC et procédé à l'embauche d'une salariée à compter du 27 février 2012.
À cette même date, M. et Mme G. ainsi que leur salariée Mme Le C. ont participé à une formation à Paris pour apprendre le fonctionnement de l'appareil d'épilation à lumière pulsée.
Puis le 29 février 2012 c'est à une formation "LPG " et "Presso" que M. et Mme G. ainsi que leur salariée ont participé à Lorient. Enfin le 5 mars les trois ont encore participé à une formation commerciale à Rennes.
L'institut a ouvert le 13 mars 2012.
Par jugement du 1er juin 2012, le Tribunal de commerce de Lorient a prononcé la liquidation judiciaire de la société Esthétique Bretagne, nommé la SCP F. en qualité de liquidateur et fixé provisoirement la date de cessation des paiements au 30 mai 2015.
C'est dans ces circonstances, que la SCP F. et M. G. ont assigné la société Alésia Minceur, la société Group Excel Cabinet LPO et la société Poligone.
Par jugement contradictoire du 9 octobre 2013, le Tribunal de commerce de Lorient a :
- annulé les contrats de licence "Radical Epil" et "Cellu Chic" conclus le 15 février 2012,
- condamné la société Alésia Minceur à payer à la SCP F. ès qualités la somme de 34 846 euro ;
- condamné la société Alésia Minceur à payer à M. G. la somme de 11 960 euro ;
- condamné la société Alésia Minceur à payer à la SCP F. la somme de 1 000 euro et à M. G. la somme de 1 500 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- débouté les parties du surplus de leurs demandes.
La société Alésia Minceur a formé appel ainsi que M. G. et la SCP F. ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL Esthétique Bretagne.
Les procédures enrôlées sous les numéros 13-07976 et 13-7672 ont été jointes.
Par ordonnance rendue le 11 juin 2014, le conseiller de la mise en état a débouté la société Alésia Minceur de sa demande de sursis à statuer.
La société Alésia Minceur demande à la cour de :
Vu l'article 1134 du Code civil,
Vu l'article R. 330-1 du Code de commerce,
- constater que la société Alésia Minceur a respecté son obligation d'information précontractuelle,
- constater l'absence de vice du consentement dont aurait été victime la société Esthétique Bretagne,
- constater le respect par la société Alésia Minceur de l'ensemble de ses obligations contractuelles au titre des contrats de licence de marque Radical Epil et Cellu Chic
En conséquence,
Infirmer le jugement,
Statuant à nouveau,
- débouter Monsieur G. et Me F., ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Esthétique Bretagne, de l'ensemble de leur demande à l'encontre la société Alésia Minceur,
Condamner solidairement Monsieur G. et Me F., ès qualité, à payer à la société Alésia Minceur la somme de 5 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
La SCP E. F. et M. G. demandent à la cour de :
Vu les articles 6, 1108, 1110, 1116 et suivants, 1131, 1134, 1147, 1315, 1382 et suivants du Code civil
Vu l'article L. 372-1 du Code de la santé publique
Vu les articles L. 330-3 alinéas 1 et 3 et R. 330-1 et suivants du Code de commerce
Vu les articles 49, 74, 378, 564 et suivants du Code de procédure civile
Vu le Code de déontologie des experts-comptables et notamment l'article 155
Débouter la société Alésia Minceur de sa demande de question préjudicielle et de sursis à statuer.
La dire irrecevable et mal fondée,
Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé l'annulation des contrats de licence " Cellu Chic " et " Radical Epil " conclus le 15 février 2012.
Infirmer le jugement en ce qu'il a refusé de dire et juger que la société Alésia Minceur, les cabinets Poligone et LPO avaient commis une faute au préjudice personnel de Monsieur Laurent G. occasionnant à celui-ci des préjudices matériel et moral.
Infirmer le jugement en ce qu'il a alloué à Maître F., ès qualités, la somme de 30 000 euro et porter le montant de cette réparation à 50 000 euro.
En conséquence des nullités ou des fautes relevées,
Condamner la société Alésia Minceur à payer à Maître F., ès qualités :
- la somme de 2 392 euro (2 x 1 196 euro TTC) en remboursement du solde des deux droits d'entrée acquittés par la société Esthétique Bretagne,
- la somme de 660 euro HT au titre des quatre redevances réglées par la SARL Esthétique Bretagne (130 euro HT X 2 pour "Radical Epil" et 400 euro HT pour "Cellu Chic")
- la somme de 598 euro TTC au titre de la formation "Capitalis" (soins anti-âge)
- la somme de 1 196 euro TTC au titre de la formation dispensée par " Minceur & Développement "
- la somme de 50 000 euro à titre de dommages intérêts
Voir condamner solidairement la société Alésia Minceur, les cabinets Poligone et LPO à payer à Monsieur Laurent G.:
- la somme de 11 960 euro (2 x 5 980 euro TTC) correspondant aux deux droits d'entrée acquittés par Monsieur Laurent G. sur ses deniers personnels
- la somme de 60 000 euro à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice matériel
- la somme de 10 000 euro à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral.
Assortir toutes les condamnations à intervenir des intérêts légaux à compter du jugement rendu le 9 octobre 2013.
Ordonner, sur le fondement de l'article 1154 du Code civil, la capitalisation des intérêts.
Confirmer les condamnations prononcées au titre de l'article 700
Débouter la société Alésia Minceur ainsi que les cabinets Poligone et L.-O. de toutes leurs demandes,
Condamner solidairement la société Alésia Minceur, les cabinets Poligone et LPO, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, à payer à Monsieur Laurent G. la somme de 2 500 euro, chacun, et celle de 2 000 euro chacun à Maître F., ès qualités outre aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de la SCP G.-D.
La société Poligone et Associés demande à la cour de :
Vu l'article 1147 du Code civil :
A titre principal :
Confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Monsieur Laurent G. et Maître F. ès qualités de liquidateur de la société Esthétique Bretagne, de l'ensemble de leurs demandes dirigées contre la société Poligone et Associés
A titre subsidiaire :
Réduire à de bien plus juste proportions le montant des dommages et intérêts sollicités par Monsieur Laurent G. et Maître F. ès qualités de liquidateur de la société Esthétique Bretagne ;
Dans tous les cas :
Condamner conjointement et solidairement Monsieur Laurent G. et Maître F. ès qualités de liquidateur de la société Esthétique Bretagne à verser à la SARL Poligone et Associés une indemnité de 3 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, outre aux entiers dépens et autoriser la Selarl L. S. Associés, Avocats, à les recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.
La SARL Groupe Excel-Cabinet LPO demande à la cour de :
Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté les demandeurs de leurs demandes à l'encontre du Cabinet LPO
En conséquence,
Débouter M. G. de ses demandes,
Condamner conjointement et solidairement Me F., ès qualités, et M. G. à verser à la société LPO la somme de 2 500 euro sur le fondement de l'article 700 du CPC, outre aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du CPC.
L'ordonnance de clôture est du 20 mai 2015.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties la cour se réfère aux énonciations de la décision déférée et aux conclusions régulièrement signifiées des parties :
- du 13 mai 2015 pour la société Alésia Minceur
- du 15 mai 2015 pour M. G. et la SCP E. F.
- du 28 mars 2014 pour la société Poligone et Associés
- du 27 février 2014 pour la SARL Groupe Excel-Cabinet LPO
II - MOTIFS
Sur la nature des contrats Radical Epil et Cellu Chic
Aux termes du Contrat de licence de marque Radical Epil signé le 15 février 2012, la société Alésia Minceur a concédé pour une durée de 5 ans à la société Esthétique Bretagne, dans le cadre d'une sous-licence d'exploitation exclusive, l'exploitation de la marque Radical Epil, déposée et enregistrée à l'INPI en 2010, et la vente dans le centre qu'elle exploite à Lorient de la totalité des produits et services couverts par la marque, en assurant au licencié un usage exclusif de la marque sur le territoire de Lorient et son agglomération, et en fournissant des pochettes constituant un support commercial et informatif, contre paiement d'un droit d'entrée de 6 000 euro, redevances mensuelles de 130 euro et en lui faisant l'obligation d'acquérir le matériel approprié auprès d'un fournisseur référencé, ni l'un ni l'autre n'étant spécifiés, des pochettes Radical Epil à remettre à tout nouveau curiste.
Le contrat de licence de marque Cellu Chic, marque déposée et enregistrée à l'INPI en 2011, fonctionne selon les mêmes modalités la redevance mensuelle étant cependant de 200 euro.
Si le contrat ne prévoit aucun transfert de savoir-faire ou d'assistance, il confère cependant à la société Esthétique Bretagne le droit d'utiliser sur le secteur de Lorient et son agglomération les produits et services couverts par la marque.
L'article 5 des deux contrats précise que le concept Radical Epil est en partie, basé sur l'utilisation de matériels liés à tous type d'épilations, et le concept Cellu Chic est quant à lui basé sur l'utilisation de matériels spécifiques normalisés pour l'amincissement.
Le licencié doit équiper l'institut de ce matériel acheté auprès d'un fournisseur référencé par le donneur de licence.
Il résulte de la plaquette remise à la société Esthétique Bretagne que le concept Radical Epil est totalement axé sur la dépilation à lumière pulsée et la simulation de la rentabilité est effectuée au vu de cette activité principale.
Et il résulte de la plaquette remise en ce qui concerne Cellu Chic que ce concept est totalement axé sur l'endermologie et la presso-esthétique via un Cellu M6, soit un palper rouler-effectué par une machine.
Outre le fait que l'article L. 330-3 est une disposition d'ordre public, d'ailleurs mise en œuvre par la société Alésia Minceur, les deux contrats sont fondés sur l'approvisionnement des adhérents du réseau en ce qui concerne le matériel, auprès des fournisseurs référencés par Alésia Minceur, mais également l'approvisionnement obligatoire de 10 plaquettes par mois, facturées 8 euro HT chacune par Alésia Minceur, outre un droit d'entrée de l'adhérent et une redevance mensuelle. Par ailleurs l'adhérent s'engage aux termes de ces contrats à accomplir tous actes nécessaires de publicité en vue d'une commercialisation optimale des produits et services qui en sont revêtus et obtenir préalablement l'accord écrit d'Alésia Minceur pour tout support et opérations publicitaires qu'il souhaite engager.
Par ailleurs les plaquettes Radocam Epil et Cellu Chic à destination de l'adhérent mentionnent eux même le terme de franchisé.
Que les contrats soient des contrats de licence de marque ou des contrats de franchises, ils relèvent en tout état de cause des dispositions de l'article L. 330-3 du Code de commerce.
Sur la nullité des contrats :
La SCP F. et M. G. soutiennent la nullité du contrat Radical Epil en invoquant les dispositions de l'article L. 330-3 § 1 qui imposent la fourniture d'un document donnant des informations sincères permettant de s'engager en connaissance de cause et l'existence d'une cause illicite alors que le procédé Radical Epil a recours à une technique, la lumière pulsée, dont l'utilisation est réservée au corps médical.
Alésia Minceur indique quant à elle que l'arrêté du 6 janvier 1962 est illégal alors que le ministre a défini un délit, sanctionné par des peines contraventionnelles dont la détermination relevait du seul domaine de la loi et qu'il a en outre été tacitement abrogé par la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009.
Il résulte de l'article L. 4161-1 du Code de la santé publique et de l'article 2 de l'arrêté du 6 janvier 1962, pris par le ministre chargé de la Santé publique en application de ces dispositions, que les actes d'épilation doivent être pratiqués par des docteurs en médecine, à la seule exception des épilations pratiquées à la pince ou à la cire. Par arrêt en date du 28 mars 2013 le Conseil d'Etat a réaffirmé l'actualité de ces dispositions.
La société Alésia Minceur ne peut sérieusement soutenir que le contrat Radical Epil ne comportait aucune mention illicite et ne prévoyait pas l'obligation pour la société Esthétique Bretagne d'utiliser un matériel de dépilation à la lumière pulsée, en arguant que l'article 5 précisait que le concept Radical Epil est en partie, basé sur l'utilisation de matériels liés à tous type d'épilations.
En effet, comme vu supra le concept Radical Epil est totalement axé sur la dépilation à lumière pulsée et la simulation de la rentabilité effectuée au vu de cette activité principale.
Il est inopérant pour la société Alésia de soutenir que la société Esthétique Bretagne ne rapporte pas la preuve que l'illicéité éventuelle de l'activité lui aurait causé un préjudice ou encore que la société aurait été informée, avant la signature du contrat de la réglementation applicable en l'espèce aux termes d'une formation faite par la société Capitalis.
Il est justifié que par jugement du 8 décembre 2014 le Tribunal correctionnel de Lorient a condamné divers prévenus pour des faits similaires de dépilation par utilisation d'un procédé de lumière pulsée qualifiés d'exercice illégal de la médecine commis à Lorient entre le 27 février 2011 et le 27 février 2014. Même si cette décision ne concernait pas les parties au présent litige, il atteste du risque de poursuites pénales et d'illicéité engendré par le recours au procédé concédé à travers le contrat Radical Epil.
En tout état de cause il n'est pas justifié que M. G. et la société Esthétique Bretagne aient été informés du débat existant quant à la légalité de l'utilisation du procédé par des non-médecins. La simple information sur la teneur des dispositions de l'arrêté du 6 janvier 1962 n'est pas suffisant pour informer complètement le co-contractant des risques qui résultaient de cette réglementation. Même à supposer que ce procédé ait pu être utilisé par des personnes n'ayant pas le titre de médecin, la société Alésia Minceur se devait d'informer complètement M. G. et la société Esthétique Bretagne, de l'illicéité pour le moins potentielle du procédé et des risques, y compris de poursuites pénales, qui en découlaient.
En tout état de cause l'absence de délivrance de cette information a vicié le consentement de la société Esthétique Bretagne lors de son engagement dans la cadre du contrat Radical Epil. Il est justifié que cette absence d'information a été déterminante de son consentement. Il y a lieu de prononcer la nullité de la convention Radical Epil.
La SCP F. et M. G. soutiennent que le consentement de la société Esthétique Bretagne a été déterminé par une information mensongère d'Alésia Minceur, soit des documents prévisionnels exagérément optimistes et des DIP avec des informations mensongères ou très insuffisantes pour Radical Epil et pour Cellu Chic, dont la signature de ce dernier contrat a été concomitante à la remise du DIP privant ainsi Esthétique Bretagne de tout délai de réflexion alors en outre que le contrat Cellu Chic est vide de tout objet.
La société Alésia Minceur expose quant à elle que la société Esthétique Bretagne a reconnu pour le contrat Cellu Chic la réception antérieure du DIP dans les conditions légales. Surtout que les comptes prévisionnels qu'elle n'a pas établis ne valent pas à la charge d'Alésia Minceur engagement de réussite pour Esthétique Bretagne. L'erreur de rentabilité si elle existe ne peut lui être imputable alors qu'il appartient au franchisé d'être vigilant lors de la remise des informations précontractuelles et alors qu'aucune disposition n'impose au franchiseur d'établir et de remettre une étude de marché pas plus que des prévisionnels. La simple simulation de rentabilité destinée à faire connaître le potentiel réaliste d'un centre sous licence de marque a été élaboré à partir de données réelles vérifiables et raisonnables et Alésia Minceur ne saurait être tenue des résultats d'exploitation de la société esthétique Bretagne qui sont en réalité le fruit des mauvaises conditions d'exploitation des époux G.
Considérant que conformément aux dispositions de l'article L. 330-3 alinéa 1 et 2 du Code de commerce, la personne qui met à la disposition d'une autre une marque doit, préalablement à la signature du contrat, fournir un document donnant des informations sincères, qui lui permettent de s'engager en connaissance de cause. Par ailleurs pour prononcer la nullité du contrat conclu en violation de cet article, le défaut d'information doit avoir eu pour effet de vicier le consentement du cocontractant.
L'article R. 330-1 fixe les informations devant y figurer.
Il convient en préliminaire de relever que la société Alésia Minceur ne peut prétendre que le DIP concernant Cellu Chic a été remis 20 jours au moins avant la signature du contrat au motif que Madame G. a signé le 15 février 2012 un document attestant de la remise de ce document dans le délai légal, alors qu'Alésia Minceur a transmis le DIP le jour même ce qui résulte de sa lettre d'envoi du 15 février 2015. Cet élément a privé la société Esthétique Bretagne de tout délai de réflexion prévu par les dispositions de l'article R. 330-2 du Code de commerce.
Le DIP concernant Cellu Chic ne présente pas l'état général et local du marché ni les perspectives de développement de ce marché, alors qu'il évoque simplement à travers des considérations d'ordre général, une augmentation du nombre de personnes en surcharge pondérale, un désir premier chez les femmes et chez les hommes de perdre du poids... sans notamment fournir quelque chiffre que ce soit permettant de se faire une idée sur la clientèle potentielle et sur la concurrence de services ou produits proposant des services ayant le même objectif.
Le DIP produit par la société Alésia Minceur ne contient pas d'indication exactes sur l'importance du réseau d'exploitants alors qu'il est justifié qu'un certain nombre d'entre eux connaissaient des difficultés à la date de la signature des conventions en cause, voire étaient mentionnées alors qu'elles ne faisaient plus partie du réseau. La société Alésia Minceur se devait d'informer ses cocontractants de l'état réel du réseau et des difficultés rencontrées par certains de ses membres.
Le consentement de la société Esthétique Bretagne au contrat Cellu Chic a été vicié. Elle n'aurait pas contracté si elle avait disposé des éléments d'informations prescrits par les dispositions légales visées supra. Il y a lieu de prononcer la nullité de la convention Cellu Chic en date du 15 février 2012.
Sur l'indemnisation de la société Esthétique Bretagne :
Le préjudice résultant du manquement à une obligation précontractuelle d'information est constitué par la perte de la chance de ne pas contracter ou de contracter à des conditions plus avantageuses.
La société Esthétique Bretagne justifie avoir versé à la société Alésia Minceur dans le cadre de l'exécution des conventions, les sommes de 1 196 euro correspondant au solde du droit d'entrée, de 260 euro correspondant à deux mois de redevances, de 598 euro correspondant à la facture Capitalis, de 1 196 euro au titre de la formation Minceur & Développement.
Les carences de la société Alésia Minceur dans la délivrance des informations nécessaires ont conduit la société Esthétique Bretagne à investir dans des circonstances qui ont rendu plus difficile la réussite financière de son activité. Le passif échu déclaré s'élève ainsi à la somme de 78 012 euro pour un actif de 4 585 euro.
Il y a lieu d'évaluer le préjudice qui en est résulté pour elle à la somme de 34 846 euro. Le jugement sera confirmé sur ce point.
Sur les demandes formées par M. G. :
L'étude prévisionnelle, telle que détaillée par la société Poligone Associés dans son courriel du 30 septembre 2011, prévoit en fait une assistance à la création de l'entreprise sous forme de société ou entreprise individuelle. Le coût prévisionnel est de 600 euro HT si le dossier n'est pas missionné par la suite pour la comptabilité de la SARL et est gratuit si après le dossier il y a mission pour suivre la comptabilité. Il s'agit donc bien d'une mission de conseil et non pas d'une mission de comptabilité. Dans le cadre d'une telle mission l'expert-comptable est soumis à un devoir de conseil et non pas seulement à l'obligation de moyen à laquelle il est tenu lorsqu'il intervient dans le cadre de ses seules fonctions de professionnel du chiffre. D'ailleurs, la société Poligone Associés a adressé le 10 février 2012 à la société Esthétique Bretagne une lettre de mission spécifiant la teneur de ses engagements dans le cadre de ses éventuelles fonctions purement comptables. Cette mission correspondait à celle de professionnel du chiffre pour laquelle elle serait intervenue si le suivi comptable de l'entreprise lui avait été confié et est bien distinct de la mission qui était la sienne dans le cadre de l'établissement d'un prévisionnel.
Le prévisionnel établi par la société Poligone, même s'il a pu être établi sur des prévisions établies par le client, mentionne dès le premier mois d'exploitation un chiffre d'affaire de 9 300 euro, soit une somme presque identique à celle censée être obtenue chaque mois par la suite. Dès la première année, le chiffre d'affaire prévu est de près de 130 000 euro, 140 000 puis 150 000 euro les années suivantes.
La société Poligone ne justifie pas avoir vérifié la possibilité d'atteindre de tels chiffres d'affaires, dès le tout début de l'exploitation. Elle ne justifie pas avoir informé son client des conséquences de la non-réalisation du chiffre d'affaires prévu dès les premiers mois de l'exploitation. Elle n'a établi qu'un prévisionnel fondé sur des hypothèses qu'elle ne justifie pas avoir vérifiées.
Quant à la société LPO, qui indique elle-même dans ses conclusions que la mission qui lui était confiée était une étude prévisionnelle portant notamment sur le caractère raisonnable des hypothèses ayant servi de base à l'élaboration des informations prévisionnelles, ne justifie pas avoir vérifié un tant soit peu le caractère réaliste de ces prévisions. Elle n'a fait que reprendre les prévisions mentionnées dans le prévisionnel de la société Poligone. Elle ne justifie pas avoir alerté, même à minima, son client sur les conséquences de la réalisation d'un chiffre d'affaires qui n'aurait pas été en ligne avec les prévisions. Elle n'a établi qu'un seul projet fondé uniquement sur des prévisions non vérifiées.
Au vu des pièces et des hypothèses qui leur étaient soumises, et notamment de l'absence de référence fiable, de l'absence d'étude sur le marché, la clientèle ou encore la zone d'exclusivité accordée, il revenait aux experts comptables pour le moins d'avertir leur client sur le caractère purement hypothétique des simulations dont ils se prévalent désormais devant la cour d'appel.
Elles ont manqué à leur devoir de conseil vis à vis de M. G., leur seul interlocuteur à l'époque où le prévisionnel a été établi.
En produisant à M. G. des informations tronquées qui l'ont conduit à payer les sommes correspondant aux acomptes de réservation, la société Alésia Minceur a également manqué à ses obligations.
Le bail commercial en date du 22 décembre 2011 a été signé par M. et Mme G. pour le compte de la société en formation Esthétique Bretagne.
Il n'est pas justifié d'une éventuelle assemblée générale de la société ayant statué, comme prévu à l'article 21 de ses statuts, sur la reprise d'engagements.
Si M. G. justifie avoir payé les sommes prévues au titre des réservations, il n'a pas signé les contrats dont l'annulation est prononcée, seule la société Esthétique Bretagne l'ayant fait.
Les contrats ont pris soin de déduire les sommes ainsi versées de celles que la société devait payer au titre des droits d'entrée et de rémunération des licences. M. G. est un créancier de la seule société Esthétique Bretagne au titre des sommes versées dans le cadre de la réservation. Il ne peut non plus faire valoir qu'il ne recouvrera pas sa créance sur la liquidation alors qu'il ne l'a même pas déclarée. Ses demandes formées à ce titre doivent être rejetées.
M. G. fait valoir qu'il aurait subi un préjudice moral du fait de l'ensemble de cette affaire. Il n'était que l'actionnaire minoritaire de la société Esthétique Bretagne. S'il justifie avoir été interdit bancaire, la lettre du CIC Ouest l'informant de cette mesure ne fait état que de l'émission d'un chèque sans provision sur un compte ouvert auprès d'un autre établissement bancaire. Aucun lien entre cette émission d'un chèque sans provision et la situation de la société Esthétique Bretagne n'est établi. En outre, il ne justifie pas d'un préjudice moral résultant de cette interdiction bancaire.
Il ne justifie que du préjudice moral résultant des manquements de la société Alésia Minceur et des sociétés Poligone et LPO à leurs obligations de bonne foi et de conseil.
M. G. se prévaut de la perte d'une chance de réaliser un gain. Il apparaît qu'il n'avait, à titre personnel, aucune chance de réaliser quelque gain que ce soit. Il ne justifie pas de la perte de la chance qu'il invoque.
S'il justifie avoir été appelé par l'établissement bancaire en sa qualité de caution, il ne justifie pas avoir dû payer quelque somme que ce soit à ce titre. Le préjudice qu'il invoque au titre de cet engagement de caution n'est qu'hypothétique.
Au vu du préjudice moral subi par M. G., les sociétés Alésia Minceur, Poligone et LPO seront condamnées à lui payer chacune à titre la somme de 1 000 euro à titre de dommages et intérêts.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Les sociétés Alésia Minceur, Poligone et Associés, Groupe Excel - Cabinet LPO, qui succombent à l'instance sont condamnés aux dépens et ne peuvent de ce fait prétendre aux dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile. L'équité commande en revanche de faire droit à la demande de M. F. ès qualités et de M. G. sur le fondement de ce texte. La société Alésia Minceur sera condamnée à payer la somme de 2 000 euro à M. F. ès qualités. Les sociétés Alésia Minceur, Poligone et Associés, Groupe Excel-Cabinet LPO seront condamnées à payer la somme globale de 2 500 euro à M. G. Ces sommes s'ajouteront à celles déjà fixées par les premiers juges.
Par ces motifs LA COUR, Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a condamné la société Alésia Minceur à payer à M. G. la somme de 11 960 euro et rejeté les demandes formées par M. G. à l'encontre des sociétés Poligone et Associés, Groupe Excel - Cabinet LPO, Statuant de nouveau, Condamne les sociétés la société Alésia Minceur, Poligone et Associés et Groupe Excel - Cabinet LPO à payer chacune la somme de 1 000 euro à titre de dommages et intérêts à M. G. avec intérêt au taux légal à compter de la présente décision et capitalisation des intérêts, Condamne solidairement les sociétés Alésia Minceur, Poligone et Associés et Groupe Excel - Cabinet LPO à payer la somme globale de 2 500 euro à M. G. au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la société Alésia Minceur à payer la somme globale de 2 000 euro à M.F. ès qualités au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, Rejette les autres demandes des parties, Condamne les sociétés Alésia Minceur, Poligone et Associés et Groupe Excel - Cabinet LPO aux entiers dépens d'appel dont distraction au profit de la SCP G. D.