CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 7 janvier 2016, n° 15-01034
PARIS
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Laboratoires M & L (SA)
Défendeur :
Johnson & Johnson Sante Beaute France (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Perrin
Conseiller :
Mme Rohart-Messager
Avocats :
Mes Teytaud, Bertrand, Michel
Rappel des faits et procédure
Par jugement, assorti de l'exécution provisoire, du 05 décembre 2014 le Tribunal de commerce de Paris a :
- condamné la société Laboratoires M&L à payer à la société Johnson & Johnson Santé Beauté France JJSBF la somme de 200 000 euro de dommages et intérêts au titre du préjudice subi pour les actes de concurrence déloyale et parasitaire ;
- interdit à la société Laboratoires M&L de réaliser toute opération commerciale telle l'Occitube reprenant les caractéristiques emblématiques de l'Echoppe du Sud de la société Johnson & Johnson Santé Beauté France JJSBF en France et sous astreinte de 100 euro par jour et par infraction constatée ;
- condamné la société Laboratoires M&L à verser à la société Johnson & Johnson Santé Beauté France JJSBF la somme de 25 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision ;
- débouté les parties de toutes leurs autres demandes plus amples ou contraires ;
- condamné la société Laboratoires M&L aux entiers dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 82,44 euro dont 13,52 euro de TVA.
La société Laboratoires M&L a interjeté appel le 14 janvier 2015.
Dans ses dernières conclusions du 1er juin 2015 la société Laboratoires M&L demande à la cour de :
- Recevoir la société Laboratoires M&L, plus connue sous le nom commercial de L'Occitane dans l'ensemble de ses arguments, fins et moyens et déclarer ceux-ci recevables et bien fondés.
Vu le jugement frappé d'appel, vu l'article 455 du Code de Procédure Civile,
- Constater que le jugement frappé d'appel ne tient compte d'aucun des arguments développés par la société Laboratoires ML / L'Occitane, et qu'il se contente d'affirmer péremptoirement que celle-ci a commis des actes de concurrence déloyale pour avoir repris " l'ensemble des caractéristiques de la campagne promotionnelle "L'Echoppe du Sud " ".
- Dire et juger que ce jugement est dépourvu de motivation, en conséquence.
- L'infirmer dans toutes ses dispositions.
Vu les conclusions et pièces versées aux débats, sur l'absence d'actes contraires aux usages loyaux du commerce, équipollent à des actes de concurrence déloyale.
- Constater que dès 1976, le fondateur de L'Occitane proposait ses huiles essentielles sur les marchés de Provence avec diverses camionnettes, parmi lesquelles figuraient au moins deux modèles Citroën.
En conséquence dire et juger qu'on ne saurait reprocher à la société Laboratoires ML / L'Occitane de vendre ses produits sur les marchés de Provence grâce à une camionnette itinérante dénommée "L'Occitube".
- Constater que la camionnette "L'Occitube" est équipée des mêmes casiers de présentation que ceux équipant depuis 2004, si ce n'est même avant, les boutiques L'Occitane.
En conséquence,
- Dire et juger qu'on ne saurait reprocher à la camionnette "L'Occitube" d'être équipée des mêmes casiers de présentation que ceux équipant depuis 2004 les boutiques L'Occitane.
- Constater que les vendeurs du "roadshow L'Occitube" sont vêtus des tabliers que ceux utilisés dans les boutiques L'Occitane.
En conséquence,
- Dire et juger qu'on ne saurait reprocher aux vendeurs et vendeuses de "L'Occitube" d'être habillés des mêmes tabliers que ceux utilisés dans les boutiques L'Occitane.
- Constater que la société Laboratoires ML/L'Occitane d'utiliser pour son "roadshow L'Occitube" un espace détente comprenant des transats pour semblables à ceux qu'elle a utilisé un tel espace pour ses stand depuis 2008.
- Dire et juger qu'on ne saurait reprocher à la société Laboratoires ML / L'Occitane d'utiliser pour son "roadshow L'Occitube" un espace détente comprenant des transats pour son "roadshow L'Occitube" dès lors qu'elle a utilisé un tel espace pour ses stands depuis 2008.
- Constater qu'en ce qui concerne le choix d'un camion de marque Citroën type H, ce choix s'est imposé fonctionnellement à la société Laboratoires ML / L'Occitane et qu'il est le résultat d'aucun emprunt.
En conséquence de ce qui précède,
- Dire et juger que tous les éléments caractéristiques du "roadshow L'Occitube" ne font que reprendre des éléments déjà exploités couramment par la société Laboratoires ML / L'Occitane avant même que la société Johnson & Johson Beauté France ("JJSBF") ne lance son opération "L'Echoppe du Sud".
En conséquence,
- Dire et juger que l'opération "roadshow L'Occitube" n'est caractérisée par aucun élément contraire aux usages loyaux du commerce susceptible de constituer un acte de concurrence déloyale,
- Infirmer le jugement frappé d'appel en conséquence.
Vu les conclusions et pièces versées aux débats, sur l'absence de parasitisme :
- Constater que la société Laboratoires ML / L'Occitane ne s'est épargnée aucun investissement pour la réalisation de son "roadshow L'Occitube" même si elle n'a pas eu recours à une agence de communication ou de publicité externe ;
- Dire et juger que le "roadshow L'Occitube" de la société Laboratoires ML / L'Occitane ne parasite aucun des investissements réalisé par la société Johnson & Johson Beauté France ("JJSBF") pour développer son "roadshow L'Echoppe du Sud" ;
- Infirmer le jugement frappé d'appel en conséquence.
Vu les conclusions et pièces versées aux débats, sur l'absence de parasitisme :
- Dire et juger qu'aucun consommateur ne peut à l'évidence confondre une camionnette dénommée Occitube qui fait la promotion et où l'on vend des produits de la marque L'Occitane, avec une camionnette dénommée "Echoppe du Sud", qui fait la promotion et où l'on vend des produits de la marque "Le Petit Marseillais".
En conséquence,
- Débouter la société Johnson & Johson Beauté France ("JJSBF") de l'ensemble de son action et de ses demandes formulées au titre d'un éventuel risque de confusion dans l'esprit du public.
- Infirmer le jugement frappé d'appel en conséquence.
Vu les pièces versées aux débats :
- Dire et juger que la société Laboratoires ML / L'Occitane n'a commis " aucune faute contraire aux usages loyaux du commerce " en embauchant Mme Dorothée Massoulier à partir du 12 novembre 2012.
- A titre très subsidiaire, dans l'hypothèse fort peu probable où la Cour confirmerait le jugement frappé d'appel, sur le quantum du préjudice subi par JJSBF et le montant des dommages et intérêt qu'il convient de lui allouer.
- Constater que la société Johnson & Johson Beauté France ("JJSBF"), qui a la charge de la preuve en la matière, ne démontre pas avoir perdu de chiffre d'affaires du fait du "roadshow L'Occitube" ;
- Constater que la société Laboratoires ML / L'Occitane a financé son "roadshow L'Occitube", et qu'elle ne s'est épargnée aucun investissement, et qu'elle n'a pu bénéficier de l'existence ou d'une quelconque notoriété du "roadshow l'Echoppe du Sud", dès lors que les produits L'Occitane ne sont pas comparables aux produits de la marque "Le Petit Marseillais", car ils ne s'adressent pas à la même catégorie de consommateurs.
En conséquence, et en tout état de cause,
- Infirmer le jugement frappé d'appel sur le quantum des dommages et intérêts alloués à la société Johnson & Johson Beauté France ("JJSBF"), et limiter ceux-ci à 10 000 euro.
Toujours dans l'hypothèse peu probable où la cour confirmerait le jugement frappé d'appel, sur la publication judiciaire sur le site web de la société Laboratoires ML / L'Occitane.
- Confirmer le jugement frappé d'appel en ce qu'il n'a pas fait droit à la demande de publication judiciaire sur le site web de la société Laboratoires ML / L'Occitane sollicité par Johnson & Johson Beauté France ("JJSBF").
- Débouter la société Johnson & Johson Beauté France ("JJSBF") de l'ensemble de ses demandes de publications judiciaires tant sur support papier que sur le site de la société appelante.
Reconventionnellement,
- Condamner la société Johnson & Johson Beauté France ("JJSBF") à rembourser à la société Laboratoires M&L / L'Occitane les honoraires et frais de conseil que celle-ci a dû exposer pour se défendre en 1re instance et en appel d'une procédure dénuée de fondement.
En conséquence,
- Condamner la société Johnson & Johson Beauté France ("JJSBF") à payer 20 000 euro au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile à la société Laboratoires M&L / L'Occitane, et Condamner la société Johnson & Johson Beauté France ("JJSBF"), aux frais et dépens de la présente procédure d'appel, dont distraction au profit de Me Teytaud par application de l'article 699 Code de Procédure Civile.
Dans ses dernières conclusions du 14 septembre 2015 la société Johnson & Johnson Sante Beaute France demande à la cour de :
- Débouter la société Laboratoires M&L de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions.
- Confirmer le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 5 décembre 2014 en ce qu'il a :
- Condamne la société Laboratoires M&L à payer à la société Johnson & Johnson Santé Beauté France JJSBF la somme de 200 000 euro de dommages et intérêts au titre du préjudice subi pour les actes de concurrence déloyale et parasitaire.
- Interdit à la société Laboratoire M&L de réaliser toute opération commerciale telle l'Occitube reprenant les caractéristiques de l'Echoppe du Sud de la société Johnson & Johnson Santé Beauté France JJSBF en France et sous astreinte de cent euro (100 euro) par jour et par infraction constatée.
- Condamne la société Laboratoires M&L à verser à la société Johnson & Johnson Santé Beauté France JJSBF la somme de 25 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure.
Y ajoutant :
- Ordonner la publication de l'arrêt à intervenir dans 5 (cinq) journaux ou revues du choix de la société Johnson & Johnson Santé Beauté France JJSBF et aux frais de la société Laboratoires M&L et ce, au besoin, de complément de dommages et intérêts, le coût de chaque insertion étant fixé à la somme de 5. 000 (cinq mille) euro hors taxes.
- Ordonner la consignation de cette somme augmentée de la TVA entre les mains de Monsieur le Bâtonnier de l'Ordre des avocats de Paris en qualité de séquestre sous astreinte de 1 000 (mille) euro par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de 8 (huit) jours après la signification de l'arrêt à intervenir.
- Dire que Monsieur le Bâtonnier de l'Ordre des avocats attribuera cette somme à la société Johnson & Johnson Santé Beauté France JJSBF sur production de la commande de ces publications.
- Ordonner que l'arrêt à intervenir soit publié en intégralité aux frais de la société Laboratoires M&L sous la forme d'un document au format PDF reproduisant l'intégralité
de la décision et accessible à partir d'un lien hypertexte apparent situé sur la page d'accueil du site internet de la société Laboratoires M&L et plus particulièrement sur le site de L'Occitane, quelle que soit l'adresse permettant d'accéder à ce site, l'intitulé de ce lien étant : "la société Laboratoires M&L a été condamnée judiciairement pour concurrence déloyale et parasitaire", dans une police de taille 20 (vingt) points au moins, pendant une durée de 6 (six) mois à compter de la première mise en ligne, sous astreinte de 1 000 (mille) euro par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de 8 (huit) jours après la signification de l'arrêt à intervenir.
- Condamner la société Laboratoires M&L à verser à la société Johnson & Johnson Santé Beauté France JJSBF la somme de 30 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, pour les frais engagés par la société Johnson & Johnson Santé Beauté France JJSBF pour la défense de ses intérêts en appel.
- Condamner la société Laboratoires M&L aux entiers dépens.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 24 septembre 2015.
Il résulte de l'instruction du dossier les faits suivants :
La société Johnson & Johnson Beauté France (société Johnson & Johnson) qui commercialise une gamme de produits d'hygiène corporelle sous plusieurs marques, dont les marques le Petit Marseillais, Roc, Neutrogena, Biafine, avait fait appel en 2009 à une agence Strada marketing pour " développer une opération promotionnelle dont l'objet était de créer une animation forte sur les plus gros marchés de Provence pour mettre en avant les valeurs incontournables de la marque le Petit Marseillais ". Elle fait valoir que c'est ainsi que depuis 2009, des vendeurs des produits le Petit Marseillais sillonnent les marchés du Sud de la France dans un " tub " Citroën à la rencontre des vacanciers pour leur faire découvrir l'univers du Petit marseillais autour d'animations olfactives dans le cadre d'une opération dénommée " l'Echoppe du Sud ".
Or elle indique qu'en août 2013 la société Laboratoire M&L, plus connue sous la marque l'Occitane, spécialisée dans la conception, la fabrication et la commercialisation de produits cosmétiques de soins et d'hygiène corporelle, dont le siège est à Manosque en Provence, aurait lancé une opération commerciale, dénommé Occitube, reprenant la combinaison des caractéristiques essentielles de sa propre campagne publicitaire.
C'est ainsi que par courrier du 7 août 2013 la société Johnson & Johnson mettait en demeure la société Laboratoire M&L de cesser immédiatement la compagne commerciale Occitube ainsi que toute communication et promotion de cette campagne dans les différents médias et notamment sur Internet.
Le 11 août 2013 elle faisait dresser un procès-verbal de constat à Marseille, par lequel l'huissier notait la présence, sur la place du général de Gaulle, d'un camion de couleur jaune, de marque Citroën, contenant des produits de la marque l'Occitane en Provence, déposés sur un présentoir et des paniers, avec un oriflamme publicitaire dressé à droite du camion, un panneau publicitaire sur le flanc droit du camion, la présence de deux employées vêtues d'un chapeau de paille et d'un tablier, ainsi que la présence d'un transat en bois. L'huissier constatait également que ces deux employées distribuaient et parfumaient les passants et qu'elle proposait à la vente des produits de la marque l'Occitane en Provence.
Malgré la demande réitérée de la société Johnson & Johnson de cessation de l'opération l'Occitube, la publicité était toujours présente sur Internet, ainsi qu'il résulte d'un constat du 17 août 2013.
Par courrier officiel du 16 août 2013 le conseil de la société l'Occitane écrivait au conseil de la société Johnson & Johnson, faisant valoir que les idées et concepts publicitaires seraient de libre parcours et ne pourraient donc bénéficier d'aucun droit privatif et qu'il ne pourrait y avoir aucune confusion dans l'esprit des consommateurs puisque " l'Echoppe du Sud " propose des produits " Petit Marseillais " alors que l'Occitube propose des produits " l'Occitane " ; elle mettait en avant le caractère banal de chaque élément caractéristique de l'opération commerciale l'échoppe du Sud.
C'est ainsi que par acte du 14 novembre 2013 la société Johnson & Johnson assignait la société l'Occitane en lui reprochant des faits de parasitisme et de concurrence déloyale, en paiement d'une somme de 200 000 euro à titre de dommages-intérêts ; Elle sollicitait en outre que des interdictions soient prononcées, sous astreinte, ainsi que l'autorisation de publication du jugement dans des journaux.
C'est dans ces circonstances de fait et de droit qu'était rendu le jugement présentement entrepris.
Motifs de la décision
Sur le moyen tiré de l'absence de motivation du jugement déféré
À l'appui de son appel, la société l'Occitane soutient que le jugement serait insuffisamment motivé et en sollicite l'infirmation et non la nullité.
Elle n'en tire donc aucune conséquence particulière puisqu'en application de l'article 561 du Code de procédure civile, de par l'effet dévolutif de l'appel, la cour se trouve investie de plein droit de l'entière connaissance du litige.
Sur la concurrence parasitaire
Pour retenir des faits de concurrence parasitaire, les premiers juges ont relevé des similitudes dans les 2 campagnes promotionnelles de la société Johnson & Johnson d'une part, et de la société l'Occitane d'autre part, et ont mis en évidence un risque de confusion, d'autant que les sociétés commercialisent des produits identiques similaires, à savoir des produits d'hygiène corporelle et de soins.
La société Johnson & Johnson fait valoir que la société l'Occitane a repris, de manière combinée, des caractéristiques essentielles de sa compagne promotionnelle " l'Echoppe du sud ", en utilisant le même camion de vente, le même aménagement dudit camion, des vendeurs habillés de façon identique avec un tablier et un chapeau de paille, un aménagement d'un espace détente identique avec des transats de design similaire. Elle ajoute que l'Occitane a repris la même idée publicitaire c'est-à-dire un roadshow.
De son côté, la société l'Occitane soutient qu'il s'agit d'éléments parfaitement banals, qu'elle utilise habituellement dans ses boutiques. Elle fait valoir que dès son origine elle a vendu ses produits sur les marchés de Provence avec une camionnette, que les camions utilisés pour la campagne Occitube sont de couleur jaune orangée, alors que ceux utilisés par la société Johnson & Johnson pour sa campagne l'Echoppe du sud sont de couleur grise et prétend qu'il n'existerait aucun risque de confusion.
Elle ajoute que ses vendeurs sont revêtus de vêtement provençaux comme ils le sont dans ses boutiques, qu'elle aurait utilisé des espaces de détente dans ses salons depuis 2008, c'est-à-dire bien avant le roadshow l'Echoppe du sud, que les casiers de présentation de l'Occitube seraient les mêmes que ceux utilisés dans les magasins de l'Occitane et que cette notion de casiers de présentation serait très floue.
Il convient de rappeler que le parasitisme consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d'une entreprise en profitant indûment des investissements consentis ou de sa notoriété.
En l'espèce la société Johnson & Johnson justifie d'un investissement important, de plus de 800 000 euro, pour son opération de promotion commerciale, alors que de son côté la société l'Occitane ne justifie par avoir procédé un investissement propre pour la mise au point de sa campagne publicitaire l'Occitube.
Il importe peu que la camionnette Citroën type H ait été choisie également par la société l'Occitane en raison de sa fonctionnalité, que le fait que les vendeurs aient les mêmes tabliers que ceux utilisés dans les boutiques l'Occitane, que les transats utilisés en bois ne présentent pas une originalité particulière, que la présentation des produits dans des casiers ne soit pas davantage originale.
En effet c'est la reprise par l'Occitane, de manière combinée, des caractéristiques du concept de l'Échoppe du Sud, imaginé en 2009, pour la promotion des produits le Petit Marseillais, à la demande de la société Johnson & Johnson par l'agence Strada marketing qui constitue une concurrence parasitaire.
Ainsi, même si les marques l'Occitane et l'Échoppe du sud sont apposées sur la devanture de chacune des camionnettes, et même si la société Johnson & Johnson ne peut s'attribuer le monopole de vente de produits de cosmétiques et de soins sur les marchés provençaux, il n'en demeure pas moins que la société l'Occitane a manifestement cherché à s'inscrire dans le sillage de la société Johnson et Johnson en adoptant un concept faisant naître la même ambiance, en profitant indûment des investissements consentis par la société Johnson et Johnson.
Il s'ensuit que c'est à juste titre que les premiers juges ont retenu des faits de parasitisme à l'encontre de l'occitane et que le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.
Sur la réparation du préjudice
La société Johnson & Johnson rappelle avoir investi des moyens importants pour le roadshow l'Echoppe du sud et avoir ainsi dépensé plus de 800 000 euro pour son opération commerciale. Elle soutient que le lancement par la société l'Occitane qui reprend les caractéristiques de l'Echoppe du sud diluerait significativement ses investissements. Elle ajoute que l'importance de la communication faite par la société l'Occitane sur Internet pour son opération commerciale l'Occitube serait de nature à accroître ce phénomène de dilution et donc le préjudice qu'elle subit.
Elle indique que son préjudice réel ne provient pas d'une réalisation moindre du chiffre d'affaires par la vente directe de produits lors des marchés itinérants, mais bien la promotion de ses produits le Petit Marseillais afin de conquérir de nouvelles parts de marché. Elle précise donc que son préjudice ne se limite pas au simple chiffre d'affaires qu'elle aurait pu réaliser par la vente directe de produits lors de son opération, mais qu'il convient de prendre en compte dans le calcul de son préjudice la dilution de la valeur promotionnelle de l'opération. Elle demande la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la société l'Occitane à lui payer une somme de 200 000 euro à titre de dommages-intérêts correspondant à environ 25 % du montant des sommes engagées par elle pour son opération commerciale.
La société l'Occitane sollicite à titre subsidiaire la diminution de dommages-intérêts alloués et demande de limiter ceux-ci à 10 000 euro. Elle fait valoir qu'en 2013 le chiffre d'affaires de l'Occitube qui a sillonné les [...] durant quelques semaines n'a été que de 18 720 euro.
Toutefois, ainsi que l'indique la société Johnson & Johnson, le préjudice induit par la concurrence parasitaire ne se borne pas aux ventes effectuées sur les marchés provençaux, mais à la nuisance apportée à la valeur promotionnelle de l'opération.
Cependant, compte tenu de la notoriété peu importante de l'Échoppe du sud, de la période relativement réduite pendant laquelle s'est produite la concurrence parasitaire, augmentée toutefois par les opérations publicitaires sur Internet, il convient de fixer à 80 000 euro le montant des dommages-intérêts que la société appelante devra verser à la société Johnson & Johnson.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a
- interdit à la société Laboratoires M&L de réaliser toute opération commerciale telle l'Occitube reprenant les caractéristiques emblématiques de l'Echoppe du Sud de la société Johnson & Johnson Santé Beauté France JJSBF en France et sous astreinte de 100 euro par jour et par infraction constatée.
Le jugement sera également confirmé en ce qu'il a dit qu'il n'y avait pas lieu à publications de la décision à intervenir.
Par ces motifs, Confirme le jugement en ce qu'il a dit que la société Laboratoires M&L a commis des actes de concurrence parasitaire au préjudice de la société Johnson & Johnson et lui a interdit de réaliser toute opération commerciale telle l'Occitube reprenant les caractéristiques emblématiques de l'Echoppe du Sud de la société Johnson & Johnson Santé Beauté France JJSBF en France et sous astreinte de 100 euro par jour et par infraction constatée et n'a pas fait droit aux demandes de publication de la décision et l'a condamnée aux dépens et une somme de 25 000 euro au titre des frais irrépétibles exposés en première instance. L'infirme sur le montant du préjudice. Statuant à nouveau, Condamne à société Laboratoires M&L à payer à la société Johnson & Johnson une somme de 80 000 euro à titre de dommages-intérêts. Condamne la société Laboratoires M&L aux dépens d'appel avec recouvrement dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile. La condamne également à payer à la société Johnson & Johnson la somme de 15 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en cause d'appel.