CA Versailles, 12e ch. sect. 2, 16 juin 2015, n° 14-04948
VERSAILLES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Fédération Nationale Famille Rurales
Défendeur :
Canal + Distribution (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Palau
Conseillers :
Mme Guillou, M. Leplat
Avocats :
Mes Ricard, Nasry, Lafon, Fourgoux
L'association Familles Rurales Fédération Nationale, ci- après dénommée Familles Rurales, est une association de consommateurs agréée pour exercer au plan national les droits reconnus à ces associations en application des articles L. 411-1 et suivants du Code de la consommation.
Les SA Société d'Edition Canal Plus et Société Groupe Canal +, celle-ci aux droits de la société Canal+ Distribution, ci-après dénommées sociétés Canal+, commercialisent auprès des consommateurs des offres d'accès, dites Canal + et Canalsat, à des programmes de télévision payante sous forme d'un abonnement mensuel.
Ces offres sont reconductibles tacitement sauf résiliation par l'abonné, par notification écrite reçue au plus tard un mois avant la date d'échéance du contrat. A défaut d'une telle résiliation, le contrat est reconduit pour une nouvelle période d'une durée égale à sa durée initiale.
Les abonnés à Canal + pouvaient recevoir mensuellement un magazine " Canal + le magazine des abonnés " et les abonnés à Canalsat, mensuellement, le magazine " Canal Sat Le Mag ".
Ceux n'ayant pas souhaité recevoir mensuellement ces magazines les recevaient une fois par an, trois mois avant la date d'échéance de leur abonnement.
Ces magazines précisaient les modalités de résiliation des contrats.
Courant 2010, l'association Familles Rurales a écrit aux sociétés précitées afin qu'elles modifient le mode d'information de leurs abonnés relatif à la reconduction du contrat.
Par actes du 10 octobre 2011, l'association Familles Rurales Fédération Nationale a fait assigner les sociétés Société d'Edition Canal+ et Société Canal Plus Distribution devant le Tribunal de grande instance de Nanterre.
Dans leurs dernières conclusions devant ce tribunal, elle a demandé' qu'il soit jugé que les intimées ont manqué à l'exécution de leur obligation d'information et que leurs pratiques utilisées pour contourner l'obligation légale d'information constituent des pratiques déloyales et trompeuses interdites par la loi.
Elle a réclamé la condamnation in solidum des sociétés à lui payer les sommes de 50 000 euro à titre de dommages et intérêts et de 5 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Elle a demandé qu'il soit ordonné aux sociétés, sous astreinte de 1 000 euro par jour, de cesser leurs agissements illicites constituant des pratiques commerciales déloyales et trompeuses et de mettre en œuvre des mesures d'information effective, dans le respect des articles L. 136-1 et L. 133-2 du Code de la consommation.
Elle a sollicité la publication du jugement sur le site Internet des défenderesses et dans la presse spécialisée.
L'association critiquait l'information donnée par les magazines précités.
Par jugement du 15 mai 2014, le tribunal a rejeté les demandes et condamné l'association à payer aux deux sociétés la somme unique de 4 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par déclaration du 28 juin 2014, la Fédération Nationale des Familles Rurales a interjeté appel.
Dans ses dernières conclusions portant le numéro 2 en date du 4 mai 2015, l'association Familles Rurales Fédération Nationale demande que le jugement soit réformé sauf en ce qu'il l'a déclarée recevable.
Elle demande qu'il soit jugé que les intimées ont manqué à l'obligation d'information relative au droit des consommateurs de s'opposer à la reconduction tacite de leur contrat.
Elle demande que les clauses suivantes soient jugées illicites et inopposables aux consommateurs ayant conclu avec les intimées les contrats d'abonnement aux chaines Canal+, Canal+ Week end, Canalsat ou TPS Star:
Les mentions contenues à la page 3 du magazine " + " du mois de mai 2011:
" Pratique (modalités de résiliation)
Adresser la demande par courrier au plus tard avant la date d'échéance de votre (vos) abonnement(s)
La date et le numéro de client figurent sur la couverture du magazine. Vous pouvez également vous renseigner sur toutes les modalités sur espaceclientcanal.fr ".
Les mentions contenues à la page 3 du magazine " + " des mois de décembre 2011 et février 2012:
" Modalités de résiliation
Pour résilier votre abonnement, adressez-nous votre demande par courrier à l'adresse ci-dessous :
Canal + et/ou Canalsat
Au plus tard un mois avant la date d'échéance de votre contrat. Mentionnez sur ce courrier votre numéro de client.
La date d'échéance de votre contrat et votre numéro de client figurent sur la couverture de ce magazine. Vous pouvez également retrouver les modalités de résiliation sur espaceclientcanal.fr "
Les mentions contenues à la page 3 du magazine " Canalsat Le mag " de février 2012 :
" Modalités de résiliation
Pour résilier votre abonnement, adressez-nous votre demande par courrier à l'adresse ci-dessous :
Canal + et/ou Canalsat
Au plus tard un mois avant la date d'échéance de votre contrat. Mentionnez sur ce courrier votre numéro de client.
La date d'échéance de votre contrat et votre numéro de client figurent sur la couverture de ce magazine.
Vous pouvez également retrouver les modalités de résiliation sur espaceclientcanal.fr ou sur celle du magazine + pour les abonnés aux chaînes de Canal + ".
Elle demande que soit jugée illicite et inopposable la clause suivante figurant dans les courriers adressés aux abonnés ayant conclu avec les sociétés intimées des contrats d'abonnement aux chaînes Canal+, Canal+ week end, Canal Sat ou TPS Star :
" Si vous souhaitez résilier votre abonnement, adressez-nous votre demande par courrier au plus tard un mois avant la date d'échéance de votre contrat à Canal+/Canalsat service résiliation [...] ".
Elle demande qu'il soit jugé que les intimées mettent en œuvre une pratique commerciale trompeuse et de nature à induire en erreur les consommateurs sur la portée de leurs droits et fournissent de manière inintelligible et à contretemps les informations relatives à la durée réelle du contrat d'abonnement et à la possibilité de ne pas reconduire ledit contrat à son échéance.
Elle demande la condamnation in solidum des sociétés à lui payer la somme de 50 000 euro à titre de dommages et intérêts.
Elle demande qu'il soit ordonné aux sociétés intimées de cesser leurs agissements illicites constituant des pratiques commerciales déloyales et trompeuses et de mettre en œuvre des mesures information effective, dans le respect des articles L. 136-1 et L. 133-2 du Code de la consommation.
Elle sollicite la publication d l'arrêt sur le site Internet des défenderesses pendant une durée de 6 mois précédé de la mention "communiqué judiciaire" en couleur rouge et en police 14, et dans les journaux Telerama, Télé 7 Jours et Tele Star sans que le coût de chaque publication soit inférieur à 15 000 euro.
Elle réclame la condamnation solidaire des défenderesses à lui payer la somme de 5 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
L'association expose que les magazines adressés par les sociétés sont destinés à présenter les programmes disponibles et ne sont pas personnalisés et que l'information capitale pour les abonnés constituée par la possibilité de ne pas reconduire est noyée dans ce support publicitaire, impersonnel et inadapté. Elle invoque une violation de l'article L. 136-1 du Code de la consommation qui prescrit au professionnel d'informer le consommateur par écrit de la possibilité de ne pas reconduire le contrat. Elle excipe de l'existence de nombreux litiges à la suite de demandes de résiliation de contrats, de témoignages, d'un rapport d'information de l'assemblée nationale de mai 2006 et d'une réponse ministérielle du 27 janvier 2011.
Elle soutient que son action est recevable, quand bien même l'agissement illicite aurait cessé, l'article L. 421-2 du Code de la consommation permettant d'agir à l'encontre de "contrats qui ne sont plus proposés". Elle affirme que la cessation de la pratique litigieuse en cours lors de l'introduction de l'instance témoigne du bien-fondé de son action et ne vide pas ses demandes de leur substance.
Elle affirme que ses demandes conservent un objet bien que les magazines ne soient plus proposés.
Elle conteste que sa demande portant sur les courriers soit nouvelle au sens des articles 561 et 564 du Code de procédure civile. Elle rappelle sa demande originaire. Elle estime que cette demande est la conséquence ou le complément de sa demande initiale compte tenu du lien existant avec celle-ci. Elle affirme qu'en visant des courriers, elle s'adapte à l'évolution des dispositions légales et des pratiques des intimées qui tendent continument à contourner l'obligation d'information prescrite par l'article L. 136-1 du Code de la consommation. Elle invoque un lien suffisant, la demande concernant les courriers ayant pour objet, comme les demandes originaires, de constater une violation de l'article L. 136-1 du Code de la consommation et la commission de pratiques commerciales trompeuses. Elle estime que l'objet est identique s'agissant de courriers et que cette demande ne contredit pas celle portant sur les magazines.
A titre subsidiaire, elle fait valoir que les demandes concernant les courriers résultent de la révélation d'un fait nouveau et visent à écarter les prétentions des intimées. Elle invoque le fait nouveau constitué par la loi du 17 mars 2014, postérieure à la clôture des débats devant le tribunal, et par l'abandon, à la suite de cette loi, des magazines. Elle indique qu'elle n'avait donc pas la possibilité d'examiner la conformité des courriers à la nouvelle loi. Elle rappelle qu'une jurisprudence nouvelle constitue un fait nouveau au sens de l'article 566 du Code de procédure civile. Elle soutient qu'elle était dans l'impossibilité de prendre connaissance de la teneur des courriers, le commentaire par elle en première instance d'un article paru sur un site internet ne démontrant pas qu'elle connaissait la teneur et la présentation desdits courriers.
Elle réfute toute atteinte au principe de non rétroactivité de la loi dans la mesure où elle demande que soit examinée la validité des mentions figurant dans les magazines au regard de l'article L. 136-1 dans son ancienne version et la validité des mentions figurant dans les courriers adressés postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 12 mars 2014 au regard de l'article L. 136-1 issu de cette loi.
L'appelante soutient que l'article L. 136-1 du Code de la consommation dans sa version issue de la loi du 28 janvier 2005 n'est pas respecté. Elle fait valoir que cet article vise le consommateur "pris dans sa situation particulière", que celui-ci doit être mis en mesure de comprendre que l'information le concerne individuellement et de manière spécifique et qu'il ne doit pas s'agir d'une information générale concernant, de manière globale, l'ensemble des clients du professionnel ayant souscrit à la même offre. Elle considère que le consommateur doit comprendre que le professionnel s'adresse à lui personnellement. Elle déclare qu'il s'agit de prévenir le piège du contrat éternellement reconduit. Elle fait valoir que le consommateur doit être averti de la possibilité de s'opposer au jeu de la clause de tacite reconduction en manifestant une volonté contraire.
Elle considère que l'information ne doit pas être relative à la possibilité de mettre fin au contrat, et donc de le résilier, mais de s'opposer à sa reconduction.
Elle rappelle que l'article précité impose que le consommateur soit averti au plus tôt 3 mois et au plus tard 1 mois avant le terme de la période autorisant le rejet de la reconduction. Elle en infère que l'information doit être pertinente soit être délivrée au moment où elle s'impose.
Elle indique qu'elle doit être adressée par écrit et déclare que, parmi les écrits cités par le rapporteur de la loi, il n'est pas fait mention de magazines mais de documents contractuels, "officiels". Elle estime que l'exigence, dans la nouvelle loi, d'une "lettre nominative ou courrier électronique dédiés" ou d'une information "délivrée dans des termes clairs et compréhensibles" mentionnant "dans un encadré apparent la date limite de résiliation" ne fait qu'expliciter l'obligation antérieure et ne peut signifier qu'une telle exigence de documents dédiés et de termes clairs et compréhensibles n'était pas alors requise.
L'association critique l'information donnée. Elle affirme que les informations sur l'adresse du service destinataire et sur la date limite d'envoi du courrier ne sont pas fournies ou, lorsqu'elles le sont, sont lacunaires, disparates et dispersées.
Elle relève qu'en 2010, la date d'échéance du contrat était inscrite sur la pochette servant d'emballage au magazine, emballage déchiré lors de l'ouverture.
Elle indique qu'en mai 2011, cette date était indiquée sur la couverture du magazine dans un encadré occulté par un cadre noir inséré au bas de l'emballage et que les modalités de résiliation étaient indiquées dans un encadré vertical, sombre, attenant au sommaire. Elle estime déloyal d'occulter la date d'échéance et observe que le numéro de l'abonné, et la date d'échéance, pouvait être inséré à l'intérieur du magazine.
Elle affirme que l'adresse d'envoi du courrier de "résiliation" n'est pas référencée, l'adresse mentionnée étant apposée de telle manière qu'elle ne concerne pas les conditions de la résiliation. Elle observe que l'adresse sera apposée en décembre 2011.
Elle soutient que les articles 2.2 et 8 relatifs à la durée du contrat et à sa résiliation ne précisent pas davantage cette adresse. Elle indique que ces articles ne précisent pas qu'à défaut de s'opposer à la reconduction dans le délai indiqué, le contrat sera reconduit pour une année. Elle fait valoir que la mention apposée est un rappel de la prérogative contractuelle prévue aux articles 2.2 et 8.1 des conditions générales d'abonnement et non de l'information portant sur la possibilité de ne pas reconduire le contrat. Elle soutient que la mention ne permet pas au consommateur de prendre conscience des conséquences de son inaction et, donc, qu'il n'est pas alerté sur le fait que son contrat se poursuit jusqu'à l'échéance suivante. Elle se prévaut d'un jugement d'un juge de proximité.
Elle affirme que l'indication des modalités de résiliation est sciemment noyée parmi de nombreuses informations, celles-ci étant inscrites en caractères de 2 millimètres de haut et étant insérées dans la rubrique "contacts utiles" entre les divers moyens de contacter les sociétés. Elle conteste le titre de la rubrique qui ne permet pas de deviner qu'une information si importante pour le consommateur y figure. Elle cite des jugements de plusieurs juridictions de proximité.
Elle ajoute que le consommateur doit, pour connaître la date d'échéance de son abonnement, se référer à la page de couverture puis calculer lui-même la date limite d'envoi de son courrier.
Elle déclare que, pour connaître toutes les modalités de résiliation, il est invité à se rendre sur l'espace client du site internet des sociétés ce qui confirme le caractère lacunaire des mentions et de l'information données dans l'encadré.
Elle observe que les modalités de résiliation ne sont indiquées ni dans la rubrique "détail des contrats" ni dans la Foire aux Questions.
Elle souligne que le consommateur ne dispose jamais, sur une page unique, internet ou magazine, de toutes les informations utiles pour empêcher la reconduction de son contrat. Elle fait état du caractère délibérément dispersé de l'information afin de compliquer sa démarche. Elle cite un jugement d'une juridiction de proximité.
L'appelante fait état d'une légère modification du magazine " + " entre décembre 2011 et février 2012, l'adresse de destination du courrier de résiliation étant indiquée au même endroit que les "modalités de résiliation et déclare que cette modification a été introduite à la suite de son assignation. Elle reprend ses autres critiques et cite une décision d'une juridiction de proximité.
En ce qui concerne l'année 2012, elle affirme que le magazine "Canalsat Le mag" de février 2012 ne mentionne pas le numéro de client et l'échéance du contrat en couverture. Elle expose que le consommateur abonné à Canal+ et Canalsat doit se reporter d'un magazine à l'autre puis suivre de page en page et de support en support les indications fournies.
Elle observe qu'aucun des magazines ne mentionne qu'à défaut de résiliation, le contrat est reconduit pour une année entière. Elle soutient qu'en s'abstenant d'évoquer la reconduction du contrat et en usant de ces renvois successifs, les intimés éludent volontairement leur obligation d'information.
L'appelante soutient, par ailleurs, que le support utilisé était inadapté pour la délivrance de l'information. Elle fait valoir qu'un magazine de programmes télévisés est un document dénué de caractère contractuel et estime que le consommateur désireux de ne pas reconduire un contrat d'abonnement ne cherchera pas spontanément les modalités de résiliation dans un magazine publicitaire et de programmes télévisés. Elle ajoute que les conditions générales d'abonnement en vigueur au 1 er juin 2011 ne faisaient pas référence au magazine et à l'utilisation de celui-ci en tant que support d'une information à valeur contractuelle. Elle en infère que l'attention du consommateur n'a pas été portée sur ces magazines. Elle cite des décisions de juridictions de proximité.
Elle affirme que, dès le 18 décembre 2006, la DGCCRF a relevé que l'information était peu lisible et peu compréhensible et a enjoint les sociétés d'améliorer celle-ci selon des préconisations non suivies d'effet. Elle relève que Monsieur Hamon, ministre délégué, a répondu à une question écrite d'un parlementaire que la communication par un magazine d'information ne lui paraissait pas contraire à l'article L. 136-1 mais sous réserve de l'appréciation souveraine des tribunaux. Elle ajoute qu'il a rappelé que la jurisprudence était diverse et que la modification proposée à l'article L. 136-1 concernant les supports était de nature à mieux informer les consommateurs. Elle souligne que la société Canal + a abandonné, à l'approche du vote de l'amendement, ses magazines en tant que support de l'information prévue par l'article L. 136-1 dans son ancienne version.
Elle invoque, en outre, les effets négatifs et trompeurs de l'envoi mensuel des informations, celles-ci n'étant pas personnalisées. Elle rappelle que l'article L. 136-1 impose la date de l'information afin que celle-ci soit donnée à un moment opportun. Elle considère que le rappel tous les mois de la date d'échéance du contrat vide et banalise cette information qui "fait partie du décor".
Elle se réfère, par analogie, à un arrêt de la cour de cassation qui a considéré que l'information donnée par un opérateur de ses nouvelles conditions d'abonnement en adressant un courriel invitant l'abonné à se rendre sur une interface de gestion avait été délivrée dans des conditions déloyales. Elle souligne que l'information doit être claire, précise et délivrée au moment le plus opportun et de manière loyale et pertinente.
L'appelante invoque la violation, dans les courriers, de l'article L. 136-1 dans sa version issue de la loi du 17 mars 2014. Elle relève que ces modifications sont d'application immédiate. Elle reproche aux intimées de ne pas délivrer un courrier électronique "dédié" à l'information précitée.
Elle déclare que ce courrier est destiné avant tout à présenter le site Internet des sociétés, a un caractère publicitaire plus qu'informatif et n'a pas pour fonction d'alerter les consommateurs sur la possibilité de ne pas reconduire le contrat. Elle fait, ainsi, valoir que les mentions informatives de l'article L. 136-1 sont reléguées en note de bas de page à la fin du courriel, au-dessous de la signature de la société, sont écrites avec une police minuscule, que la date d'échéance du contrat figure en haut de la page- annulant tout lien entre les mentions-, que la date limite de résiliation n'est pas mentionnée contrairement aux prescriptions légales et qu'il n'est pas indiqué qu'à défaut , le contrat est reconduit pour une année. Elle affirme qu'il s'agit d'un simple rappel de la prérogative contractuelle mais pas de l'information portant sur la possibilité de ne pas reconduire le contrat. Elle soutient que la mention ne permet pas au consommateur de prendre conscience des conséquences de son inaction.
Elle conclut que le courrier n'est pas dédié, que la date limite de résiliation ne figure pas dans un encadré apparent et que l'information n'est pas délivrée dans des termes clairs et compréhensibles. Elle produit un courriel adressé le 15 avril 2014 qu'elle détaille et dont elle affirme qu'il souffre des griefs énoncés ci-dessus. Elle se prévaut d'une réponse d'un secrétaire d'Etat en date du 23 décembre 2014 aux termes de laquelle les modalités d'information de Canal+ ne lui paraissent pas conformes à la nouvelle réglementation.
L'association invoque une violation de l'article L. 133-2 du Code de la consommation aux termes duquel les clauses doivent être présentées et rédigées de façon claire et compréhensible.
Elle soutient que les mentions apposées par les intimées sur les magazines en mai 2011, décembre 2011 et février 2012 contreviennent à cette exigence compte tenu de la taille des caractères et de l'emplacement de ces mentions, noyées dans d'autres informations.
Elle soutient qu'il en est de même des mentions figurant sur les courriers électroniques et réitère ses critiques développées ci-dessus.
En réponse aux intimées, elle observe que celles-ci réfutent tout caractère contractuel aux magazines et affirme que toute stipulation qu'un professionnel entend rendre opposable aux consommateurs doit être examinée à l'aune de l'article L. 133-2. Elle soutient que ces mentions constituent des clauses ayant vocation à régir les rapports entre les sociétés et leurs abonnés et qu'elles sont opposées à ceux-ci. Elle en infère qu'elles doivent être conformes à l'article précité.
L'appelante reproche aux intimés des pratiques commerciales trompeuses. Elle rappelle la Directive du Parlement européen et du conseil du 11 mai 2005 transposée dans les articles L. 120 -1 et suivants du Code de la consommation. Elle soutient qu'une pratique commerciale est trompeuse si elle fournit de façon inintelligible, ambigüe ou à contre temps une information substantielle. Elle fait valoir qu'il s'agit d'une infraction formelle en raison de la rédaction des textes qui n'exige pas que le consommateur ait été effectivement trompé et qu'il suffit qu'elle ait été de nature à produire cet effet, la Cour d'appel de Paris évoquant une "potentialité d'effets".
Elle estime qu'il est nécessaire de constater l'altération du comportement économique des consommateurs, du moins d'un seul d'entre eux, pour caractériser l'existence d'une pratique commerciale déloyale mais que cette constatation n'est pas nécessaire dans le cas des pratiques commerciales trompeuses.
Elle rappelle que l'article L. 120-1 1 du Code la consommation définit les pratiques commerciales déloyales et que les articles suivants visent deux formes de pratiques déloyales soit les pratiques trompeuses (L. 121-1 et L. 121-1-1) et les pratiques agressives.
Elle reprend la définition donnée par la Directive de " l'altération substantielle du comportement économique des consommateurs " et rappelle l'objectif de la Directive. Elle invoque un arrêt de la cour de cassation du 11 mars 2014.
Elle déclare que les éléments matériels et moraux procèdent du seul caractère trompeur des éléments d'information, l'annonceur devant tout mettre en œuvre pour éviter de tromper le consommateur au moment de la diffusion de la publicité. Elle souligne que tout message publicitaire doit être apprécié en lui-même, un document distinct ne pouvant avoir pour effet de supprimer son caractère fallacieux.
Elle invoque la fourniture déceptive et à contretemps de l'information relative à la possibilité de ne pas reconduire le contrat à son échéance.
Elle déclare que, dans les magazines, les informations essentielles pour pouvoir s'opposer à la reconduction du contrat sont fournies de manière inintelligible et à contretemps alors qu'elles portent sur un droit du consommateur. Elle reprend ses critiques précédentes et estime qu'une telle présentation constitue une pratique trompeuse. Elle soutient également que les sociétés retiennent une date d'échéance qui n'est pas identique à la date anniversaire de souscription à l'abonnement et considère que la pratique consistant à se prévaloir de la date d'échéance mentionnée sur la couverture d'un magazine sur la date anniversaire du contrat est trompeuse.
Elle ajoute que le non-respect par les intimées du délai de communication imposé par l'article L. 136-1- qui correspond au moment opportun- caractérise une pratique commerciale trompeuse.
Elle reproche aux courriers d'être le support d'une pratique commerciale trompeuse en présentant les informations sous une forme de nature à induire en erreur les abonnés sur leur droit de ne pas reconduire le contrat et en fournissant l'information de manière inintelligible. Elle estime que le consommateur est ainsi prisonnier d'un contrat automatiquement reconduit. Elle considère qu'il s'agit d'une pratique commerciale trompeuse.
En réponse aux intimées, elle relève que celles-ci ont systématiquement opposé les mentions figurant dans les magazines pour faire échec aux demandes de résiliation alors même que les conditions posées par l'article L. 136-1 n'avaient pas été respectées.
Elle soutient en outre, en ce qui concerne les pratiques antérieures à l'entrée en vigueur des conditions générales du 17 février 2015, que le consommateur moyen a nécessairement patienté jusqu'à l'échéance annuelle suivante dans la mesure où les conditions générales en vigueur au 1 er juin 2011 ne mentionnaient pas son droit de résilier à tout moment. Elle affirme que les sociétés refusent de faire droit à la demande de résiliation et considèrent qu'elle ne vaut que pour l'année suivante. Elle cite deux courriels des 14 et 16 avril 2015. Elle affirme que si le consommateur peut résilier son abonnement à tout moment compte tenu du défaut d'information dans les conditions de l'article L. 136-1, son comportement économique a été altéré. Elle fait valoir que le fait qu'il dispose d'un droit- celui de résilier à tout moment l'abonnement- ne signifie pas que la pratique litigieuse n'a pas eu d'impact sur son comportement économique. Elle reproche aux sociétés de confondre le droit- la situation juridique- et le fait-le comportement économique de l'abonné. Elle soutient qu'à défaut d'information suffisante, le consommateur n'est pas amené à s'interroger sur l'opportunité de se défaire du service. Elle estime que son aptitude à prendre une décision en pleine connaissance de cause est compromise.
L'association fait valoir que l'évaluation du préjudice doit se faire au vu de l'impact des faits litigieux sur la collectivité des consommateurs et au vu de leur impact sur les actions de défense des consommateurs menées par l'association. Sur le premier point, elle rappelle l'ancienneté des dénonciations du manque de clarté de l'information, 2006, une étude de la DGCCRF et des indicateurs de la société. Elle indique que 11 % d'abonnés résilie et que le revenu moyen par abonné est de 555, 60 euro par an et estime que, dûment informés, 20 % des abonnés au moins se seraient opposés à la reconduction automatique. Elle souligne les dépenses exposées par elle pour inviter les sociétés à se conformer à leurs obligations. Elle réclame donc le paiement d'une somme de 50.000 euro à titre de dommages et intérêts.
Dans leurs dernières écritures en date du 30 avril 2015, les sociétés Edition de Canal Plus et Groupe Canal+ concluent à l'irrecevabilité de la demande tendant à ce que soit jugée illicite et inopposable la clause suivante figurant dans les courriers adressés aux abonnés ayant conclu avec les sociétés intimées des contrats d'abonnement aux chaines Canal+, Canal+ week end, Canalsat ou TPS Star :
" Si vous souhaitez résilier votre abonnement, adressez-nous votre demande par courrier au plus tard un mois avant la date d'échéance de votre contrat à Canal+/Canalsat service résiliation [...] ".
Subsidiairement, elles concluent au rejet des demandes tendant à juger qu'elles auraient manqué à leur obligation d'information posée par l'article L. 136-1 dans sa version issue de la loi du 17 mars 2014 et que le courrier envoyé serait constitutif d'une pratique commerciale déloyale et trompeuse.
En tout état de cause, elles sollicitent la confirmation du jugement.
Elles réclament le paiement d'une somme de 8 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Les sociétés rappellent qu'elles distribuent des offres de programme de télévision payante Canal+ et Canalsat sous forme d'abonnements annuels et que les abonnements sont reconductibles tacitement sauf résiliation un mois avant l'échéance.
Elles indiquent qu'au jour de l'assignation, elles proposaient à leurs abonnés les magazines mensuels " Canal+ Le magazine des abonnés " et " Canal Sat Le mag ". Elles déclarent que ces magazines informaient individuellement leurs clients par l'envoi d'un magazine personnalisé. Elles précisent que les abonnés n'ayant pas souhaité recevoir ces magazines chaque mois les recevaient au minimum une fois par an, trois mois avant la date d'échéance de leur abonnement. Elles affirment qu'ils indiquaient sur la couverture au sein d'un encadré immédiatement identifiable et visible le numéro de l'abonné, son ancienneté et la date d'échéance de son contrat et, en page 3, les modalités de résiliation.
Elles déclarent que les contentieux concernant ces contrats se sont élevés à 100 en 2011 et 78 en 2012 soit 0,0015 % et 0,0013 % des abonnés et qu'en 2010, 1 062 000 contrats ont été résiliés.
Elles concluent à l'irrecevabilité de la demande tendant à constater l'irrégularité de la clause précitée dans les courriers. Elles soutiennent que cette demande se heurte à l'effet dévolutif de l'appel et à la non rétroactivité de la loi.
Elles font valoir qu'en application des articles 561 et 564 du Code de procédure civile et 4 du Code civil, la saisine de la cour est limitée à l'objet du litige tel que défini par l'assignation et les dernières conclusions. Elles excipent également de l'article 2 du Code civil sur la non rétroactivité de la loi.
Elles soutiennent que l'association a étendu son recours à un grief ni formulé ni débattu en première instance. Elles font valoir que la contestation de l'association a toujours porté sur la loyauté du support d'information constitué par les magazines et que la question de la conformité des courriers n'a jamais été abordée. Elles soulignent que l'association connaissait l'existence de ces courriers, évoqués dans ses conclusions numéro 4 de novembre 2013. Elles relèvent qu'elle évoquait ces courriers pour faire état de la cessation de l'envoi de l'information par les magazines et en conclure, à tort, qu'elles reconnaissaient ainsi le bien fondé des critiques émises. Elles font état d'une prétention nouvelle qui diffère et contredit la prétention initiale.
Elles ajoutent que la nouveauté de cette prétention résulte également de l'invocation de l'article L. 136-1 dans sa nouvelle version qui fait peser de nouvelles obligations sur le professionnel. Elles rappellent que cette loi ne peut s'appliquer aux situations antérieures à son entrée en vigueur, seules situations dont était saisi le tribunal ainsi que celui-ci l'a rappelé. Elles excipent donc d'une atteinte à la non rétroactivité de la loi.
Elles soulignent l'importance du double degré de juridiction et font état de la déloyauté de la démarche de l'appelante qui connaissait avant la clôture des débats de première instance les nouvelles modalités d'information et qui n'a formé sa demande nouvelle que la veille de la date prévue pour la clôture de la procédure d'appel.
Elles reprochent à l'association de se fonder sur une jurisprudence non transposable à l'espèce. Elles font valoir que la demande de l'association porte sur un support nouveau et est fondée sur une loi nouvelle et en infèrent qu'elle n'a ni la même cause ni le même objet que la demande initiale. Elles font état d'un litige totalement nouveau et indépendant. Elles contestent que cette demande ait été virtuellement comprise dans l'assignation initiale et qu'elle en soit l'accessoire, la conséquence ou le complément. Elles dénient que l'évolution législative puisse constituer la révélation d'un fait nouveau, le courrier contesté étant connu de l'appelante avant la clôture des débats de première instance et aucune impossibilité d'en prendre connaissance n'étant justifiée. Elles ajoutent que, s'agissant de faits totalement distincts exposés à des législations distinctes, la solution du litige relatif à l'information donnée dans les magazines ne peut être modifiée par l'adoption postérieure d'un texte qui ne lui est pas applicable.
Les sociétés soutiennent que les développements sur les articles L. 421-2 et L. 133-2 du Code de la consommation sont inopérants. Elles déclarent ne pas contester le droit à agir de l'association mais seulement la recevabilité de demandes tendant à voir déclarer illicite et inopposable une information contenue dans un magazine qui n'est plus distribué. Elles soutiennent que ces demandes sont d'autant plus inopportunes que l'article L. 136-1, dans ses deux versions, prévoit une sanction spécifique liée à la faculté pour le consommateur de résilier son contrat de manière immédiate s'il n'a pas été informé. Elles s'interrogent donc sur la possibilité pour l'association de maintenir ses demandes. Elles considèrent que l'article L. 421-2 est étranger aux débats, le magazine n'ayant aucune valeur contractuelle et l'information délivrée par le magazine n'étant pas qualifiée d'abusive.
Elles demandent donc que soient écartées les digressions sur les articles L. 421-2 et, les clauses contractuelles n'étant pas contestées, L. 133-2 du Code de la consommation.
Les intimées soutiennent qu'elles ont respecté l'article L. 136-1 dudit Code dans sa version alors applicable. Elles déclarent que cette loi a pour objet d'améliorer l'information du consommateur sur la date de renouvellement du contrat et soulignent que la sanction du défaut d'information est la possibilité de résilier le contrat à tout moment.
Elles relèvent que le tribunal a jugé que l'article L. 136-1 n'imposait aucune forme spécifique à l'information. Elles invoquent d'autres décisions de tribunaux d'instance jugeant qu'aucune forme ni modalité particulière n'était exigée. Elles excipent de jugements ayant estimé conformes les informations données et déclarent que les juridictions de proximité dont les jugements sont invoqués par l'appelante ont considéré l'information suffisante avant ou après ces décisions. Elles estiment que l'arrêt du 2 juillet 2014 invoqué n'est pas transposable car rendu sur le fondement de l'article L. 121-84 du Code la consommation sur les contrats de service de communications électroniques qui font l'objet de dispositions spécifiques et sanctionnant un courriel invitant les abonnés à se rendre sur une interface alors que le magazine contenait toutes les informations nécessaires.
Elles soutiennent que le magazine distribué jusqu'en juin 2013 contenait une information claire et non équivoque permettant aux abonnés d'être parfaitement éclairés sur la situation de leur abonnement et la possibilité d'y mettre un terme.
En ce qui concerne le support, elles relèvent que la législation alors applicable n'imposait pas un " support dédié " mais seulement un "'écrit'". Elles observent que les débats parlementaires exigeaient un " support durable, support papier ou courrier électronique par exemple'" et que la commission parlementaire a précisé que le législateur avait entendu laisser au professionnel le choix du support et fait état des " multiples envois adressés'" à leurs clients (relevés de prestations, relevés de compte) ". Elles en infèrent que le choix du support n'était ni limité ni imposé.
Elles considèrent qu'en stricte application de l'article L. 136-1, elles ont mis en place un système spécifique permettant d'informer individuellement chaque client par l'envoi d'un magazine personnalisé, " Canal+ Le magazine des abonnés " ou " Canal Sat, Le mag ". Elles affirment que ce magazine était personnalisé, reçu par l'ensemble des abonnés, était un moyen clair et direct permettant à chacun d'eux d'être parfaitement informé. Elles font valoir que cette distribution a été expressément reconnue par la jurisprudence précitée. Elles estiment que la mise sous pli permettait de distinguer cette correspondance personnalisée d'une simple publicité. Elles affirment que cette mise sous pli est un moyen d'attirer directement l'attention du destinataire sur le contenu de la correspondance. Elles se prévalent de la déclaration de Monsieur Hamon estimant valable cette communication.
En ce qui concerne le contenu de l'information transmise par le magazine " + ", elles soutiennent que ce magazine contenait de façon claire et compréhensible toute l'information nécessaire. Elles indiquent que le magazine indiquait sur sa couverture, au sein d'un encadré identifiable et visible, le numéro client de l'abonné, son ancienneté et la date d'échéance de son contrat. Elles estiment que ces informations étaient visibles et identifiables d'un seul coup d'œil dès l'ouverture de l'enveloppe sans qu'il soit nécessaire de feuilleter le magazine. Elles réfutent donc toute dissimulation. Elles ajoutent que les modalités de résiliation étaient reprises en page 3 au sein d'une rubrique dédiée à cette information et clairement identifiable. Elles affirment que, sous la rubrique " Contacts utiles ", les coordonnées du service clients auquel la demande de résiliation devait être adressée étaient mentionnées. Elles indiquent qu'avant septembre 2011, cette adresse figurait à cet emplacement et qu'à compter de septembre, elle était mentionnée à cet emplacement et à la rubrique " modalités de résiliation ". Elles en concluent que cette adresse a toujours été mentionnée et non ajoutée à la suite de l'assignation. Elles soutiennent que la mention de l'adresse dans le même encadré que celui rappelant les modalités de résiliation était suffisante.
Elles ajoutent que l'article L. 136-1 n'a jamais exigé que soit rappelé au consommateur qu'à défaut de résiliation, le contrat serait reconduit pour un an.
Enfin, elles précisent que l'information était accessible sur leur site internet et que les abonnés pouvaient contacter un conseiller téléphonique ce qui excède leurs obligations légales.
En ce qui concerne la forme de l'information délivrée par le magazine " + ", les intimés font valoir que l'information était donnée dans des termes simples et dans une forme et une taille de caractère standard. Elles contestent qu'elle était noyée et soulignent qu'elle figurait dans des encadrés apparents sur les deux pages les plus importantes, couverture et sommaire, qui renvoyaient l'une à l'autre. Elles affirment que la DGCCRF ne les a jamais enjoint de changer leurs pratiques, leur demandant simplement de parfaire l'information délivrée et leur indiquant des axes d'amélioration dont certains ont été adoptés avant l'assignation. Elles observent qu'elles n'ont pas été sanctionnées par l'administration.
En ce qui concerne le délai de délivrance, elles affirment que l'appelante n'indique pas en quoi le délai de délivrance de l'information " était impertinent ". Elles déclarent que le magazine " + " était envoyé aux abonnés soit une fois par an, trois mois avant l'échéance des contrats, soit à leur demande expresse mensuellement. Elles en infèrent qu'il était envoyé dans le délai utile. Elles ajoutent que la répétition de l'information ne pouvait qu'être favorable aux abonnés comme l'a indiqué le tribunal. Elles soulignent que la délivrance d'une information mensuelle ne peut être qualifiée de manquement ou de défaut d'information. Elles font également état de l'espace client utilisé par 45 % des abonnés qui est un complément et qui n'est pas destiné à pallier un prétendu défaut d'information.
Subsidiairement, en ce qui concerne le manquement à l'obligation prévue par l'article L. 136-1 modifié par la loi du 17 mars 2014, les sociétés indiquent que l'appelante se fonde sur un modèle de courrier adressé en août 2013 soit avant l'adoption de la loi. Elles font valoir que la notion de " correspondance dédiée " s'entend comme " dédiée à la gestion du contrat " par opposition à un courrier à vocation publicitaire et estiment que tel est le cas, s'agissant d'une correspondance personnelle, personnalisée et rappelant l'information relative à la possibilité de résiliation et à ses modalités. Elles déclarent que le courrier ne contient aucune information commerciale ou promotionnelle. Elles affirment que l'information est lisible compte tenu de la taille de la police et de l'emploi d'un vocabulaire clair et dénué d'ambiguïté.
Les sociétés contestent toute pratique commerciale trompeuse. Elles s'interrogent sur l'applicabilité de l'article L. 121-1, le recours à des contrats comportant une clause de tacite reconduction ne constituant pas une pratique déloyale et les mentions apparaissant dans les magazines résultant uniquement de l'exécution d'une obligation prévue par le Code de la consommation et non d'une pratique commerciale.
Elles rappellent la définition donnée par l'article L. 121-1 du Code de la consommation d'une pratique commerciale trompeuse. Elles soutiennent qu'en application même de la Directive invoquée par l'appelante, il est nécessaire de vérifier que le comportement économique du consommateur a été altéré. Elles font valoir que si l'article L. 136-1 a été respecté, il n'existe pas d'altération du comportement du consommateur et que, s'il n'a pas été respecté, il peut résilier immédiatement son abonnement de sorte que son comportement n'est pas altéré.
Elles reprennent leurs développements sur l'information donnée par les magazines et font état de jugements de juridictions de proximité.
Subsidiairement, au regard de l'irrecevabilité soulevée, elles reprennent également les développements sur l'information donnée par les courriers.
Les sociétés contestent tout préjudice, celui-ci n'étant pas caractérisé.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 12 mai 2015.
Sur la recevabilité des demandes portant sur les courriers
Considérant qu'aux termes de l'article 564 du Code de procédure civile, les " nouvelles prétentions " sont irrecevables sauf, notamment, pour faire écarter les prétentions adverses ou pour faire juger les questions nées de la survenance ou de la révélation d'un fait ;
Considérant que l'article 566 du même Code permet aux parties d'ajouter à leurs prétentions initiales " toutes les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément " ;
Considérant que, dans ses écritures devant le tribunal, l'association contestait les informations données par les sociétés Canal+ dans des magazines au regard de l'article L. 136-1 du Code de la consommation dans sa version issue de la loi du 28 janvier 2005, alors applicable ;
Considérant que l'information délivrée par les sociétés intimées figure désormais non dans des magazines mais dans des courriers ;
Considérant que l'association conteste désormais, notamment, l'information donnée par les sociétés dans ces courriers au regard de la loi du 17 mars 2014 postérieure au jugement ;
Considérant qu'ainsi, l'association critique une information différente fournie dans des supports différents au regard d'une loi nouvelle ;
Considérant que des faits totalement distincts doivent donc être appréciés ; que la demande ne peut être l'accessoire, la conséquence ou le complément de la demande initiale ;
Considérant que la survenance ou la révélation d'un fait doit avoir un lien suffisant avec le litige initial ; qu'un support nouveau contenant une information différente de celle contestée ne remplit pas cette condition ;
Considérant que la loi nouvelle ne peut constituer un fait nouveau au regard de l'article 564 précité compte tenu du caractère différent du support auquel elle s'applique et de l'information donnée ;
Considérant que la critique des courriers par l'association constitue, par conséquent, un litige nouveau et indépendant nécessitant une analyse distincte de celle à laquelle le tribunal a été convié à précéder ;
Considérant que la demande se heurte donc au principe du double degré de juridiction ;
Considérant que les demandes de l'association fondées sur les courriers sont, dès lors, irrecevables ;
Sur les clauses figurant dans les magazines
Considérant que la suppression des magazines ne retire pas leur objet à des demandes critiquant l'information alors donnée et sollicitant l'indemnisation d'un préjudice causé par l'insuffisance invoquée de celle-ci ;
Considérant que les critiques formulées doivent être examinées au regard de l'article L. 136-1 du Code de la consommation dans sa version résultant de la loi du 28 janvier 2005 ainsi rédigée :
"Le professionnel prestataire de services informe le consommateur par écrit, au plus tôt trois mois et au plus tard un mois avant le terme de la période autorisant le rejet de la reconduction, de la possibilité de ne pas reconduire le contrat qu'il a conclu avec une clause de reconduction tacite'", la sanction d'une violation de cette obligation étant constituée par la faculté pour le consommateur de mettre fin à tout moment et gratuitement au contrat ;
Considérant que l'article L. 136-1 dans sa version issue de la loi du 17 mars 2014 dispose que le professionnel doit informer, aux mêmes dates, le consommateur "par écrit, par lettre nominative ou courrier électronique dédiés" et que "cette information, délivrée dans des termes clairs et compréhensibles, mentionne, dans un encadré apparent, la date limite de résiliation" ;
Considérant qu'il ne peut résulter des nouvelles exigences posées que l'information pouvait, auparavant, être donnée dans des termes obscurs et incompréhensibles ; que l'exigence d'une information claire et compréhensible est d'autant plus requise que celle-ci est prescrite par la loi ;
Considérant que, toutefois, les modalités imposées par la loi du 17 mars 2014 pour fournir cette information n'étaient pas applicables ;
Considérant que la nature de l'écrit requis n'était pas précisée ; qu'il ne résulte d'aucune disposition, voire d'aucun débat parlementaire ou rapport de la commission législative compétente, qu'un magazine ne pouvait être le support de cette information ;
Considérant que ce support devait, toutefois, être adapté ;
Considérant que les magazines litigieux étaient adressés individuellement à l'abonné ; qu'ils étaient recouverts d'un plastique les distinguant de publicités ; que l'inclusion de ces informations dans ces magazines ainsi adressés n'était donc pas contraire à la loi ;
Considérant que cette inclusion dans un magazine exposant les programmes des sociétés et contenant des publicités n'était pas davantage en soi contraire à l'article précité ;
Considérant que le support choisi était donc régulier ;
Considérant que ces magazines étaient adressés, sauf volonté contraire des abonnés, chaque mois ; que l'information sur la possibilité de ne pas reconduire le contrat était donc donnée chaque mois et non entre un et trois mois avant le délai prescrit pour pouvoir ne pas reconduire l'abonnement ;
Considérant, d'une part, que le consommateur bénéficiait de l'information dans le délai prescrit ;
Considérant, d'autre part, que la répétition de cette information permettait à l'abonné, chaque mois, de se rappeler de la date d'expiration de son abonnement et donc de sa faculté d'y mettre un terme avant son échéance ;
Considérant, enfin, que l'association ne justifie nullement que la réitération d'une telle information équivalait à une moindre information pour le consommateur ;
Considérant que la répétition de cette information ne rendait donc pas celle-ci irrégulière ;
Considérant, enfin, que l'article L. 136-1 prescrivait d'informer le consommateur de la possibilité de ne pas reconduire le contrat ; qu'il n'exigeait nullement que les conséquences de l'absence d'utilisation de cette faculté soient énoncées ; qu'il n'imposait pas au professionnel de préciser qu'à défaut de résiliation, le contrat serait poursuivi pendant un an ; que cette absence d'indication dans les magazines ne pouvait donc constituer une violation par les intimées de leurs obligations ;
Considérant, par conséquent, que ni le choix des supports ni la périodicité de l'information ni l'absence d'indication des conséquences du défaut de résiliation ne constituaient une violation de l'article précité ;
Considérant que doit donc être examiné le contenu de l'information donnée dans les magazines contestés ;
Sur le magazine " + " de mai 2011
Considérant que la date d'échéance du contrat figure sur la couverture du magazine, dans un encadré occulté par un cadre noir inséré dans l'emballage plastique ; que cette occultation disparaît lors de l'ouverture de l'emballage ; que la date d'échéance du contrat ne demeure donc pas dissimulée étant observé que l'insertion de cette information dans le magazine aurait nécessité également, pour être vue, que l'emballage soit déchiré ;
Considérant que la rubrique "Pratique" incluse dans l'encadré intitulé "Contacts Utiles" énonce que la demande de résiliation doit être adressée par courrier ; qu'elle ne précise pas l'adresse ; que, toutefois, cette adresse figure dans le même encadré à la rubrique "courrier" ;
Considérant que l'exigence d'une demande adressée par "courrier" et la mention, quelques lignes au-dessus, dans le même encadré, de l'adresse où doit être envoyé le courrier constituent une indication suffisamment claire pour que l'abonné envoie sa lettre à l'adresse mentionnée pour cet envoi ;
Considérant que la rubrique "Pratique" est écrite dans les mêmes caractères que les autres rubriques de l'encadré ; qu'elle est suivie, immédiatement après et sur la même ligne, de la mention "'(modalités de résiliation) " ; que si cette mention et ces modalités font l'objet de caractères plus petits, la taille des caractères de la rubrique " Pratique " appelle suffisamment l'attention du lecteur pour qu'il lise le contenu de cette rubrique ;
Considérant que la circonstance que la date d'échéance figure sur la première page et les modalités de résiliation sur la troisième page ne contrevient pas à l'obligation d'une information claire et compréhensible dès lors que ces modalités sont lisibles et figurent à côté du sommaire du magazine, qu'elles sont indiquées dans un encadré clairement distinctif et que celui-ci renvoie expressément à la date d'échéance figurant en couverture ;
Considérant que l'article L. 136-1 n'impose pas au professionnel d'indiquer la date limite d'envoi du courrier pour que la résiliation soit prise en compte ; que l'obligation pour le consommateur de la calculer au vu de la date d'échéance de son abonnement, qui lui a été rappelée sur la couverture du magazine, et de la nécessité de l'adresser un mois avant cette date, rappelée dans l'encadré, ne constitue donc pas une violation de cet article ;
Considérant que l'abonné a, ainsi, connaissance de la date d'échéance de son abonnement et des conditions et modalités de la résiliation qui le renvoient à l'information figurant sur la couverture ;
Considérant que l'information donnée n'est donc pas dispersée et est suffisamment claire ; que l'abonné n'est nullement contraint de se reporter à un site internet ;
Considérant que l'information donnée correspond aux exigences de l'article L. 136-1 soit la faculté de mettre un terme au contrat ;
Considérant que le magazine comprend donc l'information nécessaire exprimée de façon claire et compréhensible ;
Considérant que la demande portant sur ce magazine sera donc rejetée ;
Sur le magazine " + " de décembre 2011 et février 2012
Considérant que les informations sont portées de manière identique au magazine examiné ci-dessus sous réserve des développements suivants ;
Considérant que l'intitulé " Pratique " est remplacé par l'intitulé " modalités de résiliation ", dans les mêmes caractères ; que l'adresse du courrier est précisée dans la rubrique " résiliation " ;
Considérant que ces différences ne caractérisent pas une violation des obligations précitées ;
Considérant que la demande au titre de ce magazine sera donc rejetée ;
Sur le magazine " Canalsat Le mag " de février 2012
Considérant que la pièce produite par l'appelante ne mentionne pas, en couverture, le numéro du client et la date d'échéance de son contrat ;
Mais considérant que l'identité et l'adresse de l'abonné ne sont pas davantage indiquées ; qu'il s'agit donc, à l'évidence, d'un exemplaire non distribué et, concernant l'omission reprochée, non représentatif ;
Considérant que les informations sont données dans les mêmes conditions que dans le magazine " + " de février ;
Considérant qu'il est indiqué que la date d'échéance figure sur la couverture du magazine " ou sur celle du magazine + " pour les abonnés aux chaînes de Canal+ ;
Considérant qu'il ne résulte nullement de cette mention que les abonnés aux deux services doivent se reporter d'un magazine à l'autre pour connaître la date d'expiration, éventuellement différente, de leurs abonnements ;
Considérant enfin que le renvoi aux modalités de résiliation figurant sur le site internet de la société ne se substitue pas à l'information, suffisante, donnée dans le magazine mais caractérise l'indication d'un mode, supplémentaire, d'information ; que le consommateur n'est donc nullement contraint de passer d'un support à un autre ;
Considérant que l'information donnée répond donc aux exigences légales ;
Considérant, par conséquent, que les demandes de l'association tendant à juger que les intimées ont manqué à leur obligation d'information des consommateurs de s'opposer à la reconduction tacite de leur contrat et à juger que les clauses précitées sont illicites et inopposables aux consommateurs seront rejetées ;
Sur l'existence de pratiques commerciales trompeuses
Considérant que, compte tenu de l'irrecevabilité des demandes afférentes aux courriers, ces pratiques ne peuvent résulter que des informations figurant dans les magazines ;
Considérant qu'il résulte des développements ci-dessus que ces informations données par les magazines sont satisfaisantes ; qu'elles ne peuvent donc être constitutives de pratiques trompeuses ;
Considérant qu'en cas de manquement, l'abonné peut demander à tout moment et sans frais la résiliation du contrat ; que le litige, isolé, entre la société et Monsieur Dreumont, qui se plaignait le 20 août 2010, de la prise en compte d'une date de résiliation erronée ne peut donc caractériser l'existence d'une pratique commerciale trompeuse ;
Considérant que la demande sera rejetée ;
Sur les autres demandes
Considérant que les demandes de l'association portant sur les informations contenues dans les magazines sont rejetées ; que le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions ;
Considérant que l'association devra payer la somme de 4 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel par les intimées ;
Par ces motifs, Contradictoirement, Confirme le jugement dans toutes ses dispositions, Y ajoutant, Déclare irrecevables les demandes formées à l'encontre des courriers adressés par les sociétés intimées, Condamne l'association Familles Rurales Fédération Nationale à payer à la SA Société d'Editions de Canal plus et à la SA Société Groupe Canal+ la somme unique de 4 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, Rejette les demandes plus amples ou contraires, Condamne l'association Familles Rurales Fédération Nationale aux dépens, Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.