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Décisions

Cass. com., 24 novembre 2015, n° 14-17.747

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Brunet-Beaumel (ès qual.), Allegro Manon Troppo.Box (Sté)

Défendeur :

Fashion Box France (Sté), DJ Evolution (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Laporte

Avocat général :

Mme Pénichon

Avocats :

Me Blondel, SCP Hémery, Thomas-Raquin

T. com. Paris, 16e ch., du 4 mai 2012

4 mai 2012

LA COUR : - Sur le moyen unique : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 mars 2014), que le 8 mai 2009, la société Fashion Box France (la société Fashion) a résilié le contrat d'agence commerciale qu'elle avait consenti à la société Allegro Manon Troppo Box (la société Allegro) le 18 novembre 2008 ; qu'en cessation des paiements depuis le 13 janvier 2009, celle-ci a été mise en redressement judiciaire le 3 avril 2009, puis en liquidation judiciaire le 11 septembre 2009, M. Brunet-Beaumel étant désigné liquidateur ; que celui-ci l'ayant assignée en paiement d'une indemnité de cessation de contrat, la société Fashion a invoqué la faute grave de l'agent en se prévalant de son manquement à l'obligation de l'informer des événements susceptibles d'affecter sa situation financière et sa direction, stipulée au contrat ;

Attendu que M. Brunet-Beaumel, ès qualités, fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande indemnitaire alors, selon le moyen : 1°) qu'en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit en principe à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi ; que par exception, l'indemnité n'est pas due si la cessation du contrat est provoquée par la faute grave de l'agent commercial ; qu'en ce cas, le mandant doit établir l'existence d'un lien de causalité entre la faute grave invoquée et sa décision de rompre le contrat, lien nécessairement inexistant lorsque le manquement invoqué ne lui a été révélé que postérieurement à la rupture du contrat, quand bien même aurait-il été commis antérieurement ; qu'en considérant au contraire qu'un manquement qualifié de faute grave était de nature à priver l'agent commercial de toute indemnité compensatrice, quand bien même n'eût-il été révélé que postérieurement à la rupture du contrat, dès lors qu'il avait été commis antérieurement à cette rupture, la cour d'appel viole par fausse interprétation l'article L. 134-13 du Code de commerce, interprété à la lumière de l'article 18, a) de la directive 86-653-CEE du Conseil du 18 décembre 1986 relative à la coordination des droits des Etats membres concernant les agents commerciaux indépendants, lui-même interprété à la lumière de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE, 28 octobre 2010, affaire C-203-09) ; 2°) que ne constitue pas une obligation essentielle de l'agent commercial, dont la violation pourrait s'analyser en un manquement grave à l'obligation de loyauté qui préside au mandat d'intérêt commun, celle résultant de l'engagement accessoire du mandataire d'informer le mandant " des événements susceptibles d'affecter sa situation financière et la direction de son entreprise " ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel viole de nouveau l'article L. 134-13 du Code de commerce ; 3°) qu'en ne recherchant pas, comme elle y était pourtant invitée, si la brièveté du laps de temps s'étant écoulé entre l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, le 3 avril 2009, et la rupture du contrat d'agence intervenue le 8 mai 2009, ensemble la circonstance que l'ouverture de la procédure collective n'entraînait concrètement aucun empêchement à la poursuite de l'exécution normale du contrat d'agent commercial, n'étaient pas de nature à priver le manquement imputé à la société Allegro Manon Troppo.Box de tout caractère de gravité, la cour d'appel prive sa décision de base légale au regard de l'article L. 134-13 du Code de commerce ;

Mais attendu qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que la société Allegro avait sciemment dissimulé à la société Fashion sa situation financière, qui était déjà très dégradée lors de la conclusion du contrat, puis sa mise en redressement judiciaire, en violation de l'obligation d'information essentielle dont elle était tenue à l'égard de son mandant et de l'obligation de loyauté requise des parties à un contrat d'agence commerciale, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérantes, en a exactement déduit, par une appréciation souveraine de la volonté commune des parties, que la société Allegro avait commis une faute grave privative de l'indemnité de cessation de contrat, peu important que la société Fashion, qui n'avait découvert ces manquements que postérieurement à la rupture des relations contractuelles, n'en ait pas fait état dans sa lettre de résiliation, dès lors que cette faute avait été commise antérieurement à la rupture ; que le moyen n'est pas fondé ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.