Livv
Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 5-7, 18 décembre 2014, n° 2013-12370

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Sanofi (SA), Sanofi-Aventis France (Sté), Téva Santé (SAS)

Défendeur :

Autorité de la concurrence, Ministre de l'économie

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Remenieras

Conseillers :

Mmes Leroy, Michel-Amsellem

Avocats :

Mes Teytaud, Elkins, Wachsmann

CA Paris n° 2013-12370

18 décembre 2014

Depuis une autorisation de mise sur le marché (AMM) délivrée Le 15 juillet 1998, par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps), remplacée le 1er mai 2012 par l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), la société Sanofi Aventis commercialise le Plavix(r) (le Plavix), médicament, dont le principe actif est le clopidogrel, utilisé dans la prévention des complications liées à l'athérothrombose, maladie susceptible d'entraîner des lésions des parois artérielles qui, lorsqu'elles se rompent, peuvent conduire à des accidents cardio-vasculaires graves. Ce médicament comporte quatre indications thérapeutiques, dont le syndrome coronarien aigüe (SCA) en association avec l'acide acétylsalicylique (aspirine). Le Plavix est le quatrième médicament le plus vendu dans le monde.

La protection des brevets protégeant les étapes du procédé de fabrication du Plavix s'est achevée en Europe le 15 juillet 2008, mais à Cette date la société Sanofi-Aventis a néanmoins continué à bénéficier d'un certificat de protection complémentaire protégeant e type de sel utilisé dans ce médicament, hydrogénosulfate de clopidogrel, ainsi que d'un autre concernant l'indication du traitement du SCA en bithérapie avec l'aspirine. En dépit de ces deux protections complémentaires, il est donc devenu possible à compter du 15 juillet 2008. dc produire et de commercialiser des génériques du princeps Plavix en utilisant un autre type de sels et en n'indiquant pas le traitement du SCA en bithérapie.

Il convient pour la bonne compréhension du présent arrêt de rappeler qu'en application des dispositions de l'article 10, paragraphe 2, sous b), de la directive 2001/23/CE du Parlement européen et du Conseil, du 6 novembre 2001, instituant un Code communautaire relatif aux médicaments à usage humain, et de l'article L. 5121-I, 5°, sous a) du Code de la santé publique, tin médicament ne peut être qualifié de générique que s'il remplit les trois critères suivants : il doit, en premier lieu, être de même composition qualitative et quantitative que la spécialité de référence, avoir, en deuxième lieu, la même forme pharmaceutique que le princeps et, enfin, sa bioéquivalence avec la spécialité de référence doit être démontrée. Cette bioéquivalence est définie comme l'équivalence des biodisponibilités. La biodisponibilité a été définie à l'article 5121 du Code de la santé publique comme étant "la vitesse de l'intensité de l'absorption dans l'organisme, à partir d'une forme pharmaceutique, de la substance active ou de sa fraction thérapeutique destinée à devenir disponible au niveau des sites d'action".

Les dispositions précitées précisent que les sets utilisés dans tin principe actif, pour le Plavix le clopidogrel, sont regardés comme ayant la même composition qualitative que le principe actif, sauf s'ils présentent des propriétés sensiblement différentes au regard de l'efficacité ou de la sécurité, Ainsi la présence de sels différents dans le princeps et le générique n'a aucun impact sur la qualification de ce médicament de générique, sauf s'il apparaît que le sel du générique présente des propriétés sensiblement différentes au regard de l'efficacité ou de la sécurité.

Afin d'être commercialisé sur le marché français, un médicament générique doit être inscrit au répertoire des génériques de l'ANSM et, à compter de cette inscription. L'article L. 5125-23 du Code de la santé publique permet la substitution par le pharmacien du générique au princeps, quand bien même ce générique présenterait des indications différentes de celui-ci. Le médecin prescripteur conserve toujours, néanmoins, la possibilité d'exclure cette substitution, par une mention expresse portée sur la prescription, "non substituable" ou "NS". Par ailleurs, l'article R. 5121-5 du Code de la santé publique permet au directeur général de l'ANSM de préciser dans sa décision que la substitution de la spécialité de référence parla spécialité générique petit entrainer un risque particulier pour la santé de certains patients dans certaines conditions d'utilisation. Dans le cadre de la procédure de mise sur le marché des génériques de Plavix, la société Sanofi-Aventis s'est fondée sur celte disposition pour demander par lettre dii 24 juillet 2009, au directeur général de l'Afssaps que soit expressément mentionné, au sein du répertoire des génériques, le fait que tous les génériques du clopidogrel ne disposaient pas de l'indication relative au traitement du SCA en association avec l'aspirine. Cette demande a été rejetée par l'Afssaps par lettre du 24 septembre 2009.

Le 23 septembre 2009, l'Afssaps, a créé le groupe générique hydrogénosulfate de clopidogrel" qui regroupe la spécialité de référence et des spécialités génériques et cite y a inscrit l'auto-générique Clopidogrel Winthrop(r) (le Clopidogrel Winthrop), faisant suite à la délivrance des AMM "génériques" par l'Agence Européenne du Médicament (EMEA). Le 27 octobre 2009, les premiers génériques (Clopidogrel HCS(r) notamment), hors auto-générique, ont ét inscrits à ce répertoire. Onze de ces vingt spécialités génétiques ont été commercialisées entre le 5 et le 15 octobre 2009, le premier d'entre eux a été le Clopidogrel Winthrop auto-générique commercialisé par le groupe Sanofi. Pour respecter les brevets et certificats complémentaires en cours relatifs aux données pharmaceutiques de Plavix, les spécialités génériques de Plavix, hors l'auto-générique précité, présentent généralement, d'une part, un sel de clopidogrel diffèrent de celui contenu dans Plavix, d'autre part, une "inhomogénéité", selon la terminologie médicale, d'indications thérapeutiques, par rapport au princeps, concernant l'indication SCA, à l'exception de Clopidogrel Ratiopharm GmbH(r), Ratiopharm ayant engagé en septembre 2009, devant le Tribunal de grande instance de Paris, une action en nullité du brevet attaché à cette indication.

Par lettre du 2 novembre 2009, l'Autorité de la concurrence a été saisie au fond, ainsi que d'une demande de mesures conservatoires, par la société Téva Santé (la société Téva) qui se plaignait de pratiques d'abus de position dominante mises en œuvre par la société Sanofi Aventis France (la société Sanofi-Aventis) sur le marché "ville" du clopidogrel en France, sur lequel cette société commercialise son médicament princeps dénommé Plavix et son auto-générique le Clopidogrel Winthrop, en dénigrant le médicament générique commercialisé par la société Téva le Clopidogrel HCSCR.

Par une décision n° 10-D-16 du 17 mai 2010, l'Autorité de la concurrence a rejeté la demande de mesures conservatoires et décidé de poursuivre l'instruction de l'affaire au fond.

À la suite de l'enquête menée par les services d'instruction, la rapporteure générale de l'Autorité de la concurrence a notifié à la société Sanofi-Aventis et à sa société mère, la société Sanofi, le grief d'avoir " (...) abusé de leur position dominante sur le marché français du clopidogrel délivré en ville en se livrent, entre le mois de mai 2009 et le mois de janvier 2010, par voie de presse et au travers du réseau de visiteurs médicaux et de délégués pharmaceutiques du groupe, à des pratiques de dénigrement des médicaments génériques de Plavix (hors Clopidogrel Winthrop,) auprès des professionnels de santé. Ces pratiques ont eu pour objet et pour effet de limiter l'accès au marché des concurrents du médicament princeps Plavix et de leur propre générique de ce princeps, le Clopidogrel Winthrop. Elles sont donc prohibées par l'article L. 420-2 du Code de commerce et par l'article 102 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, Un autre grief d'entente entre les sociétés Sanofi-Aventis France et Bristol Myers Squibb (la société BMS) a été notifié, mais il n'a pas été retenu par la décision et n'est ici mentionné que pour mémoire.

Par décision n° 13-D-11 du 14 mai 2013, l'Autorité de la concurrence a décidé que :

"Article 1er : Il est établi que les sociétés Sanofi-Aventis France, en tant qu'auteur de la pratique, et Sanofi, en sa qualité de société mère de Sanofi-Aventis France, ont enfreint les dispositions de l'article L. 420-2 du Code de commerce ainsi que celles de l'article 102 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, en mettant en œuvre une pratique de dénigrement des génériques concurrents de Plavix sur le marché français du clopidogrel commercialisé en ville.

Article 2 : Il n'est pas établi que les sociétés Sanofi-Aventis France et Bristol Myers Squibb ont enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce ainsi que celles de l'article 101 TFUE.

Article 3 : Au titre de la pratique visée à l'article 1er, il est infligé conjointement et solidairement à Sanofi-Aventis France et à Sanofi une sanction pécuniaire de 40,6 millions d'euros.

Article 4 : Les personnes morales visées à l'article 1er feront publier à leurs frais le texte figurant au paragraphe 696 de la présente décision dans les journaux "Le Quotidien du médecin" et "Le Quotidien du Pharmacien", en respectant la mise en forme. Cette publication interviendra dans un encadré en caractère noirs sur fond blanc de hauteur au moins égale à trois millimètres sous le titre suivant, en caractère gras de même taille : "Décision de l'Autorité de la concurrence n° 13-D-11 du 14 mai 2013 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur pharmaceutique " (..) ".

Cette décision a été notifiée par l'Autorité de la concurrence le 21 mai 2013

La Cour

Vu le recours en annulation et subsidiairement en réformation de la décision n° 13-D-11 déposé le 20 juin 2013 sous deux numéros distincts (13-12370 et 13-12379) au greffe de la Cour par les sociétés Sanofi et Sanofi-Aventis ;

Vu l'ordonnance du 25 juin 2013 qui a joint les deux recours et dit que la procédure se poursuivrait sous le N° 13-12370 ;

Vu l'intervention à l'instance de la société Téva Santé par déclaration du 23 juillet 2013 ;

Vu les mémoires exposant leurs moyens à l'appui du recours déposés au greffe de la cour par les sociétés Sanofi et Sanofi -Aventis France le 19 juillet 2013 ;

Vu les observations déposées au greffe de la cour par la société Téva, le 29 novembre 2013 ;

Vu les observations déposées au greffe de la cour par le Ministre chargé de l'économie le 11 mars 2014 ;

Vu les observations déposées au greffe de la cour par l'Autorité de la concurrence le 13 mars 2014 ;

Vu les mémoires récapitulatifs déposés au greffe de la cour par les sociétés Sanofi et Sanofi-Aventis France le 5 juin 2014 ;

Vu les observations du Ministère public déposées au greffe de la cour le 27 juin 2014 ;

Après avoir entendu à l'audience publique du 4 septembre 2014, le sconseils des requérantes, qui ont été mis en mesure de répliquer, le conseil de l'intimée, ainsi que le représentant de l'Autorité de la concurrence, celui du ministère de l'économie et le ministère public ;

SUR CE

Considérant qu'après avoir retenu que le marché pertinent était le marché français du clopidogrel (Plavix et ses génériques) commercialisé en ville et que la Société Sanofi Aventis s'y trouvait en position dominante, l'Autorité a estimé qu'elle avait abusé de cette position en se livrant, entre les mois de mai 2009 et janvier 2010, à une pratique de dénigrement des médicaments génériques concurrents dii Plavix, auprès des médecins et pharmaciens que l'Autorité a relevé à ce sujet que la société Sanofi-Aventis avait mis en place une communication globale et structurée, diffusée par voie de presse ainsi que par l'intermédiaire de ses réseaux de visiteurs médicaux et de délégués pharmaceutiques, laquelle avait eu pour objet et pour effet de limiter l'accès au marché des génériques concurrents qu'elle a estimé que cette communication tendait intrinsèquement à discréditer les spécialités concurrentes, en soulignant l'existence de différences entre celles-ci et ses propres spécialités, relatives, d'une part, à la différence de sels, d'autre part, à l'absence d'indication SCA pour les génériques, différences ne pouvant se comprendre que comme substantielles dans le contexte sensible du discours tenu qu'elle a considéré que cette communication revêtait un caractère trompeur en ce qu'elle omettait de manière délibérée deux informations essentielles, la première sur le fait que ces différences ne résultaient que des certificats de protection complémentaires subsistants, et la seconde sur l'absence d'incidence qu'elles revêtaient sur la bioéquivalence et la substituabilité de ces médicaments que, selon l'Autorité, dans un contexte de réticence généralisée à l'égard des génériques, toute remise en cause de l'efficacité et de l'innocuité des spécialités concurrentes du Plavix ne pouvait avoir qu'un effet sensible sur les professionnels de santé, et il incombait à Sanofi Aventis, en sa qualité de laboratoire princeps, une responsabilité particulière de veiller à ne pas abuser de la position dominante qu'elle détenait sur le marché lorsqu'elle communiquait sur les médicaments génériques dans le cadre notamment de la promotion de son auto-générique ;

que la décision relient en ce sens que la société Sanofi-Aventis a manqué à cette obligation, par la communication d'un discours ayant fait obstacle au jeu de la concurrence, qui a eu pour conséquence, au stade de la prescription du Plavix par les médecins, une forte augmentation du nombre de mention "NS", ensuite auprès des pharmaciens, au stade de la substitution, une incitation à substituer le Plavix par son auto-générique, qui s'est traduite par un profil atypique du taux de substitution de ce Princeps.

Considérant que la société Sanofi-Aventis conteste la qualification de sa position comme étant dominante, la qualification de sa communication comme constituant une pratique de dénigrement abusif et enfin la sanction qui lui a été infligée ; que ces trois points seront examinés successivement.

Sur la position dominante de la société Sanofi-Aventis

Considérant que la société Sanofi-Aventis conteste que sa position sur le marché puisse être qualifiée de dominante qu'elle fait valoir sur ce point qu'au moment de la mise en œuvre des pratiques qui lui sont reprochées, elle avait perdu 46 % de parts de marché en à peine quatre mois, qu'elle ne dispose d'aucune marge de manœuvre pour fixer ou modifier les prix puisque ceux-ci sont réglementés et qu'elle n'a non plus aucun contrôle sur la demande de médicaments à base de clopidogrel, laquelle dépend du nombre de patients atteint d'athérothrombose, enfin, qu'elle est confrontée à des laboratoires "génériques" qui sont des acteurs mondiaux aux ressources financières considérables ;

Considérant qu'il n'est pas discuté que le marché pertinent est celui du clopidogrel commercialisé en ville sur le territoire français, ni que la société Sanofi-Aventis ait été, jusqu'à l'entrée des génériques sur ce marché au mois d'octobre 2009, en position de monopole, puisqu'elle était titulaire des brevets protégeant les étapes du procédé de fabrication du médicament princeps Plavix lesquels ont pris fin le 15 juillet 2008 et que les AMM ont été délivrées aux premiers génériques concurrents en juillet 2008.

Considérant que la position dominante visée par les articles L. 420-2 du Code de commerce et 102 du TFUE, dont la société Sanofi-Aventis ne conteste pas l'applicabilité, s'analyse comme une position de puissance économique qui confère à l'entreprise qui en est détentrice le pouvoir de faire obstacle au maintien d'une concurrence effective sur le marché en cause en lui fournissant la possibilité de comportements indépendants dans une mesure appréciable vis-à-vis de ses concurrents, de ses clients et, finalement, des consommateurs ; que l'existence d'une position dominante résulte en général de la réunion de facteurs divers, qui, pris isolément, ne seraient pas nécessairement déterminants mais qui traduisent ensemble la puissance économique requise par la jurisprudence ;

Considérant que la perte importante de parts de marché de la société Sanofi Aventis au moment des pratiques est due à la fin du monopole que lui conférait le brevet dont elle était titulaire et quelle exploitait depuis 1998 ; qu'en dépit de ces pertes elle a gardé, entre le mois de janvier 2010 et le mois d'août 2011, une part de marché en volume cumule de son médicament princeps et du générique qu'elle a elle-même mis sur le marché de 58,18 3/4 (38 3/4 Plavix et 21,18 % Clopidogrel Winthrop), tandis que ses deux concurrents les plus importants, les sociétés Mylan et Biogaran, disposaient chacun d'une part de marché très inférieure de 12 3/4 et que celle des autres laboratoires ensemble était inférieure à 5 % ;

qu'outre ces parts importantes en volume, il convient de noter que la part de marché en valeur du Plavix était en août 2011 de 60,1 %, tandis que celle du Clopidogrel Winthrop était de 10,8 %, soit une part de marché cumulée dc 70,9 %, alors que dix-huit autres entreprises commercialisaient des génériques du clopidogrel ; que ces parts démontrent qu'au moment de l'ouverture à la concurrence du marché du clopidogrel commercialisé en ville, la société Sanofi-Aventis est demeurée un opérateur puissant face à une concurrence particulièrement atomisée

qu'en outre et comme l'a relevé l'Autorité, le groupe de sociétés Sanofi était en 2009 le quatrième laboratoire pharmaceutique dans le monde et le premier en France, où sa filiale a réalisé en 2010 un chiffre d'affaires de 2,7 milliards d'euros, tandis que ses concurrents les plus importants sur le marché du clopidogrel commercialisé en ville, réalisaient des chiffres d'affaires très inférieurs, comme 797 millions d'euros en 2010 pour la société Mylan, 534 millions d'euros pour la société Biogaran en 2009/2010, 125 millions d'euros en 2009 pour la société Arrow Génériques qu'en conséquence, même si ces concurrents, parmi lesquels.la société Téva, pouvaient disposer de ressources importantes en raison de leur appartenance à des groupes de sociétés de taille internationale, il n'en demeure pas moins que la société Sanofi-Aventis était demeurée en position dominante sur le marché au moment des pratiques qui lui ont été reprochées ;

Considérant, enfin, que le brevet initial que cette société a exploité en monopole pendant dix ans et l'importance du groupe dans lequel elle s'inscrit, lui ont permis d'acquérir une réputation de référence, accentuée en l'espèce par le retour d'expérience de dix ans qu'elle peut faire, et fait, valoir auprès des professionnels de Santé ;

Considérant qu'au regard de ces éléments, le fait que la société Sanofi-Aventis ne dispose d'aucune marge de manœuvre pour fixer ou modifier ses prix, puisque ceux-ci sont réglementés, ou encore que la demande de clopidogrel dépende du nombre de personnes atteintes d'athérothrombose n'exclut pas qu'elle dispose d'une position dominante ; qu'en effet, la relative insensibilité aux prix de la demande et son caractère indirect sont des caractéristiques particulières des marchés de médicaments et sont identiques pour tous les opérateurs sur ces marchés ; que la concurrence s'exerce entre ceux-ci au travers des prescriptions médicales, puis, s'agissant des génériques, des décisions de substitution prises par les pharmaciens que cette concurrence repose, avant toute autre considération, sur la conviction de l'efficacité des produits que les laboratoires parviennent à susciter qu'à cet égard, les visites aux médecins permises par l'important réseau de visiteurs médicaux dont disposait la société Sanofi-Aventis, lors de la mise en œuvre des pratiques reprochées, constituait un incontestable outil d'influence auprès des prescripteurs, puisqu'ainsi que le développe l'Autorité, les laboratoires "génériqueurs" n'avaient pas les moyens de répliquer un tel réseau en plus de celui qu'ils avaient développé pour visiter les pharmaciens, seuls décideurs de la substitution, et ce même s'il est démontré que les médecins complètent l'information qui leur est ainsi délivrée, auprès d'autres sources ; qu'enfin, il n'est pas démontré que les outils commerciaux mis en place par la société Téva et invoqués par la société Sanofi-Aventis existaient au moment de la mise en œuvre des pratiques sanctionnées ; que si la notice "Wikipédia" la concernant, figurant sur Internet, mentionne des "délégués pharmaceutiques, des attachés scientifiques et des délégués à l'information médicale dans les régions", ces indications sommaires et non chiffrées sont à elles seules insuffisantes pour démontrer que la société Téva aurait disposé d'un réseau (le visiteurs médicaux équivalent à celui de la société Sanofi-Aventis, ce pour quoi elle n'avait, en tout état de cause, aucun intérêt, puisque les médecins ne peuvent prescrire les médicaments génériques par leur désignation commerciale ;

Considérant qu'il est ainsi démontré que la société Sanofi-Aventis détenait bien une position dominante sur le marché du clopidogrel commercialisé en ville sur le territoire français lorsqu'elle a mis en œuvre les pratiques qui lui sont reprochées et que le recours doit être rejeté sur ce point

Sur les pratiques reprochées

Considérant que la pratique qualifiée par l'Autorité de la concurrence d'abus de position dominante a consisté de la part de la société Sanofi-Aventis, à diffuser à destination des professionnels de la santé un discours relatif aux différences entre le Plavix et ses génériques, par lequel elle leur n délivré des informations incomplètes et présentées, compte tenu de leur assemblage et du contexte particulièrement sensible dans lequel elles étaient données, d'une manière telle que ces informations revenaient intrinsèquement à discréditer les produits concurrents des siens, en mettant indûment en doute leur efficacité et leur sécurité au bénéfice de ses propres spécialités ;

Sur l'obligation d'information invoquée par la société Sanofi-Aventis

Considérant que la société Sanofi-Aventis conteste le caractère abusif de la pratique en faisant valoir que pèse sur elle, en sa qualité de fabricant, une obligation légale d'information, qui se divise en une double exigence d'obligation de renseignement et de conseil, tant à l'égard du consommateur final, ce qu'elle fait au moyen de la notice, mais aussi des professionnels de santé que sont les médecins prescripteurs et les pharmaciens, ce qui implique de sa part la communication d'une information complète et précise ; qu'elle rappelle qu'elle est, de plus, tenue, en sa qualité de laboratoire pharmaceutique, à une obligation légale d'information ; qu'Ile objecte que les informations qu'elle a délivrées n'ont porté que sur les caractéristiques objectives de ses produits, c'est-à-dire, d'une part, la différence de sets, qui renvoie à une différence de composition, et donc à une réalité chimique, d'autre part, à une différence dans l'AMM entre le Plavix qui contient deux indications et ses génériques qui n'en contiennent qu'une ; qu'elle ajoute que l'Afssaps n'a soulevé aucune objection quant à la communication de cette information aux professionnels

Mais considérant que s'il n'est pas contestable que les données diffusées ont concerné des différences objectives entre le Plavix et ses génériques, soit, d'une part, que le sel contenu dans ces médicaments n'était pas le même, d'autre part, que l'AMM du princeps visait une indication thérapeutique en association avec l'aspirine pour le SCA que ne contenaient pas les AMM des génériques, ce n'est pas le simple fait d'avoir communiqué ces données qui est reproché à la société Sanofi-Aventis, mais la façon dont elle l'a fait ;

qu'il convient à cet égard de rappeler tout d'abord que ces différences sont la résultante du respect des brevets et certificats complémentaires en cours et protégeant d'un côté l'hydrogénosulfate de clopidogrel, de l'autre, l'indication thérapeutique du SCA en bithérapie ; qu'elles sont donc des différences imposées juridiquement et ne procèdent pas d'un choix des laboratoires pharmaceutiques concurrents que par ailleurs, compte tenu des conditions auxquelles est soumise l'octroi d'une AMM, ces différences sont l'une et l'autre sans portée sur la substituabilité des génériques au princeps qu'en effet, sur la différence de sel, l'Afssaps a, dans le cadre d'une réponse adressée aux services d'instruction de l'Autorité, précisé que compte tenu des éléments communiqués pour les demandes d'AMM qui "Contenaient outre une étude de bioéquivalence à la spécialité Plavix, des données démontrant la sécurité et l'efficacité du sel différent (..) [celle-ci] n'interdit pas la qualification générique d'une spécialité et ne constitue pas une entrave à la substitution" ; que sur la différence d'indication thérapeutique, cet organisme, répondant à une demande de la société Sanofi-Aventis, a dans une lettre du 24 septembre 2009, précisé que " (...) l'inhomogénéité des indications thérapeutiques des spécialités en cause ne saurait être regardée comme participant d'une situation dans laquelle la substitution serait susceptible d'entraîner un risque particulier pour la santé des patients sous certaines conditions d'utilisation et ce d'autant qu'il s'agit de spécialités génériques ayant démontré leur bioéquivalence, ayant établi un rapport efficacité/sécurité satisfaisant au moins similaire à celui de votre spécialité de référence Plavix et présentant une notice validée par l'Agence française de sécurité sanitaire (...) " ; qu'il résulte de cette réponse que la substitution d'un générique au Plavix, dans ce cas d'un patient traité pour un SCA en bithérapie avec de l'aspirine, est sans risque particulier pour la santé de ce patient ;

que, dans ces conditions, c'est à juste titre que l'Autorité a considéré que les pratiques i-appelées ci-dessus, qui ne consistent pas seulement A décrire des différences objectives ou informelles professionnels de simples caractéristiques des médicaments concernés, constituaient une pratique abusive ;

qu'une telle analyse ne revient pas à priver les laboratoires princeps Un droit d'assurer la promotion de leurs produits, dès lors que celle-ci demeure objective et ne se présente pas de façon à introduire une suspicion de dangerosité à l'égard des produits concurrents ; qu'en outre, si l'Afssaps na pas relevé de caractère trompeur de la publicité diffusée par la société Sanofi-Aventis en faveur de son propre générique Clopidogrel Winthrop rappelant que celui-ci disposait d'un sel identique, se présentait comme un comprimé identique et bénéficiait d'une fabrication identique, ceci s'explique pat- le fait que ce message n'était pas mêlé à un i-appel du risque de mortalité lié au SCA, ni à la mention d'une prétendue impossibilité de substituer le générique dans ce cas, comme le véhiculait le discours des visiteurs médicaux et délégués pharmaceutiques de la société Sanofi-Aventis ;

Considérant que, dans ces conditions et compte tenu du contexte particulier résultant, d'une part, de la méconnaissance des professionnels en termes de pharmacologie mais aussi du cadre juridique réglementant les spécialités génériques, d'autre part, de l'aversion au risque des professionnels de santé relevés par l'Autorité aux paragraphes 346 à 360 de sa décision, il est sans portée qu'un sondage effectué pour le compte de la société Sanofi-Aventis ait révélé que 91,4 % des médecins ont considéré que l'information sur la différence de sel était utile et 53,3 % ont jugé cette information comme indispensable, de même que 89,7 % des médecins ont i-épandu que l'information sur la différence d'indications était utile tandis que 68,5 % estimaient qu'elle était indispensable ; qu'en effet, si tant est que l'objectivité du recueil des informations contenues clans ce sondage, soit démontrée, ce qui n'est pas le cas, ces taux sont d'autant moins exploitables qu'il n'est pas précisé quelles sont les raisons pour lesquelles ces professionnels ont répondu comme ils l'ont fait et ce alors qu'ils ont été interrogées en février 2013, soit à un moment où la décision de l'Autorité n'était pas rendue et les professionnels n'étaient pas informés de la pratique mise en œuvre ;

Considérant que l'obligation d'information et de conseil qui pèse tant sur les médecins que sur les pharmaciens ne remet pas non plus en cause l'appréciation de l'Autorité sur les pratiques développées dans la mesure où, ainsi qu'il a déjà été dit, celle-ci ne concerne pas les informations délivrées en tant que telles, mais la façon dont celles-ci ont été présentées ;

Sur la variabilité de réponse des patients

Considérant que la société Sanofi-Aventis reproche, en outre, à l'Autorité de la concurrence d'avoir rejeté la pertinence de son argumentation prise de la variabilité de réponse des patients au clopidogrel et de l'observance des prescriptions ; quelle affirme que l'importance de l'information qu'elle a communiquée est confirmée par des études scientifiques et des avis médicaux postérieurs et antérieurs à la générification du Plavix, qui attestent de l'influence différente selon les sels utilisés, de l'action du Clopidogrel Considérant, cependant, qu'il résulte de l'argumentation de la société Sanofi Aventis elle-même que la variabilité de l'efficacité du clopidogrel selon les individus est un phénomène observé "à la fois avec Plavix et n'importe elquel de ses génériques" ;qu'elle expliquait d'ailleurs dans son mémoire récapitulatif du 21 septembre 2012, dont elle produit un extrait devant la cour (pièce 12), que "l'efficacité et la tolérance hémorragique du clopidogrel varient à la fois selon les individus (...) et également dans le temps chez un même individu" et qu'elle ajoutait qu'il existe différentes causes possibles à cette variabilité de réponse ; qu'il s'en déduit que si des variabilités de réactions individuelles à la prise de Plavix ou de ses génériques ont pu être observées, il n'est pas scientifiquement démontré que la différence de sels serait la cause de cette variabilité ; que par ailleurs, aucun des éléments du dossier ne permet de constater que la société Sanofi-Aventis aurait communiqué aux médecins et pharmaciens l'information selon laquelle il aurait été observé que les sels différents de celui qu'elle utilise pour le Plavix pouvaient avoir une influence sur l'efficacité du médicament générique en particulier chez les patients à haut risque, ce qui aurait été vérifiable, mais qu'elle s'est contentée de le sous-entendre tout en liant l'information relative à l'absence d'indication pour le SCA, afin d'entretenir une méfiance à L'égard des génériques ;

Considérant que, de même, aucun élément ne permet de constater qu'elle aurait invoqué le risque objectivement constaté que certains patients ne trouvant pas dans la notice d'un générique qui aurait été substitué au Plavix l'indication du SCA en bithérapie, cessent, au péril de leur santé, voire de leur vie, de prendre le traitement prescrit, phénomène désigné sous le terme d'observance ; que le constat selon lequel une grande majorité de personnes consulte la notice ne permet en aucun cas d'en tirer la conclusion que les patients atteint d'une maladie aussi grave que le SCA abandonneraient leur traitement au seul motif que celle-ci ne figurerait pas dans les indications de la notice des génériques du clopidogrel ; que le risque relevé par une majorité de médecins dans le sondage produit par la société Sanofi-Aventis n'est corroboré par aucun élément tangible, ni aucune étude ayant objectivement étudié, ou constaté, un tel phénomène ; qu'enfin, l'Afssaps alertée par la société Sanofi-Aventis sur ce point lors de la procédure de mise sur le marché des génériques du Plavix, lui a répondu par une lettre du 29 septembre 2009, que l'identité des indications ne figure pas au nombre des critères qui doivent être remplis pour satisfaire à la définition du médicament générique (identité qualitative et quantitative en principe actif, identité de forme pharmaceutique et bioéquivalence démontrée), mais surtout que "l'inhomogénéité des indications thérapeutiques des spécialités en cause ne saurait être regardée comme participant d'une situation dans laquelle une substitution serait susceptible d'entraîner un risque particulier pour la santé des patients sous certaines conditions d'utilisation, et ce d'autant qu'il s'agit de spécialités génériques ayant démontré leur bioéquivalence, ayant démontré leur bioéquivalence, ayant établi un rapport efficacité/sécurité satisfaisant au moins similaire à celui de votre spécialité de référence Plavix et présentant une notice validée par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé voire, le cas échéant, l'Agence européenne des Médicaments. En effet, quelle que soit la spécialité dispensée au sein du groupe générique, les conditions d'utilisation de la spécialité prescrite ne seront pas modifiées par la substitution et ce d'autant que le patient suivra les termes de la prescription" ;

Considérant encore que la société requérante ne saurait tirer argument de ce qu'une demande l'AMM de la société Téva pour un générique utilisant certains sels aurait été rejetée par l'agence européenne du médicament dès lors qu'un tel fait, fut établi, n'est pas de nature à remettre en cause la bioéquivalence de l'ensemble des autres génériques dont ceux produits par la société Téva, ayant obtenu une AMM ;

Considérant que la société Sanofi-AvenUs fait valoir qu'il existe un nombre significatif scientifiques et avis médicaux menés par des équipes sérieuses de chercheurs et ayant fait l'objet de publications dans des revues connues qui attestent de la possible influence des sels sur l'action du clopidogrel et confirment la pertinence de l'information qu'il lui est reproché d'avoir communiqué ;

Considérant cependant, que l'article L. 525-t, 5°, sous a) du Code de la santé publique, qui définit la spécialité générique d'une spécialité de référence, précise que "(...) De même, les différents sels, esters, éthers, isomères, mélanges d'isomères, complexes ou dérivés d'un principe actif sont regardés comme ayant la même composition qualitative en principe actif, sauf s'ils présentent des propriétés sensiblement différentes au regard de la sécurité ou de l'efficacité. Dans ce cas, des informations supplémentaires fournissant la preuve de la sécurité et de l'efficacité des différents sels, esters et dérivés d'une substance active autorisée doivent être données par le demandeur de l'autorisation de mise en sur le marché" ; que répondant à une demande des services d'instruction de l'Autorité, l'Afssaps a indiqué que "les dossiers déposés à l'appui des demandes d'AMM pour du clopidogrel présent sous une forme autre que de l'hydrogénosulfate (sel du Plavix) contenaient, outre une étude de bioéquivalence à la spécificité Plavix, des données démontrant la sécurité et l'efficacité du sel différent (bésilate de clopidogrel ou chlorhydrate de clopidogrel).Il découle de ce qui précède que la différence de sel n'interdit pas la qualification générique d'une spécialité, et ne constitue donc pas une entrave à la substitution" ; que, de plus, force est de constater que la société Sanofi-Aventis n'a invoqué aucune de ces études ou publications qui auraient pourtant été de nature à conforter les informations qu'elle délivrait, au moment où elle les a diffusées que si, comme elle l'indique, la possible influence de la différence de sels était parfaitement connue de l'ensemble de la communauté médicale, ce qui expliquerait son choix de ne délivrer que la seule information sur les caractéristiques du Plavix au regard de celles des génériques, elle ne rapporte pas la preuve de la connaissance généralisée de cette information lorsqu'elle a mis en œuvre la pratique reprochée, et il demeure incompréhensible, d'une part, qu'elle n'ait pas alors signalé de tels risques à l'Afssaps comme elle en avait la possibilité, d'autre part, que cet organisme ait délivré des AMM aux génériques en cause

Considérant par ailleurs que c'est à juste titre que l'Autorité fait observer que les rapports et études invoquées par la société Sanofi-Aventis et faisant état de variations de réactions de patients au clopidogrel selon les sets employés, qui sont tous postérieurs aux pratiques reprochées, ne peuvent justifler a posteriori la pratique de dénigrement dont il lui est l'ait grief, d'autant qu'il ne résulte pas de ces études que les patients couraient un risque en utilisant les génériques plutôt que le princeps et que, de plus, ainsi qu'il a été relevé précédemment, la société Sanofi-Aventis elle-même indique que ces variations individuelles s'observent quel que soit le sel utilisé ;

Considérant qu'outre les éléments relevés par la décision attaquée (paragraphes 43 1 et 432), l'attestation délivrée par Le Professeur Drouet comporte, dans sa déclaration d'intérêts, mention de sa participation à un symposium financé par la société Sanofi en 2012. qui empêche de considérer son témoignage comme présentant les garanties d'indépendance et d'objectivité que nécessite l'admission d'une preuve testimoniale et ce, quels que soient les titres et qualités de l'attestant ; que, de plus, ce témoignage mentionne des situations que le signataire qualifie lui-même d'"extrêmes" ou de "phase algue" qui relèvent de cas d'hospitalisations lesquels ne sont pas compris dans le champ de la saisine de l'Autorité qui ne vise que le marché "ville" du clopidogrel en France ;

Considérant, enfin, que le tableau fourni par l'Afssaps aux services d'instruction de l'Autorité mentionne, ainsi qu'elle l'a relevé au point 80 de sa décision, qu'au mois d'août20 1 I, soit dix-huit mois après les mises sur le marché des génétiques du Plavix, soixante-dix alertes de pharmacovigilance avaient été reçues par cet organisme pour les spécialités à base de clopidogrel, dont seize concernaient le Clopidogrel Winthrop et seize autres le générique commercialisé par la société Mylan, ce qui les plaçait à la première place en nombre d'alertes et démontre, de plus, que ces incidents ont été très peu nombreux en regard des 8,3 milliards de boites de génériques de Plavix vendus en 2010, chiffre non contesté par la requérante ;

Sur la mise en place une stratégie globale et structurée destinée à dénigrer les génériques concurrents

Considérant que la société Sanofi-Aventis conteste avoir mis en place une stratégie globale et structurée ; qu'elle fait valoir à ce sujet que la décision ne cite aucune déclaration ambigüe ou douteuse de la part des visiteurs médicaux, le seul propos relevé étant, selon elle, modéré; qu'elle ajoute que la décision ne se fonde que sur des articles de presse et des documents purement internes qui ne démontrent pas l'existence d'une stratégie globale et structurée de sa part, lors du lancement des génériques du Plavix.

Mais considérant cependant que la stratégie, dont la société requérante conteste l'existence et la luise en œuvre, est établie par de nombreux éléments relevés par l'Autorité de la concurrence aux paragraphes 103 à 205 de sa motivation que la cour adopte ; qu'il convient à ce sujet de rappeler que dès le mois de mai 2009, juste après la délivrance des AMM " génériques " par le comité des médicaments à usage humain de l'Agence européenne du médicament, la société Sanofi-Aventis a diffusé, par la voie d'un communiqué de presse, un discours mettant en avant l'existence de La différence de sels entre le Plavix et les génériques, ces derniers étant présentés comme une nouveauté non éprouvée, alors que le Plavix bénéficiait d'une décennie d'expérience et disposait d'un profil d'efficacité et de tolérance établi ; que ce discours a été complété par un entretien avec le président de la société Sanofi publié dans la revue le Quotidien du médecin le 15 octobre 2009, qui liait la différence de sels entre le Plavix et les génériques à la différence d'indication thérapeutique du SCA, pour exposer ensuite que "pour autant " l'Agence dit médicament avait considéré qu'elle ne pouvait retenir de différenciation entre le Plavix et ses génériques et rappeler que l'auto-générique Clopidogrel Winthrop était lui totalement identique au princeps ; que ces termes induisaient l'idée que la délivrance de l'AMM aux génériques pouvait être contestable en termes de sécurité pour les patients, mais qu'en tout état de cause, il existait un générique parfaitement sûr et efficace, l'auto-générique Clopidogrel Winthrop ; que, par ailleurs, ce discours a été relayé par les visiteurs médicaux auprès des médecins et les délégués pharmaceutiques auprès des pharmaciens, lequel est démontré par les argumentaires diffusés par la société Sanofi-Aventis à ces professionnels ; que ces documents proposent le même message que celui décrit ci-dessus, mais insistent de surcroît sur les risques de mortalité élevée des patients atteints de SCA et incitent les visiteurs à recommander ou inviter les médecins à inscrire la mention NS (non substituable) sur les ordonnances et les pharmaciens à opérer la substitution avec l'auto-générique Clopidogrel Winthrop ; que les argumentaires diffusés aux délégués de la société Sanofi Aventis abordent aussi la question des motifs pour lesquels les génériques à l'exception de l'auto-générique ne comportent pas l'indication thérapeutique du SCA en bithérapie en expliquant seulement qu'une telle demande n'a pas été faite dans les AMM, sans toutefois préciser qu'en tout état de cause la société Sanofi étant titulaire d'un brevet en cours de validité sur cette indication, il était impossible pour les laboratoires distribuant des génériques du Plavix de mentionner cette indication dans leur notice, alors même que la substitution est possible même dans ce cas ;

Considérant que les cinq témoignages des délégués pharmaceutiques de a société Sanofi Aventis entendus par les services distinction de l'Autorité et selon lesquels, d'une part, ils se bornaient à signaler aux pharmaciens la différence de sels entre le Plavix, son auto-générique le Clopidogrel Winthrop et les autres génériques et, d'autre part, ils répondaient, lorsqu'ils étaient interrogés sur cette question en se référant i la bioéquivalence des génériques, sont contredits par de très nombreux témoignages de pharmaciens exerçant dans des régions très diverses de France qu'i] résulte en effet de ces témoignages en partie retranscrits aux paragraphes 155 à 173 de la décision, que les délégués pharmaceutiques de la société Sanofi-Aventis ont alerté les pharmaciens sur des risques encourus par les patients du fait de la différence de sels et du fait que les génériques ne comportaient pas l'indication pour le SCA en liant ces deux informations pourtant totalement indépendantes l'une de l'autre que ces témoignages sont confortés par une lettre adressée le 25 septembre 2009 à la société Téva par le responsable de La grande Pharmacie du Val de Saône, qui annulait sa commande de clopidogrel leva en indiquant qu'il avait interrogé le laboratoire Winthrop qui lui avait indiqué, d'une part, la non-substitution de Plavix dans 40 % des indications (SCA) dans Le cadre de l'association avec le Kardégic -qui est une marque d'aspirine-, d'autre part, La différence de sels entre le princeps et le générique ; que cette personne ajoutait "Ma responsabilité pharmaceutique et pénale étant engagée aux dires de Winthrop en cas de problème, je ne souhaite pas substituer ce générique" ; que l'Autorité a aussi relevé aux paragraphes 150 à 152 Plusieurs témoignages de médecins qui ont indiqué avoir reçu des visiteurs médicaux de la société Sanofi qui les ont alertés sur les difficultés que pouvaient poser La différence de sels et de l'absence d'AMM pour le SCA, l'une de ces médecins avant indiqué " (..) On m'a dit qu'il fallait mettre "non substituable". C'est une visiteuse habituelle de Sanofi. Les excipients ne seraient pas les mêmes et il y aurait eu des cas de thrombose" ;

Considérant, de plus que ces différents témoignages sont confirmés par les "remontées de terrains" de plusieurs représentants régionaux de la Caisse nationale de l'assurance maladie (Décision paragraphes 180 à 194), lesquels ont signalé que les professionnels de santé étaient destinataires d'un même discours délivré par les visiteurs et délégués du laboratoire Sanofi liant la différence de sels et la différence d'AMM entre les génériques et Je princeps Plavix, alertant sur les risques encourus en cas de substitution pour les patients atteints de SCA, et incitant à inscrire la mention "NS" sur l'ordonnance ;

que l'ensemble de ces éléments démontre suffisamment que les visiteurs médicaux et les délégués pharmaceutiques de la société Sanofi-Aventis ont tenu aux médecins et pharmaciens un discours liant de façon inappropriée et ambig0e, d'une part, la différence de sels entre le princeps et les génériques, d'autre part, l'absence d'indication thérapeutique du SC, parfois. en invoquant expressément tin risque qui résulterait pour certains patients de la substitution, alors qu'ainsi que le rappelle la décision, ces deux différences indépendantes l'une de l'autre ne résultent que de l'existence des certificats complémentaires concernant l'hydrogénosulfate de clopidogrel, sel du Plavix, et l'indication thérapeutique du syndrome coronarien aigue, lesquels étaient toujours en cours au moment de l'arrivée à son terme du brevet déposé pour le Plavix ; que la communication ainsi mise en œuvre occultait l'existence et la portée de ces bi'evets, contrairement â ce que soutient la société Sanofi Aventis qui ne saurait invoquer à ce sujet la brièveté de l'entretien des visites médicales, qui l'aurait contrainte à centrer ses informations aux seules données utiles aux médecins et pharmaciens ; que par ailleurs, c'est par une juste motivation que la cour adopte que l'Autorité (paragraphes 465 à 470 de la Décision) a décidé que les articles de presse cités par la société Sanofi-Aventis pour soutenir qu'elle avait clairement communiqué l'existence de ces brevets, étaient en réalité partiels et confus ; qu'il convient de relever à ce sujet que si d'autres articles faisant mention des brevets, sont parus en octobre 2009 suc différents supports, il n'est pas démontré qu'ils l'aient été à l'initiative de la société Sanofi-Aventis que de plus, ces seuls articles tous publiés au seul moment de l'autorisation des mises sur le marché des génériques, ne pouvaient à eux seuls permettre aux médecins et pharmaciens de replacer le discours communiqué par les visiteurs et délégués de la société Sanofi Aventis dans son exact contexte juridique, ce qui leur aurait permis d'envisager avec moins de crainte la possibilité d'urne substitution du Plavix par un générique autre que son auto-générique ;

Considérant, enfin, que le tableau produit par la société Sanofi-Aventis au paragraphe 195 de ses observations permet de constater que pour la période de six mois avant la mise sur le marché des génériques de Plavix, ce médicament princeps a été présenté à 79 % soit au premier, soit au deuxième, rang, lors des visites médicales qui sont censées durer moins de dix minutes, et que pour les six mois postérieurs à la sottie des génériques, ce médicament a continué à être présenté en rang un ou deux à 73 % ; que ces pourcentages, alors que le Plavix était en 2009 le quatrième médicament le plus vendu au monde, mis sur le marché depuis plus de dix ans, démontre qu'il faisait l'objet d'une présentation et d'un soin soutenus de la part des visiteurs médicaux, ce qui constitue des efforts de promotion tout à fait importants ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il est établi que la société Sanofi Aventis a. contrairement à ce qu'elle soutient, mis en œuvre une stratégie globale et structurée destinée â dénigrer les génériques concurrents et que les moyens du recours sur ce point ne sont pas fondés ;

Sur la preuve de l'effet trompeur des pratiques

Considérant qu'il convient à titre liminaire de rappeler que les dispositions de droit interne et communautaire prohibant la mise en œuvre de pratiques d'abus de position dominante sont rédigées en termes généraux et que toute pratique, y compris le dénigrement de concurrents actuels ou potentiels. est susceptible de constituer un abus prévu par ces textes des lois qu'elle a pour objet ou peut avoir pour effet de fausser le jeu de la concurrence (article L. 420-2 du Code de commerce) ou qu'elle est susceptible d'affecter le commerce entre Etats membres de l'Union européenne (article 102 du TFUE) ; qu'il n'existe aucun principe qui conduirait à exclure le dénigrement de ces prohibitions ;

Considérant, en outre, qu'il résulte d'une jurisprudence constante, tant en droit interne qu'en droit communautaire, que la notion d'exploitation abusive" est une notion objective visant les comportements d'une entreprise en position dominante qui sont de nature à influencer la structure d'un marché où, à la suite précisément de la présence de l'entreprise en question, le degré de concurrence est déjà affaibli et qui ont pour effet de faire obstacle, par le recours à des moyens différents de ceux qui gouvernent une compétition normale des produits ou des services sur la base des prestations des opérateurs économiques, au maintien du degré de concurrence existant en cote sur le marché ou au développement de cette concurrence (CICE arrêts du 13 février 1979, Hoffmann-La Roche/Commission. 85/76, Rec. p. 461, point 91; du 3juillet 1991, AKZO/Commission, C-62/86, Rec. p. J-3359, point 69; du 11 décembre 2008, Kanal 5 et TV 4. C-52/07, Rec.p. l-9275, point 25. ainsi que du 17 février 2011, Telia Sonera Sverige, C-52/09, Rec. p. J-527, point 27 6décembre2012, Astra Zenecal Commission, C-457/10. Point 74)- Cour d'appel de Paris. 8 avril 2008, Laboratoire Gtaxosmithkline C. ADLC).

Considérant que c'est par une exacte motivation, que la cour adopte, que l'Autorité de la concurrence a considéré que compte tenu de la forte rigidité au changement des médecins prescripteurs et des pharmaciens, ainsi que de l'aversion au risque des professionnels de santé, non contestés par la requérante, la diffusion d'une information négative, voire l'instillation d'un doute sur les qualités intrinsèques d'un médicament, peut suffire à le discréditer immédiatement auprès des professionnels de la santé ; qu'en effet, si ceux-ci s'interrogent sur son efficacité thérapeutique voire sur sort innocuité, du fait de la présentation qui leur en a été faite ou des réponses qui ont été données à leurs interrogations à cet égard, ils ne prendront pas le risque de le prescrire ou de le délivrer ; qu'ainsi que l'ajustement retenu l'Autorité instiller un doute dans l'esprit de professionnels de la santé, ciblé sur la qualité ou les propriétés du médicament générique, en délivrant des informations incomplètes, ambigües ou présentées de telle manière qu'elles suggèrent l'existence d'un risque à le substituer ou entretiennent, pour des motifs injustifiés, une crainte ou une prévention à cet égard, constitue bien une pratique déloyale et abusive, qui, si elle a pour objet et peut avoir pour effet de restreindre la diffusion sur le marché de ce médicament générique, contrevient aux dispositions précitées du droit de la concurrence ;

Considérant que, dans ce cadre, t'Autorité de la concurrence doit, pour qualifier de telles pratiques, démontrer que le discours tenu par la société Sanofi-Aventis auprès des professions de santé par voie de presse et pur l'intermédiaire des visiteurs médicaux et délégués pharmaceutiques, était de nature ?t faire naître une crainte ou une prévention à l'égard des médicaments génériques dtt Plavix que ce standard de preuve, qui répond aux caractéristiques du marché concerné, n'est pas un standard de preuve réduit, contrairement à ce que prétend la société Sanofi-Aventis; qu'il convient à ce sujet de rappeler, d'une part, que ]a divulgation d'une information de nature à jeter le discrédit sur un concurrent constitue un dénigrement, peu important qu'elle soit exacte, d'autre part, que ce n'est pas en l'espèce l'objectivité ou l'exactitude des informations contenues dans le discours de la société requérante qui est en cause, mais le lien établi entre deux informations exactes mais indépendantes et présentées de façon incomplète permettant de susciter un doute, voire une crainte sur l'efficacité oti la sécurité des médicaments génériques ; qu'il en résulte qu'il ne peut être reproché à ('Autorité de ne pas avoir respecté le standard de preuve requis en l'espèce ;

Considérant que la preuve d'une pratique anticoncurrentielle peut être établie par tout moyen dès lors que celui-ci est loyal et que cette preuve peut être directe ou résulter d'un faisceau d'indices graves, précis et concordants ;

Considérant que l'Autorité a estimé qu'il était établi que la communication de la société Sanofi-Aventis avait produit un effet trompeur et dissuasif à l'égard des génériques du Plavix sur les médecins et pharmaciens en se fondant sur les déclarations précises et concordantes de médecins et de nombreux pharmaciens, lesquelles ont été confortées par les remontées d'informations fournies par la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (la CNAMTS), selon lesquelles, dans plusieurs régions, les cardiologues ajoutaient en grand nombre la mention " non substituable " sur leurs ordonnances et les pharmaciens substituaient en priorité le Clopidogrel Winthrop, auto-générique distribué par la société Sanofi-Aventis ; que ces multiples indices ont encore été confortés jar des éléments transmis par les groupements de pharmaciens Réseau Santé et Giropharm, qui ont également fait état d'interrogations voire d'inquiétudes de la part d'un grand nombre de pharmaciens, tellement vives que ces groupements ont diffusé des circulaires d'information spécifiques à l'attention de leurs adhérents ;

Considérant que la société Sanofi-ventis conteste la valeur probante de l'ensemble de ces éléments ; qu'elle soutient à ce sujet que, s'agissant des témoignages, l'échantillon n'est pas pertinent et que ('Autorité a choisi les témoignages faisant état d'un effet trompeur, alors même que d'autres ne font pas état de doutes sur la bioéquivalence des génériques ;

Mais considérant, cependant, que les témoignages de médecins et pharmaciens retenus par l'Autorité sont un des éléments (du faisceau des indices qui concordent entre eux, tous les éléments se confortant mutuellement ; que rien ne permet de douter de la sincérité et du caractère objectif des déclarations formulées dans ces témoignages qui sont, comme le relève l'Autorité, parfaitement crédibles ; que le fait qu'un échantillon scientifiquement représentatif de la population des médecins, des cardiologues et des pharmaciens n'ait pas été utilisé, ou qu'aucun professionnel de santé implantés dans certaines régions n'ait été interrogé, n'altère pas la valeur probante des témoignages retenus par l'Autorité ; que les citations de deux témoignages de médecins généralistes et un cardiologue hospitalier donnent, même s'ils sont peu nombreux, un indice de l'effet du discours véhiculé par la société requérante auprès des médecins, lequel est, ainsi qu'il vient d'être précisé, corroboré par les " remontées de terrain " transmis par la CNAMTS, par les pharmaciens et par les indications fournées par les groupements de pharmaciens Réseau Santé et Giropharm ;

Considérant de même que la circonstance que les remontées de la CNAMTS ne concernent pas toutes les régions de France, ou que pour certaines d'entre elles une proportion de remontées ne soit pas à la mesure du nombre de professionnels implantés dans la région concernée, ne saurait remettre en doute la valeur probante des indications transmises par cet organisme qu'enfin, le pourcentage de personnes interrogées rapporté ai nombre de professionnels de santé n'est pas de nature à mettre en doute la crédibilité des éléments de preuve retenus par la Décision ; qu'à cet égard, la cour relève qu'il résulte de données produites par la société Sanofi-Aventis qu'un tiers des médecins qui, parmi ceux

qui ont répondu au rapporteur, ont reçu la visite de Sanofi-Aventis, ont émis un doute quant à la bioéquivalence des génériques et qu'un quart des pharmaciens, qui ont répondu au rapporteur, ont reçu la visite de Sanofi-Aventis, ont émis un doute quant à la bioéquivalence des génériques, ce qui constitue des proportions suffisamment significatives, pour constituer un élément de preuve, compte tenu de la concordance des autres éléments retenus par la décision ;

Considérant, par ailleurs, que le fait que le dossier comporte, selon les indications de la société Sanofi-Aventis. huit témoignages de pharmaciens et quatre témoignages de médecins qui n'ont fait part d'aucun doute concernant la bioéquivalence des génériques de Plavix, ni même l'approche statistique par laquelle la société requérante conteste la significativité de l'échantillon utilisé par la décision, ne sont, eux non plus, pas de nature à remettre en cause la force probante dci faisceau d'indices retenu ;

Considérant encore que les remontées de la CNAMTS que la société Sanofi Aventis considère comme étant insuffisamment nombreuses, concernent néanmoins 13 régions sur 22 et font état de multiples constats des membres du réseau (délégués de l'assurance maladie. praticiens conseils et directeurs de caisse), repris aux paragraphes 179 à 194 de la décision, qui font état d'expressions par les professionnels de santé soit d'une affirmation du caractère irremplaçable ou insubstituable du Plavix (Région Aquitaine), soit de l'absence de validation des études conduites pour les génériques du Plavix (Ile-de France), niais aussi de l'absence de preuve de l'efficacité d'autres génériques que le Clopidogrel Winthrop (région Midi-Pyrénées), ou encore du risque de mise en danger des patients en cas de délivrance d'un autre médicament que le Plavix ou son auto-générique (Région Nord-Pas-de-Calais, et région Picardie) ; que ces remontées ont été confortées par des déclarations ou des notes écrites de membres du réseau de la CNAMTS citées aux paragraphes 189 à 193 de la décision attaquée ; que dans ces conditions, il importe peu que certaines régions n'aient pas fait remonter à la CNAMTS d'informations ou que les praticiens conseil du service médical de la région Alsace-Moselle et les délégués de l'assurance maladie du Bas-Rhin et du Haut-Rhin aient répondu à la CNAMTS ne pas avoir été destinataires d'informations relatives à des problèmes de substitution des génériques, ou que le doute exprimé dans la région Champagne-Ardenne ait été formulé par une déléguée commerciale de la société Téva ;

Considérant qu'indépendamment de la représentativité de l'échantillon sur lequel il repose et de savoir si ses conclusions procèdent d'une méthode objective, le sondage réalisé par t'agence A plus A au bénéfice de la société Sanofi-Aventis et produit par elle devant la cour ne rapporte pas la preuve de l'indifférence du discours diffusé par celle-ci auprès des professionnels de santé ; qu'en effet, d'une part, la proportion de médecins qui auraient appris l'existence de sels différents entre le Plavix et les génériques autres que le Clopidogrel Winthrop est sans portée à ce sujet, dans la mesure où la pratique reprochée ne consiste pas dans le fait d'avoir délivré cette information objective, mais de l'avoir présentée comme étant liée à l'absence d'indication du SCA et d'avoir, par l'ambiguïté des formulations, induit l'idée qu'il pouvait exister un danger pour les patients dans la substitution du Plavix par un générique différent de l'auto-générique ; que par ailleurs, le fait que les médecins estiment eux-mêmes avoir des connaissances suffisantes en pharmacologie concernant le Plavix est contredit par les remontées de terrains de la CNAMTS qui montrent que, dans de nombreux cas, des médecins se sont laissés convaincre par le discours de la société Sanofi-Aventis qu'enfin, si 98 % des médecins de l'échantillon, connaissant les différences de sels, ont considéré que cette différence peut remettre en cause la bioéquivalence des génériques, cette donnée est pourtant formellement contredite par l'Afssaps, devenue l'ANSM qui a délivré les autorisations de mise sur le marché aux génériques, sans qu'il soit d'ailleurs démontré, plusieurs années à présent après ces délivrances d'autorisations, que la bioéquivalence puisse être objectivement remise en question ; qu'en conséquence, le sondage produit n'apporte pas d'éléments qui conduiraient à remettre en cause l'appréciation de l'Autorité de la concurrence ;

Considérant, enfin, que le fait que la société leva soit le seul laboratoire parmi ceux qui commercialisent des génériques du Plavix à avoir saisi ]'Autorité de]a concurrence n'est pas susceptible de remettre en cause le caractère probant des éléments retenus par elle pour qualifier la pratique mise en œuvre par la société Sanofi-Aventis de dénigrante et considérer qu'elle avait eu un effet trompeur sur les professionnels de santé ;

qu'il se déduit de ce cliii précède que les moyens du recours contestant l'effet trompeur de la pratique doivent être rejetés ;

Sur le lien de causalité entre la pratique reprochée et les effets

Considérant que la société Sanofi-Aventis soutient qu'il n'est pas démontré par l'Autorité que la réticence générale des Patients et des médecins vis-à-vis des génériques du Clopidogrel aurait été une conséquence du discours qu'il lui est reproché d'avoir diffusé ;

Considérant toutefois que s'il existe, comme elle le fait valoir, une réticence généralisée à l'égard des médicaments génériques, ainsi qu'un débat relayé par la presse sur la confiance qui peut être accordée à ceux-ci, cet élément de contexte n'a pu que favoriser les effets de la pratique relevée ; qu'en outre. il n'est produit aucun élément tangible démontrant que les génériques du Plavix n'auraient pas les effets curatifs ou préventifs de ce princeps, ou encore qu'il attrait été relevé un taux d'incidents permettant de douter de leur sécurité pour les patients ; que, de plus, la décision relève et cite un certain nombre de témoignages de pharmaciens qui font état de leur crainte de voir leur responsabilité engagée et de l'influence du discours du laboratoire Sanofi dans l'alimentation de cette crainte ; que la cour relève ainsi, à titre d'exemple, le témoignage cité par la décision au paragraphe 494 d'un pharmacien de Pierrelatte selon lequel " (...) le personnel de l'officine avait été très sensible au discours du laboratoire Sanofi sur la notion de responsabilité lors de la délivrance, en cas d'AVC ou d'infarctus par la suite (on apprend des risques si on associe kardegic + générique autre que Winthrop) ", ou encore celui du responsable d'une pharmacie située à Saint Laurent de Médoc, selon lequel "la formatrice de Sanofi-Aventis nous a mis en garde, lors des formations in situ sur Plavix, des risques que nous faisons courir aux patients lors de Ici substitution de Plavix car les génériques n'avaient pas les AMM" (Décision, paragraphe 161) ; qu'à CeS témoignages s'ajoute, enfin, l'annulation par le responsable d'une pharmacie située à Neuville-sur-Saône de sa commande de générique de la marque leva à la suite d'une visite d'un délégué pharmaceutique de Sanofi-Aventis, et précisant "Ma responsabilité Pharmaceutique et pénale étant engagée au dire de Winthrop Cfl CCIX de problème chez un patient, /e ne souhaite pas substituer ce générique." (Décision paragraphe 1162) ;

Considérant que la société Sanofi-Aventis reproche à la décision d'avoir retenu que la pratique avait eu pour effet un taux de mentions cc NS " (pour cc non substituable "), relevées sur les ordonnances de médecins, supérieur à ce qui est constaté pour d'autres génériques qu'elle fait valoir sur ce point que les ordonnances "NS " existent pour tous les génériques et non uniquement pour le clopidogrel et que l'importance du nombre de ces ordonnances s'explique par le fait que les génériques du Plavix n'ont pas l'indication du SCA qui demeure protégée par un brevet, alors que cette pathologie représente environ 25 % des prescriptions ; qu'elle soutient qu'il convient de corriger les chiffres de la CNAMTS sur les ordonnances où figure la mention " NS " en en excluant les ordonnances correspondant au SCA ;

Mais considérant, cependant, que pour établir le lien entre la pratique reprochée et les effets, la décision ne s'est pas référée au seul fait que des mentions cc NS " soient inscrites sur les ordonnances, mais au constat qu'il existait un taux plus élevé de cette mention s'agissant du Plavix (12,6 %) que pour d'autres spécialités, puisque toutes spécialités confondues, ce taux est en moyenne de 5 % ; que dans ces conditions, il est sans portée que cette possibilité existe pour toutes les molécules et pas seulement pour le Plavix ; que l'Autorité a relevé à ce sujet que cette spécialité était celle pour laquelle ce taux était le plus élevé, ce qui n'est pas contesté que par ailleurs, l'absence d'indication SCA en bithérapie pour les génériques ne procède pas d'une impossibilité biologique, mais seulement de ce que cette indication est encore protégée par un certificat complémentaire, ce qui n'empêche nullement la substitution par le médecin ou par le pharmacien du Plavix par un générique en bithérapie avec l'aspirine en cas de SCA, sans violation de l'article L. 5 121-l 2-l du Code de la santé publique interdisant les prescriptions hors AMM ; qu'en conséquence, si cette donnée petit expliquer un taux de mention " NS " par certains médecins moins informés que d'autres, elle ne saurait expliquer l'importance de la différence de taux de mentions de non substitution entre le Plavix et d'autres médicaments princeps ; qu'enfin, la Société Sanofi-Aventis ne produit aucun élément permettant à la cour de constater qu'il existe, comme elle l'affirme, une tendance confirmée à une moindre substitution dans le cas de médicaments destinés à des pathologies lourdes de conséquences comme l'est l'athérothrombose que, de plus, la proposition de calcul que la société requérante formule dans ses conclusions n'est pas appropriée, dès lors qu'il repose sur le postulat qu'il conviendrait de déduire des ordonnances comportant la mention NS toutes celles relatives à une prescription en cas de SCA, alors que la substitution par le médecin est aussi possible dans ces cas. en dépit de ce que cette indication ne figure pas dans l'AMM ;

Considérant que la société Sanofi-Aventis conteste encore qu'il existe un lien de causalité entre la pratique qui lui est reprochée et l'effet de baisse continue du taux de pénétration des génériques du Plavix suit le marché à partir d'avril 2010 ;

Considérant que l'Autorité a observé à Cet égard que le taux de substitution de Plavix a initialement connu une hausse rapide, une stagnation précoce, plus une baisse constante dès le mois de mars 2010, soit environ cinq mois après la sortie des premiers génériques de Plavix ; qu'elle a estimé que ces taux sont tout à fait inhabituels ; qu'elle relève que de nombreux laboratoires "génériqueurs" étaient présents dès le départ sur le marché concerné, ce qui promettait des volumes importants et un chiffre d'affaires élevé, d'autant plus, qu'en raison des mesures réglementaires d'incitation à la substitution, et notamment celles concernant les terni ses supplémentaires autorisées, la générification de Plavix constituait une opportunité économique intéressante pour les pharmaciens ;

Considérant que. comme le fait observer la société Sanofi-Aventis, la comparaison du taux de générification du clopidogrel avec ceux de huit autres molécules comparables mises sur le marché entre avril 2004 et octobre 2009, permet de constater que le clopidogrel a le plus fort taux de générification sur les trois premiers mois ; niais que cependant ce taux augmente très peu au quatrième mois, ce qui n'est pas le cas des autres, à l'exception de la Rispéridone, ce qui s'explique par le fait que, comme le relève l'Autorité, sans être contredite, ce médicament est commercialisé en partie sous forme injectable, le médicament princeps sous cette forme n'étant pas " générique " ; qu'ensuite, le taux de générification du clopidogrel a diminué et apparaît en baisse continue aux 12ème et 24ème mois, ce qui n'est le cas d'aucune des autres molécules ;

Qu'il résulte des éléments du dossier que le discours développé par la société requérante n'a été transmis aux visiteurs médicaux que fin août début septembre 2009, au cours de séminaires de formation, alors que les génériques sont apparus sur le marché en octobre 2009 que, de plus, les portefeuilles des visiteurs médicaux de la société Sanofi Aventis peuvent comporter plusieurs centaines de médecins et sont tels qu'ils ne peuvent les rencontrer qtie de façon progressive dans le temps ; que l'Autorité constate aussi que certains laboratoires génériqueurs, comme la société Biogaran. qui avaient reçu des commandes, les ont vu cesser pendant ou après la campagne d'information de la société Sanofi-Aventis et que les taux de " recommandes " sont ensuite restés inférieurs à la moyenne ; qu'au regard de l'ensemble dc ces éléments, l'affirmation selon laquelle le discours diffusé par la société Sanofi-Aventis aurai t produit des effets progressivement dans le temps ne relève pas de la spéculation, contrairement à ce que soutient la société Sanofi Aventis ; qu'en outre, le nombre de prescriptions de Plavix ou de clopidogrel par les médecins généralistes et les cardiologues en 2013, date du sondage de l'institut A plus A, n'apporte aucun élément pertinent à ce sujet, d'autant que les données citées par la société Sanofi-Aventis dans ses conclusions ne sont pas celles résultant du rapport de cet institut ;

Considérant que cet effet retardé dans le temps n'est pas non plus incompatible avec l'aversion au risque des professionnels de santé, dans la mesure où il n'est pas contesté que les prescriptions de clopidogrel sont t renouvelées, en moyenne, une fois toutes les sept semaines, soit tous les mois et demi, ce qui explique que les pratiques n'ont pas eu d'effet immédiat ; que par ailleurs, il convient de rappeler que parmi les génériques, figure auto-générique Clopidogrel Winthrop en tous points semblable au Plavix, dont la part est systémaliquei7len au-dessus de 30 % en volume, ainsi que l'a relevé la décision sans être contestée sur cette donnée. ce qui laisse une part de faible importante aux autres génériques ;

Considérant que la société Sanofi-Aventis fait valoir que deux facteurs extérieurs et postérieurs à l'arrêt de la pratique reprochée ont eu une influence sur l'évolution du taux de substitution ; qu'elle expose, d'une part, qu'en mars 2010, l'Afssaps a retiré des lots de génériques de Clopidogrel commercialisés par les laboratoires Ratiopharm et Sandoz, ce qui u, selon elle, eu un effet immédiat et durable sur le marché, d'autre part, qu'en mai 2010, les pharmaciens ont déclenché une grève de la substitution concernant le Plavix, qui aurait été longue et très bien suivie, entrainant des ruptures de stock de Plavix chez les grossistes ;

Mais considérant que si ces deux évènements ont pu avoir un impact sur le taux de générification. il convient d'observer que selon le graphique produit par la société requérante dans ses conclusions, la baisse des parts de marché de la société Sandoz avait commencé depuis la moitié du mois de novembre 2009 et celle de la sté Ratiopharm depuis le mois de février 2010, soit antérieurement au retrait décidé par l'Afssaps au mois de mars 2010 que ce même graphique permet de constater que les parts dc marché de ces deux laboratoires étaient au mois de mars 2010, date des retraits, à peine supérieure à 3 % pour la société Sandoz et inférieure à 3 % pour la société Ratiopharm, ce qui conduit à considérer que le retrait invoqué par la société Sanofi Aventis n'a pu avoir qu'une incidence mineure dans la baisse du taux de générification, qui selon le graphique figurant au paragraphe 570 de la décision et repris par la société Téva, a commencé à baisser dès la moitié du quatrième mois de lancement des génériques, soit en février 2010 ;

Considérant par ailleurs, s'agissant de la grève de la substitution du Plavix mise en œuvre le 17 mai 2010, que la société Sanofi-Aventis, ne démontre ni qu'elle aurait été très suivie, ni qu'elle aurait été de longue durée comme elle le prétend, et ce, alors que la société BMS, poursuivie par l'Autorité pour un grief d'entente avec la société requérante, avait indiqué qu'elle avait duré deux semaines et quelle était motivée par des raisons purement économiques et "déconnectée de Plavix" et que la CNAMTS a précisé que cet évènement avait eu un effet très limité ;

Considérant que la Société Sanofi-Avantis fait encore valoir que la brutale remontée des génériques du Clopidogrel à la suite de la signature d'une nouvelle convention entre les pharmaciens et la CNAMTS, en mai 2012, démontre que la stagnation du taux de générification était due à une insuffisante incitation financière des pharmaciens à substituer davantage et non au nombre élevé d'ordonnances "NS" ;

Considérant qu'il résulte du graphique produit par la société Sanofi-Aventis dans ses conclusions qu'après avoir connu une diminution constante jusqu'en mai 2012, date à laquelle il était de 60,6 %, le taux de pénétration des génériques de clopidogrel a augmenté pour s'établir à 76,1 % en mars 2013 ; que la requérante précise que celte augmentation est liée à la signature d'une convention le 6 mai 201 2, qui u accordé aux pharmaciens, en échange d'engagements plis par eux, une rémunération annuelle versée par la CNMATS, variable en fonction dii taux de substitution individuel qu'ils atteignent ;

Considérant, cependant, qu'il ne peut être déduit de la progression du taux de générification à compter de ce moment, que la baisse puis la stagnation antérieures de ce taux pour le Plavix n'étaient pas dues aux ordonnances " NS" comme le soutient la société Sanofi-Aventis qu'en effet, elle ne conteste pas que la mise en œuvre de la nouvelle convention entre les pharmaciens et la CNAMTS résulte d'un dispositif de politique de santé publique très directif et contraignant, susceptible d'aboutir à des sanctions qui explique directement que les pharmaciens aient surmonté leurs préventions contre les génériques du Plavix, d'autant que cette convention est intervenue plus de deux ans et demi après le lancement des génériques de ce médicament, période suffisamment longue pour que les pharmaciens puissent être convaincus de l'absence de danger à substituer un générique à ce princeps ;

Considérant encore que si d'autres génériques n'ont pas atteint les objectifs de générification fixés par la CNAMTS et que, dès lors, la portée d'un tel constat pour le Plavix doit être relativisée, ce que d'ailleurs fait la décision en ne retenant cet élément qu'à titre indicatif d'ordre de grandeur", la cour relève que ce constat est retenu à titre surabondant dans l'analyse de l'Autorité sur les effets de la pratique d'abus et que dès tors, la minoration des conséquences que l'on pourrait tirer de cet élément ne remet pas en cause l'analyse de l'Autorité que la cour adopte sur les effets de la pratique et le lien de causalité ;

Considérant, enfin, que la société Sanofi-Aventis soutient que si l'auto-générique du Plavix. le Clopidogrel Winthrop réalise surie segment des génériques dccc princeps une part de 30 % en volume au minimum et atteint des pics de 35 %, cette situation que l'Autorité a qualifiée d'atypique au regard de la part de la société Winthrop sur le marché des génériques en général, s'explique parfaitement par le fait que la substitution du princeps par cet auto-générique est sans risque pour les pharmaciens et que, de plus, seul celui-ci comporte l'indication thérapeutique du SCA ;

Considérant toutefois, que quelles que soient les raisons de cette part importante du Clopidogrel Winthrop dans le volume des génériques, elle est une donnée objective qui doit, en tant que telle, être prise en compte dans l'analyse du taux de générification du Plavix et accentue le constat de la faible progression de celui-ci ; qu'en outre, la démonstration chiffrée de la société Sanofi-Aventis tendant à ce que la part de prescriptions de Clopidogrel Winthrop en SCA soit déduite de l'estimation de sa part sur le marché total du clopidogrel, n'est pas pertinente, puisque l'absence de l'indication thérapeutique du SCA en bithérapie dans les AMM des génériques autres que le Clopidogrel Winthrop ne résulte pas d'une impossibilité thérapeutique mais de l'existence du certificat complémentaire dont bénéficie cette indication et que, dans ces conditions, la substitution d'un générique, quel qu'il soit, est possible même s'agissant du traitement d'un SCA ;

Considérant qu'il se déduit de l'ensemble de ce qui précède que les moyens développés par la requérante ne sont pas de nature à conduire à la réformation de la décision qui a retenu à juste titre, d'une part, que la société Sanofi-Aventis a mis en place une stratégie de dénigrement à l'encontre des génériques concurrents de Plavix et de Clopidogrel Winthrop, à partir d'actions de communication mises en œuvre pendant cinq mois, de début septembre 2009 à janvier 201 0, d'autre part, que cette pratique a eu pour effet de limiter durablement l'entrée de ces génériques sur le marché français du clopidogrel commercialisé en ville et enfin, qu'elle constitue tin abus de position dominante prohibé par l'article L. 420-2 du Code de commerce et l'article 102 du TFUE ; que le recours doit être rejeté sur l'ensemble des contestations présentées sur ces différents points ;

Sur les sanctions

Considérant que le troisième alinéa du I de l'article L. 464-2 du Code de commerce, relatif aux critères de détermination des sanctions pécuniaires, dispose que " Les sanctions pécuniaires Sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie, à la situation de l'organisme ou de l'entreprise sanctionnée ou du groupe auquel l'entreprise appartient et à l'éventuelle réitération de pratiques prohibées par le [titre VI du livre IV du Code de commerce]. Elles sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionnée et de façon motivée pour chaque sanction" ; que le quatrième alinéa relatif au montant maximum des sanctions précise que " Le montant maximum est, pour une entreprise, de 10 3/4 du montant du chiffre d'affaires mondial hors taxes le plus élevé réalisé au cours d'un des exercices clos depuis l'exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en œuvre. Si les comptes de l'entreprise concernée ont été consolidés ou combinés en vertu des textes applicables à sa forme sociale, le chiffre d'affaires pris en compte est celui figurant dans les comptes consolidés ou combinés de l'entreprise consolidante ou combinante".

Considérant qu'en ce qui concerne l'étendue et les modalités de contrôle par la cour des sanctions infligées, il est rappelé qu'au-delà du déroulement des étapes successives découlant de la mise en œuvre par l'Autorité de la méthode de détermination de son communiqué sanctions, qui ne constitue qu'une directive au sens administratif du terme, comme telle dépourvue de valeur normative, il revient seulement à la cotir d'apprécier si, en définitive, l'Autorité n bien déterminé les sanctions pécuniaires qui ont été infligées aux requérantes au titre des pratiques anticoncurrentielles poursuivies en application des dispositions précitées de l'article L. 464-2 du Code de commerce ;

Sur le volume des ventes

Considérant que la société Sanofi-Aventis reproche à l'Autorité de la concurrence d'avoir retenu pour base de calcul de la sanction un chiffre erroné ; qu'elle explique à ce sujet que la société Sanofi qui a découvert et conçu le Plavix a concédé l'ensemble des droits privatifs de ce médicament à une société en nom collectif dénommée SNC Sanofi Pharma BMS, qui est détenue à 50.1 % par la société Sanofi et 49,9 % par la société BMS, que la SNC a confié par convention la commercialisation du Plavix dans le monde à ces deux Sociétés Sanofi et BMS et qu'en France, ces tâches sont assurées par une société en participation, détenue à 50,1 % par elle-même, Sanofi-Aventis, et à 49,9 % par la société BMS France qu'elle ajoute que le chiffre d'affaires lié aux ventes de Ptavix en France est comptabilisé par elle seule pout' le compte de la société en participation, en raison de l'absence de personnalité juridique de celle-ci, que les frais et coûts de promotion supportés par elle et par la société BMS France viennent en diminution de ce chiffre d'affaires, dont le solde est ensuite alloué à chacune, à concurrence du montant de leur part dans la société en participation, ; qu'elle estime que le choix dc l'Autorité de la concurrence de retenir pour valeur des ventes le montant total de celles-ci tel qu'il figure dans sa comptabilité, alors que 49,9 % est attribué à BMS, constitue une erreur; qu'elle fait valoir à cet égard que la valeur des ventes doit être une valeur objective qui, au-delà des écritures comptables, est destinée à proportionner l'amende au mon tant des ventes imputables individuellement à chaque entreprise ayant participé à l'infraction ;

Considérant que l'Autorité de la concurrence n évalué l'assiette de la sanction au regard de la valeur des ventes de Plavix et de Clopidogrel Winthrop ; que c'est à juste titre qu'elle a décidé que le montant total des ventes de Plavix, tel qu'il figure dans la comptabilité de la société Sanofi-Aventis, devait être pris en compte, sans réduction de la part attribuée à la société BMS pour d'uniques raisons tenant à l'organisation du groupe de sociétés Sanofi et à sa politique interne ; qu'en effet, ainsi que le relève l'Autorité, la pratique développée était destinée à favoriser l'ensemble des ventes de Plavix et de générique Clopidogrel Winthrop en France ; que la prise en compte de l'intégralité de la valeur des ventes en France du Plavix et dit générique Clopidogrel Winthrop n'est pas contraire aux principes d'individualisation de la sanction, contrairement à ce que soutient la requérante, puisqu'elle permet de donner une mesure de la gravité de la pratique et de la réalité économique de l'infraction en cause au regard du contexte dans lequel elle a été mise en œuvre que de plus cette analyse est conforme à l'intention du législateur, qui, lorsqu'il a réformé les dispositions relatives aux sanctions, le 15 mai 2001, a lui-même prévu la prise en compte du chiffre d'affaires consolidé pour l'examen du plafond de la sanction, en était destinée à ce que les sanctions pécuniaires soient "mieux adaptées aux pratiques mises en œuvre par [des] groupes " (Cf. exposé des motifs de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques), ce dont il se déduit que l'organisation juridique d'un groupe de sociétés ne doit pas permettre aux entreprises, ou être pour elles l'occasion, de minorer les sanctions qu'elles lorsqu'elles mettent en œuvre des pratiques prohibées par le droit de la concurrence ;

Considérant que le recours doit être rejeté sur ce point ;

Sur la durée des pratiques

Considérant que la requérante reproche encore à la décision d'être entachée d'une erreur de droit, en ce qu'elle n'a pas pris en compte la durée des pratiques en cause dans le calcul du montant de base de l'amende, aboutissant à une solution qui, selon elle, viole le principe de proportionnalité, et qui prive la décision de motif à ce sujet ;

Considérant qu'elle objecte que l'Autorité qui, à plusieurs reprises, relevé que la pratique avait duré cinq mois, aurait dû appliquer un coefficient de 5/12eme à la valeur des ventes ; qu'elle ajoute qu'en justifiant son choix d'appliquer un coefficient de 1 par le fait que si la pratique avait duré cinq mois, ses effets dénigrants se sont fait ressentir pendant une année, l'Autorité n'a pas respecté sa pratique décisionnelle tant en matière d'abus de position dominante que d'entente, ni celle des autorités et juridictions européenne, la Commission européenne, confirme sur ce point par le tribunal et la Cour de justice, comptabilisant systématiquement, pour les infractions inférieures à un an, leur durée réelle ;

Considérant que la durée de mise en œuvre des pratiques est un critère indicatif tant de la gravité que du dommage à l'économie ; que toutefois, pour avoir un sens, l'appréciation de la durée de mise en œuvre ne saurait être déconnectée de celles des effets de la pratique, lorsque ceux-ci ont perduré dans le temps au-delà des faits en cause ; que tel est le cas du dénigrement qui introduit une opinion défavorable qui demeure attachée à l'entreprise ou au produit visé jusqu'à ce que l'expérience ou la diffusion d'une contre opinion permette d'inverser l'appréciation négative instillée ; que c'est donc à juste titre que l'Autorité a appliqué au montant de base de la sanction un coefficient de Ï correspondant à son appréciation de la durée des effets de la pratique en cause, et ce, abstraction faite de la référence à la date de la communication des griefs, à laquelle l'Autorité n'a finalement donnée aucune portée ; que le fait que dans d'autres décisions relatives à des pratiques différentes, l'Autorité n'ait pas retenu une approche identique ne saurait conduire à considérer qu'elle a, en l'espèce, commis une erreur d'appréciation, d'autant que dans les deux cas cités par la société requérante. les pratiques en cause avaient eu un effet immédiat, celui de faire disparaître un produit concurrent, pour la première, et d'avoir favorisé une filiale auprès des consommateurs, dans le second ; qu'il en est de même s'agissant des jurisprudences communautaires citées lesquelles ne concernent que des cas de cartel ; que les moyens du recours sur ce point doivent en conséquence être rejetés ;

Sur l'appartenance à un groupe

Considérant que la société Sanofi-Aventis fait aussi grief à la décision de lui avoir imposé une majoration d'amende de 50 3/4 au titre de sa puissance économique ; qu'elle soutient qu'une telle analyse, en matière d'abus de position dominante, revient à condamner doublement l'entreprise, le critère de la puissance économique étant utilisé aux fins de caractériser l'infraction et de majorer l'amende ; qu'elle ajoute que cc procédé conduit à augmenter systématiquement les sanctions des entreprises en position dominante, ce qui serait contraire au principe d'individualisation de la sanction, prévue à l'article L464-2 du Code de commerce

Considérant que la prise en compte de la puissance économique d'une entreprise pour caractériser sa position dominante ne constitue pas un obstacle à ce que cet élément Soit aussi pris en compte dans le calcul de la sanction au titre d'une majoration, comme l'a fait l'Autorité de la concurrence ; que l'analyse à laquelle elle a procédé ne revient pas, contrairement à ce que soutient la requérante, à la condamner doublement au titre de sa puissance économique, qu'en effet, si cette situation est un des éléments sans lequel l'in fraction ne petit être constituée, elle n'est pas sanctionnée en tant que telle, mais à raison des agissements mis en œuvre par l'opérateur économique qui la détient; que de plus, la cause de majoration retenue par l'Autorité dans la décision attaquée n'est pas la puissance économique par elle-même, mais la mesure de celle-ci, le groupe de sociétés Sanofi ayant une envergure mondiale, et ayant réalisé en 2012 un chiffre d'affaires consolidé au niveau mondial de plus de 34,9 milliards d'euros, ainsi qu'un résultat net de l'ensemble consolidé de 5,136 milliards d'euros ; que l'appartenance à un groupe de sociétés constitue une cause de majoration de la sanction d'une infraction au droit de la concurrence en ce que cette circonstance est de nature à accroître l'ampleur de la portée économique de l'infraction et favorise un effet d'exemplarité tant pour les autres sociétés du groupe que pour les entreprises de moindre importance mais opérant dans le même secteur ; que, de plus et nonobstant le principe d'autonomie de la personne morale de chaque société au sein d'un groupe. cette appartenance constitue un caractère propre à permettre à la filiale concernée d'assumer la charge d'une sanction plus élevée qu'elle ne le serait pour une entreprise de moindre envergure ; qu'enfin, en l'espèce, l'Autorité a relevé un certain nombre d'éléments qui seront examinés dans les développements ci-dessous et qui démontrent que la société Sanofi, société holding du groupe et mère de la société Sanofi-Aventis, a par son influence déterminante dans cette filiale, ainsi que les orientations qu'elle définissait, participé aux pratiques, ce dont il résulte que l'appartenance au groupe a joué un rôle dans la mise en œuvre de celles-ci ; que le moyen doit en conséquence être rejeté ;

Considérant que la société Sanofi-Aventis soutient encore que le taux de 50 % au titre de la majoration dc l'amende est excessif ait regard de son chiffre d'affaires et enfreint le principe de proportionnalité des peines ; qu'elle fait valoir, à ce titre, que ce taux est bien plus élevé que ceux appliqués dans d'autres décisions ;

Considérant que, cependant. la sanction imposée par l'autorité de la concurrence doit, outre son caractère répressif, permettre de dissuader les entreprises d'adopter des comportements semblables à ceux sanctionnés, particulièrement nocifs pour le fonctionnement de l'économie; que tel est le cas des pratiques de l'espèce mises en œuvre par un groupe de sociétés mondialement renommé, et destinées à entraver l'entrée sur le marché des génériques d'un des médicaments les plus prescrits dans le monde et coûteux pour l'assurance maladie, que par ailleurs, le taux de 50 % a été appliqué non pas à l'amende, mais au montant de base sur lequel elle a été calculé, ce qui est justifié par la faible proportion dc la valeur des ventes retenue comme assiette de la sanction qui ne représente que 0,6 % du chiffre d'affaires consolidé ait niveau mondial du groupe de sociétés qui s'est élevé à plus dc 34,9 milliards et celui du résultat net de l'ensemble consolidé de 5,136 milliards d'euros, sans que les comparaisons invoquées par la société Sanofi-Aventis avec d'autres décisions concernant des pratiques différentes et d'autres entreprises ne conduisent à constater une inégalité de traitement par l'Autorité qui, comme elle le fait observer, a, avant et après la décision querellée, appliqué une majoration de 50 %, notamment dans des situations d'abus de position dominante ;

Sur le dommage à l'économie

Considérant que la société Sanofi-Aventis reproche à la décision de ne pas avoir démontré l'existence d'un dommage à l'économie, de sorte que la proportion de 13% de la valeur des ventes retenue à son encontre, au titre de la gravité des pratiques et de l'importance de ce dommage. est, selon elle, disproportionnée cl devra être réduite ; qu'elle précise que pour apprécier le dommage à l'économie, la décision se réfère quasiment exclusivement aux économies manquées par la CNAMTS, en retenant deux données incertaines, l'objectif de substitution fixé par cet organisme et l'estimation de 38 millions d'économies qui n'auraient pas été réalisées par elle, basées sur l'hypothèse d'un taux de générification de 85 % en août 2011 ; qu'elle fait valoir que les objectifs de générification de la CNAMTS ne sont en général pas réalisés, cc qui empêche de les retenir comme référence fiable et que, de plus, à l'inverse, l'objectif de 200 millions d'économies pour l'année 2010, a été atteint ; qu'enfin, la requérante fait valoir que cet organisme dispose du pouvoir d'appliquer un tarif forfaitaire de responsabilité, lorsqu'elle considère qu'une générification n'est pas satisfaisante et lui cause un dommage en terme d'économies insuffisantes ; que selon elle, le fuit qu'elle n'ait pas mis en œuvre ce tarif identique pour les génériques et la spécialité de référence, démontre que la Caisse a estimé que le taux de généritfication du Plavix ne justifiait pas une intervention de sa part ;

Considérant que l'article L. 464-2 dci Code de commerce exige, non pas un chiffrage précis dit dommage à l'économie, mais seulement une appréciation de son existence et de son importance reposant sur une analyse aussi complète que possible des éléments du dossier ; que ce dommage résulte, comme l'Autorité de la concurrence l'a précisé, d'un certain nombre d'éléments, comme l'ampleur de la pratique, les caractéristiques du secteur concerné et les conséquences du comportement infractionnel que celle-ci a relevé, par urne motivation pertinente et non contestée, en premier lieu, que le marché concerné était de taille considérable. le Plavix représentant le premier poste de l'assurance maladie, en deuxième lieu, que la société Sanofi-Aventis détenait 60% de parts de marché au moment des faits et un monopole au moment de la mise en place de sa stratégie de communication, en troisième lieu, que ce marché comportait deux caractéristiques spécifiques, la quasi-inexistence de la concurrence par les prix dans le secteur de la vente de médicaments en ville et le climat de suspicion vis-à-vis des génériques ainsi que (e manque d'informations suffisantes des médecins ;

Que l'Autorité a, outre les éléments précédemment relevés, apprécié le dommage â l'économie au regard de la perte de bien-être pour les consommateurs qui comprend le surprix payé par eux sur le marché concerné par les pratiques et retenu qu'en l'espèce le surprix est celui payé pour l'achat de clopidogrel sur le marché de la ville, en raison de la moindre pénétration des génériques ; qu'elle n, à juste titre, précisé que cet aspect du dommage à l'économie correspond au différentiel de prix entre Plavix et ses génériques multiplié par les quantités de Plavix qui ont été vendues au détriment des génériques du fait de hi mise en œuvre de la pratique ; que pour apprécier ce dernier point, la décision a comparé le taux de générification réalisé à la suite de la pratique au regard de ce qu'il aurait pu être si la pratique n'avait pas été mise en œuvre ;

Considérant que si les objectifs de substitution fixés par la CNAMTS comportent un aléa comme tous objectifs et qu'il n'est pas discuté qu'ils ne sont pas régulièrement atteints, il n'en demeure pas moins que ces objectif donnent un ordre de grandeur de ce qu'auraient pu être les quantités de génériques vendues au lieu du Plavix en l'absence de la pratique de dénigrement ; qu'en l'espèce, le caractère raisonnable et plausible de l'objectif de 75 % de générification dans le délai d'un an, fixé par la sécurité sociale, est conforté par les données résultant du graphique établi par les services d'instruction à partir de celles communiquées par la société Sanofl-Avcntis et figurant au paragraphe 673 de la décision ;

qu'il résulte en effet de ce graphique que sur huit autres génériques comparables au clopidogrel, six avaient, en un an, atteint un taux de générification de 75 3/4, ce que n'avaient pas atteint les génériques du Plavix ; que ce graphique montre aussi que le clopidogrel qui avait bénéficié du taux de générification le plus important pendant les trois premiers mois de mise sur le marché n, dès le quatrième mois, perdit cet avantage par rapport aux autres dont les taux ont eux augmenté de façon continue et que le taux de générification de cette molécule a, contrairement à toutes les autres, diminué ensuite de façon continue pour atteindre à peine 60% au bout de deux ans ; que, dès lors, l'objectif de 75 % fixé par la CNMATS pour le clopidogrel au bout d'une année de mise sur le marché n'apparaît pas hasardeux ou déraisonnable et que c'est donc à juste titre que l'Autorité l'a retenti dans son estimation du surprix résultant des pratiques Considérant de surcroît que l'économie de 200 millions d'euros qui aurait été réalisée par la CNAMTS, alléguée par la société Sanofi-Aventis, n'est pas démontrée et qu'elle est, de plus, démentie par le rapport sur les comptes de la sécurité sociale pour l'année 2010, publié en septembre 2011, qui indique au sujet du Plavix que " L'arrivée à échéance de son brevet fin 2009 a permis 163 millions d'économie pour l'assurance maladie en 2010 (..). Notons toutefois que les économies,-réalisées sont inférieures à l'estimation faite ex ante (200M€) cela s'explique par un taux de pénétration objectif du clopidogrel à fin décembre 2010 inférieur à 10 points à l'objectif (64.6 % contre 75 % )" qu'enfin, le fait que la CNAMTS n'ait pas fait usage de la possibilité d'imposer le tarif forfaitaire de responsabilité, ne démontre pas l'absence de dommage à l'économie ;

Considérant qu'il suit de l'ensemble de ce qui précède que les moyens relatifs au dommage à l'économie doivent être rejetés ;

Sur le recours de la société Sanofi

Considérant que la société Sanofi, société mère de la société Sanofi-Aventis, conteste sa condamnation ait paiement conjoint et solidaire de la sanction prononcée par l'Autorité de la concurrence qu'elle conteste à ce titre le principe même de la possibilité d'imputer à une société mère la responsabilité des pratiques mises en œuvre par une filiale qu'elle estime contraire aux principes fondamentaux de responsabilité personnelle et d'individualisation des peines ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que l'ensemble des moyens dit recours de la Société Sanofi-Aventis doivent être rejetés et que la décision doit être confirmée en ce qu'elle a considéré que les pratiques mises en œuvre par la société Sanofi-Aventis constituaient une infraction aux dispositions de l'article L. 420-2 du Code de commerce et de l'article 102 dii TFUE ; que faisant application de cette dernière disposition, l'Autorité de la concurrence et fa cour d'appel statuant comme juridiction de contrôle, doivent l'appliquer selon l'interprétation qui en est donnée par la CJUE ;

Considérant qu'en tout état de cause, le droit de la concurrence national et européen vise à permettre de poursuivre et de sanctionner les infractions contraires à l'exercice de la libre concurrence sur les marchés concernés et qu'à ce titre, de façon dérogatoire au droit commun laquelle est justifiée par ses objectifs de police économique, ce droit vise les activités des entreprises indépendamment de la personnalité morale des sociétés qui peuvent composer celles-ci ; que selon une jurisprudence constante de l'Union, la notion d'entreprise désigne toute entité exerçant une activité économique, indépendamment de son statut juridique et de son mode de financement ; qu'à cet égard, la Cour de Justice a précisé, d'une part, que la notion d'entreprise, placée dans ce contexte, doit être comprise comme désignant une unité économique, même si. du point de vue juridique, cette unité économique est constituée de plusieurs personnes physiques ou morales, d'autre part, que, lorsqu'une telle entité économique enfreint les règles de la concurrence, il lui incombe, selon le principe de la responsabilité personnelle, de répondre de cette infraction (arrêt dit 20 janvier 201 I. General Quimica e.a./Commission, C-90/09 P, points 34 à 36 et jurisprudence citée) ;

Que le comportement d'une filiale peut être imputé à la société mère, notamment, lorsque, bien qu'ayant une personnalité juridique distincte, cette filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché, mais applique pour l'essentiel les instructions qui lui sont données par la société mère, eu égard en particulier aux liens économiques, organisationnels et juridiques qiti unissent ces deux entités juridiques (arrêt du 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission, C-97/08 P, Rec. p. l-8237, point 58 ainsi que jurisprudence citée) ;

que. dans le cas particulier où une société mère détient 100% du capital de sa filiale ayant commis une infraction aux règles de la concurrence de l'Union, cette société mère a les moyens d'exercer une influence déterminante sur te comportement de cette filiale et il existe une présomption réfragable selon laquelle ladite Société mère exerce effectivement une influence déterminante sur le comportement de sa filiale (arrêt Akzo Nobel e.a./Commission, précité, point 60 ainsi que jurisprudence citée) ;

que dans ces conditions, il suffit que l'autorité de concurrence prouve que la totalité du capital d'une filiale est détenu par sa société mère pour présumer que cette dernière exerce une influence déterminante sur la politique commerciale de cette filiale et elle sera en mesure, par la suite, de considérer la société mère comme solidairement responsable pour le paiement de l'amende infligée à sa filiale, à moins que cette société mère,-â laquelle il incombe de renverser cette présomption, n'apporte des éléments de preuve suffisants de nature à démontrer que sa filiale se comporte de façon autonome sur le marché (arrêt Akzo Nobel e.a./Commission, précité, point 61 ainsi que jurisprudence citée, Cour d'appel de Paris. 29 mars 2012, Lacroix Signalisation et a. 2011/01228) ;

qu'il s'en déduit que les moyens développés par la société Sanofi pour contester le principe de l'imputabilité à une société mère de la responsabilité des pratiques mises en œuvre par une filiale ne sont pas fondés et doivent être rejetés ;

Considérant, enfin, que la société Sanofi à laquelle il revient de rapporter la preuve qu'elle n'exerce pas une influence déterminante sur la société Sanofi-Aventis laquelle se comporte de façon autonome, n'est pas fondée à reprocher à l'Autorité de la concurrence de ne pas avoir démontré que la stratégie du groupe qu'elle définit a des conséquences opérationnelles directes sur l'activité des filiales que se bornant à affirmer qu'elle est une société holding non opérationnelle, elle ne rapporte pas la preuve que la politique qu'elle soutient comme étant définie au niveau mondial ne l'est pas par elle ; que le recours de la société Sanofi doit en conséquence être rejeté ;

Sur les frais irrépétibles

Considérant qu'aucune cii-constance d'équité ne commande d'allouer à la société Sanofi-Aventis France une indemnité au titre dc ses frais irrépétibles ;

Par ces motifs : Rejette les recours formés par les sociétés Sanofi et Sanofi-Aventis France contre la décision n° 13-D-11 de l'Autorité de la concurrence du 14 mai 2013 Rejette la demande de la société Sanofi-Aventis France au titre de l'article 700 du Code de procédure civile Condamne les sociétés Sanofi et Sanofi-Aventis France aux dépens Dit qu'en application de l'article 15-2 du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil du 16 décembre 2002, le présent arrêt sera transmis à la Commission européenne.