ADLC, 18 novembre 2015, n° 15-D-15
AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE
Décision
Relative à des pratiques relevées dans le cadre de l'attribution d'emplacements commerciaux à la mezzanine banlieue de la gare du Nord de Paris
L'Autorité de la concurrence (section II),
Vu la lettre enregistrée le 18 novembre 2014, sous les numéros 14-0091F et 14-0092M, par laquelle les sociétés Parfumerie Douglas France et Nocibé France Distribution ont saisi l'Autorité de la concurrence de pratiques mises en œuvre par la Société d'Aménagement de la Mezzanine Paris Nord, la Société d'Aménagement de Commerces et de Concessions et la société Sephora lors de l'attribution d'emplacements commerciaux sis à la mezzanine banlieue de la gare du Nord et ont sollicité, sur le fondement de l'article L. 464-1 du Code de commerce, le prononcé de mesures conservatoires; Vu la lettre enregistrée le 14 avril 2015, sous les numéros 15-0030F et 15-0031M, par laquelle la société O'Rêve a saisi l'Autorité de la concurrence de pratiques mises en œuvre par la Société d'Aménagement de la Mezzanine Paris Nord, la Société d'Aménagement de Commerces et de Concessions, la Société Altarea France ainsi que la société Elior Concessions, lors de l'attribution d'emplacements commerciaux sis à la mezzanine banlieue de la gare du Nord et ont sollicité, sur le fondement de l'article L. 464-1 du Code de commerce, le prononcé de mesures conservatoires ; Vu la décision du 21 avril 2015 du rapporteur général adjoint de l'Autorité de la concurrence de joindre l'instruction des affaires numéros 14-0091F, 14-0092M, 15-0030F et 15-0031M ; Vu les articles 101 ou 102 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) ; Vu le livre IV du Code de commerce modifié ; Vu les observations présentées par la Société d'Aménagement de la Mezzanine Paris Nord la Société d'Aménagement de Commerces et de Concessions, la société Altarea France, la société Sephora, la société Elior Concessions Gares, les sociétés Parfumerie Douglas et Nocibé France distribution ainsi que la société O'Rêve ; Vu les décisions de secret des affaires n° 14-DSA-355 du 12 décembre 2014, n° 15-DSA-38 du 27 janvier 2015, n° 15-DSA-41 du 28 janvier 2015, n° 15-DSA-42 du 29 janvier 2015, n° 15-DSA-48 du 4 février 2015, n° 15-DSA-49 du 5 février 2015, n° 15-DSA-58 du 12 février 2015, n° 15-DSA-67 du 23 février 2015, n° 15-DSA-81 du 23 février 2015, n° 15-DSA-118 du 11 mars 2015, n° 15-DSA-146 du 31 mars 2015, n° 15-DSA-147 du 31 mars 2015, n° 15-DSA-149 du 31 mars 2015, n° 15-DSA-150 du 1er avril 2015, n° 15-DSA-151 du 1er avril 2015, n° 15-DSA-159 du 7 avril 2015, n° 15-DSA-162 du 10 avril 2015, n° 15-DSA-163 du 10 avril 2015, n° 15-DSA-165 du 13 avril 2015, n° 15-DSA-169 du 15 avril 2015, n° 15-DEC-50 du 22 septembre 2015, n° 15-DECR-32 du 23 septembre 2015, n° 15-DEC-52 du 23 septembre 2015, n° 15-DSA-192 du 7 mai 2015, n° 15-DSA-208 du 3 juin 2015, n° 15-DSA-209 du 3 juin 2015, n° 15-DSA-223 du 16 juin 2015, n° 15-DSA-226 du 17 juin 2015, n° 15-DSA-227 du 17 juin 2015, n° 15-DSA-235 du 25 juin 2015, n° 15-DSA-244 du 6 juillet 2015, n° 15-DSA-247 du 6 juillet 2015, n° 15-DSA-251 du 9 juillet 2015, n° 15-DSA-251 du 10 juillet 2015, n° 15-DSA-252 du 10 juillet 2015, n° 15-DSA-253 du 15 juillet 2015, n° 15-DSA-255 du 21 juillet 2015, n° 15-DSA-256 du 21 juillet 2015, n° 15-DSA-267 du 27 juillet 2015, n° 15-DECR-30 du 22 septembre 2015, n° 15-DEC-51 du 22 septembre 2015, n° 15-DECR-31 du 23 septembre 2015, n° 15-DEC-53 du 23 septembre 2015 ; Vu les autres pièces du dossier ; Le rapporteur, le rapporteur général adjoint, le commissaire du Gouvernement et les représentants des sociétés Société d'Aménagement de la Mezzanine Banlieue Paris Nord, Société d'Aménagement de Commerces et de Concessions, Altarea France, Sephora, Elior Concessions Gares, Nocibé France Distribution, O'Rêve, entendus lors de la séance de l'Autorité de la concurrence du 29 septembre 2015 ; Adopte la décision suivante :
I. Constatations
A. LES SAISINES
1. Par lettre enregistrée le 18 novembre 2014, sous les numéros 14-0091F et 14-0092M, les sociétés Parfumerie Douglas France et Nocibé France Distribution (ci-après " Nocibé ") ont saisi l'Autorité de pratiques mises en œuvre par la Société d'Aménagement de la Mezzanine Paris Nord, la Société d'Aménagement de Commerces et de Concessions et la société Sephora lors de la commercialisation d'un emplacement destiné à une activité de parfumerie à la mezzanine banlieue de la gare du Nord à Paris. Les sociétés Parfumerie Douglas France et Nocibé France Distribution ont sollicité, sur le fondement de l'article L. 464-1 du Code de commerce, accessoirement à leur saisine au fond, le prononcé de mesures conservatoires.
2. Par lettre enregistrée le 14 avril 2015, sous les numéros 15-0030F et 15-0031M, la société O'Rêve a saisi l'Autorité de pratiques mises en œuvre par la Société d'Aménagement de la Mezzanine Paris Nord, les sociétés A2C et Altarea France ainsi que la société Elior Concessions Gares, lors de la commercialisation de deux emplacements dédiés pour le premier à de la restauration rapide et pour le second à de la vente de boissons avec de la restauration rapide à la mezzanine banlieue de la gare du Nord. La société O'Rêve a sollicité, sur le fondement de l'article L. 464-1 du Code de commerce, accessoirement à sa saisine au fond, le prononcé de mesures conservatoires.
3. Par décision des services d'instruction du 21 avril 2015, les affaires sous les numéros 14-0091F, 14-0092M, 15-0030F et 15-0031M ont été jointes.
B. LE SECTEUR CONCERNE : L'ATTRIBUTION ET LA GESTION DES ESPACES COMMERCIAUX À LA GARE DU NORD
1. LE SECTEUR DES COMMERCES EN GARE
4. En 2014, on comptabilisait 3029 gares de voyageurs sur le territoire national, proposant 1500 points de vente sur le domaine public ferroviaire gérés par la Société d'Aménagement de Commerces et de Concessions (ci-après " A2C "), filiale de SNCF Gares & Connexions (1). Le secteur des commerces en zone de transit représentait pour les gares SNCF en France (commerce et restauration) environ 1,2 milliard d'euro de chiffre d'affaires (2). Parmi les gares de voyageurs, les gares parisiennes restaient les plus fréquentées du fait de l'importance des réseaux (TGV, transilien, RER, etc.) (3).
5. Selon A2C, les types de commerces présents en gare sont fonction de la superficie du domaine public ferroviaire disponible pour les activités commerciales. Sont d'abord présents les indispensables du voyage, à savoir la presse et la restauration, puis, si la superficie allouée le permet, les commerces de cadeaux et de produits régionaux. Plus la superficie du domaine public ferroviaire est importante, plus l'activité commerciale sera diversifiée pour constituer de véritables centres commerciaux avec la présence de points de vente d'équipement à la personne. Il est à noter que 20 % des achats réalisés dans les gares sont consacrés à la restauration, juste après l'achat de presse qui représente 35 % (4).
6. Les activités commerciales et le choix des enseignes s'effectuent selon le type de clientèle fréquentant la gare et transitant par l'espace commercial pour accéder aux lignes ferroviaires. La typologie de la clientèle en gare est répertoriée comme suit : (i) clientèle loisir, (ii) clientèle d'affaires, (iii) clientèle pendulaire qui prend le train pour se rendre sur son lieu de travail mais aussi (iv) la clientèle non voyageurs qui accompagne les voyageurs et/ou habite autour des gares (5).
2. L'ATTRIBUTION DES EMPLACEMENTS COMMERCIAUX A LA GARE DU NORD
7. La gare du Nord à Paris, avec une estimation de 550 000 visiteurs par jour et 177 millions de voyageurs par an, (6) est la première gare de France et d'Europe. Elle est utilisée pour ses lignes internationales vers le Royaume-Uni et l'Europe du Nord (Thalys, Eurostar) ainsi que ses lignes nationales et donne aussi accès aux transiliens, aux RER et à certaines lignes de métros parisiens (7). La station de la gare du Nord a été comptabilisée comme la station du métro parisien la plus fréquentée avec environ 50 millions de voyageurs entrants provenant de l'extérieur du réseau RATP et la première gare RER avec près de 47 millions de passagers en 2013 (8).
8. La gare du Nord à Paris comporte quatre niveaux avec des zones commerciales distinctes:
- le niveau -2 où se situe une zone commerciale de transit d'environ 3500 m2 pour les passagers à destination et en provenance des transiliens, des RER D et B et donnant accès à certaines lignes du métro. Depuis 2014 ont lieu des travaux de réaménagement de ce niveau, appelé communément mezzanine banlieue de la gare du Nord. Il y est prévu une galerie marchande d'une trentaine de boutiques.
- le niveau -1, situé au niveau des lignes de métro parisien et où sont présents un laboratoire d'analyses médicales, un commerce de prêt-à-porter, une sandwicherie et un commerce de décoration maison ;
- le niveau 0 (niveau des quais) où sont situés certains commerces alimentaires et de presse, un commerce de prêt-à-porter et des bureaux de change ;
- le niveau +1, zone de départ et d'arrivée des trains Eurostar, à destination ou en provenance de Londres où, après avoir franchi le contrôle de sécurité, les passagers munis de titres de transport accèdent à une zone commerciale (9).
9. Les espaces du domaine public ferroviaire dédiés à des activités commerciales aux niveaux, -1, 0 et +1 sont commercialisés et gérés par A2C. La Société d'Aménagement de la Mezzanine Paris Nord commercialise et gère les espaces commerciaux de la mezzanine banlieue de la gare du Nord situés au niveau -2.
10. Il est estimé que les passagers de la mezzanine banlieue de la Gare du Nord sont à 80% des voyageurs pendulaires, c'est-à-dire des voyageurs qui utilisent les lignes de la gare du Nord à Paris quotidiennement pour se rendre sur leur lieu de travail (10).
11. À la gare du Nord, deux emplacements du domaine public ferroviaire sont attribués à une activité de parfumerie. L'un est géré par le groupe Alia, au niveau +1 de la gare, après le contrôle de sécurité pour accéder aux lignes Paris-Londres, l'autre est situé au niveau -2 de la mezzanine banlieue de la gare du Nord et est exploité depuis 2001 par l'enseigne Parfumerie Douglas remplacée par l'enseigne Nocibé depuis octobre 2014, à la suite de l'acquisition du groupe Nocibé SAS par la société-mère de la société Parfumerie Douglas.
12. Avant les travaux de réaménagement de la mezzanine banlieue de la gare du Nord, on y dénombrait une quinzaine de points de vente de restauration rapide dont sept au sein de la mezzanine banlieue de la gare du Nord, exploités par des sociétés de la restauration de voyage (ou restauration concédée) (11) telles qu'Autogrill, SSP France et Elior Concessions mais aussi par de nombreuses enseignes indépendantes.
C. LES ENTREPRISES CONCERNÉES
1. LA SOCIÉTÉ D'AMÉNAGEMENT DE COMMERCES ET DE CONCESSIONS
13. A2C était une filiale à 100 % de Gares et Connexions, branche d'activités en charge de l'exploitation et du développement des gares de la SNCF, à l'époque des faits litigieux. À partir du 1er janvier 2015, à la suite de la réforme ferroviaire, A2C est devenue un département de la branche d'activités Voyages au sein de l'EPIC mobilité de la SNCF (12).
14. Son activité consiste notamment en l'étude, la conception, la coordination de travaux, l'aménagement, la commercialisation et la gestion locative d'emplacements commerciaux, la gestion immobilière, l'animation et la gestion de groupements de commerçants et de sites commerciaux installés dans les enceintes ferroviaires et à proximité de celles-ci (article 2 des statuts) (13).
15. A2C gère et commercialise quasiment la totalité des emplacements commerciaux sur le domaine ferroviaire français, à l'exception de certaines gares parisiennes pour lesquelles la SNCF a conclu des conventions d'occupation du domaine public avec des sociétés foncières qui sont chargées d'attribuer et de gérer les espaces commerciaux situés sur le domaine public ferroviaire (14).
16. Son chiffre d'affaires qui comprend les prestations effectuées en études, en honoraires de gestion et de commercialisation pour le compte de la SNCF s'élevait en 2014 à [10-11] millions d'euro (15).
2. LA SOCIÉTÉ ALTAREA FRANCE
17. Altarea France SAS (ci-après " Altarea ") qui fait partie du groupe Altarea Cogedim exerce une activité d'étude et de réalisation de toutes opérations d'équipement commerciaux, industriels et urbains, d'implantation et d'organisation de centres commerciaux et industriels (voir article 2 de ses statuts) (16).
18. Altarea qui a signé un contrat d'occupation temporaire du domaine public avec la SNCF à la gare de l'Est a été en charge de la commercialisation et de la gestion des espaces commerciaux du domaine public ferroviaire de cette dernière (17).
19. Actionnaire à hauteur environ de 40 % de la Société d'Aménagement de la Mezzanine Paris Nord, elle a été mandatée par cette dernière, conjointement avec A2C pour la commercialisation des espaces commerciaux situés à la mezzanine banlieue de la gare du Nord. Elle était en charge de la commercialisation des espaces commerciaux dédiés à l'équipement de la personne.
20. Son chiffre d'affaires s'élevait à environ 49 millions d'euro en 2014.
3. LA SOCIÉTÉ D'AMÉNAGEMENT DE LA MEZZANINE PARIS NORD
21. La Société d'Aménagement de la Mezzanine Paris Nord SA (ci-après " la SAM ") a été créée le 26 février 1999 par A2C et Altarea SA qui détiennent respectivement 59,96 % et 39,92 % de son capital (39,92 % est détenue par la foncière Cézanne Matignon SNC, elle-même détenue à 50 % par Foncière Altarea et 50 % par Matignon Commerce, toutes deux détenues à 99 % par Altarea) (18).
22. La SAM a pour objet, en France et à l'étranger, notamment l'acquisition, la location sous toutes formes (bail à construction, concession immobilière, convention d'occupation) de tous locaux, terrains, droits à construire, droits immobiliers de toute nature à usage de centres commerciaux mais aussi la réalisation de travaux sur les biens et droits immobiliers acquis (19).
23. En date du 25 septembre 2001, la SAM a conclu un contrat d'occupation du domaine public avec la SNCF en vue de la gestion et la commercialisation d'un espace de 3500 m2 sur le domaine public ferroviaire, à Paris, à la gare du Nord, situé au niveau -2 (20). En vertu du préambule du pacte d'actionnaires entre A2C et Altarea, en date du 26 février 1999, la SAM se voit reconnaître la possibilité de conclure des conventions de sous-occupation du domaine public de la SNCF, au profit des exploitants de ces surfaces commerciales (21).
24. Par un mandat de commercialisation, en date du 30 décembre 1999, la SAM a mandaté A2C et Altarea SA, pour la commercialisation locative de l'espace situé au niveau -2 de la Gare du Nord. En vertu de l'article 2 de ce contrat, il est prévu que les deux mandataires établissent " un plan de merchandising ", effectuent la recherche des exploitants des espaces commerciaux situés à la mezzanine banlieue de la gare du Nord, les négociations avec les exploitants ainsi que l'établissement d'un état d'avancement de la commercialisation desdits espaces (22).
25. Le mandat de commercialisation prévoit également que les missions confiées aux mandataires confèrent à chacun la moitié de la commercialisation des concessions commerciales.
26. Son chiffre d'affaires provient des redevances perçues des locations des espaces du domaine public ferroviaire ainsi que des charges gérées et s'élevait, en 2014, à [3-4] millions d'euro (23).
4. LA SOCIÉTÉ PARFUMERIE DOUGLAS FRANCE
27. Parfumerie Douglas France SAS était une filiale de la société Douglas Holding AG elle-même intégrée depuis 2012 au groupe Advent International Corporation, société de capital investissement. La société Parfumerie Douglas était active dans le commerce au détail de parfums et produits cosmétiques en Europe, via, en 2013, 1174 magasins dont 179 en France dont 90 en franchise (24).
28. Le 4 décembre 2001, la société Parfumerie Douglas a conclu un contrat de sous-occupation avec la SAM d'un emplacement à usage commercial, situé au niveau -2 de la gare du Nord, d'une superficie de 191 m2 et pour une durée de 10 ans.
29. Le 24 juin 2014, Advent International Corporation a procédé à l'acquisition du groupe Nocibé SAS également actif dans la distribution sélective de parfums et de cosmétiques, à la suite de l'autorisation de l'opération d'acquisition par l'Autorité de la concurrence, sous réserve de la cession d'un certain nombre de points de vente à des tiers (25).
30. À la suite de cette acquisition du groupe Nocibé SAS, les enseignes Douglas ont été progressivement remplacées en France par les enseignes Nocibé, et à la gare du Nord, au cours de la semaine du 6 octobre 2014 (26).
31. Le 19 février 2015, la société Parfumerie Douglas France a été dissoute par absorption par la société Nocibé France Distribution (ci-après " Nocibé ").
32. Depuis l'acquisition de Nocibé SAS par Advent International Corporation, Nocibé est devenue le deuxième distributeur de parfums et produits cosmétiques de luxe sur le marché français, après Sephora SA et devant Marionnaud SA (27).
33. Advent International Corporation a vendu, fin juillet 2015, le groupe Douglas aux fonds d'investissement CVC Capital Partners (28).
5. LA SOCIÉTÉ NOCIBÉ FRANCE DISTRIBUTION
34. Fondée en 1984, le groupe Nocibé SAS, passé sous le giron du fonds d'investissement britannique Chaterhouse Capital Partners en 2006 avant d'intégrer le groupe Advent International en 2014, est spécialisé dans la fabrication et la distribution de parfums et de cosmétiques (29). Son chiffre d'affaires s'élevait à 950 millions en 2014 avec environ 651 magasins (30).
35. Le 19 février 2015, la société Parfumerie Douglas France a été dissoute par absorption par Nocibé qui est venue au droit de Parfumeries Douglas.
36. L'enseigne était le 3ème acteur sur le marché de la distribution sélective de parfums et de produits cosmétiques en France, avant son rachat par Douglas Holding en 2014 (31).
6. LA SOCIÉTÉ SEPHORA
37. Créée en 1970, Sephora SA (ci-après " Sephora ") s'est développée autour d'un réseau de magasins propres (317 magasins à enseigne Sephora en France au 31 décembre 2014). Depuis 1997, Sephora fait partie du groupe LVMH. Son activité porte essentiellement sur l'achat de parfums et produits cosmétiques en vue de leur revente aux consommateurs à travers son réseau de magasins.
38. En 2014, Sephora avait une part de marché d'environ 30 % sur le marché de la distribution des parfums et des produits cosmétiques en France, la plaçant au premier rang des distributeurs sur ce marché. Son chiffre d'affaires s'élevait à [900 000 000 - 1 200 000 000] d'euro en 2013 (32).
7. LA SOCIÉTÉ O'REVE
39. Créée en 2010, la société à responsabilité limitée O'Rêve (ci-après " O'Rêve ") exerce une activité de restauration rapide et de vente à emporter sous l'enseigne " Segafredo ". Elle est détenue à hauteur de 160 parts par M. Alain X et à hauteur de 40 parts par M. Steeve Y (33).
40. Par une convention du 2 octobre 2012, la SAM a autorisé ladite société à sous occuper un emplacement situé à la mezzanine banlieue de la gare du Nord, pour une durée de 18 mois en vue d'y exercer une activité de restauration rapide et de vente à emporter, sous enseigne Segafredo. Avant cette date, O'Rêve exerçait son activité de restauration commerciale sur le domaine public de la gare d'Orléans.
41. Son chiffre d'affaires s'élevait à environ 343 000 euro en 2014.
8. LA SOCIÉTÉ ELIOR CONCESSIONS GARES
42. Le groupe Elior est organisé en trois secteurs d'activité : la restauration collective, les services et la restauration de concession. L'activité de restauration de concession se subdivise elle-même en plusieurs catégories : restauration dans les gares, restauration sur les autoroutes, restauration dans les aéroports et restauration dans les musées et villes (34). L'activité de restauration de concessions représentait environ 30 % de son chiffre d'affaires en 2014, ce qui en fait le 3eme acteur mondial de la restauration de concession (35).
43. Depuis le 1er mai 2015, Elior Concessions Gares SAS (ci-après " Elior Concessions Gares "), filiale à 100 % d'Elior Concessions SA gère les activités de restauration en gare du groupe, ayant absorbé les filiales du groupe Elior qui intervenaient dans ce secteur dont la société Hold & Co. Cette dernière commercialisait sous franchise des points de vente de l'enseigne Paul sur le territoire français depuis 2000.
44. À la gare du Nord, Elior Concessions Gares exploite actuellement deux emplacements commerciaux sous enseigne Paul : le premier au niveau des quais de la gare du Nord depuis le 15 septembre 2001 (36) et le second, au niveau -2 de la gare du Nord, depuis le 2 septembre 2002. Les conventions de sous-occupation du domaine public ont fait l'objet de prorogations, et pour l'emplacement situé à la mezzanine banlieue, jusqu'au 15 février 2015, date de début des travaux dans cette zone (37).
45. Une nouvelle convention d'occupation du domaine public a été signée entre Hold & Co et la SAM, le 19 mai 2015, pour l'exploitation d'une activité de restauration rapide par l'enseigne Paul sur l'emplacement qu'elle occupait avant le 15 février 2015.
46. La société Hold & Co (devenue Elior Concessions Gares) a également exploité un emplacement sous enseigne Paul au niveau +1 (lignes Eurostar) entre le 15 janvier 2004 et le 30 juin 2014 (38).
D. LES FAITS
1. LE CONTEXTE DE L'ATTRIBUTION PAR LA SAM DES EMPLACEMENTS COMMERCIAUX À LA MEZZANINE BANLIEUE DE LA GARE DU NORD
47. Vers la fin d'octobre 2011, la SAM a publié un avis de mise en concurrence pour la réattribution de sept emplacements commerciaux, notamment un pour une activité de parfumerie et un autre pour une activité de restauration rapide, (39) sis à la mezzanine banlieue de la gare du Nord (40).
48. En janvier 2012, la préfecture de police de Paris a informé l'établissement Exploitation Voyageurs de Paris Nord que la commercialisation desdits emplacements commerciaux nécessitait l'établissement préalable d'un schéma général de mise en sécurité pour la protection incendie (41).
49. La SAM a alors décidé de mettre fin aux procédures de mise en concurrence. Il s'en est suivi un maintien des activités commerciales présentes en 2011, avec prorogation des sous-conventions d'occupation du domaine public existantes (42).
50. Par courrier du 5 février 2014, l'inspection générale de sécurité incendie a validé le schéma directeur d'aménagement de la mezzanine banlieue de la gare du Nord qui lui avait été soumis par Gare et Connexions consistant en des aménagements des emplacements existants (regroupement et/ou réaménagement des emplacements commerciaux) (43).
51. La SAM qui, par convention d'occupation du domaine public signée avec la SNCF était également en charge de l'exécution des travaux de réaménagement et de mise en conformité incendie de la mezzanine banlieue de la gare du Nord, a décidé de les exécuter à partir de septembre 2014, en les compartimentant en quatre zones géographiques (44).
52. Au cours du premier trimestre 2014, à la suite de l'établissement par la SAM d'un plan des emplacements par type d'activités, appelé également " plan merchandising ", A2C et Altarea se sont partagé la commercialisation des emplacements commerciaux selon l'activité en cause (45). A2C était en charge de la commercialisation des emplacements destinés à des activités alimentaires, de restauration, de presse, de beauté et des activités de culture et de loisirs alors que Altarea était en charge de l'équipement de la personne (46).
53. Dans ce contexte, un nouvel emplacement dédié à la parfumerie a été prévu au sein de l'îlot central de la mezzanine banlieue de la gare du Nord, d'une superficie de 230 m² (47) ainsi qu'un " coffee shop " d'une superficie d'environ 79 m² (48). Il ressort également du plan merchandising de mars 2014 que l'enseigne Paul, active dans la restauration rapide est une enseigne cible pour occuper, à la suite des travaux, l'emplacement qu'elle occupait jusqu'au 15 février 2015 (49).
54. Le 18 juin 2014, s'est tenu un salon professionnel dédié au commerce de détail et à l'immobilier à l'occasion duquel les commercialisateurs de la SAM ont remis une plaquette générale du projet de commercialisation des emplacements commerciaux de la mezzanine banlieue de la gare du Nord (50).
55. Une fois le plan merchandising établi, A2C et Altarea ont commencé des négociations bilatérales avec des enseignes présélectionnées par type d'emplacement répondant aux critères définis par la SAM, notamment celui de la clientèle essentiellement pendulaire de la mezzanine banlieue de la gare du Nord.
56. A2C a eu recours pour la sélection des enseignes à la mezzanine banlieue de la gare du Nord à deux types de procédures, à savoir une procédure de gré à gré ou une procédure de sollicitation commerciale (51). Cette dernière consiste à solliciter plusieurs enseignes commerciales en adéquation avec le type d'activité préétablie et la clientèle de la gare et à retenir l'offre financière la plus élevée.
2. LES FAITS RELEVÉS LORS DE L'ATTRIBUTION DE L'EMPLACEMENT DÉDIÉ À UNE ACTIVITÉ DE PARFUMERIE
a) Historique des relations contractuelles entre la SAM-A2C et Parfumerie Douglas-Nocibé
57. Le 4 décembre 2001, aux termes d'un contrat de sous-occupation du domaine public conclu entre la SAM et Parfumerie Douglas, un emplacement situé au niveau -2 de la gare du Nord d'une superficie de 191 m2 a été mis à la disposition de la société Parfumerie Douglas pour qu'elle y exploite une activité de vente de parfums et accessoires s'y rapportant. Ce contrat a été conclu pour une durée initiale de 10 ans et a été étendu postérieurement à trois emplacements à usage de réserve (52).
58. Fin octobre 2011, un avis de mise en concurrence a été publié dans les journaux spécialisés (LSA et sites commerciaux), en vue de l'attribution de l'emplacement (lot 3) alors exploité par Parfumerie Douglas et réaffecté à une activité de parfumerie (53).
59. Les sociétés Marionnaud, Sephora et Parfumerie Douglas ont déposé chacune une offre pour exploiter l'emplacement destiné à une activité de parfumerie (54).
60. Le 12 janvier 2012, la préfecture de police de Paris a informé l'établissement Exploitation voyageurs de Paris Nord que la commercialisation des emplacements commerciaux situés au niveau -2 de la gare du Nord nécessitait l'établissement préalable d'un schéma général de mise en sécurité pour la protection incendie (55).
61. Le 18 juillet 2012, la SAM a informé les soumissionnaires pour l'occupation du lot destiné à une activité de parfumerie, à savoir les sociétés Parfumerie Douglas, Sephora et Marionnaud que la procédure de mise en concurrence était interrompue à la suite de la décision de la préfecture de police de Paris (56).
62. Il s'en est suivi que le contrat de sous occupation signé entre la SAM et Douglas a fait l'objet de deux prorogations : la première jusqu'au 5 mars 2014 et la seconde jusqu'au 15 février 2015. Dans le premier avenant de prorogation, il était rappelé que la SAM était disposée à proroger le contrat de sous-occupation de la société Douglas jusqu'à la réalisation de travaux issus du schéma de sécurité et que l'attribution de l'emplacement s'effectuerait après une nouvelle mise en concurrence (57).
63. Au cours d'un salon professionnel dédié au commerce de détail et à l'immobilier commercial précité, les commercialisateurs de la SAM ont remis une plaquette générale du projet de recommercialisation des emplacements commerciaux à la gare du Nord aux personnes intéressées. Il ressort des tableaux de suivi de commercialisation de la SAM qu'aurait été remis à Nocibé, ce jour-là, une plaquette d'informations comportant le plan avec les différentes superficies d'emplacement et le type d'activités recherchées, la typologie de la clientèle à la gare du Nord et les personnes de contact chez la SAM (58).
64. Par courrier du 24 juin 2014, accompagnant le second avenant du contrat de sous-occupation du domaine public, le directeur juridique de la société Parfumerie Douglas a indiqué que cette dernière souhaitait se maintenir à la gare du Nord et a demandé à être informée du processus de sélection à venir.
65. Par lettre du 21 juillet 2014, A2C a répondu que l'emplacement occupé par la société Parfumerie Douglas devait être restitué au plus tard le 15 février 2015.
66. Par courriels du 26 août 2014, un commercialisateur de chez A2C a respectivement contacté les sociétés Nocibé-Parfumerie Douglas, Sephora et Marionnaud pour les informer qu'un nouvel emplacement de 230 m² dédié à la parfumerie était disponible à la mezzanine banlieue de la gare du Nord et qu'il souhaitait leur présenter le projet. Il était précisé qu'un accord ferme était attendu pour la mi-septembre (59).
67. Le lendemain, A2C a communiqué à Nocibé, par courriel, les documents suivants: le cahier des prescriptions techniques, architecturales et environnementales (C.P.TA.E.) des espaces commerciaux de la mezzanine banlieue de la gare du Nord, des plans de la mezzanine établis par l'AREP, ainsi qu'un modèle de compte de résultat prévisionnel. Il a été convenu d'un rendez-vous le 3 septembre au siège d'A2C (60).
68. Il ressort d'un courriel du 19 septembre 2014 que le commercialisateur d'A2C aurait donné à Nocibé, lors de leur rencontre du 3 septembre 2014, une information erronée relative à la prise en charge des vitrines. Il y est fait mention que, contrairement à ce qui avait été annoncé lors de cette rencontre, les vitrines étaient à la charge du preneur et devaient être chiffrées dans l'offre. Il est précisé, par ailleurs, que la date limite pour le dépôt de l'offre était, eu égard au contexte, repoussée au mercredi 24 septembre 2014 et que dans l'hypothèse où Nocibé ne pourrait pas apporter des réponses aux questions techniques, un envoi de l'offre mentionnant les différentes hypothèses dans le compte d'exploitation serait accepté (61).
69. Par courriel du 25 septembre 2014, le commercialisateur d'A2C a demandé à Nocibé de lui transmettre pour le soir même son offre qui devait comporter " un compte d'exploitation prévisionnel et le taux de redevance + Redevance minimale garantie annuel (RMG) " (62).
70. Le jour même, Nocibé a répondu que la rectification de l'erreur commise par A2C relative à la prise en charge des vitrines par la SAM nécessitait une vérification d'ordre technique de leur architecte (63).
71. Le 26 septembre 2014, Nocibé a envoyé, par courriel, le compte d'exploitation prévisionnel pour l'emplacement destiné à une activité de parfumerie et a demandé un rendez-vous pour présenter son projet de commercialisation (64).
72. Par courriel du 29 septembre 2014, le commercialisateur d'A2C a indiqué qu'il prendrait en compte les éléments transmis pour les communiquer au comité d'arbitrage de la SAM qui se tiendrait le 30 septembre 2014 (65).
73. Par courriel du même jour, Nocibé a réitéré sa demande de rencontrer les personnes en charge du projet à la mezzanine de la gare du Nord pour présenter son plan d'aménagement (66).
74. Par courriel du 2 octobre 2014, Nocibé a demandé quelle était la décision prise par le comité de sélection (67). En réponse à son courriel, A2C lui a répondu que son offre n'avait pas été retenue et a proposé une rencontre pour exposer les motifs de son rejet.
75. Par lettre du 3 octobre 2014, la présidente du directoire de la société Parfumerie Douglas, a fait remarquer que les modalités et l'existence d'un appel d'offres n'avaient pas été communiquées à la société et a demandé un certain nombre de documents dont l'avis de publicité, le règlement de consultation, les critères de choix et les candidats sélectionnés (68).
76. Par lettre du 9 octobre 2014, la SAM a répondu que n'étant pas soumise au Code des marchés publics, elle n'était pas tenue à une procédure d'appel d'offres pour la sélection des enseignes commerciales sis à la mezzanine banlieue de la gare du Nord (69).
77. Par lettre du même jour, Nocibé a fait référence à la réunion avec A2C qui s'était tenue le 6 octobre 2014 et qui avait pour objet les motifs du rejet de son offre. Selon Nocibé, au cours de la réunion, A2C aurait mentionné que dans le cadre d'une procédure de gré à gré, trois offres auraient été examinées et que Sephora avait été sélectionnée. Auraient été pris en considération : i) le montant de l'offre financière (ii) le positionnement et la notoriété de l'enseigne ; iii) le concept envisagé et la qualité des aménagements envisagés. Or il est relevé que seule une offre financière avait été demandée aux trois candidats sans élément qualitatif (70).
78. La SAM a répondu, par lettre du 29 octobre 2014, qu'elle n'était soumise à aucun formalisme ni à aucune obligation pour conclure un contrat en vue de l'occupation d'un emplacement au sein de la mezzanine banlieue de la gare du Nord. De surcroît, la SAM aurait fait le choix de Sephora pour l'enseigne devant occuper l'emplacement destiné à une activité de parfumerie, d'une part, parce que la proposition financière de Sephora était la plus élevée et, d'autre part, en raison de la notoriété de l'enseigne qui répondait aux besoins de la clientèle de la gare (71).
79. Par jugement du 2 juillet 2015, le tribunal administratif de Paris a enjoint à Nocibé de libérer l'emplacement qu'elle occupait à la mezzanine banlieue de la gare du Nord, sans droit ni titre à la gare du Nord depuis le 15 février 2015 (72).
b) Historique des relations entre la SAM-A2C et la société Marionnaud
80. Dans le courriel précédemment cité au point 66, en date du 26 août 2014, A2C avait informé les trois plus importants distributeurs sélectifs de parfums et de produits cosmétiques de la mise à disposition d'un nouvel emplacement destiné à la parfumerie à la mezzanine banlieue de la gare du Nord. S'agissant de l'enseigne Marionnaud, A2C a ajouté " Je souhaiterais évoquer le projet avec votre société et suis donc à la recherche d'un interlocuteur. Pourriez-vous me communiquer les coordonnées du contact concerné ? " (73)
81. La responsable expansion chez Marionnaud a répondu à A2C, le jour même, en manifestant sa surprise puisqu'elle avait déjà visité le nouvel emplacement destiné à la parfumerie à la gare du Nord, avec les équipes d'A2C, dès le début de l'été 2014 (74).
82. Il ressort en effet d'un échange de courriels entre Marionnaud et A2C, entre le 4 août 2014 et le 12 août 2014, que la première avait déjà sollicité des plans précis de l'emplacement destiné à une activité de parfumerie mais qu'elle ne les avait pas reçus, à cette date (75).
83. Par courriel du 28 août 2014, A2C a communiqué, à la suite de la demande de l'enseigne Marionnaud, le C.P.T.A. de la galerie, des plans de la mezzanine établis par l'AREP ainsi qu'un modèle de compte de résultat prévisionnel (76).
84. Par courriel du 19 septembre 2014, A2C a rappelé que la nouvelle date butoir pour le dépôt des offres des candidats pour exploiter l'emplacement dédié à la parfumerie était fixée au mercredi 24 septembre 2014 (77).
85. Par courriel du 25 septembre 2014, A2C a sollicité à nouveau Marionnaud pour le dépôt de son offre.
86. Par courriel du 29 septembre 2014, Marionnaud a indiqué qu'elle enverrait les documents dans les meilleurs délais. Le soir même, elle a précisé qu'elle ne serait finalement pas en mesure de déposer une offre définitive, le jour même, eu égard aux contraintes liées à l'emplacement et à l'importance des sommes engagées qui nécessitaient un délai plus long que celui proposé par A2C (78).
87. Par courriel du même jour, le commercialisateur d'A2C a répondu qu'il n'était pas en mesure de lui accorder un délai supplémentaire, par souci d'équité avec les autres candidats (79).
c) Historique des relations entre la SAM-A2C et Sephora
88. Dans le courriel du 26 août 2014, précité au point 66, informant les trois plus importants distributeurs sélectifs de parfums et de produits cosmétiques de la mise à disposition d'un nouvel emplacement à la gare du Nord, A2C a ajouté, concernant Sephora : " Je souhaiterais évoquer le projet avec votre société et suis donc à la recherche d'un interlocuteur. Pourriez-vous me communiquer les coordonnées du contact concerné ? " (80).
89. Le 27 août 2014, le responsable du développement européen chez Sephora a manifesté son intérêt (81) et il a été convenu un rendez-vous téléphonique le jour même (82). À la suite de cette conversation téléphonique, une visite sur site à la mezzanine de la gare du Nord a été prévue, le 1er septembre 2014. A2C a communiqué les plans C.P.T.A.E., des plans de la mezzanine établis par l'AREP ainsi qu'un modèle de compte de résultat prévisionnel, en précisant qu'une offre devait être faite pour le 12 septembre 2014.
90. Par courriel du 12 septembre 2014, Sephora a déposé sa proposition financière, comprenant un compte de résultat prévisionnel, un montant de loyer variable et une redevance annuelle de base (83). Puis, le 18 septembre 2014, un plan provisoire d'implantation sur l'emplacement destiné à une activité de parfumerie a été joint à la proposition financière déposée quelques jours auparavant (84).
91. Par courriel du 25 septembre 2014, A2C a demandé à Sephora s'il lui était possible de transmettre un nouveau compte d'exploitation prévisionnel en excluant la prise en charge par Sephora des vitrines de l'emplacement (85).
92. Un nouveau compte d'exploitation prévisionnel excluant la prise en charge des vitrines et précisant qu'il s'agissait d'une simple estimation a été communiqué à A2C le lendemain (86).
93. À la suite du comité d'arbitrage d'A2C et d'Altarea, qui a eu lieu le 30 septembre 2014, Sephora a été sélectionnée pour occuper l'emplacement de la mezzanine banlieue de la gare du Nord destiné à une activité de parfumerie, en raison de son offre financière et du concept de l'enseigne (87).
94. Le 23 juillet 2015, une convention de sous-occupation du domaine public a été signée entre la SAM et Sephora (88).
3. LES FAITS RELEVÉS LORS DE L'ATTRIBUTION DES EMPLACEMENTS DÉDIÉS À UNE ACTIVITÉ DE RESTAURATION RAPIDE
95. Avant le réaménagement de la mezzanine banlieue pour mise en sécurité incendie, sept emplacements dédiés à la restauration rapide y étaient dénombrés. Les enseignes qui y exploitaient des commerces de restauration rapide et de vente à emporter étaient les suivantes : i) Monoprix qui exploitait une coque intégrée à un point de vente de distribution alimentaire ; ii) La Croissanterie, iii) Bonne journée qui avait une activité de sandwicherie ; iv) Le lotus bleu, traiteur asiatique avec de la restauration sur place et de la vente à emporter, v) Good chef proposant une série de snacks, de hamburgers et de sandwichs, vi) Paul avec une activité de sandwicherie et de croissanterie jouxtant, vii) Segafredo (exploitée par O'Rêve) ayant une activité de restauration sur place et de vente à emporter (89).
96. Le chiffre total réalisé dans le secteur de la restauration rapide au sein de la mezzanine banlieue s'élevait alors à environ 5 millions d'euros par an.
97. À l'issue des travaux de réaménagement de la mezzanine, le nouveau plan merchandising prévoit quatre emplacements de restauration rapide et de vente à emporter et un point de vente de chocolats avec une activité de " snacking " (90).
a) Historique des relations contractuelles entre la SAM-A2C et O'Rêve
98. Le 2 octobre 2012, O'Rêve a conclu une convention d'occupation du domaine public pour commercialiser un emplacement dédié à de la restauration rapide et de vente à emporter situé à la mezzanine banlieue de la gare du Nord pour une durée de 18 mois (91).
99. En juin 2014, la SAM a proposé à O'Rêve la conclusion d'un avenant, en vue de prolonger son autorisation d'occupation du domaine public jusqu'au 30 novembre 2014, lui rappelant qu'en raison des travaux de réaménagement, son contrat prendrait fin à cette date (92). Cet avenant n'a pas été signé par O'Rêve (93).
100. Par courrier du 18 septembre 2014, O'Rêve a demandé respectivement à Altarea, à A2C et à la SAM le renouvellement de son contrat pour l'exploitation de son enseigne Segafredo (94).
101. Le 26 septembre 2014, la SAM a rappelé que le contrat de O'Rêve prendrait fin le 30 novembre 2014 et qu'elle devait libérer l'emplacement à cette date (95).
102. Par jugement du Tribunal administratif de Paris du 4 juin 2015, il a été enjoint à O'Rêve de libérer l'emplacement qu'elle occupait à la mezzanine banlieue de la gare du Nord, sans droit ni titre, sous quinzaine (96).
b) Historique des relations contractuelles entre la SAM-A2C et Elior Concessions Gares
103. Elior Concessions Gares exploitait, depuis 2002, un emplacement sous enseigne Paul à la mezzanine banlieue de la gare du Nord, jouxtant l'emplacement de l'enseigne Segafredo, exploitée par O'Rêve. Le contrat de sous-occupation du domaine public qui avait été conclu pour une durée de 10 ans a fait l'objet de prorogations jusqu'au 15 février 2015 (97).
104. Il ressort d'un courriel, en date du 31 juillet 2014, adressé à Elior Concessions Gares que A2C lui aurait communiqué le projet de commercialisation de la mezzanine banlieue à cette date, tout en lui donnant la possibilité de réaliser des travaux de l'enseigne concomitamment aux travaux réalisés par la SAM (98).
105. Des négociations ont alors eu lieu, au cours du mois de septembre, entre A2C et Elior Concessions Gares pour le maintien de l'enseigne sur l'emplacement qu'elle occupait avant les travaux de réaménagement de la mezzanine banlieue (99).
106. Lors du comité d'arbitrage de la SAM du 30 septembre 2014, la SAM semble avoir validé le maintien de l'enseigne Paul sur l'emplacement que l'enseigne occupait sous condition d'une amélioration de son offre financière et notamment d'un taux de redevance minimale garantie plus élevé (100).
107. Une convention de sous-occupation du domaine public pour l'exploitation de l'enseigne Paul à la mezzanine banlieue de la gare du Nord, a été signé entre la SAM et Elior Concessions Gares, le 15 mai 2015.
108. Parallèlement aux négociations de gré à gré avec Elior Concessions Gares pour le maintien de l'enseigne Paul à la mezzanine banlieue, A2C a sollicité différentes enseignes pour occuper les trois autres emplacements dédiés à la restauration rapide (101).
109. S'agissant de l'emplacement dédié à une activité de " coffee shop ", c'est-à-dire de café et de restauration rapide (102) de la mezzanine banlieue de la gare du Nord, A2C a sollicité au cours de l'été 2014, plusieurs enseignes, à savoir les enseignes Colombus, Starbucks exploitée par SSP, Pomme de pain, Costa Coffee exploitée par Elior Concessions Gares.
110. À la suite des visites sur site, ont été transmis respectivement par le commercialisateur d'A2C aux enseignes intéressées, le C.P.TA.E. la plaquette d'information sur la mezzanine banlieue comprenant le plan de la mezzanine et de la coque.
111. L'enseigne Brioche dorée a, de sa propre initiative, demandé des renseignements à A2C sur l'emplacement destiné à un " coffee shop " mais n'a pas déposé d'offre.
112. Il a été demandé à chacune de ces enseignes de déposer une offre pour le 24 septembre 2014.
113. Lors de son comité d'arbitrage, en date du 30 septembre 2014, la SAM a sélectionné l'enseigne Costa Coffee, cette dernière ayant fait la meilleure offre financière par rapport aux enseignes concurrentes. Toutefois, A2C a demandé d'augmenter le montant de la redevance minimale garantie proposée par Elior Concessions Gares ainsi que le taux de sécurisation sur la redevance minimale garantie (103).
114. Une négociation bilatérale a eu lieu entre A2C et Elior Concessions Gares pour l'exploitation du " coffee shop " par l'enseigne Costa Coffee et un accord financier a été trouvé entre les parties, dès le lendemain, le 1er octobre 2014.
115. Le 19 mai 2015, Elior Concessions Gares a signé une convention d'occupation du domaine public avec la SAM, en vue de l'exploitation de l'enseigne Costa Coffee sur la coque n° 7 de la mezzanine banlieue.
E. LES PRATIQUES DÉNONCÉES
116. Dans le cadre de leurs saisines au fond, les parties saisissantes dénoncent plusieurs pratiques qui seraient contraire aux articles L. 420-1 et L. 420-2 du Code de commerce ainsi qu'aux articles 101 et 102 du TFUE.
1. ATTRIBUTION DE L'EMPLACEMENT POUR UNE ACTIVITÉ DE DISTRIBUTION SÉLECTIVE DE PARFUMS ET DE PRODUITS COSMÉTIQUES
117. Nocibé soutient tout d'abord que l'accord conclu entre la SAM et Sephora aux fins d'exploiter l'unique emplacement destiné à une activité de parfumerie à la mezzanine banlieue de la gare du Nord constitue une entente anticoncurrentielle ayant pour objet et pour effet de l'évincer du marché de la distribution sélective de parfums et de produits cosmétiques.
118. Selon elle, l'attribution d'un nouvel emplacement dédié à la distribution sélective de parfums et de produits cosmétiques à la mezzanine banlieue de la gare du Nord nécessitait de recourir à une procédure de mise en concurrence, eu égard à l'avantage concurrentiel conféré par l'emplacement en cause. L'accord ainsi conclu entre la SAM et Sephora, à l'issue d'une négociation de gré à gré serait, en l'absence d'une mise en concurrence effective, constitutif d'une entente qui aurait pour objet et effet d'évincer Nocibé de la gare du Nord et de fausser la concurrence sur le marché de la distribution sélective de parfums et cosmétiques de luxe dans les gares. Certains éléments au cours de la procédure de sélection de Sephora montreraient que celle-ci aurait été informée avant ses concurrents de la commercialisation d'un nouvel emplacement dédié à la parfumerie à la gare du Nord et aurait bénéficié de conditions plus avantageuses lors du dépôt de son offre.
119. Elle reproche ensuite à la SAM, considérée en situation de monopole sur le marché de l'attribution de droits de sous-occupation du domaine public ferroviaire à la mezzanine banlieue de la gare du Nord, des comportements pouvant être qualifiés d'abusifs, au sens des articles L. 420-2 du Code de commerce et 102 TFUE. Elle fait notamment état du recours à une procédure non transparente et discriminatoire qui aurait eu pour objet et effet de l'évincer du marché connexe de la distribution sélective de parfums et produits cosmétiques de luxe dans les gares. Selon elle, la SAM n'aurait pas permis aux candidats autres que Sephora de faire une offre ou du moins de faire une offre dans des conditions équitables et non discriminatoires.
2. ATTRIBUTION DES EMPLACEMENTS POUR DES ACTIVITÉS DE RESTAURATION RAPIDE
120. O'Rêve considère que la SAM et Elior Concessions Gares se seraient entendues pour répartir les emplacements commerciaux dédiés à la restauration rapide au sein de la mezzanine banlieue de la gare du Nord. La SAM, dans le cadre de ses relations commerciales existantes avec Elior Concessions Gares pour la gestion de l'emplacement commercialisé sous l'enseigne Paul, n'aurait sollicité que cette société pour lui attribuer deux emplacements dédiés à la restauration rapide, ce qui aurait eu pour effet d'évincer les concurrents sur ledit marché.
121. O'Rêve reproche également à la SAM d'avoir abusé de sa position dominante en ayant recours à une procédure de négociation de gré à gré pour l'attribution d'un lot destiné à une activité de restauration rapide. Selon elle, le choix par la SAM d'une procédure non transparente et discriminatoire pour sélectionner les exploitants de la mezzanine banlieue de la gare du Nord serait constitutif d'un abus contraire à l'article L. 420-2 du Code de commerce.
122. En choisissant les procédures de sélection des exploitants en fonction des types d'emplacements commerciaux et sans publicité préalable, la SAM favoriserait certains opérateurs en leur donnant un accès privilégié aux activités commerciales sur le domaine public, ce qui fausserait les conditions d'accès au marché des sous-concessions du domaine public.
123. La pratique de la SAM aurait également eu pour effet de donner une exclusivité à Elior Concessions Gares dans la commercialisation des points de vente de restauration rapide et de placer celle-ci en situation d'abuser de sa position dominante sur le marché connexe de la restauration rapide de la mezzanine banlieue de la gare du Nord.
F. LES DEMANDES DE MESURES CONSERVATOIRES
124. Nocibé demande, à titre conservatoire, et dans l'attente de la décision à intervenir au fond, de suspendre les effets des pratiques mises en œuvre par la SAM et Sephora qui sont susceptibles de constituer des pratiques contraires aux articles L. 420-1 et L. 420-2 du Code de commerce et des articles 101 et 102 TFUE, et donc d'enjoindre à :
- la SAM et Sephora de suspendre l'exécution de l'accord relatif à la sous-occupation du nouvel emplacement dédié à la parfumerie ;
- la SAM et à Sephora de s'abstenir de toute communication afférente à cet accord, notamment à des fins d'utilisation publicitaire ou commerciale ;
- la SAM de procéder à une mise en concurrence transparente et non discriminatoire des offres d'aménagement de l'emplacement en cause et de lancer la procédure de mise en concurrence au plus tard, le 15 février 2015 ;
- la SAM d'ouvrir une procédure de mise en concurrence à tout opérateur intéressé, et d'opérer un choix entre les différentes offres de façon transparente et non discriminatoire, dans le respect du cadre qui sera défini dans le dossier de consultation que la SAM aura élaboré et remis aux candidats en amont de la procédure de mise en concurrence ;
- la SAM de limiter la durée du contrat de sous-occupation de l'emplacement dédié à la parfumerie à cinq ans maximum ;
- la SAM de poursuivre l'exécution du contrat de sous-occupation entre Nocibé et la SAM au-delà du 15 février 2015.
125. O'Rêve demande, eu égard au fait que les pratiques dénoncées lui portent une atteinte grave et immédiate, d'enjoindre à la SAM, à A2C, à Altarea ainsi qu'à Elior Concessions Gares de cesser les pratiques constatées et de lui permettre de se maintenir dans les lieux jusqu'à ce qu'il soit statué sur les faits litigieux.
II. Discussion
126. L'article R. 464-1 du Code de commerce énonce que : " la demande de mesures conservatoires mentionnée à l'article L. 464-1 ne peut être formée qu'accessoirement à une saisine au fond de l'Autorité de la concurrence. Elle peut être présentée à tout moment de la procédure et doit être motivée ". À cet égard, la Cour de cassation a considéré que " lorsque l'Autorité est saisie d'une demande de mesures conservatoires, il lui appartient de vérifier préalablement si les faits invoqués sont appuyés d'éléments suffisamment probants et, dans la négative, de rejeter la saisine, ce rejet, entraînant, par voie de conséquence, celui de la demande de mesures conservatoires, sans examen de celle-ci " (Cass.com.9 octobre 2012, n° 10-27388).
127. Une demande de mesures conservatoires ne peut donc être examinée que pour autant que la saisine au fond n'est pas été déclarée irrecevable ou rejetée faute d'éléments suffisamment probants, en application, respectivement, des alinéas 1 et 2 de l'article L. 462-8 du Code de commerce.
A. SUR LA COMPÉTENCE DE L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE
128. L'article L. 410-1 du Code de commerce soumet aux règles définies notamment au titre II du livre IV du Code de commerce, consacré aux pratiques anticoncurrentielles, " toutes les activités de production, de distribution et de service y compris celles qui sont le fait de personnes publiques notamment dans le cadre de conventions de délégation de service public ".
129. Constitue une activité économique, toute activité consistant à offrir des biens ou des services sur un marché donné (voir arrêt de la Cour de Justice de l'Union européenne du 24 novembre 2002, Aéroports de Paris- Commission européenne, C-82-01P, Rec. I-9334, point 79 et jurisprudence citée et, en ce sens, les décisions du Conseil de la concurrence n° 09-D-10 du 27 février 2009 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur du transport maritime entre la Corse et le continent, point 89 et de l'Autorité de la concurrence, n° 10-D-13 du 15 avril 2010 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la manutention pour le transport de conteneurs au port du Havre, point 150).
130. En revanche, l'Autorité de la concurrence n'est pas compétente pour statuer sur les actes par lesquels les personnes publiques font usage, pour l'organisation du service public dont elles ont la charge de prérogatives de puissances publiques. La légalité de ces actes et leur conformité au droit de la concurrence ne peuvent être appréciées que par le juge administratif.
131. Ainsi, dans sa décision Aéroports de Paris et compagnie Air France c-TAT European Airline Sarl, du 18 octobre 1999, le Tribunal des conflits a-t-il jugé que les décisions par lesquelles les personnes publiques exercent la mission de service public qui leur incombe au moyen de prérogatives de puissance publique, même lorsque ces décisions constituent des actes de production, de distribution ou de service au sens de l'article L. 410-1 du Code de commerce, ne relèvent pas de la compétence du Conseil de la concurrence et qu'il en est de même des pratiques qui sont indissociables de ces décisions. Plus récemment, l'arrêt Gisserot du Tribunal des conflits, en date du 4 mai 2009 confirme que l'Autorité n'est pas compétente pour connaître " des décisions ou actes portant sur l'organisation du service public ou mettant en œuvre des prérogatives de puissance publique ".
132. En l'espèce, la SAM, société de droit privé, a conclu une convention d'occupation du domaine public avec la SNCF, établissement public, notamment aux fins de commercialiser et de gérer l'espace dédié à des activités de commerce de la mezzanine banlieue de la gare du Nord. Les activités en cause de la SAM consistant en la commercialisation et la gestion d'espaces commerciaux peuvent être qualifiées d'activités économiques, au sens de l'article L. 410-1 du Code de commerce qui ne relèvent pas de l'exercice de puissance publique, même si elles sont exercées sur le domaine public ferroviaire.
133. En tout état de cause, si, comme le soutiennent les parties défenderesses, il y a lieu d'appliquer l'article L. 2331-1 du Code général de la propriété des personnes publiques qui dispose que " sont portés devant la juridiction administrative les litiges relatifs : 1) aux autorisations ou contrats comportant occupation du domaine public, quelle que soit leur forme ou leur dénomination, accordées ou conclus par les personnes publiques ou leurs concessionnaires [...] ", force est de constater que le Tribunal des conflits a jugé que seuls les concessionnaires de services publics sont visés par cette disposition (Tribunal des conflits, 12 décembre 2005, Préfet de Seine-Maritime c-TGI de Rouen). Ainsi, une sous-convention d'occupation domaniale conclue entre un occupant qui n'est pas délégataire d'un service public et une société de droit privé relève de la compétence du juge judiciaire (Tribunal des conflits, 14 mai 2012, Mme A- Société d'exploitation Sports événements et Ville de Paris, TC, 10 juillet 1956, Société des steeple-chases de France, p.587). Ce n'est que dans les situations où l'occupant du domaine public est délégataire d'un service public ou encore que celui-ci agit pour le compte de la personne publique qui l'a autorisé à occuper le domaine public (Tribunal des conflits 16 octobre 2006, EURL, pharmacie de la gare Saint-Charles-A2C) que les litiges relatifs aux sous-conventions d'occupation du domaine public relèvent de la compétence des juridictions administratives.
134. En l'espèce, il est constant que la SAM, occupant du domaine public à la suite de la convention conclue avec la SNCF, établissement public, aux fins de la commercialisation et de la gestion des espaces commerciaux sis à la mezzanine de la gare du Nord, n'est pas délégataire d'un service public.
135. La SAM n'agit pas davantage pour le compte de la SNCF. En effet, elle dispose d'une autonomie décisionnelle dans la validation du plan merchandising définissant les types d'activités par espaces mais également dans le choix final des exploitants des surfaces commerciales. Créée par A2C et Altarea France, société de droit privée sans lien capitalistique avec la SNCF, la SAM n'est pas détenue à 100 %, même indirectement, par la SNCF, à l'opposé d'A2C dans la décision du tribunal des conflits, EURL, Pharmacie St Charles, précitée. Elle n'a pas été mandatée par la SNCF pour commercialiser et gérer les espaces commerciaux de la mezzanine banlieue de la gare du Nord mais a obtenu, dans le cadre de la convention d'occupation du domaine public, le droit d'occuper ledit domaine public ferroviaire.
136. Dès lors, dans la mesure où il est constant que la SAM, en concédant à des sociétés commerciales des espaces commerciaux sis à la mezzanine banlieue de la gare du Nord pour que ces dernières y exercent une activité commerciale, n'est pas délégataire d'un service public et n'a pas agi pour le compte de la SNCF, les litiges entre Nocibé, et la SAM, d'une part, et O'Rêve et la SAM, d'autre part, relèvent de la compétence des juridictions judiciaires (voir jurisprudence citée, point 132 ci-dessus).
137. Le fait que le juge judiciaire soit compétent pour connaître des litiges relatifs aux conventions de sous-occupation entre un occupant du domaine public et les exploitants d'espaces dédiés à des activités commerciales ne saurait exclure la compétence de l'Autorité de la concurrence, dès lors que les pratiques anticoncurrentielles alléguées lors de l'attribution par la SAM des espaces commerciaux de la mezzanine banlieue de la gare du Nord à des exploitants pourraient être de nature à porter atteinte au fonctionnement de la concurrence sur les marchés affectés.
138. Il s'ensuit, eu égard à l'ensemble de ce qui précède, que l'Autorité de la concurrence est compétente pour analyser les présentes saisines et les demandes de mesures conservatoires.
B. SUR L'ANALYSE CONCURRENTIELLE DES PRATIQUES DÉNONCÉES
139. Il sera vérifié ci-après si les éléments apportés par Nocibé et par O'Rêve sont suffisamment probants pour étayer la réalité des pratiques alléguées.
1. SUR LA DÉFINITION DU MARCHÉ PERTINENT
140. L'Autorité de la concurrence, dans sa pratique décisionnelle constante, considère que " se situent sur un même marché les produits et services dont on peut raisonnablement penser que les acheteurs les regardent comme des moyens alternatifs entre lesquels ils peuvent arbitrer pour satisfaire une même demande. [...] La substituabilité entre différents biens ou services du point de vue de la demande constitue le critère déterminant pour la délimitation du marché pertinent " (104).
141. Le marché géographique, quant à lui, comprend le territoire sur lequel les entreprises sont engagées dans l'offre et la demande en cause et sur lequel les conditions de concurrence sont homogènes.
a) Sur le marché amont de la commercialisation des emplacements commerciaux en gare
142. La délimitation du marché pertinent concernant l'attribution des emplacements commerciaux en gare n'a pas été abordée en tant que telle par la pratique décisionnelle.
143. Les parties saisissantes considèrent qu'un raisonnement par analogie pourrait être fait avec les services d'exploitation des emplacements commerciaux sous douane dans les aéroports (décision du Conseil de la concurrence du 27 mars 2008 n° 08-D-05 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des commerces sous douane des aéroports parisiens) ou avec l'attribution de régies d'emplacements publicitaires dans les réseaux de transport (décision n° 05-D-53 du 6 octobre 2005 relative à la situation de concurrence dans le secteur des espaces publicitaires du réseau des transports en commun urbains). Appliqué au cas d'espèce, le raisonnement suivi par le Conseil de la concurrence conduirait à délimiter un marché de l'attribution de droits de sous-occupation du domaine public ferroviaire à la mezzanine banlieue de la gare du Nord. Ainsi, le demandeur serait l'organisateur du processus de mise en concurrence, à savoir en l'espèce la SAM, et les offreurs en compétition seraient les opérateurs susceptibles d'y répondre. Le marché géographique serait nécessairement circonscrit à la zone géographique concernée par le processus de mise en concurrence.
144. Nocibé précise que l'Autorité de la concurrence ayant déjà considéré qu'un tel marché fonctionne par succession de marchés instantanés à chaque attribution ou renouvellement d'une concession, il pourrait être soutenu qu'il existe un segment de marché plus étroit correspondant au marché de l'attribution du droit de sous occupation de l'emplacement dédiée à la parfumerie dans la mezzanine -2 de la gare du Nord (105).
145. La SAM, A2C et Altarea rétorquent que les définitions des marchés des décisions concernant la commercialisation des emplacements sous douane à l'aéroport de Roissy et la commercialisation d'emplacements publicitaires par la RATP ne seraient pas pertinentes puisque la première définition concernerait des conditions de concurrence spécifiques et la seconde distinguerait l'attribution de contrats accordant la régie des emplacements, en la distinguant de la location d'emplacement (106). Selon elles, la SAM n'est pas dans une situation de commande publique où la personne publique serait en position de demandeur, mais elle offre, contre le paiement de redevance, la possibilité pour un opérateur économique d'exercer une activité commerciale et de réaliser des profits dont il est le seul destinataire (107).
146. Elior soutient quant à elle, qu'à supposer que la SAM exerce une activité économique en mettant à disposition des emplacements commerciaux, elle devrait alors être considérée comme tout opérateur privé et serait donc en concurrence avec tous les bailleurs privés, notamment ceux proposant des locaux aux alentours immédiats des gares de sorte qu'il n'y aurait donc pas lieu de limiter le marché à la mezzanine banlieue de la gare du Nord (108).
147. Les modalités d'attribution des espaces commerciaux par la SAM pourraient, par certains aspects, conduire à considérer que la SAM agit comme le fait, dans un tout autre secteur, un gestionnaire d'aéroport, exprimant une demande de services auprès de prestataires spécialisés, offreurs qui sont les opérateurs commerciaux ayant des activités en détail pour emporter les marchés ainsi proposés. En effet, la SAM détermine elle-même le format des services qu'elle propose aux passagers et clients de la mezzanine banlieue de la gare du Nord et se rémunère par un pourcentage du chiffre d'affaires des commerces. Par ailleurs, les conventions de sous-occupation du domaine public conclues entre les exploitants et la SAM étant consenties à titre précaire et révocable, la SAM se réserve le droit de retirer à tout moment l'autorisation de sous-occupation aux exploitants. La durée des contrats est également plus courte que la durée des baux commerciaux et le cocontractant n'a pas droit au renouvellement de son contrat, de sorte que l'activité exercée sur le domaine public ferroviaire ne peut être assimilée à un fonds de commerce.
148. Il pourrait, par conséquent, être considéré que la SAM n'interviendrait pas sur le marché comme offreur passif de surfaces commerciales ou comme simple bailleur mais bien comme demandeur de services d'exploitation de boutiques dont elle déterminerait préalablement le format. Dans cette hypothèse, la SAM serait en situation de monopsone sur le marché de l'attribution des emplacements commerciaux sis à la mezzanine banlieue de la gare du Nord.
149. Toutefois, dans la mesure où, comme cela sera analysé ultérieurement, aucune pratique abusive de la part de la SAM n'a pu être relevée au cas d'espèce, il n'y a pas lieu de procéder à une analyse plus précise du marché et de rechercher si la SAM dispose d'une position dominante sur celui-ci (voir en ce sens, décision de l'Autorité n° 12-D-11 du 6 avril 2012 concernant une saisine de la société Roland Vlaemynck Tisseur à l'encontre de pratiques mises en œuvre dans le secteur de la commercialisation de serviettes industrielles, point 103, confirmée par la Cour d'appel de Paris, 26 septembre 2013).
b) Sur le marché aval de la vente au détail
150. Les deux saisines concernent des emplacements dédiés à deux types d'activités commerciales : la première est relative à une activité de distribution de parfums et de produits cosmétiques et la seconde concerne une activité de restauration rapide et de vente de boissons. Les deux marchés aval seront donc analysés successivement.
Sur le marché aval de la distribution sélective de parfums et de produits cosmétiques
151. Dans de précédentes décisions, la Commission européenne 14-DCC-71 du 4 juin 2014 relative à la prise de contrôle exclusif du groupe Nocibé par Advent international Corporation), rappelant que le marché de la distribution sélective des parfums et cosmétiques de luxe se distingue de la vente au détail de produits de parfumerie et de cosmétiques " ordinaires ", qui ne requiert pas les mêmes exigences en termes de présentation et d'environnement (109) et le ministre de l'économie (110) ont retenu l'existence d'un marché de la vente au détail de produits de parfums et cosmétiques de luxe. L'Autorité de la concurrence a repris cette définition de marché (décision n°14-DCC-71 du 4 juin 2014 relative à la prise de contrôle exclusif du groupe Nocibé par Advent international Corporation), rappelant que le marché de la distribution sélective des parfums et cosmétiques de luxe se distingue de la vente au détail de produits de parfumerie et de cosmétiques " ordinaires ", qui ne requiert pas les mêmes exigences en termes de présentation et d'environnement.
152. Il a, par ailleurs, été distingué, au sein de la distribution des parfums et cosmétiques de luxe, les réseaux de distribution sélective du canal des magasins détaxés (ou travel retail) (111). Ce dernier canal qui regroupe les magasins situés dans les aéroports, les aéronefs et les navires, a pu être considéré comme un marché distinct, dans la mesure où les conditions de négociation et de vente étaient différentes de celles de la distribution sélective et que la gamme de produits proposée était plus restreinte avec un packaging différent destiné à une clientèle composée majoritairement de voyageurs internationaux. Toutefois, la définition exacte du marché est restée ouverte, les parties n'étant pas présentes sur ce canal.
153. Il s'ensuit que le marché de produits pertinents pourrait être délimité comme celui du marché de la vente au détail de produits de parfums et cosmétiques de luxe.
154. Toutefois, se pose la question de la délimitation géographique du marché de la vente au détail de produits et parfums cosmétiques de luxe.
155. Il y a lieu de relever, tout d'abord, que la distribution sélective en gare ne s'opère pas via un canal de distribution spécifique, tel que celui des aéroports avec des produits détaxés, le prix public des produits distribués en gare et notamment à la mezzanine banlieue de la gare du Nord étant du même ordre de grandeur que dans des magasins du centre-ville (112).
156. Si, comme le relèvent la SAM, A2C et Altarea ainsi que Nocibé, la demande provient exclusivement de voyageurs pendulaires se rendant sur leur lieu de travail ou leur domicile et devant disposer d'un titre de transport pour accéder à cette zone commerciale, il s'agit d'une clientèle de transit qui, contrairement à la clientèle des commerces sous douane dans les aéroports, peut effectuer ses achats dans un autre point de vente Nocibé. Contrairement à la clientèle qualifiée de captive des commerces sous douane, ayant franchi les contrôles de police et se situant dans des zones d'embarquement ou encore à la clientèle achetant des carburants sur les autoroutes, (113) les clients de Nocibé qui se trouvent dans la zone de la mezzanine banlieue de la gare du Nord ont la possibilité d'effectuer leur achat dans un autre point de vente. Les facilités pour le consommateur liées au passage sur son parcours lieu de travail- domicile de réaliser ses achats, ne sauraient présumer d'un marché distinct, tant qu'il lui est loisible de les effectuer, à la sortie de la gare ou dans un tout autre point de vente.
157. Par ailleurs, les produits vendus dans le point de vente Nocibé ne diffèrent pas de ceux que le consommateur peut se procurer dans d'autres points de vente Nocibé ou chez d'autres distributeurs de parfums et de produits cosmétiques (114) Le fait que Nocibé ait adapté ses produits à la clientèle de la mezzanine banlieue de la gare du Nord ne saurait infirmer ce qui précède dans la mesure où le packaging et les gammes de produits ne sont pas différents selon les points de vente.
158. L'ensemble de ces éléments conduisent à considérer que si le marché de produits en cause pourrait être défini comme de la vente au détail des parfums et des cosmétiques de luxe, une délimitation de ce marché de produits aux gares et plus spécifiquement à la mezzanine banlieue de la gare du Nord n'a pas lieu d'être.
159. En tout état de cause, la question exacte du marché géographique peut être laissée ouverte dans la mesure où aucune pratique abusive ne peut être établie à l'encontre de Sephora, comme cela sera examiné ultérieurement. Il n'est donc pas nécessaire de définir, en l'espèce, le marché géographique de la distribution sélective de parfums et de produits cosmétiques et de rechercher si Sephora y bénéficiait d'une position dominante (voir en ce sens, décision de l'Autorité n° 12-D-11 précitée et arrêt de la Cour d'appel de Paris du 28 mai 2015). Sur le marché aval de la restauration rapide et de la vente à emporter
160. Au sein de la restauration commerciale, la pratique décisionnelle opère une distinction entre le marché de la restauration rapide à bas prix (qui comprend les fast-foods, les self-services et la vente à emporter-livraison à domicile) et celui de la restauration plus sophistiquée incluant, notamment un service à table (voir, en ce sens, décisions de l'Autorité de la concurrence n° 15-DCC-47 du 5 mai 2015 relative à la prise de contrôle exclusif de la société GPA Courtepaille par la société ICG, point 12 et n° 10-DCC-94 du 16 août 2010 relative à l'acquisition du contrôle conjoint du groupe Dupont par Abenex IV et Monsieur Pascal Z... et décisions de la Commission européenne, COMP/M.4220-Food service Project-TelePizza, du 6 juin 2006, points 7 et 8 et COMP/M.2490, TPG Advisors-Goldman Sachs-Bain Capital Investors-Burger King, du 11 octobre 2002).
161. Il est précisé par la Commission européenne que tous les restaurants avec un service rapide, même s'ils proposent des types de repas différents, doivent être considérés comme appartenant à un même marché de produits dans la mesure où les principales caractéristiques de ce marché sont la rapidité du service, les prix bas et le côté pratique du service (décision de la Commission européenne, TPG Advisors-Goldman Sachs-Bain Capital Investors-Burger King précitée, point 17).
162. Par ailleurs, la pratique décisionnelle tant nationale que communautaire a distingué, dans le secteur de la restauration, le marché de la restauration concédée de celui de la restauration collective. Cette délimitation repose sur le critère selon lequel le service de la restauration est affecté principalement ou pas à une autre activité (aéroports, gares, musées, commerce de détail, etc.) (décisions de l'Autorité n° 12-DCC-68 du 23 mai 2012 relative à l'acquisition de la SAS Ansamble par le groupe Elior et de la Commission européenne COMP/ M.1972 du 26 juin 2000, Granada-Compass, points 12 à 15, COMP/M.3728 Autogrill-Altadis-Aldeasa, du 23 mars 2005, point 10).
163. Toutefois, la Commission européenne a laissé ouverte la question d'une délimitation plus étroite du marché de la restauration de concession (exemple les aéroports, les gares ou les lieux de sport et de loisirs) (voir, en ce sens, décision de la Commission européenne Autogrill-Altadis-Aldeasa, précitée, point 10).
164. Comme indiqué pour le marché de la distribution sélective de parfums et de produits cosmétiques, un certain nombre d'éléments conduisent à considérer que le marché de la restauration rapide n'est pas susceptible d'être restreint en l'espèce à celui de la mezzanine banlieue de la gare du Nord. En effet, il est difficile de considérer, à l'instar de la clientèle autoroutière ou des commerces sous douane à l'aéroport, que la clientèle de la mezzanine banlieue de la gare du Nord puisse être qualifiée de captive. En outre, la gamme de produits offerts par l'enseigne Paul ou les autres enseignes de restauration rapide au sein de la mezzanine banlieue de la gare du Nord ne diffère pas de celle proposée dans d'autres points de vente de restauration rapide ni de celle proposée dans tous les points de vente sur le territoire national.
165. De plus, la demande de la mezzanine banlieue de la gare du Nord étant pendulaire à 80 %, il s'agit d'une clientèle qui est en transit à la gare du Nord, entre son domicile et son lieu de travail et qui peut décider de se restaurer sur son lieu de départ ou sur son point d'arrivée. Les points de vente de restauration rapide de la mezzanine banlieue sont également en concurrence avec les autres points de vente avoisinant la gare du Nord.
166. En tout état de cause, il est également relevé par les parties que le secteur d'activité de la restauration concédée et même celui plus restreint de la restauration en gare est considéré comme concurrentiel dans la mesure où sont présentes de nombreuses enseignes, exploitées par de grands groupes de la restauration concédée ou de nombreux indépendants. À considérer le marché de la restauration concédée, le groupe Elior ne disposerait que de [0-10] % de part de marché et d'une part de marché se situant [25-38] % si on restreignait le marché pertinent comme celui du marché de la restauration concédée en gares (115).
167. Dès lors, que la délimitation du marché pertinent soit celle de la restauration en gares ou encore une délimitation plus étroite de la restauration concédée à la mezzanine banlieue de la gare du Nord, Elior Concessions Gares ne disposerait pas de parts de marché permettant de considérer qu'elle est en position dominante sur lesdits marchés.
168. La question d'une délimitation plus étroite du marché de la restauration concédée peut donc rester ouverte.
2. SUR L'EXISTENCE D'UNE ENTENTE ANTICONCURRENTIELLE ENTRE, D'UNE PART, LA SAM ET SEPHORA, ET, D'AUTRE PART, LA SAM ET ELIOR CONCESSIONS GARES
a) Sur l'existence d'une entente anticoncurrentielle entre la SAM et Sephora
169. Nocibé considère, en substance, que la SAM et Sephora se sont entendues dans le cadre d'une négociation de gré à gré aux fins que Sephora obtienne l'unique emplacement dédié à la parfumerie à la mezzanine banlieue de la gare du Nord. Cette entente entre la SAM et Sephora emporterait une restriction concurrentielle par objet et produirait des effets anticoncurrentiels (116).
170. Tout d'abord, il y a lieu de préciser que, contrairement à ce que soutient la partie saisissante, la SAM et A2C n'ont pas procédé à une négociation de gré à gré avec Sephora, lors de l'attribution de l'emplacement destiné à une activité commerciale. Comme le démontre la chronologie des faits et l'envoi, le même jour, par le commercialisateur d'A2C, d'un courriel adressé à Marionnaud, Sephora et Nocibé leur proposant de déposer chacune une offre, si elles étaient intéressées par un nouvel emplacement de 230 m2, dédié à la parfumerie à la mezzanine banlieue de la gare du Nord, (117) une mise en concurrence des principaux distributeurs de parfums et produits cosmétiques a bien eu lieu. En effet, à elles trois, les enseignes sollicitées qui ont une certaine notoriété représentent plus de 75 % de la distribution sélective des parfums et des produits cosmétiques sur le marché national.
171. Certes, aucun appel d'offres n'a été publié dans des journaux spécialisés pour ce nouvel emplacement, contrairement à ce qui avait été préalablement fait par la SAM, en 2011. Pour autant la SAM a bien procédé à une présélection des enseignes, sollicitant les trois plus importants distributeurs de parfums et produits cosmétiques sur le marché national, considérant qu'elles étaient plus à même de répondre aux besoins de la clientèle pendulaire de la mezzanine banlieue de la gare du Nord et de générer un chiffre d'affaires important dont un pourcentage lui est redistribué sous forme de redevances. La suite de la procédure de sollicitation commerciale est très similaire à un appel d'offres classique, puisqu'il a été imparti aux sociétés intéressées par le nouvel emplacement de déposer une offre financière pour la même date, après communication des mêmes informations, à savoir, le cahier des prescriptions techniques, architecturales et environnementales (C.P.TA.E.), des plans de la mezzanine établis par l'AREP ainsi qu'un modèle de compte de résultat prévisionnel. La procédure suivie peut, par conséquent, être considérée comme une mise en concurrence des principaux acteurs sur le marché de la distribution des parfums et des produits cosmétiques de luxe.
172. Quant au prétendu objet anticoncurrentiel de l'accord entre Sephora et la SAM, force est de constater que la partie saisissante n'apporte aucun élément de preuve permettant de considérer que la SAM et Sephora se seraient concertées en vue de se répartir l'unique emplacement de la mezzanine banlieue de la gare du Nord dédié à la parfumerie. Les éléments obtenus lors de l'instruction sur le déroulement de la procédure d'attribution de l'emplacement dédié à la parfumerie ne permettent pas davantage de conclure que l'accord intervenu entre la SAM et Sephora soit le résultat d'une concertation ayant pour objet d'évincer les concurrents de Sephora sur ledit emplacement.
173. S'agissant enfin des prétendus effets anticoncurrentiels de l'accord, il y a lieu de relever que le chiffre d'affaires généré par la parfumerie à la mezzanine banlieue de la gare du Nord ne représente pas 1% du chiffre d'affaires de Nocibé. Ce point de vente n'est, de surcroît, qu'un point de vente parmi les quelques 650 points de vente de Nocibé sur le territoire national. Les effets de l'accord intervenu entre la SAM et Sephora sont donc susceptibles d'être très limités sur le marché de la distribution sélective de parfums et de produits cosmétiques qui, comme cela a été analysé précédemment, est difficilement circonscrit aux gares dans la mesure où la distribution en gare n'est pas un canal spécifique.
b) Sur l'existence d'une entente anticoncurrentielle entre la SAM et Elior Concessions Gares quant à l'attribution des emplacements destinés à une activité de restauration rapide
174. Selon O'Rêve, l'octroi par la SAM de deux emplacements de restauration rapide aux enseignes Paul et Costa Coffee, toutes deux exploitées par Elior Concessions Gares résulteraient d'une entente entre la SAM et Elior Concessions Gares, contraire à l'article L. 420-1 du Code de commerce. En effet, la SAM n'aurait prévu que deux emplacements dédiés à la restauration rapide et Elior Concessions Gares aurait été la seule société contactée par la SAM pour exploiter à nouveau l'emplacement occupé par l'enseigne Paul et pour exploiter un " coffee shop " (118).
175. Cependant, il y a lieu de relever que la partie saisissante n'apporte aucun élément de preuve de l'existence d'une entente anticoncurrentielle entre Elior Concessions Gares et A2C. Il ne saurait en effet être présumé des deux conventions conclues entre la SAM et Elior Concessions Gares pour l'exploitation des enseignes " Paul " et de Costa Coffee à la mezzanine banlieue de la gare du Nord l'établissement d'un accord ayant eu pour objet une répartition des surfaces commerciales entre la SAM et Elior Concessions Gares.
176. Par ailleurs, contrairement à ce qui est soutenu par la partie saisissante, les emplacements commerciaux dédiés à une activité de restauration rapide, à la suite des travaux de réaménagement, seront au nombre de quatre, dont les enseignes Brueggers et Bread and Co qui ne sont pas commercialisées par Elior Concessions Gares.
177. Il ne ressort pas davantage du contenu des accords conclus entre la SAM et Elior Concessions Gares concernant les enseignes " Paul " et Costa Coffee que ceux-ci comportent des dispositions ayant pour objet de fausser ou de restreindre la concurrence (119) Ces deux contrats ont en effet pour objet, aux termes de leur article 2 de " définir les conditions particulières et générales de mise à disposition par la SAM à l'exploitant et d'occupation par ce dernier :- d'un emplacement à usage commercial situé en gare du Nord à Paris niveau -2 (Mezzanine banlieue en vue de son exploitation commerciale (...) ; - d'un emplacement à usage de réserves : situé en gare du Nord à Paris niveau -3 (...) ".
178. Le déroulement des faits de la procédure d'attribution des emplacements dédiés à la restauration rapide met en évidence que c'est A2C qui a pris l'initiative de proposer à l'enseigne Paul, eu égard au chiffre d'affaires généré par l'enseigne, la reconduite de son contrat de sous-occupation du domaine public et qui a initié les négociations commerciales avec cette enseigne (voir points 103 à 115). C'est également A2C qui a sollicité six enseignes pour une activité de " coffee shop " consistant en une offre de boissons chaudes mais également de restauration rapide pour que chacune dépose une offre financière en vue de sélectionner l'offre la plus intéressante. Elior Concessions Gares s'est donc vue attribuer l'emplacement, l'offre pour l'exploitation de l'enseigne Costa Coffee étant la plus avantageuse pour la SAM.
179. Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de conclure que les comportements des mis en cause ne sont pas de nature à influencer le comportement sur le marché d'un concurrent actuel ou potentiel, les contacts en cause n'ayant pas pour objet d'aboutir à des conditions de concurrence qui ne correspondraient pas aux conditions normales du marché en cause.
180. Il convient en conséquence de relever que ni Nocibé ni O'Rêve n'apporte d'éléments propres à étayer l'existence des ententes alléguées.
3. SUR L'ABUS DE POSITION DOMINANTE REPROCHÉ À LA SAM ET À ELIOR CONCESSIONS GARES SUR LE MARCHÉ DE L'ATTRIBUTION DES EMPLACEMENTS COMMERCIAUX À LA MEZZANINE BANLIEUE DE LA GARE DU NORD
181. Selon la jurisprudence de l'Union européenne, il incombe à l'entreprise qui détient une position dominante une responsabilité particulière de ne pas porter atteinte, en recourant à des moyens autres que ceux qui relèvent de la concurrence par les mérites, à une concurrence effective et non faussée dans le marché commun (voir, en ce sens, arrêt Nederlandsche Banden-Industrie-Michelin-Commission, 322-81, Rec. p.3461, point 57 et du 3 juillet; arrêts du Tribunal du 6 octobre 1994, Tetra Pak-Commission, T-83-91, Rec. p. II-755, point 114).
182. Ainsi, l'article 102 TFUE interdit-il notamment, à une entreprise occupant une position dominante de mettre en œuvre des pratiques produisant des effets d'éviction pour ses concurrents considérés comme étant aussi efficaces qu'elle-même, renforçant sa position dominante en recourant à des moyens autres que ceux qui relèvent d'une concurrence par les mérites. Dans cette perspective, toute concurrence par les prix ne peut donc être considérée comme légitime (voir, en ce sens, arrêt du 27 mars 2012, Post Danmark A-S, C-209-10, point 25).
183. Par ailleurs, il résulte d'une pratique décisionnelle constante du Conseil de la concurrence puis de l'Autorité que " [l]a concurrence suppose un certain degré de rivalité et de compétition entre les acteurs d'un marché. Néanmoins, cette lutte pour la conquête de la clientèle n'autorise pas tous les comportements, surtout de la part d'une entreprise qui, détenant une position dominante sur un marché, encourt une responsabilité particulière. " (voir notamment décision n° 09-D-14 du 25 mars 2009, relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la fourniture d'électricité, point 57, confirmée par arrêt de la Cour d'appel de Paris du 23 mars 2010).
184. En l'espèce, à supposer que le marché pertinent amont pris en considération soit celui de l'attribution des emplacements commerciaux à la mezzanine banlieue de la gare du Nord, la SAM serait en situation de monopsone (voir développements aux points 142 à 149). Il y a donc lieu d'analyser si cette dernière n'a pas eu de pratique abusive, notamment de pratique discriminatoire lors de la sélection des enseignes devant occuper les emplacements en cause.
a) Sur l'analyse des pratiques considérées comme abusives de la part de la SAM dans l'attribution de l'emplacement commercial destiné à une activité de distribution sélective de parfums et de produits cosmétiques
185. Nocibé soutient en substance que les pratiques dénoncées sont susceptibles de caractériser un abus de position dominante de la part de la SAM, contraire aux articles L. 420-2 du Code de commerce et 102 TFUE (120). En effet, selon elle, la SAM se devait d'organiser une procédure de mise en concurrence transparente et non discriminatoire en mettant en œuvre une procédure d'appel d'offres classique. En ne procédant pas de la sorte, alors qu'il avait été contractuellement prévu une mise en concurrence, la SAM aurait eu un comportement abusif.
186. Il convient de rechercher successivement, si le non recours à un appel d'offres pour la sélection des enseignes devant occuper les emplacements commercialisés par la SAM est susceptible d'être qualifié de pratique abusive de la SAM, puis, si la SAM a eu des pratiques ayant pour objet ou pour effet d'évincer Nocibé lors du déroulement de la procédure d'attribution de l'enseigne. Sur le choix par la SAM de la procédure d'attribution des emplacements commerciaux à la mezzanine banlieue de la gare du Nord
187. Il y a lieu de relever, comme indiqué précédemment, aux points 128 à 131 que la SAM, société de droit privée, exerce une activité économique, au sens de l'article L. 410-1 du Code de commerce, dans ses missions de gestion et de commercialisation des espaces commerciaux à la mezzanine banlieue de la gare du Nord. La SAM qui n'est pas une entité adjudicatrice n'est, par conséquent, pas soumise au Code des marchés publics lorsqu'elle sélectionne les offreurs de prestations de services devant occuper les emplacements commerciaux sis à la mezzanine banlieue de la gare du Nord. Il en résulte qu'elle n'a pas d'obligation légale d'avoir recours à une procédure d'appel d'offres lors de la sélection de ses cocontractants.
188. Contrairement à ce que soutient Nocibé en se référant au dossier beIN Sports France dans le secteur de la télévision payante [décision de l'Autorité n° 14-MC-01 du 30 juillet 2014 relative à la demande de mesures conservatoires présentée par la société beIN Sports France dans le secteur de la télévision payante, confirmée par la Cour d'appel de Paris du 9 octobre 2014 (réformation partielle sur la date butoir d'attribution de droits)], où il a été décidé que la commercialisation de droits de diffusion télévisuelle d'évènements sportifs premium, tels que le top 14, eu égard au caractère particulièrement attractif de ces droits, devait faire l'objet d'une procédure de mise en concurrence, la commercialisation d'espaces en gare ne justifie pas le recours obligatoire à une procédure d'appel d'offres.
189. En effet, même s'il y a lieu de considérer que le périmètre commercial de la mezzanine banlieue est un espace limité en superficie commerciale, les lots affectés à une activité donnée dans le plan merchandising peuvent être réattribués à une autre activité si l'emplacement ne trouve pas preneur, de sorte qu'ils ne sont pas commercialisés en exclusivité pour un type d'activités donné. Le nouveau plan merchandising a ainsi redéfini les activités commerciales devant être présentes à la mezzanine banlieue de la gare du Nord et a réattribué les emplacements donnés à d'autres enseignes. Force est de constater que Nocibé qui se voit évincer de l'emplacement qu'elle occupait à la mezzanine banlieue de la gare du Nord est toujours en mesure de déposer une offre pour occuper un emplacement dédié à une activité de parfumerie dans une autre gare ou dans un autre centre commercial dans la mesure où le marché de la distribution sélective de parfums et de produits cosmétiques ne saurait se limiter géographiquement aux gares ou encore plus spécifiquement à la mezzanine banlieue de la gare du Nord.
190. Ensuite, le fait de ne pas avoir eu recours à nouveau à une consultation publique pour attribuer l'emplacement qui était occupé par Parfumeries Douglas ne saurait être considéré comme une pratique abusive de la SAM, tant qu'il est constant que Nocibé a été invitée à déposer son offre pour exploiter le nouvel emplacement à la mezzanine banlieue de la gare du Nord dédié à une activité de distribution sélective de parfums et de produits cosmétiques et, qu'elle a été prévenue des motifs de l'interruption de la précédente procédure nécessitée par les travaux de mise en sécurité incendie à la mezzanine banlieue de la gare du Nord.
191. Le mode de sélection des exploitants de la mezzanine banlieue de la gare du Nord relève de la stratégie commerciale de la SAM et de ses mandataires. En effet, A2C et Altarea poursuivent un objectif de rentabilité dans le choix de leurs cocontractants en sélectionnant les enseignes qui sont susceptibles de réaliser le chiffre d'affaires le plus important puisque les redevances qui sont dues à la SAM sont calculées en pourcentage de ce dernier.
192. À cet égard, il y a lieu de relever que la procédure de sélection des enseignes par la SAM et ses mandataires s'effectue comme suit. Tout d'abord, la SAM établit un plan merchandising consistant à définir pour chaque emplacement le type d'activité recherchée (restauration rapide, café prêt-à-porter, etc.) (121). Si la superficie allouée aux commerces est relativement importante, comme à la gare du Nord, il est indiqué qu'une diversité des enseignes est recherchée afin de proposer une offre semblable à un centre commercial (122). Ensuite, les commercialisateurs d'A2C et d'Altarea, dont la fonction consiste à connaître les enseignes et leur concept sur le marché, vont présélectionner les enseignes qui sont susceptibles de correspondre à la demande d'une clientèle donnée, en l'espèce, la clientèle pendulaire de la mezzanine banlieue de la gare du Nord (123).
193. Une fois répertoriée une série d'enseignes susceptibles de correspondre à une activité donnée, A2C et Altarea déterminent le type de procédure de sélection des enseignes. Pour sa part, A2C a affirmé avoir recours à trois types de procédures d'attribution selon le caractère concurrentiel de l'activité en cause et du délai imparti à la SAM pour la commercialisation desdits espaces:
- négociation de gré à gré qui ne concerne qu'un seul et unique interlocuteur et qui consiste à lui proposer un emplacement préalablement déterminé. Si l'enseigne n'est pas intéressée par cette exploitation ou, si l'offre financière est considérée comme insuffisante, A2C opte soit pour une nouvelle affectation du local soit pour la sollicitation d'une autre enseigne ;
- sollicitation commerciale par laquelle la SAM contacte directement plusieurs enseignes susceptibles d'occuper l'emplacement et les met en situation de concurrence en retenant la meilleure offre financière ;
- appel d'offres qui correspond à une mise en concurrence formalisée avec publicité préalable (124).
194. En tout état de cause, la SAM a eu recours, en l'espèce, à une procédure de mise en concurrence, consistant à solliciter les trois plus importants distributeurs de parfums et de produits cosmétiques sur le territoire national et à sélectionner celui qui a déposé la meilleure offre financière. Sur le déroulement de la procédure de mise en concurrence de la SAM pour l'attribution d'un emplacement commercial destiné à une activité de parfums et de produits cosmétiques
195. Il y a lieu de rappeler que l'article 102 TFUE qualifie d'abusives les pratiques pouvant consister à " appliquer à l'égard des partenaires commerciaux des conditions inégales à des prestations équivalentes, en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence ". De la même façon, l'article L. 420-2 du Code de commerce cite, au nombre des cas possibles d'abus de position dominante, " les conditions de vente discriminatoires ".
196. L'Autorité de la concurrence a eu l'occasion de rappeler que " La discrimination peut distordre le jeu concurrentiel sans que l'entreprise la mettant en œuvre ne soit directement partie prenante sur le marché affecté. Par des différences de traitement injustifiées, le dominant peut par exemple, du fait de la position particulière qu'il occupe à l'égard d'acteurs situés à un autre stade de la production, qu'ils soient ses partenaires, clients ou fournisseurs, avantager ou désavantager de manière artificielle certains de ces acteurs par rapport à d'autres. En déséquilibrant ainsi les chances des différents offreurs en compétition, le dominant prive le marché et in fine le consommateur des bénéfices de l'exercice d'une concurrence par les mérites. Ce type de comportement relève de la catégorie des abus dits d'exploitation, en ce qu'il procède de l'utilisation exagérée ou non objective d'un pouvoir de marché, de nature à porter atteinte au bon fonctionnement des marchés, au-delà du seul intérêt de l'entreprise en cause. " (125).
197. La différence de traitement dans le cas de redevances commerciales en contrepartie des services de gestion des aéroports a pu ainsi être considérée comme discriminatoire, sauf à justifier cette différence de traitement par des raisons objectives (voir, en ce sens arrêt du Tribunal de l'Union européenne du 12 décembre 2000, Aéroports de Paris - Commission européenne, T-128-98, Rec. p. II-3991, point 201).
198. En l'espèce, il y a lieu de rappeler qu'A2C a contacté respectivement, le 26 août 2014, les trois plus importants distributeurs de parfums et de produits cosmétiques, par courriels, leur demandant de déposer une offre dans l'hypothèse où ils seraient intéressés par l'exploitation du nouvel emplacement destiné à une activité de parfumerie à la mezzanine banlieue de la gare du Nord. Il leur a été communiqué respectivement les mêmes documents quand chacune des enseignes a manifesté son intérêt, à savoir les plans C.P.T.A.E., des plans de la mezzanine établis par l'AREP ainsi qu'un modèle de compte de résultat prévisionnel, en précisant qu'une offre devait être déposée auprès d'A2C, le 12 septembre 2014.
199. Un rendez-vous a été proposé par A2C à chacune des enseignes visant à expliquer le nouveau projet auquel ont répondu par la positive Nocibé et Sephora. Nocibé a été convoquée au siège d'A2C et le rendez-vous de Sephora s'est déroulé sur le site de la mezzanine banlieue de la gare du Nord. Cette différence de traitement des enseignes peut être justifiée objectivement par la situation différente des deux sociétés, en ce sens que Parfumerie Douglas, devenue Nocibé, exploitait à cette date une activité de parfumerie à la mezzanine banlieue de la gare du Nord depuis 2001, à quelques mètres du nouvel emplacement à attribuer. Il peut être présumé que Nocibé avait une connaissance préalable des lieux et tout particulièrement de la typologie de clientèle de la mezzanine. A contrario, Sephora n'avait aucune information préalable sur la mezzanine banlieue de la gare du Nord, ni sur l'emplacement dédié à une activité de parfumerie avant la visite sur site et la communication des documents.
200. Il est établi par ailleurs, contrairement à ce qui est soutenu par Nocibé que cette dernière a assisté au salon professionnel du 18 juin 2014 et que lui a été remis ainsi qu'à Marionnaud une plaquette générale du projet de recommercialisation des emplacements commerciaux à la mezzanine banlieue comportant le plan merchandising avec les différentes superficies d'emplacement et le type d'activités recherchées, la typologie de la clientèle à la gare du Nord et les personnes de contact chez la SAM (126). Nocibé a donc eu connaissance, dès le 18 juin 2014, de l'existence d'un nouvel emplacement à la mezzanine banlieue de la gare du Nord dédié à la parfumerie devant se substituer à celui qu'elle exploitait jusqu'alors.
201. S'agissant enfin du prétendu désavantage dont aurait pâti Nocibé pour déposer son offre financière, il ressort des courriels échangés entre A2C et Nocibé que la première aurait induit en erreur la seconde, lors de leur rencontre du 3 septembre 2014, puisque le commercialisateur d'A2C aurait mentionné que les vitrines de l'emplacement seraient prises en charge par la SAM. Toutefois, force est de constater que le C.P.T.A.E. qui avait été préalablement communiqué à Nocibé, précisait que les vitrines de l'emplacement étaient à la charge du preneur. De surcroît, aux fins de rectifier son erreur, le commercialisateur d'A2C, après en avoir discuté préalablement à sa direction, a octroyé un délai supplémentaire aux trois distributeurs de parfums et produits cosmétiques pour le dépôt de leur offre qui a été fixée au 24 septembre 2014. Il a même été proposé à Nocibé qui s'était plaint du délai trop court pour prendre en considération ce nouveau paramètre, de déposer plusieurs hypothèses de son offre, une première avec la prise en charge des vitrines par le preneur et une seconde, avec une prise en charge par la SAM.
202. Or, à la date butoir du dépôt de l'offre et malgré les courriels de relance d'A2C, Nocibé n'avait pas communiqué son offre pour l'exploitation de l'emplacement dédié à une activité de distribution de parfums et de cosmétiques de luxe. Malgré le dépôt tardif de son offre, le 26 septembre 2014, A2C a communiqué les montants de son offre financière au comité d'arbitrage de la SAM devant se réunir le 30 septembre 2014 aux fins de la sélection des emplacements commerciaux situés dans le zonage 2 des travaux de la mezzanine banlieue de la gare du Nord.
203. Il s'ensuit que l'erreur commise, puis corrigée, par A2C quant à la prise en charge des vitrines de l'emplacement par le preneur ne peut être considérée comme un comportement discriminatoire des concurrents de Sephora.
204. Il ne ressort pas davantage du processus de sélection par le comité d'arbitrage de la SAM qui s'est réuni le 30 septembre 2014 un quelconque comportement discriminatoire. Les notes manuscrites prises au cours du comité d'arbitrage mettent en évidence que les différentes offres financières ont été discutées et que l'attribution de l'emplacement destiné à une activité de parfums s'est faite à la suite de l'examen des offres financières déposées. Sephora ayant déposé la meilleure offre financière s'est donc vue attribuer le nouvel emplacement destiné à une activité de parfumerie à la mezzanine banlieue de la gare du Nord.
205. Certes, il ressort du courrier de la SAM en date du 29 octobre 2014, en réponse à plusieurs courriers de Nocibé se plaignant de l'absence d'appel d'offres pour l'attribution de l'emplacement destiné à une activité de parfumerie que la SAM aurait effectué sa sélection en prenant en considération non seulement les éléments financiers déposés par les candidats mais également la notoriété des enseignes.
206. À cet égard, même si aucun élément qualitatif n'a été demandé aux trois enseignes sollicitées de distribution de parfums et de produits cosmétiques lors du dépôt de leur offre, il y a lieu de relever que chacune des enseignes qui possède des boutiques sur tout le territoire français a une notoriété et une image qu'elle tente de mettre en valeur auprès de sa clientèle actuelle ou potentielle. Tous les distributeurs de parfums et de produits cosmétiques vendent essentiellement les mêmes produits : les grandes marques de parfums distribués selon des contrats de distribution sélective avec une présentation des produits spécifiée par les fabricants. Chacun des distributeurs se différencie donc par les services proposés aux clients : libre-service des produits ou service plus personnalisé avec les conseils d'une vendeuse, prestations de soins plus ou moins rapides. Dès lors, si la notoriété de ces enseignes est connue du grand public, elle est également prise en considération lors des procédures de sélection par des professionnels des centres commerciaux dont la fonction consiste essentiellement à analyser la typologie de la clientèle et de solliciter les enseignes les plus adéquates pour répondre aux besoins d'une clientèle donnée.
207. Il s'ensuit qu'il ne peut être reproché à A2C de s'être fondée sur la connaissance par ses commercialisateurs de la notoriété de chacun des trois principaux distributeurs de parfums et produits cosmétiques sur le marché français pour considérer que Sephora, ayant déposé l'offre financière la plus élevée, était également une enseigne adaptée à la clientèle de la mezzanine banlieue de la gare du Nord, sans avoir besoin de demander à chacune des enseignes des éléments qualitatifs sur leur concept commercial.
208. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la pratique dénoncée n'apparaît pas avoir créé un avantage concurrentiel injustifié au profit des autres entreprises concurrentes, et notamment de Sephora.
b) Sur l'analyse des pratiques considérées comme abusives de la part de la SAM dans l'attribution des emplacements dédiés à des activités de restauration rapide
209. O'Rêve considère, en substance, que le choix de la SAM d'accorder des modalités d'accès différentes aux opérateurs souhaitant s'installer sur les emplacements commerciaux sis à la mezzanine banlieue de la gare du Nord peut être qualifié de discriminatoire. Elle lui reproche ainsi d'avoir eu recours à des procédures de sélection différentes : appels d'offres, sollicitations commerciales, négociations de gré à gré, selon le type d'emplacement à attribuer. Selon elle, si les personnes publiques n'ont pas l'obligation d'une mise en concurrence préalable des emplacements situés sur le domaine public, elles doivent cependant respecter les règles auxquelles elles ont choisi de s'assujettir.
210. Cependant, il y a lieu de relever que O'Rêve n'apporte aucun élément probant quant à un éventuel abus de la SAM lors de l'attribution des emplacements commerciaux dédiés à la restauration, se limitant à considérer que le choix de la procédure de négociation de gré à gré est discriminatoire en elle-même.
211. Il a toutefois lieu de rechercher si la SAM, qui pourrait être considérée en situation de monopsone, à supposer que le marché de l'attribution des emplacements commerciaux à la mezzanine banlieue de la gare du Nord soit retenu, n'a pas eu de pratiques susceptibles d'être qualifiées d'abusives, lors de l'attribution des deux espaces commerciaux attribués à Elior Concessions Gares pour l'exploitation des enseignes Paul et Costa Coffee.
212. S'agissant de l'emplacement destiné à une activité de type " coffee shop ", contrairement à ce qui est soutenu par O'Rêve, A2C a sollicité respectivement à compter de juillet 2014, plusieurs enseignes pour exploiter ledit emplacement, à savoir les enseignes Colombus, Starbucks, Pomme de pain et Costa Coffee. L'enseigne Brioche dorée a, quant à elle, de sa propre initiative demandé des renseignements à A2C sur l'emplacement destiné à un " coffee shop " mais n'a pas déposé d'offre. Il a été demandé à chacune de ces enseignes de déposer une offre pour le 24 septembre 2014, ce que chacune des enseignes a fait.
213. Lors de son comité d'arbitrage, en date du 30 septembre 2014, la SAM a sélectionné l'enseigne Costa Coffee, cette dernière ayant fait la meilleure offre financière par rapport aux enseignes concurrentes. Il ressort néanmoins des notes manuscrites d'un commercialisateur d'A2C qu'il leur a été demandé d'augmenter le montant de la redevance minimale garantie et le taux " [...] de sécurisation sur la redevance minimale garantie " afin d'obtenir l'emplacement, ce que Elior Concessions Gares a accepté de faire, dès le 1er octobre 2014.
214. Si l'enseigne Segafredo exploitée par O'Rêve n'a pas été sélectionnée par A2C pour le dépôt d'une offre, il semblerait que cette enseigne ne répondait pas aux critères établis par la SAM pour l'offre de " coffee shop ", n'apportant pas la gamme de produits et de services attendus telle que définie dans le plan merchandising de celle-ci.
215. Il s'ensuit qu'aucun élément de la procédure d'attribution de l'enseigne Costa Coffee ne saurait être qualifié de comportement de la SAM ayant eu pour objet ou pour effet d'évincer O'Rêve de la mezzanine banlieue de la gare du Nord.
216. S'agissant de l'emplacement qui était exploité par l'enseigne Paul avant les travaux de réaménagement de la mezzanine, il y a lieu de relever que la SAM a reconduit avec cette enseigne l'exploitation du même emplacement en négociant de gré à gré avec le groupe Elior Concessions Gares.
217. Comme indiqué précédemment s'agissant de Nocibé (voir points 187 à 193), le choix de la procédure d'attribution des emplacements commerciaux situés sur le domaine public ferroviaire, en vue de la conclusion de sous-convention du domaine public ne saurait constituer un comportement abusif de la SAM. En effet, le mode de sélection des exploitants de la mezzanine banlieue de la gare du Nord relève de la stratégie commerciale de la SAM et de ses mandataires. En effet, A2C et Altarea poursuivent un objectif de rentabilité dans le choix de leurs cocontractants en sélectionnant les enseignes qui sont susceptibles de réaliser le chiffre d'affaires le plus important puisque les redevances qui sont dues à la SAM sont calculées en pourcentage de ce dernier. Dès lors, chacun des mandataires de la SAM peut considérer qu'une seule société ou une seule enseigne est susceptible de répondre aux besoins spécifiques d'un emplacement déterminé en gare. En l'espèce, le choix de la SAM de reconduire sa convention avec Elior Concessions Gares pour le maintien de Paul sur l'emplacement que cette enseigne occupait semble se justifier par des raisons de rentabilité, l'enseigne étant celle qui réalisait le chiffre d'affaires le plus important au sein de la mezzanine banlieue parmi les sept emplacements de restauration rapide.
218. En tout état de cause, la proposition de la SAM de reconduire le contrat de sous occupation du domaine public pouvait être justifiée par des raisons objectives. En effet, il ressort de l'instruction que sur l'emplacement exploité par l'enseigne Paul à la mezzanine banlieue de la gare du Nord, se trouve une unité de production (cuisine) qui alimente également un autre local de la même enseigne, situé au rez-de-chaussée au niveau des quais de la gare du Nord et ceci, depuis le 2 septembre 2002 (127). L'exploitation de ce local commercial était donc dépendant de l'unité de production de cette même enseigne située au niveau inférieur. De ce fait, une demande particulière lors de la mise en conformité incendie a dû être faite à l'inspection générale de sécurité incendie quant au désenfumage de ce local pour le maintien de la cuisine (128).
219. Le déroulement de la procédure d'attribution à l'enseigne Paul ne révèle pas davantage de comportement de la SAM pouvant être qualifié d'abusif. Au cours de la réunion du comité d'arbitrage de la SAM qui s'est tenue le 30 septembre 2014, il a été demandé à A2C de solliciter l'enseigne Paul gérée par le même salarié de chez Elior Concessions Gares qui avait préalablement déposé une offre financière pour l'exploitation d'un " coffee shop " avec l'enseigne Costa coffee, et ceci, aux fins de négocier à la hausse le taux de redevance minimale garantie (129).
220. Elior Concessions Gare a affirmé, au cours de son audition, que pour conserver l'emplacement sur le marché concurrentiel de la restauration rapide, elle a dû améliorer sa proposition financière dans la mesure où le maintien de l'enseigne n'étant pas acquis. Il s'en est suivi une négociation commerciale dans le cadre de laquelle Elior Concessions Gares a réévalué à la hausse son taux de redevance afin d'obtenir l'exploitation de l'emplacement pour l'enseigne Paul (130).
221. Dès lors, il ne ressort pas du déroulement de l'ensemble de ce qui précède que la SAM ait eu un comportement ayant pour objet ou effet d'évincer O'Rêve, lors de l'attribution des espaces commerciaux aux enseignes Paul et Costa Coffee.
222. Sans qu'il soit besoin de conclure au fond sur le caractère abusif des procédures d'attribution d'emplacements commerciaux mises en œuvre par la SAM, il convient, là encore, de relever que ni Nocibé ni O'Rêve n'apporte d'éléments propres à étayer l'existence des abus allégués.
c) Sur l'abus de position dominante reproché à Elior Concessions Gares sur le marché connexe de la restauration rapide à la mezzanine banlieue de la gare du Nord
223. O'Rêve soutient en substance que le choix de la SAM d'attribuer les emplacements dédiés à une activité de restauration rapide à Elior Concessions Gares a eu pour conséquence de renforcer la position dominante de cette entreprise.
224. À supposer qu'existe un marché de la restauration rapide en gare, et plus spécifiquement à la mezzanine banlieue de la gare du Nord, force est de constater qu'Elior Concessions Gares ne dispose pas d'une position dominante sur un tel marché. En effet, Elior Concessions Gares exploitait l'enseigne Paul sur un marché concurrentiel, étant en concurrence avec six autres points de vente de restauration rapide. Le nouveau plan merchandising de la SAM ne prévoit pas davantage une exclusivité des enseignes du groupe Elior puisque ces dernières seront en concurrence avec deux autres enseignes de restauration rapide.
225. Il s'ensuit qu'il n'y pas lieu d'examiner si l'octroi par la SAM de deux emplacements, l'un étant reconduit pour l'enseigne Paul et l'autre ayant été attribué pour l'activité de l'enseigne Costa Coffee a contribué à renforcer la position d'Elior Concessions Gares.
226. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les faits invoqués dans le cadre des deux saisines et dans le cadre des demandes de mesures conservatoires ne sont pas appuyés d'éléments suffisamment probants pour étayer l'existence de pratiques qui auraient pour objet ou pour effet d'entraver le libre jeu de la concurrence au sens des dispositions aux articles L. 420-1 et L. 420-2 du Code de commerce et, à les supposer applicables, aux articles 101 et 102 TFUE.
227. Il convient, en conséquence, de faire application des dispositions de l'article L. 462-8 du Code de commerce et de rejeter au fond les deux saisines enregistrées sous les numéros 14-0091F et 15-0030F et, partant, les deux demandes de mesures conservatoires enregistrées sous les numéros 14-0092M et 15-0031M.
DÉCISION
Article 1er : Les saisines au fond enregistrées sous les numéros 14-0091F et 15-0030F sont rejetées.
Article 2 : Les deux demandes de mesures conservatoires enregistrées respectivement sous les numéros 14-0092M et 15-0031M sont rejetées.
Délibéré sur le rapport oral de Mme Magali Rousselot, rapporteure et l'intervention de M. Joël Tozzi, rapporteur général adjoint, par Mme Claire Favre, vice-présidente, présidente de séance, Mmes Chantal Chomel, Séverine Larère, Reine-Claude Mader-Saussaye et M. Olivier d'Ormesson, membres.
Notes :
1 Etudes Xerfi, juin 2014, page 47.
2 Etudes Xerfi Precepta, juin 2014.
3 Etudes Xerfi, juin 2014, page 49.
4 Article de presse Ville Rail et Transports n° 555 d'octobre 2013.
5 Audition A2C, cote 1470.
6 Données de la SAM, cote 1913 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
7 Cote 1913 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
8 Etudes Xerfi, juin 2014, pages 51 et 52.
9 Cote 1471 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
10 Cote 1913 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
11 La restauration dite concédée est définie comme la restauration sur autoroutes, gares, aéroports mais aussi musées et centre commerciaux.
12 Cote 1468 dans les affaires n° 14-0091F et14-0092M.
13 Article 2 des statuts d'A2C du 6 septembre 2013, cote 1595 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
14 Cote 1468 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
15 Cote 5115 dans l'affaire n° 15-0031M.
16 Cote 3714 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
17 Cote 1468 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
18 Cotes 3749 à 3754 et cote 3025 dans les affaires n° 14-0091 F et 14-0092M.
19 Statuts de la SAM, cote 1578 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
20 Cote 3839 à 4149 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
21 Cotes 3746 et 3750 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
22 Cotes 3791 à 3800 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
23 Cotes 1612 et 1708 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
24 Décision n° 14-DCC-71 du 4 juin 2014 relative à la prise de contrôle exclusif du groupe Nocibé par Advent International Corporation, (ci-après " décision n° 14-DCC-71 du 4 juin 2014 ") points 1 à 2.
25 Décision n° 14-DCC-71, précitée.
26 Cote 1754 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
27 Cote 1338 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
28 Cote 4749 dans les affaires n° 15-0030F et 15-0031M.
29 Etudes Xerfi, juin 2014.
30 Cote 60 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
31 Etudes Xerfi.
32 Cote 5097 dans l'affaire n°15-0031M.
33 Cotes 285 à 296 dans les affaires n° 15-0030F et 15-0031M.
34 Restauration dans les aéroports, les gares, les musées, etc. -Décisions de l'Autorité n° 12-DCC-68 du 23 mai 2012 relative à l'acquisition de la SAS Ansamble par le groupe Elior.
35 Études Xerfi, page 110.
36 Cote 4042dans l'affaire 15-0031M.
37 Cotes 3164 et 3165.
38 Cotes 4043 dans l'affaire n° 15-0031M.
39 Cote 1575 dans l'affaire n° 14-0092M.
40 Cotes 1626 à 1628 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
41 Cotes 2469 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M et 368 dans les affaires n° 15-0030F et 15-0031M.
42 Cote 1474 dans l'affaire n° 14-0092M.
43 Cotes 969 et 368 à 373 dans l'affaire n° 15-0031M.
44 Cote 1475 dans l'affaire n° 14-0092M.
45 Cote 304 dans les affaires n° 15-0030F et 15-0031M.
46 Cotes 1469 et 3471 dans l'affaire n° 14-0092 M.
47 Cote 4172 dans l'affaire n° 14-0092M.
48 Cote 3464 dans l'affaire n° 15-0031M.
49 Cote 3709 dans l'affaire n° 14-0092M.
50 Cote 3747 et 4143 à 4149 (plaquette distribuée lors du SIEC) dans l'affaire n° 14-0092M.
51 Cotes 305 et 306 dans l'affaire n° 15-0031M.
52 Contrat entre SAM et Douglas, en date du 4 décembre 2001, cote 95 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
53 Avis de mise en concurrence, cote 1627 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
54 Cote 1474 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
55 Cote 2469 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
56 Cote 173, 1512 et 1474 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
57 Cote 827 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
58 Cote 3747 et 4143 à 4149 (plaquette distribuée lors du SIEC) ainsi le suivi de la commercialisation des espaces commerciaux cotes 3661 et 3662 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
59 Cotes 841, 2066 et 1517 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
60 Cote 1822 à 1910 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
61 Cote 1920 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
62 Cote 1745 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
63 Cote 1744 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
64 Cote 1750 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
65 Cotes 1750 et 1748 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
66 Cote 1749 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
67 Cote 1748 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
68 Cote 1773 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
69 Cote 939 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
70 Cote 950 à 952 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
71 Cotes1782 à 1788 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
72 Cotes 3373 à 3477 dans l'affaire n° 15-0031M.
73 Cotes 2066 et 1517 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
74 Cote 2062 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
75 Cote 2063 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
76 Cote 2057 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
77 Cote 2039 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
78 Cote 1937 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
79 Cote 1937 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
80 Cote 1517 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
81 Cote 1518 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
82 Cote 1519 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
83 Cotes 2421 à 2423 1502 à1504 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
84 Cotes 2396 et 2397 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
85 Cote 2071 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
86 Cote 2071 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
87 Cote 1435 et 1639 dans l'affaire n° 14-0092M.
88 Cote 5080 dans les affaires n° 15-0030 F et 15-0031M.
89 Cote 559 dans les affaires n° 15-0030 F et 15-0031M et cotes 1617 et 1619 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
90 Cotes 3117 et 3116 dans l'affaire n° 15-0031M.
91 Cote 4 dans l'affaire n° 15-0031M.
92 Cote 181 dans l'affaire n° 15-0031M.
93 Cote 5 dans l'affaire n° 15-0031M.
94 Cotes 198, 199 et 200 dans l'affaire n° 15-0031M.
95 Cote 206 dans l'affaire n° 15-0031M.
96 Cotes 1641 à 1646 dans l'affaire n° 15-0031M.
97 Cotes 3206 à 3208 dans l'affaire n° 15-0031M.
98 Cotes 2442 dans l'affaire n° 15-0031M.
99 Cote 2464 dans l'affaire n° 15-0031M.
100 Cote 312dans l'affaire n° 15-0031 M.
101 Cote 538, 565, 619, 661, cote 703, cote 707 cote 731, 796.
102 Cote 310 dans l'affaire n° 15-0031M.
103 Cote 310 dans l'affaire n° 15-0031M.
104 Voir, par exemple, la décision de l'Autorité de la concurrence n° 10-D-17 du 25 mai 2010 relative à des pratiques mises en œuvre sur le marché de la boule de pétanque de compétition.
105 Cote 2917 dans les affaires n° 14-0092 M et 14-0091F.
106 Contrat de sous-occupation d'un emplacement à usage commercial entre la SAM et la société O'Rêve, cote 61 à 164.
107 Cotes 3379 et 3380 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
108 Cote 4732 dans les affaires n° 15-0031M et 15-0030F.
109 Décisions de la Commission n° IV-M.312 Sanofi-Yves Saint Laurent du 15 mars 1993, n° IV-M.1534 Pinault-Printemps-Redoute-Gucci du 22 juillet 1999.
110 Décision du ministre n° C2005-65 du 22 août 2005 aux conseils du groupe Douglas relative à une concentration dans le secteur des parfums et produits cosmétiques.
111 Décisions de l'Autorité n° 14-DCC-71, précitée, point 14 et de la Commission n° COMP/M.5068 L'Oréal-YSL Beauté précitée.
112 Cote 3584 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
113 Décision n° 03-D-17 du 31 mars 2003 relative à des pratiques sur le marché de la distribution des carburants sur autoroutes, point 71 et 72.
114 Cote 3534 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
115 Cote 5113 dans les affaires n° 15-0030 F et 15-0032M.
116 Cote 38 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
117 Cotes 841, 2066 et 1517 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
118 Cote 4670 dans les affaires n° 15-0030F et 15-0031M.
119 Cotes 2700 à 2749 dans les affaires n° 15-0030F et 15-0031M.
120 Cote 48 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
121 Cote 1620 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
122 Cote 1470 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
123 Cote 3582 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
124 Cote 1472 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
125 Décision de l'Autorité de la concurrence n° 10-MC-01 du 30 juin 2010 relative à la demande de mesures conservatoires présentée par la société Navx, paragraphe 184.
126 Cote 3747 et 4143 à 4149 (plaquette distribuée lors du SIEC) ainsi le suivi de la commercialisation des espaces commerciaux cotes 3661 et 3662.
127 Cote 4042 dans les affaires n° 15-0030F et 15-0031M.
128 Cotes 796 à 809 dans les affaires n° 15-0030F et 15-0031M.
129 Cote 1639 dans les affaires n° 14-0091F et 14-0092M.
130 Cotes 2248 et 2249 dans les affaires n° 15-0030F et 15-0031M.