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Décisions

Cass. com., 5 janvier 2016, n° 14-15.708

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Bridault

Défendeur :

Assurtis (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Tréard

Avocat général :

M. Debacq

Avocats :

SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, SCP Baraduc, Duhamel, Rameix

T. com. Paris, 19e ch., du 17 déc. 2010

17 décembre 2010

LA COUR, a rendu l'arrêt suivant : - Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'en 2006, M. Bridault (le franchisé) et la société Assurtis (le franchiseur) ont conclu un contrat de franchise portant sur la distribution de contrats d'assurance et de crédits à la consommation au sein d'un réseau exploité sous l'enseigne Assurtis ; qu'en 2008, M. Bridault a signé un autre contrat en qualité de gérant d'une société ABP Courtage et demandé la prorogation du contrat signé en 2006 ; que le franchisé, a assigné le franchiseur, en 2010, en résiliation du contrat aux torts exclusifs de celui-ci et en paiement de dommages-intérêts ;

Sur le second moyen : - Attendu que le franchisé fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de résiliation du contrat de franchise aux torts et griefs exclusifs du franchiseur, de rejeter sa demande de dommages-intérêts au titre des manquements contractuels commis par ce dernier, de prononcer la résiliation du contrat de franchise à ses torts, et de le condamner à payer au franchiseur une certaine somme au titre des redevances impayées et une indemnité de résiliation alors, selon le moyen : 1°) que la violation de conventions légalement formées permet au juge d'en prononcer la résiliation, laquelle n'est pas subordonnée à l'existence d'un préjudice ; que la résiliation d'un contrat peut résulter d'un manquement contractuel d'une certaine gravité imputable au débiteur de l'obligation indépendamment des conséquences qui en résultent pour le créancier de l'obligation inexécutée ; qu'en se bornant à énoncer qu'aucun grief ne peut être retenu contre la société Assurtis du fait de la suppression unilatérale, par cette dernière, du comparateur-auto, au motif que M. Bridault ne s'est jamais plaint de la suppression de ce comparateur avant l'instance judiciaire et qu'il ne justifie pas que ses résultats ont souffert de cette suppression, sans rechercher si la suppression du comparateur-auto décidée par la société Assurtis ne constituait pas un manquement d'une gravité justifiant en soi la résiliation du contrat de franchise, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 1134, 1147 et 1184 du Code civil ; 2°) qu'en estimant qu'aucun grief ne peut être retenu contre la société Assurtis du fait de la suppression unilatérale, par cette dernière, du comparateur-auto, au motif que M. Bridault ne s'est jamais plaint, sinon lors de l'instance judiciaire, de la suppression de ce comparateur, et qu'il ne justifie pas que ses résultats ont souffert de cette suppression, la cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à justifier son arrêt, a derechef privé sa décision de base légale au regard des articles 1134, 1147 et 1184 du Code civil ;

Mais attendu qu'après avoir rappelé que le comparateur-auto était présenté par le franchisé comme étant " un des éléments essentiels du concept ", l'arrêt constate que le franchisé ne s'est jamais plaint, dans les courriers échangés avec le franchiseur, de sa suppression intervenue en octobre 2007, ne la critiquant qu'à l'occasion de l'instance initiée en 2010, et retient qu'il ne justifie pas de ce que ses résultats en aient souffert ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, faisant ressortir que le comparateur-auto n'avait pas constitué un élément essentiel de la franchise, de sorte que sa suppression aurait caractérisé un manquement contractuel d'une gravité suffisante pour justifier la résiliation du contrat aux torts du franchiseur, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche : - Vu les articles L. 330-3 et R. 330-1 du Code de commerce ; - Attendu que pour rejeter la demande de dommages-intérêts formée par le franchisé au titre des manquements précontractuels du franchiseur, l'arrêt retient que si la présentation de l'état du marché local n'est manifestement pas conforme à l'esprit de l'article R. 330-1 du Code de commerce, en ce qu'il est peu détaillé et repose sur des données anciennes qui ne donnent pas les perspectives de développement, les fonctions de collaborateur de M. Bridault, agent commercial chez un agent d'assurance entre 1992 et 1998 puis courtier d'assurance depuis 1998 dans l'Ile de Ré puis à Puilboreau, lui permettaient d'avoir une bonne connaissance du marché local ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans préciser en quoi l'expérience du franchisé, acquise dans le seul secteur de l'assurance, était suffisante pour lui permettre d'apprécier l'état du marché local d'un concept novateur alliant crédit et assurance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : casse et annule, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de dommages-intérêts formée par le franchisé au titre des manquements précontractuels du franchiseur, et en ce qu'il statue sur les dépens et l'article 700 du Code de procédure civile, l'arrêt rendu le 19 février 2014, entre les parties, par la Cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Paris, autrement composée.