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Décisions

ADLC, 10 décembre 2015, n° 15-DCC-170

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

Décision

Relative à la prise de contrôle exclusif de la société Financière Quick par la société Burger King France

ADLC n° 15-DCC-170

10 décembre 2015

L'Autorité de la concurrence,

Vu le dossier de notification adressé complet au service des concentrations le 4 novembre 2015, relatif à la prise de contrôle exclusif de la société Financière Quick par la société Burger King France, formalisée notamment par une lettre d'offre ferme de Burger King France et une lettre d'engagement des sociétés Qualium et Univers 1 en date du 25 septembre 2015 ainsi qu'un projet de contrat de cession et d'acquisition ; Vu le livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ; Vu les engagements présentés le 8 décembre 2015 par la partie notifiante ; Vu les éléments complémentaires transmis par les parties au cours de l'instruction ; Adopte la décision suivante :

I. Les entreprises concernées et l'opération

1. Burger King France est une société par actions simplifiée exerçant une activité de restauration rapide en qualité de " master franchisé " de la société Burger King Europe. Elle anime un réseau de trente restaurants à l'enseigne Burger King en France dont dix sont détenus en propre et vingt sont exploités par des franchisés. Burger King France est contrôlée par la société NewCo GB, elle-même contrôlée exclusivement par la société Bertrand Holding SARL, société Holding du groupe actif dans les secteurs (i) de la restauration commerciale (notamment, outre le réseau Burger King, la Brasserie Lip, les enseignes Au Bureau et Café Leffe, les sandwicherie Bert's et les cafétérias Eris), (ii) de la distribution de boissons destination de la restauration hors foyer (ci-après, " RHF "), (iii) de l'hôtellerie et (iv) de l'immobilier. Le groupe Bertrand est ultimement contrôlé par M. Olivier Bertrand. La participation minoritaire de 15 % de Burger King UK, filiale de la société Burger King SARL, au capital de la société NewCo GB (15 %), pas plus que les stipulations du contrat de master franchise conclu par Burger King Europe avec Burger King France ne confèrent à Burger King SARL ou à l'une de ses filiales une influence déterminante sur la société Burger King France au moyen de droits de veto sur les décisions stratégiques.

2. Financière Quick est la société holding du groupe Quick qui exerce une activité de restauration rapide en France, en Belgique et au Luxembourg. Le groupe Quick anime un réseau de quatre cent cinq établissements de restauration rapide en France et cent en Belgique et au Luxembourg. 80 % de ces restaurants sont exploités en franchise. Le groupe a également conclu trois contrats de master franchise en Turquie, en Tunisie et au Maroc qui couvrent une quinzaine de restaurants exploités en franchise. Financière Quick est détenue à 94 % par la société Univers 1, elle-même détenue à 97,5 % par des fonds d'investissement gérés par la société Qualium Investissement, filiale du secteur concurrentiel de la Caisse des Dépôts et Consignations (1).

3. L'opération notifiée, formalisée par un projet de contrat de cession et d'acquisition, une lettre d'offre ferme de la Société Burger King France, une lettre d'engagement des sociétés Qualium et Univers 1 ainsi qu'un projet de contrat de cession et d'acquisition, consiste en l'acquisition par la société Burger King France de 100 % du capital et des droits de vote de la société Financière Quick auprès de la société Univers 1 (94 %), de la société TastyCo (5,63 %) et de Monsieur Jean-Paul Brayer (0,37 %). L'objectif de l'opération est de faire basculer progressivement, en quatre ans, 300 restaurants à l'enseigne Quick en France vers l'enseigne Burger King à un rythme moyen annuel de 70 à 80 établissements. Un programme d'incitation sera élaboré à destination des franchisés Quick. L'enseigne Quick sera toutefois maintenue en France pour environ 80 établissements, parmi lesquels [plusieurs] (2) restaurants bénéficiant de la certification " halal ".

4. En ce qu'elle se traduit par la prise de contrôle exclusif de la cible par Burger King France, l'opération constitue une concentration au sens de l'article L. 430-1 du Code de commerce.

5. Les entreprises concernées réalisent ensemble un chiffre d'affaires hors taxe total sur le plan mondial de plus de 150 millions d'euro (groupe Bertrand : [...] d'euro pour l'exercice clos le 31 décembre 2014 ; groupe Quick : d'euro pour l'exercice clos le 31 décembre 2014). Chacune de ces entreprises a réalisé en France un chiffre d'affaire supérieur à 50 millions d'euro (groupe Bertrand : [...] d'euro pour l'exercice clos le 31 décembre 2014 ; groupe Quick : d'euro pour l'exercice clos le 31 décembre 2014). Compte tenu de ces chiffres d'affaires, l'opération ne relève pas de la compétence de l'Union européenne. En revanche, les seuils de contrôle mentionnés au I de l'article L. 430-2 du Code de commerce sont franchis. Cette opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du Code de commerce relatifs à la concentration économique.

II. Délimitation des marchés pertinents

6. Les parties sont simultanément actives dans le secteur de la restauration, commerciale et autoroutière, ainsi que sur les marchés amont de l'approvisionnement en biens de grande consommation destinés au commerce de détail de l'alimentation. Le groupe Bertrand est en outre actif sur les marchés de la distribution de boissons à destination des cafés, hôtels restaurants qui seront examinés au titre des effets verticaux.

A. MARCHES DE PRODUITS

1. LES MARCHES AMONT DE L'APPROVISIONNEMENT EN PRODUITS ALIMENTAIRES

7. En qui concerne les marchés amont de l'approvisionnement, la pratique décisionnelle délimite autant de marchés pertinents que de groupes de produits (3). S'agissant des produits alimentaires frais, sont ainsi distingués (4) : les produits laitiers, la charcuterie et les produits traiteurs, les produits de la mer, les fruits et légumes et les produits carnés. L'Autorité de la concurrence a également identifié un marché de l'approvisionnement en produits surgelés et en glaces et a envisagé, au sein de celui-ci, un marché spécifique de l'approvisionnement en glaces, crèmes glacées et sorbets (5).

8. La pratique décisionnelle européenne (6) a par ailleurs envisagé une segmentation des marchés amont de l'approvisionnement en fonction des canaux de distribution. Dans sa décision Carrefour/Promodès, la Commission européenne (7) avait ainsi relevé qu'" il existe des indices sérieux permettant de penser que certains marchés de l'approvisionnement peuvent également être définis en fonction des canaux de distribution, de telle sorte que l'approvisionnement du secteur du commerce de détail à dominante alimentaire pourrait constituer un marché autonome ". L'Autorité de la concurrence (8) a également effectué des analyses concurrentielles sur le seul canal de la grande distribution et des commerces à dominante alimentaire (ci-après " GMS ") et envisagé l'existence de marchés distincts de l'approvisionnement en produits surgelés destinés à la RHD.

9. La question de la délimitation précise des marchés pertinents peut toutefois rester ouverte dans la mesure où les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurent inchangées quelles que soient les segmentations envisagées.

10. En l'espèce les groupes Bertrand et Quick sont actifs en tant qu'acheteurs sur les marchés de l'approvisionnement en produits alimentaires à destination de la RHD.

2. LES MARCHES AVAL DE LA DISTRIBUTION DE PRODUITS ALIMENTAIRES A LA RHD

11. En aval, s'agissant de la distribution en gros de produits alimentaires, la pratique décisionnelle9 a retenu à plusieurs reprises l'existence de marchés distincts par canal de distribution : la GMS, la RHD et l'industrie agro-alimentaire. En l'espèce, les parties sont actives dans le secteur de la distribution de produits alimentaires sur le canal de la RHD.

12. La RHD est traditionnellement composée de professionnels indépendants (café, hôtels, restaurants, ci-après " CHR "), de chaînes de restauration (restauration d'entreprises, etc.) et de collectivités (hôpitaux, armée, établissements scolaires, etc.) dont l'activité consiste à élaborer et proposer à leur clientèle un mode particulier de restauration formant un menu et comprenant généralement une entrée, un plat de résistance, un fromage et/ou un dessert.

13. Par ailleurs, une segmentation par type de clients a été envisagée (10), en distinguant les " grands comptes " (chaînes de restauration et certaines collectivités) " qui négocient des achats globalisés sur une base nationale " et les clients de taille réduite (CHR notamment) " dont les approvisionnements s'effectuent sur la base d'une périodicité très courte ". Toutefois, l'Autorité de la concurrence (11) a relevé que, dans la mesure où les produits commercialisés et les conditions de livraison étaient identiques pour ces deux catégories de clientèle, il n'y avait pas lieu de retenir deux marchés distincts.

14. En outre, dans sa pratique décisionnelle antérieure, l'Autorité de la concurrence a considéré qu'il convenait de distinguer les entrepôts de libre-service de gros (ci-après " Cash and Carry ") du commerce de gros traditionnel compte tenu des différences constatées tant du côté de la demande que du côté de l'offre. Elle a néanmoins observé récemment l'existence d'une pression concurrentielle croissante des Cash and Carry sans que celle-ci soit suffisamment importante pour remettre en cause la délimitation établie (12).

15. Enfin, la pratique décisionnelle nationale (13) distingue quatre grandes familles de produits au sein du commerce de gros de produits alimentaires : (1) les produits frais, (2) les boissons, (3) les produits surgelés et glaces et (4) les produits d'épicerie et la confiserie (ci-après, " produits secs "). La demande de la RHD porte généralement sur l'ensemble de ces produits et les grossistes peuvent proposer un large assortiment de produits. Néanmoins, beaucoup d'entre eux concentrent leur activité sur une de ces familles.

16. En l'espèce, seule la branche " distribution " du groupe Bertrand, via la société OBDH, exerce une activité de distribution de boisson (vin, bière, alcools, sodas, eau, café) et de produits secs à destination des CHR et de la restauration d'entreprise.

3. LE MARCHE AVAL DE LA RESTAURATION COMMERCIALE

17. Au sein de la restauration commerciale, la pratique décisionnelle opère une distinction entre (i) le marché de la restauration rapide à bas prix (qui comprend les fast-foods, les self-services et la vente à emporter/livraison à domicile) et (ii) celui de la restauration plus sophistiquée incluant, notamment, un service à table (14). La pertinence de cette distinction a été confirmée par une très large majorité des répondants au test de marché.

18. La Commission européenne (15) a envisagé de distinguer un marché de la restauration " sur le pouce " comprenant les établissements de restauration rapide (appartenant à une chaîne ou indépendants), les pizzerias, les cafés, les " coffee shops ", les sandwicheries et les enseignes de vente à emporter et de livraison à domicile. Tout en laissant la question ouverte, elle a également envisagé de distinguer entre les restaurants appartenant à une chaîne et les indépendants. Elle a relevé à cet égard que, alors même que les chaînes et les indépendants sont généralement considérés comme agissant sur le même marché de produits, les grandes chaînes offrent la garantie de la notoriété, particulièrement en termes de qualité de service et de constance dans les menus quelle que soit la localisation, alors que les indépendants offrent un service plus personnalisé et plus de flexibilité.

19. Pour une large majorité des répondants au test de marché, les restaurants " fast food ", les sandwicheries, les restaurants " kebab " et les boulangeries exerçant une activité de vente de sandwich sont en concurrence sur le marché général de la restauration rapide à bas prix. Depuis 2011 en France des camions restaurant itinérants (" food trucks ") proposant une offre de restauration rapide notamment dans le concept du " hamburger " se sont implantés en zones urbaines. L'ensemble des répondants fait valoir que la présence régulière d'un food truck dans une zone de chalandise exerce une certaine pression concurrentielle sur les acteurs susmentionnés. Plusieurs répondants au test de marché ont en outre mis en avant la présence sur le marché général de la restauration rapide à bas prix des grandes surfaces alimentaires (telles Daily Monop) exerçant une activité de sandwicherie. L'étude Xerfi de 2015 (16) sur la restauration rapide relève que " les grandes surfaces alimentaires (snacking, sandwiches, salades, etc.) sont ainsi devenues des concurrents de poids pour les concepts spécialisés ". En revanche les résultats du test de marché sont partagés et ne permettent donc pas de trancher la question de l'inclusion ou non dans le marché global de la restauration rapide à bas prix des pizzerias, d'une part, et des cafés, bars et brasseries exerçant une activité de restauration rapide, d'autre part.

20. La Commission européenne a laissé ouverte la question de la distinction au sein de la restauration " sur le pouce " entre un marché de la restauration rapide de " hamburgers" et un marché de la restauration rapide " hors hamburger " (17). Une distinction entre (i) la restauration rapide dite " à l'anglo-saxonne ", (ii) la restauration rapide " à la française " (sandwiches) et (iii) la restauration rapide à thème (sushi, bio, spécialités italiennes etc.) est en outre retenue dans plusieurs études économiques (18). Une majorité des répondants au test de marché a considéré que cette segmentation n'était pas pertinente.

21. Selon la majorité des répondants au test de marché, il n'est pas pertinent de distinguer un segment de la restauration rapide " à l'anglo-saxonne ", les différents formats de restauration rapide répondant aux mêmes besoins. En revanche, la totalité des répondants actifs sur le marché de la restauration rapide hors éventuel segment " à l'anglo-saxonne " considère que, en cas de hausse de prix des produits disponibles chez Burger King ou Quick, les consommateurs ne seraient pas enclins à se reporter sur leurs enseignes, confirmant ainsi l'imparfaite substituabilité entre l'offre de restauration rapide à l'anglo-saxonne et le reste du marché.

22. Sans justifier une segmentation du marché pertinent, les éléments recueillis dans le cadre du test de marché montrent qu'il existe une forte proximité concurrentielle entre les enseignes suivantes : Mc Donald's, Kentucky Fried Chicken (ci-après " KFC "), Quick et Burger King. Plusieurs répondants au test de marché ont mentionné en outre l'enseigne Subway comme constituant un concurrent particulièrement proche. Un sondage réalisée auprès des clients de Burger King et dont les résultats ont été communiqués par la partie notifiante confirme que ces cinq enseignes sont les plus proches concurrents sur le marché de la restauration rapide. Un répondant au test de marché a en outre mentionné l'enseigne Chipotle. L'étude Xerfi précitée mentionne pour sa part les enseignes Speed Burger, 231 East Street, Mythic Burger et Factory & Co comme étant actives sur le segment de la restauration rapide " à l'anglo-saxonne ".

23. La question de la pertinence de la distinction d'un tel segment peut toutefois être laissée ouverte, dans la mesure où les conclusions de l'analyse concurrentielle restent identiques selon la délimitation retenue.

24. Tout en laissant la question ouverte, la Commission européenne s'est également interrogée sur l'existence d'un marché distinct de la restauration rapide pratiquant la " livraison à domicile/vente à emporter ". Au cas d'espèce, si les parties pratiquent la vente à emporter, à l'instar de la plupart des acteurs de la restauration rapide, elles ne sont pas actives sur le segment de la livraison à domicile/vente à emporter. La question peut être laissée ouverte, dès lors qu'elle est sans incidence sur l'analyse concurrentielle.

25. En l'espèce, le groupe Bertrand est actif sur le marché de la restauration commerciale " hors restauration rapide " avec notamment les établissements ou enseignes Brasserie Lipp, Au Bureau, Café Leffe, cafeteria Eris ainsi que sur le marché de la restauration rapide avec les enseignes Bert's et Burger King.

26. L'opération entraîne donc un chevauchement d'activité sur le marché général de la restauration rapide à bas prix. Au cas d'espèce, l'analyse sera menée sur le marché général de la restauration rapide à bas prix et sur le segment de la restauration rapide " à l'anglo-saxonne ", hypothèse la plus conservatrice.

4. LE MARCHE DE LA RESTAURATION AUTOROUTIERE

27. La pratique décisionnelle distingue la restauration autoroutière de la restauration commerciale classique en raison notamment de la spécificité et du caractère captif de la clientèle autoroutière (19). Au sein de ce marché, la pratique décisionnelle distingue trois marchés de produits : la restauration stricto sensu (comprenant un service à table ou en self-service), les prestations de restauration légères (petite restauration et croissanterie), et les ventes de produits alimentaires (par le biais de boutiques, appareils distributeurs, opérations pique-nique et vente à emporter) (20).

7 B. MARCHE GEOGRAPHIQUES

1. LES MARCHES AMONT DE L'APPROVISIONNEMENT EN PRODUITS ALIMENTAIRES

28. La pratique décisionnelle (21) considère que les marchés amont de l'approvisionnement en produits alimentaires sont de dimension nationale. Elle a ainsi constaté que les préférences, goûts et habitudes alimentaires des consommateurs, les différences de prix, les variations des parts de marché détenues par les principaux opérateurs selon les Etats membres et la présence de marques de fabricants ou de distributeurs commercialisées uniquement au plan national ne permettait pas de retenir une dimension européenne du marché.

29. Il n'y a pas lieu de remettre en cause la pratique décisionnelle dans la présente opération.

2. LES MARCHES AVAL DE LA DISTRIBUTION DE PRODUITS ALIMENTAIRES A LA RHD

30. La pratique décisionnelle (22) considère que les marchés de la distribution de produits alimentaires à la RHD revêtent une double dimension : une dimension nationale, résultant des caractéristiques de la demande des grands comptes de la RHD, qui négocient leurs conditions d'approvisionnement au niveau national ; et une dimension locale conduisant à déterminer des zones de chalandise sur lesquelles les grossistes sont en concurrence pour répondre à la demande des CHR et des commerces de proximité. La pratique décisionnelle (23) a ainsi pu analyser les effets des opérations de concentration dans un rayon autour des plateformes estimé entre 60 et 300 kilomètres dans certains cas.

31. Au cas d'espèce l'analyse concurrentielle sera conduite au niveau national et au niveau de l'Ile de France seule zone d'activité de la branche distribution du groupe Bertrand.

3. LE MARCHE AVAL DE LA RESTAURATION COMMERCIALE

32. La pratique décisionnelle nationale a observé que la concurrence sur le marché de la restauration commerciale s'exerçait sur des zones de chalandise définies au niveau local (24).

33. Sur le seul marché de la restauration rapide, la Commission européenne a mis en avant plusieurs éléments militant pour une dimension nationale du marché, tout en laissant la question ouverte. Il ressort du test de marché effectué au cas d'espèce que le marché de la restauration commerciale présenterait une double dimension : (i) une dimension nationale sur laquelle sont définies les stratégies d'implantation et la politique publicitaire des grandes enseignes et (ii) une dimension locale sur laquelle le consommateur met en concurrence les différentes offres qui lui sont proposées dans la zone de chalandise. Une très large majorité des répondants au test de marché indique que les prix sont déterminés au niveau local et que les établissements locaux (intégrés ou franchisés) disposent d'une marge de manœuvre importante et tiennent compte des prix des concurrents présents dans leurs zones de chalandise pour leur propre positionnement tarifaire. Il ressort également du test de marché que les consommateurs tendent à comparer les prix de 3 à 5 établissements dans une même zone de chalandise.

34. Au niveau local, la majorité des répondants estime que la concurrence ne s'exerce pas au niveau de la commune mais plutôt au sein de zones de chalandise accessibles en dix minutes à pieds ou en voiture. Plusieurs répondants font valoir que la zone se définit plutôt en temps de trajet à pieds dans les zones urbaines et en temps de trajet en voiture dans les autres zones, confirmant la spécificité reconnue aux zones de chalandises définies à Paris et dans les dix villes les plus peuplées de France à l'instar de la pratique décisionnelle (25) en vigueur dans le secteur de la distribution alimentaire. Plusieurs répondants ont indiqué que l'implantation d'un restaurant dans un centre commercial est également susceptible d'influer sur la délimitation de la zone de chalandise.

35. L'instruction a en outre révélé la spécificité de la zone géographique d'Ajaccio (Corse). Les effets conjugués de la rareté de l'offre de restauration rapide dans l'île - en particulier sur le segment de la restauration rapide à l'anglo-saxonne - et du caractère insulaire de la zone justifient une délimitation plus large des zones locales. En effet, très peu d'enseignes de restauration rapide sont implantées en Corse. Seules deux enseignes spécialisées dans la restauration " à l'anglo-saxonne " sont présentes sur tout le territoire de l'île (deux restaurants Quick, situés à Ajaccio et Bastia, et un restaurant Burger King à Ajaccio), et il n'existe pas d'autres enseignes nationales de restauration rapide hormis un point de vente Paul dans la zone d'Ajaccio. Les consommateurs, qui privilégient le transport par automobile pour des raisons géographiques, parcourent de plus longues distances pour consommer un produit rare de restauration rapide. Il ressort ainsi des éléments au dossier que les zones locales du marché de la restauration rapide en Corse correspondent à une zone accessible en trente minutes de trajet en voiture.

36. Au cas d'espèce l'analyse concurrentielle sera conduite à la fois au niveau national et local dans des zones définies à partir des points de vente de la cible et correspondant :

- à un trajet de dix minutes à pieds pour les restaurants situés dans Paris intra-muros et dans les dix villes les plus peuplées de France (Bordeaux, Nantes, Rennes, Lille, Strasbourg, Marseille, Toulouse, Nice, Montpellier et Lyon) ;

- à un trajet de 30 minutes en voiture pour les restaurants situés en Corse ; et

- à un trajet de dix minutes en voiture pour les restaurants situés dans le reste de la France.

37. Sur le segment de la restauration rapide à l'anglo-saxonne, la pression concurrentielle exercée par des établissements relevant des principale enseignes du segment situées en bordure de zone, jusqu'à 15 minutes en voiture ou à pied, sera prise en compte au cas par cas dans l'analyse concurrentielle.

38. La question de la délimitation géographique précise du marché de la restauration rapide peut en toute hypothèse être laissée ouverte dès lors qu'elle est sans incidence sur l'analyse concurrentielle.

4. LE MARCHE DE LA RESTAURATION AUTOROUTIERE

39. La pratique décisionnelle retient une dimension nationale du marché de la restauration autoroutière. La majorité des répondants au test de marché considère que cette segmentation est pertinente.

40. En l'espèce, le groupe Bertrand (Bert's, Burger King) et le groupe Quick sont simultanément actifs sur le marché de la restauration autoroutière.

41. Il n'y a pas lieu de remettre en cause ces délimitations envisagées par la pratique décisionnelle à l'occasion de la présente décision.

III. Analyse concurrentielle

A. EFFETS HORIZONTAUX

1. LES MARCHES AMONT DE L'APPROVISIONNEMENT EN BIENS DE CONSOMMATION COURANTE

42. La partie notifiante estime la part d'achat de la nouvelle entité à moins de [0-5] % sur les marchés amont de l'approvisionnement en produits alimentaires quelle que soit la segmentation envisagée. Cette estimation inclue l'ensemble des établissements des enseignes des parties exploitées en franchise. Il en résulte que l'opération n'est pas susceptible de porter atteinte à la concurrence sur les marchés amont.

2. LE MARCHE AVAL DE LA RESTAURATION COMMERCIALE

43. L'opération entraine un chevauchement d'activité des parties sur le seul segment de la restauration rapide à bas prix.

a) Points méthodologiques

Sur la prise en compte des franchisés dans l'analyse concurrentielle

44. L'Autorité et le Conseil d'Etat (26) ont rappelé que le pouvoir de marché d'un distributeur doit s'apprécier en tenant compte des magasins détenus en propre et de ceux exploités en réseau, quel que soit leur statut juridique, dès lors que leur politique commerciale n'est pas suffisamment autonome par rapport à la tête de réseau. Il convient donc de déterminer si les franchisés des réseaux Burger King et Quick doivent être rattachés aux activités des parties aux fins de l'analyse concurrentielle.

45. L'Autorité a notamment considéré que les critères suivants permettaient d'inférer l'absence d'autonomie des membres d'un réseau : (i) la possibilité de la tête de réseau de fixer des prix maximum à ses adhérents affectant la liberté de l'adhérent de fixer ses prix de manière indépendante, (ii) les obligations d'approvisionnement des adhérents auprès du groupement pour une part importante de leurs achats, (iii) l'obligation de respecter des clauses de préemption, de substitution et de préférence au profit du groupement en cas de cession de leur magasin en dehors du périmètre familial, (iv) l'obligation de participer à un certain nombre d'opérations promotionnelles par an, durant lesquelles les adhérents doivent mettre en vente les produits au prix indiqué sur les documents publicitaires, (v) l'obligation de référencer plus de 50 % des lignes de produits de la tête de réseau, et (vi) la durée plus ou moins longue des contrats.

46. Au cas d'espèce, l'analyse des contrats-types de franchise des réseaux concernés confirme que les franchisés doivent être intégrés au pouvoir de marché du groupe acquéreur. S'agissant des restaurants Quick, les contrats types, d'une durée comprise entre et ans imposent notamment aux franchisés le respect de la politique commerciale élaborée par Quick en matière de communication publicitaire, le respect de l'image de marque de l'enseigne, le respect des menus conçus par le franchiseur, une exclusivité d'approvisionnement de leurs achats et leur interdit de modifier leur point de vente sans l'accord de la tête de réseau. Lorsque le franchisé n'exploite pas le restaurant en location gérance, les contrats contiennent également des clauses de préemption, d'option d'achat et de promesse de vente au profit de la société France Quick en cas de cession de leur restaurant. S'agissant des restaurants Burger King, le contrat type, d'une durée de ans prévoit notamment le respect par les franchisés de la politique commerciale élaborée par BKF en matière de communication publicitaire, le respect de l'image de marque de l'enseigne, le respect des menus conçus par le franchiseur et un approvisionnement exclusif auprès de fournisseurs agréés par la tête de réseau. Le contrat contient également des clauses de préemption et de promesse de vente au profit de la société BKF en cas de cession de leur restaurant.

47. Il résulte de ce qui précède que les termes des différents contrats types de franchise des réseaux Burger King et Quick encadrent étroitement leur politique commerciale en dépit de la marge de manœuvre dont disposent les franchisés pour la détermination des prix. En l'absence d'autonomie commerciale suffisante l'analyse concurrentielle tiendra donc compte des franchisés des deux réseaux.

Sur le calcul des parts de marché

48. Au cas d'espèce, l'estimation des parts de marché des parties et des concurrents se heurtent à la difficulté pour les parties de recueillir les chiffres d'affaires réalisés par les établissements concurrents dans chaque zone, soit parce qu'il s'agit de magasins indépendants qui n'ont pas l'obligation de déposer leurs comptes annuels, soit parce qu'il s'agit de données non publiques.

49. Compte tenu de ces difficultés méthodologiques, les parts de marchés des parties et celles de leurs concurrents ont été calculées dans les zones locales sur la base du nombre de points de vente des principaux opérateurs présents dans la zone. Sur le marché général de la restauration rapide, compte tenu du caractère atomisé du marché, les concurrents actifs dans les zones n'ont pu être dénombrés de façon exhaustive. Seuls les principaux établissements ont été identifiés, de sorte que les parts de marché des parties sont surévaluées.

b) Au niveau national

50. La partie notifiante estime la part de la nouvelle entité à environ [0-5] % sur le marché global de la restauration commerciale en France et à [10-20] % sur le seul segment de la restauration rapide à bas prix.

51. Parmi les cinq grandes enseignes spécialisées dans la restauration rapide à l'anglo-saxonne (Quick, Burger King, Mc Donald's, KFC, Subway), la partie notifiante estime que la part de marché de la nouvelle entité est inférieure à 15 %. Au regard des données de chiffres d'affaires recueillies à l'occasion du test de marché, Mc Donald's est le leader du marché avec plus de [50-60 %] de part de marché. Le deuxième acteur est Quick ([10-20] %), suivi de KFC ([5-10] %), Subway ([0-5] %) et Burger King (0,5 %). A l'issue de l'opération, la part de marché cumulée des enseignes de la nouvelle entité sur ce segment s'élèvera à près de [10-20] %, avec un incrément limité de 0,5 %.

52. Il convient par ailleurs de relever que plusieurs enseignes également spécialisées dans la restauration rapide à l'anglo-saxonne ont pénétré le marché français ces dernières années (notamment 231 East Street, Burger King, Steak and shake et Chipotle). L'arrivée prochaine sur le même marché des enseignes américaines Shake Shack et Five Guys a également fait l'objet d'annonces publiques.

53. S'agissant des barrières à l'entrée, plusieurs répondants au test de marché ont néanmoins mis en avant trois difficultés rencontrées par les enseignes candidates à l'entrée sur le marché de la restauration rapide à bas prix et en particulier sur le segment de la restauration rapide " à l'anglo-saxonne " : la maitrise la sécuritaire sanitaire d'un réseau national ; l'obtention d'emplacements immobiliers ; le coût du budget publicitaire nécessaire pour obvier le déficit de notoriété vis-à-vis des enseignes les plus connues.

54. Les entrées récentes observées sur le marché montrent toutefois que ces difficultés ne sont pas dirimantes. Le phénomène de l'expansion des " food truck " atteste également d'un certain dynamisme du marché. Le nombre d'établissements de ces enseignes, compris entre 2 et 30 reste toutefois significativement inférieur à celui des principales enseignes.

55. En toute hypothèse, certains obstacles à l'entrée évoqués dans le cadre du test de marché, notamment liés à l'obtention d'emplacements adéquats, sont susceptibles de varier fortement selon les conditions locales observées dans les différentes zones de chalandises.

56. L'opération n'est pas susceptible de soulever des problèmes de concurrence sur le marché national de la restauration rapide pas plus que sur le segment de la restauration rapide " à l'anglo-saxonne ".

c) Au niveau local

57. L'opération entraine un chevauchement d'activité entre des restaurants aux enseignes de l'acquéreur (Burger King, Bert's) et à l'enseigne de la cible (Quick) dans 35 zones de chalandises délimitées à partir des restaurants Quick.

Sur le marché général de la restauration rapide à bas prix

58. Les activités des parties se chevauchent dans 35 zones de chalandise identifiées par la partie notifiante autour des restaurants à l'enseigne Quick dans les agglomérations de Calais (62), Liévin (62), Lille (59), Creil (60), Le Mans (72), Paray vieille poste (91), Puteaux (92), Saint-Denis (93), Rosny-sous-Bois (93), Paris (75), Créteil (94), Villeneuve-le-Roi (94) Reims (51), Troyes (10), Geispolsheim (67) et Ajaccio (20). L'appartenance de l'enseigne Bert's au marché général de la restauration rapide a été confirmé par le test de marché.

59. A partir de la méthode de calcul des parts de marché explicitée ci-dessus, les risques d'atteinte à la concurrence peuvent être écartés pour la totalité de ces zones dans lesquelles la part de marché de la nouvelle entité est inférieure à 40 %. Dans ces zones, la nouvelle entité fera toujours face à au moins cinq concurrents d'enseignes nationales. La présence de ces concurrents nationaux garantit en effet aux consommateurs l'accès à une offre alternative à celles de la nouvelle entité et constitue une contrainte concurrentielle significative sur cette dernière. En outre, dans ces zones sont actifs plusieurs établissements indépendants (boulangeries, sandwicheries, etc.). Cette diversité de l'offre est à même de garantir une concurrence locale suffisante.

Sur un éventuel segment de la restauration rapide à l'anglo-saxonne

60. Les activités des parties se chevauchent dans 29 zones de chalandise identifiées par la partie notifiante autour des restaurants à l'enseigne Quick dans les agglomérations de Calais (62), Liévin (62), Lille (59), Creil (60), Le Mans (72), Paray vieille poste (91), Puteaux (92), Saint-Denis (93), Rosny-sous-Bois (93), Paris (75), Créteil (94), Reims (51), Troyes (10), Geispolsheim (67) et Ajaccio (20).

Dans les zones dans lesquelles la part de marché des parties est inférieure à 40 %

61. En premier lieu, les risques d'atteinte à la concurrence peuvent être écartés dans 16 zones dans lesquelles la nouvelle entité dispose de moins de 40 % de part de marché et continuera de faire face aux enseignes Mc Donald's et Subway, ainsi que l'enseigne KFC dans 11 zones.

Dans les zones dans lesquelles la part de marché des parties est comprise entre 40 % et 50 %

62. En deuxième lieu, la structure de la concurrence dans les 12 zones dans lesquelles les parties détiennent une part de marché comprise entre 40 % et 50 % est exposée dans le tableau ci-après.

63. Dans l'ensemble de ces zones l'instruction a toutefois révélé la présence régulière de " food trucks " ou de restaurants de " hamburgers ", d'enseignes indépendantes telles que 231 East Street, ainsi que celle, en bordure immédiate des zones délimitées selon les temps de trajet effectués, d'un ou plusieurs restaurants Mc Donald's, KFC ou Subway dont la proximité géographique est suffisante pour les voir intégrer à l'analyse concurrentielle.

64. Il résulte de ce qui précède que l'opération n'est pas susceptible de porter atteinte à la concurrence dans les zones dans lesquelles la part de marché des parties est comprise entre 40 % et 50 %.

Dans la zone autour du restaurant Quick d'Ajaccio dans laquelle la part de marché des parties est de 100 %

65. Dans la zone correspondant à un trajet de 30 minutes en voiture autour du restaurant Quick d'Ajaccio, seul un établissement à l'enseigne Burger King, ouvert le 19 octobre 2015, propose une offre alternative spécialisée " à l'anglo-saxonne ". L'entrée de Burger King sur le marché ajaccien a ainsi permis de stimuler la concurrence dans une zone jusqu'à présent largement dominée par Quick. En effet aucun établissement des enseignes Mc Donald's, KFC et Subway n'est présent dans cette zone. Seul un unique établissement indépendant spécialisé dans les " hamburgers ", " Le Roi Burger " est actif à Ajaccio. La rareté de l'offre disponible, sans équivalent sur le reste du territoire national, et nonobstant l'entrée récente de l'enseigne Burger King, atteste donc de conditions de marché peu favorables à l'émergence d'alternatives concurrentielles à court terme. L'opération rétablit donc une situation de quasi-monopole sur un éventuel segment ajaccien de la restauration rapide à l'anglo-saxonne en supprimant le principal concurrent de Quick récemment implanté dans la zone.

66. Ce constat reste inchangé même en considérant les effets de l'opération sur le marché global de la restauration rapide à Ajaccio, en l'absence d'autres enseignes nationales concurrentes à l'exception d'un unique point de vente Paul.

67. La concentration est donc susceptible de porter atteinte à la concurrence dans la zone d'Ajaccio. Toutefois la partie notifiante a proposé un engagement, décrit ci-dessous, de nature à restaurer dans cette zone une situation concurrentielle satisfaisante.

3. LE MARCHE DE LA RESTAURATION AUTOROUTIERE

68. L'opération entraine un chevauchement d'activité des parties sur le marché français de la restauration rapide autoroutière. L'acquéreur est actif à travers trois établissements à l'enseigne " Burger King " exploités en sous-franchise par la société Autogrill (aire Chalon Sud A4 (51), aire de Beaune Merceuil A6 (21), aire de Taponas A4 (69)) et quatre établissements à l'enseigne " Bert's " exploités en franchise (aire de Bourg Jasseron A40 (01), aire de Graincourt A2 (62), aire de Saverne A4 (67), aire d'Ecot A36 (25)). La cible Quick est également active à travers 9 établissements exploités en franchise (aire de Peronne A1 (80), aire de Sargé-les-le-Mans A11 (72), aire de Fabrègues A9 (34), aire de Saint-Albin A6 (71), aire de Sénéguier A7 (13), aire de Mornas-village A7 (84), aire de Frontonnais A62 (31), aire des Portes d'Angers A11 (49), aire de Toul-Dommartin A31 (54)).

69. La partie notifiante estime la part de marché de la nouvelle entité sur le marché de restauration routière à moins de [0-5] % quelque que soit le segment retenu.

70. L'opération n'est donc pas susceptible de porter atteinte à la concurrence sur le marché de la restauration autoroutière.

B. EFFETS VERTICAUX

71. Le groupe Bertrand, via la société OBDH, est actif que les marchés de la distribution des boissons auprès de la RHF. Dès lors que les restaurants Burger King et Quick s'approvisionnent auprès de distributeurs de boissons en gros, il convient d'examiner les effets verticaux de l'opération.

72. La partie notifiante fait valoir que cette activité s'adresse exclusivement aux établissements de restauration traditionnelle avec service à table situés en Ile de France. Elle fait remarquer que les formats et conditionnements utilisés pour la distribution de boisson aux restaurants traditionnels avec service à table ne sont pas les mêmes que ceux en usage pour la distribution à la restauration rapide, de sorte que les établissements de restauration rapide ne s'adressent pas à des distributeurs tels que la société OBDH. La partie notifiante fait également valoir qu'elle ne distribue aucun produit à des établissements relevant d'enseignes de restauration rapide ni, a fortiori, à des restaurants à l'enseigne Quick ou Burger King. Selon ses estimations la position de la nouvelle entité serait de [0-5] % sur le marché français de la distribution de boissons à la RHD et de moins de 10 % pour la seule région de l'Ile de France.

73. La pratique décisionnelle des autorités de la concurrence considère en principe qu'un risque d'effet vertical peut être écarté dès lors que la part de l'entreprise issue de l'opération sur les marchés concernés ne dépasse pas 30 %.

74. Compte tenu de ces différents éléments, la présente opération n'est pas susceptible de porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets verticaux.

C. LES ENGAGEMENTS PROPOSÉS

75. La partie notifiante a présenté, le 8 décembre 2015, des engagements visant à remédier aux effets anticoncurrentiels horizontaux de l'opération sur le marché de la restauration rapide à l'anglo-saxonne dans une zone locale accessible en trente minutes de temps de trajet autour du restaurant à l'enseigne Quick d'Ajaccio. Le texte de ces engagements, joint en annexe, fait partie intégrante de la présente décision.

76. Les engagements proposés portent sur l'établissement à l'enseigne Quick situé Boulevard Louis Campi, lieu-dit " Strette ", La Rocade, à Ajaccio (2A) pour lequel le groupe Bertrand et Burger King France s'engagent à mettre fin au contrat de franchise afin que le franchisé concerné soit en mesure de changer d'enseigne en trouvant une solution de remplacement au contrat actuellement en vigueur avec Quick lui permettant de poursuivre son activité de restauration commerciale rapide à l'anglo-saxonne de manière totalement indépendante du Groupe Bertrand, de BKF et de ses filiales.

77. Burger King France s'engage également à se désister sans contrepartie ni pénalité vis-à-vis du Franchisé concerné de tout droit dont elle bénéficierait sur la base d'une clause de non-concurrence ou de toute autre clause contractuelle en vertu du contrat de franchise précité ou de tout autre contrat et qui aurait pour effet d'empêcher le franchisé concerné de poursuivre son activité de restauration commerciale rapide à l'anglo-saxonne de manière totalement indépendante du Groupe Bertrand, de BKF et de ses Filiales. [confidentiel].

78. Cet engagement est pris pour une durée de dix ans, pendant laquelle le groupe Bertrand ne pourra acquérir ou franchiser le magasin concerné ni acquérir sur celui-ci une influence directe ou indirecte.

D. L'APPRECIATION DES MESURES PROPOSEES

79. S'agissant d'une concentration horizontale, l'Autorité recherche en priorité des mesures correctives structurelles, qui visent à garantir des structures de marché compétitives par des cessions d'activités à un acquéreur approprié, susceptible d'exercer une concurrence réelle, ou l'élimination de liens capitalistiques entre des concurrents (27). De plus, l'Autorité veille à ce que les remèdes soient proportionnés. Par conséquent, les mesures adoptées doivent être de nature à remédier effectivement aux atteintes à la concurrence identifiées, en imposant aux entreprises une charge strictement nécessaire pour maintenir ou rétablir une concurrence suffisante.

80. En ce sens, les engagements proposés par la partie notifiante permettent d'éliminer les problèmes concurrentiels engendrés par l'opération. Le transfert de l'exploitation de l'établissement Quick d'Ajaccio vers un autre franchiseur actifs sur le marché de la restauration rapide " à l'anglo-saxonne " supprime tout chevauchement d'activités dans cette zone et met fin à la situation de quasi-monopole en restaurant la situation de duopole antérieure à l'opération. [confidentiel].

81. Cette résiliation doit en toute hypothèse intervenir dans un délai suffisamment rapide pour rétablir une concurrence suffisante sur les marchés concernés. Tel est le cas en l'espèce, Burger King France s'engageant à ce que le contrat concerné ne soit pas renouvelé à son échéance qui interviendra au [confidentiel].

82. Par ailleurs, l'efficacité des remèdes dépend de la résiliation du contrat de franchise et de la recherche de solutions de remplacement qui permettront au restaurant concerné de poursuivre son activité de manière indépendante. Pour rétablir des conditions de concurrence suffisante, le ou les repreneurs devront être capables de concurrencer le groupe Bertrand de manière effective sur les marchés concernés. Ceci suppose que ces derniers présentent toutes les garanties d'indépendance, tant juridique que commerciale, vis-à-vis du groupe Bertrand. Le repreneur potentiel devra donc être un acteur de la restauration rapide à l'anglo-saxonne indépendant du groupe Bertrand capable d'assurer l'exploitation pérenne du restaurant dont il est mis fin au contrat de franchise.

83. Enfin, le transfert du restaurant vers un autre franchiseur ne doit pas être susceptible de créer de nouvelles atteintes à la concurrence sur la zone concernée en créant ou renforçant la position dominante d'un concurrent dans certaines zones après la réalisation des engagements.

84. En conséquence, l'Autorité considère que les engagements proposés par la partie notifiante sont suffisants pour éliminer les atteintes à la concurrence résultant de l'opération.

DECIDE

Article unique : L'opération notifiée sous le numéro 15-175 est autorisée sous réserve des engagements annexés et décrits ci-dessus et annexés à la présente décision.

Notes :

1 La CDC est un établissement public, régi par les articles L. 518-2 et suivants du Code monétaire et financier, qui remplit des missions d'intérêt général en appui des politiques publiques conduites par l'Etat et les collectivités locales (dépôts sur les livrets d'épargne qui financent le logement social locatif et le renouvellement urbain, consignations et dépôts réglementés, retraites et trésorerie de la Sécurité sociale) et qui exerce des activités ouvertes à la concurrence.

2 Rectification d'erreur matérielle

3 Décision de la Commission COMP/M.2115 du 28 septembre 2000 - Carrefour/GB.

4 Décisions de l'Autorité de la concurrence n° 10-DCC-158 du 22 novembre 2010 relative à la prise de contrôle exclusif de neuf sociétés du groupe Van de Woestyne par le groupe Les Maîtres Laitiers du Cotentin, n° 15-DCC-80 du 26 juin 2015 relative à la prise de contrôle par Pomona SA de huit adhérents du réseau Relais d'Or Miko et de la société Lux Frais et n° 15-DCC-141 du 27 octobre 2015 relative à la prise de contrôle exclusif de Davigel par Bain Capital.

5 Décision de l'Autorité de la concurrence n° 15-DCC-80 du 26 juin 2015 relative à la prise de contrôle par Pomona SA de huit adhérents du réseau Relais d'Or Miko et de la société Lux Frais.

6 Décision de la Commission européenne COMP/M.1221 du 3 février 1999 - Rewe / Meinl.

7 Décision de la Commission européenne COM/M.1684 du 25 janvier 2000 - Carrefour / Promodès.

8 Décisions de l'Autorité de la concurrence n° 13-DCC-90 du 11 juillet 2013 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Monoprix par la société Casino Guichard-Perrachon ; décision n° 14-DCC-173 du 21 novembre 2014 relative à la prise de contrôle de la société Dia France SAS par la société Carrefour France SAS ; décision de l'Autorité de la concurrence n° 15-DCC-80 du 26 juin 2015, précitée.

9 Décisions de la Commission européenne COMP/M.1802 du 08 mars 2000 - Unilever/Amora Maille et COMP/M.1990 du 28 septembre 2000 - Unilever/Bestfoods ; décisions de l'Autorité n° 10-DCC-158 du 22 novembre 2010 et n° 15-DCC-80 du 26 juin 2015, précitées.

10 Lettre du ministre de l'économie C2006-158 du 28 mars 2007, au conseil de la société Maîtres Laitiers du Cotentin, relative à une concentration dans le secteur des produits laitiers et de matières premières pour boulangerie-pâtisserie à destination des professionnels.

11 Décision de l'Autorité de la concurrence n° 10-DCC-158 du 22 novembre 2010, précitée.

12 Décision de l'Autorité de la concurrence n° 15-DCC-80 du 26 juin 2015, précitée.

13 Voir par exemple la décision de l'Autorité de la concurrence n° 09-D-50 du 1er octobre 2009 relative à l'acquisition du groupe Team Ouest par la société France Frais.

14 Voir notamment les décisions de l'Autorité de la concurrence n° 10-DCC-94 du 16 août 2010 relative à l'acquisition du contrôle conjoint du Groupe Dupont par Abenex IV et Monsieur Pascal Dupont et n° 11-DCC-137 du 15 septembre 2011 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Lenôtre SA par la société Sodexo SA ; n° 15-DCC-47 du 5 mai 2015 relative à la prise de contrôle exclusif de la société GPA Courtepaille par la société ICG ainsi que les décisions de la Commission européenne n° COMP/M.4220 - Food Service Project/Tele Pizza du 6 juin 2006 et n° COMP/M.2490 - TPG Advisors/Goldman Sachs/Bain Capital Investors/Burger King du 11 octobre 2002.

15 Décision de la Commission européenne n° COMP/M.6895 3G Special situations fnd III/Berkshire Hathaway/ H. J. Heinz company.

16 Xerfi, La restauration rapide, juin 2015.

17 Decision COMP/M.2490 précitée.

18 Etude Gira conseil Restauration 2014 ainsi que l'étude Xerfi Restauration rapide 2015 précitée.

19 Voir la décision de l'Autorité de la concurrence n° 09-DCC-63 du 6 novembre 2009 relative à la prise de contrôle exclusif de la société ROC-France par la société Elliance ainsi que la décision de la Commission européenne n° IV/M126 - Accor/Wagons-Lits du 28 avril 1992.

20 Voir les décisions n° 09-DCC-63 et IV/M126 précitées.

21 Voir notamment la décision de la Commission européenne n° COMP/M.2115 Carrefour/GB du 28 septembre 2000,et les décisions de l'Autorité de la concurrence n° 10-DCC-158 du 22 novembre 2010, précitée ; n° 12-DCC-11 du 6 février 2012 relative à l'acquisition de la société des Etablissements Jean Didier et Cie par la société Pro-à-Pro Distribution SA et la décision n° 14-DCC-01 du 2 janvier 2014, précitée. ; n° 15-DCC-80 du 26 juin 2015 relative à la prise de contrôle par Pomona SA de huit adhérents du réseau Relais d'Or Miko et de la société Lux Frais.

22 Voir notamment la décision de l'Autorité de la concurrence n° 15-DCC-80 du 26 juin 2015 précitée.

23 Décision de l'Autorité de la concurrence n° 10-DCC-158 du 22 novembre 2010 et n° 15-DCC-80 du 26 juin 2015 précitées ; lettre du ministre de l'économie C2008-119 du 4 décembre 2008, au Directeur de la société France Frais, relative à une concentration dans le secteur de la distribution de produits alimentaires.

24 Voir les décisions n° 10-DCC-94 et n° 11-DCC-137 précitées.

25 Voir notamment les décisions n° 13-DCC-90 du 11 juillet 2013 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Monoprix par la société Casino Guichard-Perrachon ; n° 14-DCC-173 du 21 novembre 2014 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Dia France SAS par la société Carrefour France SAS ; n° 14-DCC-196 du 24 décembre 2014 relative à la prise de contrôle conjoint d'un magasin de commerce de détail à dominante alimentaire par la société Blanc Mesnil Distribution aux côtés de l'Association des Centres Distributeurs E.Leclerc.

26 Voir notamment la décision de l'Autorité de la concurrence n° 10-DCC-01 du 12 janvier 2010 relative à la prise de contrôle exclusif par Mr Bricolage de la société Passerelle et la décision du Conseil d'Etat du 23 décembre 2010 Mr Bricolage N° 337533 et 338594.

27 Lignes directrices de l'Autorité de la concurrence relatives au contrôle des concentrations, précitées, § 575.