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Décisions

Cass. crim., 13 janvier 2016, n° 14-88.136

COUR DE CASSATION

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

HSBC France (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Guérin

Rapporteur :

Mme Farrenq-Nési

Avocat général :

M. Cuny

Avocats :

SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, Poupot, SCP Rousseau, Tapie

Paris, ch. 4-11, du 24 oct. 2014

24 octobre 2014

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par la société X, contre l’arrêt de la Cour d'appel de Paris, chambre 4-11, en date du 24 octobre 2014 qui, pour pratique commerciale trompeuse, l’a condamnée à 187 500 euros d’amende, a ordonné une mesure de publication, et a prononcé sur les intérêts civils ; - Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6, § 1 et 2, de la Convention européenne des droits de l'Homme, violation des articles L. 121-1, L. 121-1-1, L. 121-6, L. 213-1, L. 213-6 du Code de la consommation, L. 121-2, 131-38 et 131-39 du Code pénal, violation des principes fondamentaux de la procédure pénale, 591 et 593 du même Code, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la société X coupable de pratique commerciale trompeuse par personne morale, pour les faits commis du 20 février 2009 au 31 mars 2009 à Paris, l'a condamnée à une amende délictuelle de 187 500 euro, a ordonné à son égard la publication de l'arrêt à ses frais par extrait dans les revues et journaux Investir, le Journal des Finances, les Echos, Challenges et le Figaro, a, en conséquence, reçu la constitution de certaines parties civiles et a condamné la société X à leur payer certaines sommes en réparation de leurs préjudices ;

"aux motifs propres qu'il est reproché à l'établissement bancaire d'avoir commis une pratique commerciale trompeuse reposant sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur concernant la portée des engagements de l'annonceur en n'appliquant pas à cinq cent vingt consommateurs ayant souscrit "un compte épargne direct", entre le 20 février 2009 et le 31 mars 2009, les conditions mentionnées dans la campagne publicitaire réalisée dans divers titres de la presse écrite, du 21 janvier 2009 au 13 février 2009 prévoyant une rémunération de 6 % pendant six mois ; que les termes de l'offre promotionnelle concernant le "compte épargne direct", tels que rappelés dans la prévention, et ayant fait l'objet d'une diffusion importante dans la presse écrite visant un large public, du 21 janvier au 13 février 2009 ne sont pas contestés ; que cette offre, dont la validité était fixée du 20 janvier au 31 mars 2009, s'inscrivait dans un contexte de crise économique où, notamment, la rentabilité des placements avait notablement baissé ; qu'ainsi, comme le rappelle l'administration des fraudes dans ses conclusions d'intervention, le taux de rémunération du livret A était passé à 4 % au 1er janvier 2009 puis à 2,5 % au 1er février, 1,75 % au 1er mai et 1, 25 % au 1er août ; que, dès lors, en offrant aux consommateurs français un compte de dépôt à vue, permettant le retrait partiel ou total des fonds à tout moment, assorti d'une rémunération de 6 % sur six mois pour un montant pouvant aller jusqu'à 100 000 euro, avec versement mensuel des intérêts acquis, la société X offrait aux épargnants un produit particulièrement attractif dans un contexte morose pour les particuliers ; que la société X estimait, par la voix de sa direction juridique, notamment dans un courrier du 2 juillet 2009 adressé au procureur de la République de Paris, que la dite promotion avait obtenu un succès imprévu et avait dépassé ses prévisions, admettant trois fois plus de demandes qu'envisagées ; que la cour ne peut qu'en déduire l'importance de l'impact de l'offre promotionnelle en cause sur les consommateurs français ; que, nonobstant les difficultés auxquelles la société X pouvait se trouver confrontée devant le succès de sa promotion et du fait de son défaut d'anticipation, le non-respect des conditions substantielles de l'offre proposée aux consommateurs, dans un temps de souscription fixée à la période du 21 janvier au 31 mars 2009, constitue une pratique commerciale trompeuse en ce qu'elle a altéré le comportement économique des consommateurs ; que l'offre en cause était associée au " code promotionnel 019CED ", lequel devait impérativement être repris dans le formulaire de souscription ; qu'à cet égard, cette obligation et le fait que, sur les pièces de souscription figurant au dossier, notamment communiquées par les parties civiles, ce code soit systématiquement repris, contredit les explications a posteriori des représentants de la prévenue ayant soutenu que ce code n'était qu'une possibilité d'identification des supports de publicité ; que c'est précisément en visant ce code appelé " promotionnel " que les consommateurs confirmaient leur souhait de souscrire à l'offre proposée, dans les termes même de la publicité ayant attiré leur attention ; qu'à cet égard, s'il n'était pas contesté que la société X a, dès le 20 février 2009, remplacé sur son site, le taux du "compte épargne direct" en affichant celui de 3,75 %, cette mention n'impliquait pas pour le consommateur que l'offre précédente dont le délai n'était pas écoulé selon la publicité, soit devenue caduque, d'autant qu'aucune mention plus générale et claire de l'arrêt de l'offre n'apparaissait sur le site lors de la consultation des informations générales sur ce "compte épargne direct" ; qu'il importe peu que la banque ait cessé de faire de la publicité dans la presse à compter du 13 février 2009, cette date ne faisant pas cesser une possible altération du comportement du consommateur, de nombreux plaignants ayant ainsi expliqué avoir voulu souscrire à partir de la publicité initiale, de surcroît parue dans des hebdomadaires ou mensuels, ce qui laissait l'offre se diffuser dans le public de manière continue sur les mêmes bases ; que c'est ainsi à juste titre que le tribunal a souligné une disproportion entre l'impact de la campagne initiale sur les consommateurs et les quelques correctifs apportés après le 19 février par la banque, de surcroît, la plupart du temps après l'engagement des personnes concernées, ou par le biais de courriers envoyés a posteriori à des clients déçus ; que, malgré l'argument de la banque d'avoir mis fin à la promotion le 19 février 2009, les demandes de souscription se prévalant, par l'usage du code dédié, de l'offre à 6 %, continuaient d'être acceptées, sans que le consommateur ne reçoive d'alerte lui indiquant, avant la souscription, que l'offre avait été retirée et ne lui était plus applicable ; que de plus, la banque répondait aux clients mécontents que son offre était maintenue mais qu'elle avait juridiquement la liberté de revoir unilatéralement le taux applicable, ce qui vient confirmer l'ambigüité de la position de la banque à l'égard de son offre promotionnelle ; que, dès lors, le caractère trompeur de la pratique en cause, qui ne saurait se limiter au message de la publicité initiale qui, de manière intrinsèque et à ce stade, ne comportait aucun élément de tromperie, résulte dans le fait qu'eu égard aux circonstances de diffusion de cette offre promotionnelle affichant notamment un délai clair de validité de l'offre, le consommateur fort de ces conditions largement diffusées et auxquelles un code spécifique d'offre était attachée, ne pouvait, à défaut d'avis clair et antérieur à tout engagement de sa part, que penser légitimement que l'offre restait valable, alors qu'elle ne l'était plus, et ce d'autant que sa souscription continuait à être prise en compte sur Internet ; que ce faisant, en continuant d'accepter et de traiter des souscriptions bien qu'elle n'appliquait plus le taux offert initialement sans que le consommateur en soit avisé, la société X a manifestement altéré le comportement économique d'un consommateur normalement attentif et avisé, trompé sur les qualités essentielles du contrat souscrit et la portée de l'engagement de l'annonceur ; qu'en ne mettant pas ainsi en œuvre les moyens nécessaires pour informer, en temps utile, du retrait de l'offre, la société X avait continué, à bénéficier du caractère attractif de la publicité qui continuait d'attirer vers elle de nombreux clients, dont le comportement était altéré de ce fait, quelle que soit l'issue de leur démarche ; que l'élément intentionnel requis par l'infraction visée réside dans le fait que la banque ait décidé de ne plus appliquer les conditions de sa promotion avant son terme, dans les conditions qui viennent d'être rappelées ; qu'il est, par ailleurs, constant que ces agissements ont été commis par les organes de la personne morale, pour son compte et dans son intérêt ; qu'il n'est pas anodin de rappeler qu'en n'appliquant pas le taux de 6 % aux souscripteurs se prévalant de l'offre en cause, la banque a économisé des sommes importantes que l'administration des fraudes évaluait à 350 000 euro, en ayant pris comme base de calcul la somme de 40 000 euro de placement moyen pour les deux cent cinquante consommateurs n'ayant été rémunérés que par des taux de 3,75 % dans le meilleur des cas, qu'elle a également, ce faisant, amélioré son ratio de crédits sur dépôts, multipliant par six le dépôt moyen sur ses compte, comme elle l'admettait dans son rapport annuel 2009, en révélant une progression significative d'environ 7 % des dépôts à vue favorisée, notamment, par le "compte épargne direct" ; que les éléments constitutifs de l'infraction sont réunis, la cour confirmera le jugement dont appel sur la déclaration de culpabilité ; que sur la peine, les faits ayant eu un impact important sur les consommateurs, s'agissant d'une campagne nationale d'envergure, sur une période longue, dans les conditions précédemment rappelées, dans un contexte de crise, et concernant un établissement bancaire, sur lequel reposent en particulier à l'égard des particuliers des obligations légales et réglementaires importantes, la cour confirmera la décision entreprise en ce qu'elle a condamné la banque X au maximum de l'amende encourue, et à la publication de la décision, selon les modalités précisées au dispositif ;

"et aux motifs réputés adoptés, qu'il résulte de la procédure et des débats que le délit de pratique commerciale trompeuse par personne morale reproché à la société X est caractérisé ; qu' en effet, la société X a lancé dans quinze quotidiens, hebdomadaires et revues mensuelles et sur son site Internet, une campagne publicitaire du 21 janvier 2009 au 13 février 2009, visant à proposer des comptes courants rémunérés, dénommés "compte épargne direct" prévoyant un taux de rémunération de 6 % pendant six mois pour un montant plafonné à 100 000 euro, puis un taux de rémunération à 3,75 % après cette période de bienvenue ; que le délai proposé par la société X pour effectuer une souscription à cette offre, particulièrement attractive dans un contexte caractérisé par l'arrivée de la crise financière en France, est du 20 janvier 2009 au 31 mars 2009 ; que la société X a choisi, face au succès imprévu de son offre, d'interrompre dès le 19 février 2009, de manière anticipée, le délai permettant d'effectuer cette souscription ; que la banque a mis en place dès le 20 janvier 2009, sur son site Internet, la procédure permettant d'effectuer la souscription d'une ouverture de "compte épargne direct", un code de l'offre spéciale, " 019CED " ayant été communiqué au préalable dans sa publicité ; que la banque X décide d'interrompre prématurément son " offre spéciale " mais ne met pas en place pour autant sur son site Internet un blocage de la procédure de souscription et qu'ainsi à partir du 19 février 2009, les souscripteurs ont pu procéder à l'ouverture d'un "compte épargne direct" grâce à l'utilisation du code de l'offre spéciale " 019CED " mais n'ont pas su immédiatement qu'ils ne bénéficieraient pas du taux de rémunération à 6 % ; que ce n'est qu'après avoir déplacé leurs fonds de leur banque vers la banque X, qu'après avoir pris connaissance du relevé du premier mois du placement de leurs fonds, que les souscripteurs ont réalisé qu'ils ne bénéficiaient en aucun cas du taux promis par la campagne publicitaire de la banque - 6 % - mais seulement d'un taux de 3,75 %, le taux promis de 6 % pour une durée de six mois étant pourtant ce qui les avait amenés à prendre cette décision commerciale ; que les souscripteurs mécontents adressaient des courriers à la banque X afin de se plaindre de ne pas avoir pu bénéficier des conditions de l'offre promise et que la banque leur répondait avoir été obligée de mettre un terme à cette offre en raison d'un engorgement de ses services et, sachant qu'en matière bancaire, il lui est toujours possible de refuser de contracter ; que les termes de la campagne publicitaire ne l'obligeaient nullement à maintenir son offre jusqu'au 31 mars 2009 ; que la banque X s'appuyait également dans ses réponses sur le fait d'avoir cessé de faire toute publicité pour une souscription d'un "compte épargne direct" au-delà de sa campagne publicitaire, à savoir au-delà du 13 février 2009, et d'avoir informé les souscripteurs éventuels par un " avis de non-recevoir " sur la page de son site où les clients intéressés pouvaient s'inscrire et télécharger le formulaire ; que la disproportion est évidente entre les moyens mis en œuvre par la banque X pour lancer sa campagne et ceux qui ont été mis en œuvre pour l'arrêter prématurément et qu'ainsi deux cas de figures ont pu se présenter ; ainsi tout d'abord que de nombreux souscripteurs, trompés par cette annonce très attractive lue dans la presse écrite et pour laquelle ils n'ont pu bénéficier d'une information rectificative dans cette même presse, n'ont en conséquence pu disposer au préalable de toute démarche auprès de leur banque initiale, de l'information leur indiquant que l'offre avait totalement changé, et ont procédé à leur souscription par le biais du site de la banque X, ayant cependant déjà effectué leurs demandes de fermeture de comptes ou livrets, ou leurs demandes de déplacement de fonds, avec leurs frais afférents, auprès de leur banque initiale ; que ces souscripteurs indiquent dans leurs courriers de plainte que, lors de leur souscription effectuée après le 19 février 2009, par le biais du site, et grâce au code communiqué dans la campagne publicitaire " 019CED " ils ont pu effectuer leur souscription mais n'ont reçu aucune information relative au changement de taux de rémunération ; que d'autres souscripteurs n'ont pu bénéficier de l'offre, pourtant souscrite dans le délai indiqué dans la campagne publicitaire et répondant aux conditions exigées, leur souscription ayant été refusée ; qu'il apparaît clairement que de nombreux consommateurs, informés dans le cadre de la campagne publicitaire menée par la banque X dans la presse écrite, d'une proposition commerciale qui les a déterminés à effectuer des démarches et des frais afin de retirer des fonds de leurs banques pour les déposer chez X ; qu'il apparaît très clairement également que la banque X, dépassée par le succès commercial de son offre, a préféré y mettre un terme prématurément, et partant en limiter ainsi le coût qu'elle aurait eu à en supporter, d'une part, en n'engageant pas tous les moyens dont elle pouvait disposer pour s'efforcer en conséquence de répondre aux effets pour le consommateur ; qu'en effet, que la banque X n'a pas souhaité financer une campagne rectificative dans les quinze revus et magazines auxquels elle avait eu recours pour la promouvoir, n'a pas souhaité mettre en œuvre sur son site un dispositif efficace d'information, d'alerte et de blocage relatif à la procédure de souscription à son offre désormais périmée ; que la banque X s'est en effet contentée de continuer, sur la lancée de sa campagne publicitaire, de permettre la souscription de nombreuses nouvelles ouvertures de "compte épargne direct" mais tout en modifiant de façon très substantielle leur taux rémunérateur, trompant ainsi de manière délibérée le consommateur, déjà engagé dans sa démarche mais privé d'une information essentielle, à savoir le montant du taux rémunérateur affecté à son compte ; que les explications apportées par la banque X, tant aux clients mécontents qu'à la DGCCRF, ne souffrent aucune compréhension, en effet l'engorgement des services administratifs de cette banque diffèrent-ils qu'il s'agisse de comptes rémunérés à 6 % ou à 3,75 % continuer à accepter de nouvelles souscriptions, quel qu'en soit le taux rémunérateur, contribuent à engorger les services qui les traitent... or aucun blocage de souscription n'a été mis en place ; que les explications apportées par la banque X, tant aux clients mécontents qu'à la DGCCRF qui consistent à légitimer le retrait de son offre promotionnelle à partir d'une date à sa seule convenance, en dépit du délai proposé par voie de presse pour contracter cette offre promotionnelle, par la possibilité constante de toute banque de pouvoir refuser de contracter, et partant d'affirmer qu'un tiers ne peut se prévaloir d'une offre bancaire pour en exiger son exécution, contredisent les orientations de la directive 2005/29/CE de la commission européenne ; qu'en effet cette directive précise en quoi consistent des pratiques commerciales déloyales et qu'ainsi par sa campagne publicitaire, la banque X a déterminé des consommateurs à prendre une décision commerciale, a déterminé leur comportement économique qui a ensuite été altéré par la décision de retrait prématuré effectué par la banque ; que selon les calculs effectués par la DGCCRF, les intérêts financiers à la cessation prématurée de son offre pour les cinq cent vingt souscripteurs qui n'ont pu bénéficier, entre le 20 février 2009 et le 31 mars 2009, des conditions promises, représentent environ 350 000 euro ; enfin qu'en proposant une offre commerciale dont l'offre était valide jusqu'en mars 2009 puis en cessant la commercialisation de son offre à partir du 20 février 2009, afin de rectifier in extremis une opération financière parfaitement mal évaluée, la banque X a commis une pratique commerciale trompeuse ; qu'il convient en conséquence d'entrer en voie de condamnation à l'encontre de la société X pour les faits commis du 20 février 2009 au 31 mars 2009 ; qu'il convient cependant de relaxer partiellement la société X des faits de la prévention pour la période antérieure au 20 février 2009, la souscription au "compte épargne direct" ayant pu jusqu'au 19 février 2009, être réalisée dans les termes de l'offre promotionnelle ; qu'il convient, au vu de ces éléments d'appréciation, de condamner la société X à une peine délictuelle d'un montant de 187 500 euro ; qu'il convient également d'ordonner la publication de cette décision par extraits dans les revues suivantes " Investir- le Journal des finances ", " les Echos ", " Challenges " et " le Figaro " ;

"1°) alors qu'une campagne publicitaire de promotion commerciale n'est trompeuse que si, au moment où elle est diffusée, elle ne correspond pas à la réalité des engagements de l'annonceur et comporte des informations que le professionnel savait de nature à induire en erreur ; qu'il ressort des constatations mêmes de l'arrêt que la publicité initiale ne comportait aucun élément de tromperie et que la campagne publicitaire a été retirée de la presse le 13 février 2009, soit avant l'interruption de l'opération promotionnelle, de sorte que la pratique commerciale ne pouvait être considérée comme trompeuse pour la période postérieure au 13 février 2009 ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen ;

"2°) alors que le délit de pratique commerciale trompeuse est un délit intentionnel qui suppose la connaissance qu'avait le professionnel du caractère trompeur de la pratique commerciale ; qu'en se bornant à retenir que l'élément intentionnel résidait dans le fait que la société X avait décidé de ne plus appliquer les conditions de sa promotion avant son terme, sans constater la connaissance qu'avait la banque du caractère trompeur de la publicité, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

"3°) alors qu'il ressort des constatations mêmes de l'arrêt que la société X avait fourni au candidat à la souscription au "compte épargne direct" l'information selon laquelle le taux d'intérêt applicable était de 3,75 % et non plus de 6 % à compter du 19 février 2009 ; qu'en retenant, néanmoins, que la société X avait continué d'accepter et de traiter des souscriptions alors qu'elle n'appliquait plus le taux offert initialement sans que le consommateur en soit avisé, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, n'a pas légalement justifié sa décision ;

"4°) alors que la société X faisait valoir que la campagne publicitaire avait été retirée avant l'interruption de l'opération promotionnelle, dès le 13 février 2009, qu'elle avait bien fourni au candidat à la souscription au "compte épargne direct" l'information selon laquelle le taux d'intérêt applicable était de 3,75 % et non plus de 6 % à compter du 19 février 2009, soit par téléphone, soit sur son site Internet, point de passage obligatoire pour la demande d'ouverture d'un "compte épargne direct" et que l'organisation d'une campagne publicitaire rectificative dans la presse, outre qu'elle était matériellement impossible à réaliser sur le champ, aurait été inutile, compte tenu des délais de diffusion, de la périodicité (hebdomadaire, mensuelle) des périodiques concernés et du caractère aléatoire de leur consultation supposée par les personnes intéressées, d'autant plus que l'information nécessaire figurait déjà sur le site Internet de la banque, point de passage obligé pour la souscription d'un "compte épargne direct" ; qu'en se bornant à énoncer, pour retenir l'intention coupable de la société X, que celle-ci avait décidé de ne plus appliquer les conditions de sa promotion avant son terme sans mettre en œuvre les moyens nécessaires pour informer les souscripteurs en temps utile du retrait de son offre promotionnelle, sans préciser les moyens techniques et matériels que la banque aurait dû mettre en œuvre pour informer les souscripteurs ni s'expliquer sur l'information " suffisante" qu'aurait dû délivrer la banque, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des textes visés au moyen" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que la société X a lancé dans la presse écrite et sur son site Internet une campagne publicitaire qui s'est déroulée du 21 janvier 2009 au 13 février 2009, aux termes de laquelle elle offrait aux souscripteurs d'un compte dit "compte épargne direct" de bénéficier d'une rémunération à un taux de 6 % pendant six mois pour un montant plafonné à 100 000 euro, puis ensuite un taux de 3,75 %, le délai pour souscrire à cette offre étant fixé du 20 janvier 2009 au 31 mars 2009 ; que la banque a décidé d'interrompre de manière anticipée, dès le 19 février 2009, cette possibilité de souscription ; que suite à la plainte de consommateurs, la société X a été poursuivie devant le tribunal correctionnel qui l'a déclarée coupable de pratique commerciale trompeuse pour la période du 20 février au 31 mars 2009 ; qu'appel de la décision a été interjeté par la société X et par le ministère public ;

Attendu que pour confirmer le jugement l'arrêt relève que si la banque avait, dès le 20 février, remplacé sur son site Internet le taux du compte épargne direct de 6 % par celui de 3,75 %, l'offre promotionnelle initiale au taux de 6 % était associée à un code devant être impérativement repris dans le formulaire de souscription, et que les demandes de souscription sur ce code dédié avaient continué d'être acceptées sans que le consommateur ne soit averti, au préalable, que le taux de 6 % n'était plus applicable ; que les juges en déduisent que la pratique en cause ne saurait se limiter au message de la publicité initiale qui, de manière intrinsèque et à ce stade, ne contenait aucune tromperie, et qu'en continuant d'accepter et de traiter des souscriptions alors qu'elle n'appliquait plus le taux offert initialement sans que le souscripteur en soit avisé, la société X avait manifestement altéré le comportement économique d'un consommateur normalement attentif et avisé, trompé sur les qualités essentielles du contrat souscrit et la portée de l'engagement de l'annonceur ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel, sans insuffisance ni contradiction, a caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit de pratique commerciale trompeuse dont elle a déclaré la prévenue coupable ; d'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.