CA Paris, Pôle 5 ch. 1, 13 janvier 2016, n° 13-15968
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Pixid (SAS)
Défendeur :
Rapporteure de l'Autorité de la concurrence
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Fusaro
Le 1er juillet 2013, le Juge des libertés et de la détention de Paris, a rendu, en application des dispositions de l'article L. 450-4 du Code de commerce une ordonnance de visite et de saisie dans les locaux des sociétés suivantes :
Manpower France Holding et Manpower France
Tapfin (nom commercial Alisia)
Adecco Groupe France et Adjust HR sise à Villeurbanne - 69100
Adecco Holding France sise à Villeurbanne - 69100
Adecco France sise à Villeurbanne - 69100
Adecco Holding France, Adecco France et Adjust FR sises à Paris 75008
Randstad France
Pixid sise à Courbevoie 92400
Cette ordonnance faisait suite à une requête présentée à l'occasion de l'enquête des services de l'Autorité de la concurrence aux fins d'établir si lesdites entreprises se livreraient à des pratiques prohibées par les articles L. 420-1 1°, 2°, 3° du Code de commerce et 101-1 a) et b) du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE).
A l'appui de cette requête était jointe une liste de 32 pièces ou documents en annexe.
Il était fait état d'informations selon lesquelles les entreprises de travail temporaires Manpower, Adecco et Randstad utiliseraient leurs filiales respectives, Alisia (groupe Manpower), Adjust HR (groupe Adecco) RSR (groupe Randstad) et commune, Pixid (société commune aux trois groupes), toutes spécialisées dans la gestion externalisée du travail temporaire, pour acquérir des informations commerciales sensibles sur leurs concurrents, de nature à orienter leurs stratégies commerciales pour faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse , et ce en violation des dispositions L. 420-1 2° du Code du commerce et de l'article 101-1 a) du TFUE.
L'Autorité de la concurrence indiquait que le marché de l'intérim était dominé par trois groupes à savoir Adecco, Manpower et Randstad et qu'il apparaissait que ces trois grands groupes avaient emporté en 2011, 58 % des contrats de missions d'intérim.
Les trois groupes Manpower, Adecco et Randstad avaient respectivement crée les filiales Alisia, Adjust HR, RSR, celles-ci proposant divers services aux entreprises utilisatrices allant de la planification de leurs besoins en intérimaires, au suivi de leurs accords-cadres conclus avec les entreprises de travail temporaire, étant précisé que leurs filiales ne disposeraient d'aucune autonomie commerciale vis à vis de leurs sociétés mères.
S'agissant de Manpower France Holding, elle détiendrait 99 % du capital d'Alisia, le 1 % restant étant détenu par la société Supplay, elle-même filiale de Manpower France Holding, laquelle est aussi la société mère de Manpower Business Solutions. Par ailleurs, le gérant de la société Alisia cumule également les fonctions de directeur administratif et financier de Manpower France et dispose de fonctions managériales importantes au sein de la société Manpower Group et Manpower Business Solutions. D'autres cadres dirigeants cumulant aussi plusieurs fonctions dans ces trois sociétés.
De surcroît, la société Alisia aurait enregistré un résultat négatif de 2004 à 2011 la plaçant dans une situation de dépendance vis à vis de sa société mère.
Il s'en déduirait que la société Alisia serait en état de dépendance capitalistique, managériale, informatique et financière à l'égard de sa société mère Manpower France Holding et que privée de toute autonomie commerciale, elle formerait avec celle-ci et ses sociétés soeurs Manpower France et Manpower Business Solutions, une unité économique.
Le schéma serait similaire concernant Randstad France détenant 100 % du capital de Groupe Randstad France lequel contrôle l'intégralité du capital de Randstad Sourcerigh (RSR) et 97 % de Randstad, les liens entre la société mère et les sociétés soeurs seraient établis par le même représentant aux assemblées générales, par une adresse commune sise à Saint Denis (93) et le même responsable légal des sites internet des trois sociétés.
Il apparaîtrait que RSR, compte tenu de sa dépendance vis-à-vis de sa société mère Groupe Randstad France, serait dépourvue d'autonomie capitalistique, managériale, informatique et financière et formerait avec sa société mère et sa société s'ur Randstad, une unité économique.
Enfin la société Adjust HR serait détenue à 100 % par Adecco Holding France qui contrôle l'intégralité du capital d' Adecco et d'Adecco Groupe France. Elles auraient le même gérant et que seraient domiciliées à proximité géographie immédiate à Villeurbanne (69).
De la même façon Adjust HR aurait enregistré des résultats financiers négatifs pendant plusieurs années et l'accumulation de ces éléments permettrait d'en déduire que cette société est en état de dépendance capitalistique, managériale, informatique et financière vis-à-vis de sa société mère Adecco Holding France, serait dépourvue de toute activité commerciale et formerait une unité économique avec sa société mère et ses sociétés soeurs Adecco France et Adecco Groupe France.
La même déduction serait faite en ce qui concerne Pixid , filiale commune des entreprises Adecco, Manpower France et Randstad qui serait aussi en état de dépendance vis-à-vis des sociétés dont elle émane, compte tenu du fait d'une part que les trois sociétés sus-mentionnées détiendraient conjointement le capital de Pixid à hauteur de 33 % chacune et d'autre part que les gérants de la société Pixid seraient ses trois actionnaires représentés par leurs présidents respectifs à savoir M. Alain X pour Adecco France, M. François Y pour Randstad et Mme Françoise Z pour Manpower France, ses gérants prenant à l'unanimité les décisions stratégiques (plan annuel, budget et désignation du personnel d'encadrement notamment). Il aurait été constaté que Pixid aurait affiché des résultats financiers de 2004 à 2011 et que de 2009 à 2011, leurs trois sociétés-mères auraient mis en place des dispositifs permettant d'assurer le financement courant de l'activité de leur filiale Pixid, cet état de fait laissant cette société dans un état de dépendance capitalistique, commerciale et financière à l'égard de ses sociétés mères alors même que la Commission européenne avait autorisé sa création sous réserve qu'elle conserve son autonomie, et qu'elle sous-entendait dans sa décision du 5 novembre 2004, que la dépendance de Pixid pouvait favoriser une coordination des entreprises de travail temporaires dans le marché du travail temporaire.
Il s'en déduirait que l'absence d'autonomie des filiales Alisia, Adjust HR, RSR et Pixid à l'égard de leurs sociétés mères serait de nature à permettre la circulation d'informations stratégiques entre sociétés mère et fille ; par ailleurs que les services proposés par ces filiales aux entreprises utilisatrices nécessiteraient, pour être accomplis, un accès à des données commerciales provenant des entreprises de travail temporaires concurrentes dont certaines seraient issues d'une négociation entre ces dernières et les entreprises utilisatrices.
Ainsi les filiales sus-mentionnées proposeraient des services d'externalisation du processus de recrutement. A titre d'exemple, la société Alisia annoncerait sur son site internet qu'elle serait " un point de contact unique pour tous les demandeurs et toutes les agences d'intérims référencés par les entreprises utilisatrices ; qu'elle gère pour celles-ci tout ou partie du processus de planification des besoins (...) interface avec les agences d'intérim (...). "
Les filiales offriraient également des services visant à externaliser la gestion de l'intérim, ces services consistant d'une part à contrôler la bonne exécution des accords-cadres signés entre les entreprises utilisatrices et les entreprises de travail temporaires (ETT) ainsi que le proposeraient Adjust HR et RSR et d'autre part recouvriraient le suivi des contrats de travail et des factures émises par les agences d'intérim (services proposés par Adjust HR, RSR et Alisia) et enfin elles offriraient aussi des prestations d'analyse et d'optimisation du recours aux intérimaires, cette prestation étant également proposée par Pixid qui comme les filiales utiliserait différents instruments dont le " reporting ", " des réunions de suivi hebdomadaires, statistiques sur le nombre d'intérimaires, missions (...) ".
Il s'en déduirait que la nature même des services rendus par les filiales sus-mentionnées permettraient ainsi aux entreprises de travail temporaires qui les contrôlent d'accéder à de nombreuses données sensibles telles que le nombres d'intérimaires employé par chaque entreprise utilisatrice, la répartition d'intérimaires par entreprise de travail temporaire concurrente... ou encore les remises en fin d'année qui peuvent être négociées dans les accords-cadres ; que ces données commerciales pourraient être utilisées par les entreprises de travail temporaires pour coordonner leurs offres commerciales. A titre d'illustration, l'analyse de l'échantillon de factures communiquées à l'Autorité de la concurrence par les entreprises utilisatrices a révélé dans plusieurs cas une similitude des coefficients multiplicateurs et/ou des prix unitaires appliqués par les ETT de la même catégorie professionnelle (factures émanant de Manpower France, Randstad, Adecco France notamment).
Pour l'Autorité de la concurrence, ces faits pourraient constituer les premiers éléments d'un faisceau d'indices laissant présumer la mise en place par les ETT concurrentes de mécanismes permettant d'échanger, indirectement par leurs filiales respectives, des informations commercialement sensibles ayant pour finalité de diminuer l'incertitude stratégique sur le marché et faciliter ainsi la coordination entre concurrents dans le but de préserver leurs marges, en violation des dispositions de l'article L. 420-1 2° du Code de commerce.
Cette présomption d'entente illicite paraît d'autant plus grave que le Conseil de la concurrence devenu Autorité de la concurrence a sanctionné le 2 février 2009 les trois entreprises de travail temporaires sus-mentionnées pour s'être concertées afin de coordonner leur politique commerciale vis à vis de leurs clients " grands comptes " et que la portée de ces présomptions pourrait affecter également le commerce entre Etats membres et ainsi relever de l'application de l'article 101 a) TFUE.
Dans ces conditions le recours aux pouvoirs de l'article L. 450-4 du Code de commerce constituerait le seul moyen d'atteindre l'objectif recherché.
Le juge des libertés et de la détention de Paris autorisait Madame la Rapporteure générale de l'Autorité de la concurrence à faire procéder en application des dispositions sus-visées à des opérations de visites et de saisies dans les locaux suivants :
Manpower France Holding et Manpower France ainsi que les sociétés du même groupe sises à Nanterre (92)
Tapfin (nom commercial Alisia) sise à Paris 13e
Adecco Groupe France et Adjust HR sises à Villeurbanne (69)
Adecco Holding France sise à Villeurbanne (69)
Adecco France sise à Villeurbanne (69)
Adecco Holding France, Adecco France et Adjust HR sises <adresse>.
Randstad France et les sociétés du même groupe sises à Saint Denis (93)
Pixid sise à Courbevoie (92).
Il a délivré une commission rogatoire aux juges des libertés et de la détention de Nanterre, Bobigny et Lyon.
Les opérations de visites et de saisies ont été effectuées simultanément le 10 et le 11 juillet 2013.
Par déclarations d'appel et de recours en date du 19 juillet 2013 la société Pixid a demandé l'annulation de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Paris et celle du juge des libertés et de la détention de Nanterre rendue sur commission rogatoire ainsi que l'annulation des opérations de visite et de saisie autorisées dans les locaux et dépendances susceptibles d'être occupés par la société la société Pixid sise <adresse>.
L'affaire a été appelée à l'audience du 15 janvier 2014 à 9 heures, renvoyée au 2 juillet 2014, puis renvoyée de nouveau 3 décembre 2014, puis mise en délibéré mais n'a pas été rendue.
Une réouverture des débats a été fixée le 4 novembre 2015 et mise en délibéré pour être rendue le 13 janvier 2016.
Par conclusions récapitulatives et en réponse, déposées au greffe le 19 novembre 2014, la société Pixid demandait de constater l'irrégularité de l'ordonnance rendue le 1er juillet 2013 par le Juge des libertés et de la détention de Paris et par voie de conséquence celle du 3 juillet 2013 rendu par le Juge des libertés et de la détention de Nanterre et leur annulation, déclarer irrégulière les opérations de visite et de saisie en date des 10 et 11 juillet 2013 et menées dans les locaux sus-mentionnés.
I) Sur l'atteinte aux droits de la défense de Pixid
Selon la société requérante, dès le commencement de l'opération de visite et de saisie de la société Pixid, il leur aurait été indiqué de ne pas recourir au conseil de plus d'un avocat par équipe et que de ce fait, les rapporteurs de l'Autorité de la concurrence ont outrepassé leurs pouvoirs tels qu'ils découlent de l'article L. 450-1 du Code de commerce et porté atteinte aux droits de la défense de la défenderesse.
Cette injonction faite à la société Pixid de ne pas laisser plus d'un avocat accompagner chaque équipe de travail aurait ajouté à l'article L. 450-4 du Code de commerce, une condition que celui-ci ne prévoit pas et porté atteinte au principe de la libre défense.
La société requérante demande en conséquence l'annulation des opérations de visite et de contrôle réalisées les 10 et 11 juillet 2013 au siège de la société Pixid à Courbevoie (92).
L'Autorité de la concurrence fait valoir que le rapport de l'officier de police judiciaire adressé au juge des libertés et de la détention le 15 juillet 2013 que dès 11h15, soit à peine 1h45 après le début des opérations, un conseil de la société Pixid s'est présenté et a assisté aux opérations de visite et de saisie alors que les opérations avaient à peine commencé. A 12h25 puis 13h15 deux autres avocats de la société Pixid se sont présentés et ont participé à l'ensemble des opérations jusqu'à leur terme. En tout état de cause, aucun avocat n'a été empêché de pénétrer dans les locaux.
La requérante reproche en réalité aux rapporteurs l'organisation qu'ils essayaient de mettre en place et notamment le fait qu'ils ont indiqué au premier avocat qu'un seul conseil pouvait accompagner chaque équipe de visite. Compte tenu de l'exiguïté des locaux visités il était difficile de permettre à plus d'une personne supplémentaire de se trouver au même moment dans le même bureau sans risque de ralentir considérablement la progression des opérations.
Enfin, bien qu'ayant constitué deux équipes de fouille, l'Autorité de la concurrence ne s'est cependant nullement opposée à la présence d'un troisième avocat puisque " l'entreprise a pu faire intervenir trois avocats " comme le reconnaît Pixid elle-même dans ses conclusions.
Dès lors il apparaît que l'organisation des investigations mise en place dans les locaux de Pixid est en totale conformité avec les dispositions de l'article L. 450-4 du Code de commerce.
II) Sur la saisie irrégulière de certains documents contenus sur des supports d'information
- Les règles applicables à la saisie de documents
- Les règles applicables au secret professionnel protégeant la correspondance avocat/client
- La saisie irrégulière des documents couverts par la confidentialité de la correspondance avocat/client et la restitution des fichiers de messageries dans leur entier
- Sur l'atteinte portée aux droits de la société Pixid par l'absence de mesure tendant à protéger le secret professionnel et les droits de la défense
Selon la société Pixid, les textes applicables sont les articles L. 450-4 du Code de commerce et 56 alinéa 4 du Code de procédure pénale lequel dispose que l'officier de police judiciaire a l'obligation de provoquer préalablement toutes mesures utiles pour que soit assuré le respect du secret professionnel et des droits de la défense.
L'article 59 du Code procédure pénale ajoute en son second alinéa que " les formalités mentionnées aux articles 56, 56-1 et 57 et au présent article sont prescrites à peine de nullité ".
La société requérante cite notamment les dispositions de l'article 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 sur la protection de la correspondance échangée entre l'avocat et son client.
Ce principe a été consacré par de multiples arrêts de la Cour de cassation, son approche sur ce point étant similaire à celle de la Cour de justice de l'Union européenne.
La société requérante soutient qu'il en résulte que la violation des droits de Pixid a été pleinement consommée dès la saisine des documents couverts par la confidentialité de la correspondance avocat-client contenus dans les données informatiques saisis par les rapporteurs de l'Autorité de la concurrence.
Dans ces conditions la société Pixid demande l'annulation de l'ensemble des saisies intervenues lors de ladite opération concernant les documents couverts par la confidentialité de la correspondance avocat-client, aussi bien à des fins de conseils qu'en lien avec l'exercice des droits de la défense en joignant un tableau intitulé " Pixid - Legal privilege- boîte mail E. 2 ".
Il en ressort que la nullité de la saisie des éléments contenus dans ce messageries électroniques au motif qu'ils sont couverts par la confidentialité de la correspondance avocat- client, doit conduire à la remise de ce fichier dans son entier, car indivisible, par parallélisme des formes.
La saisie de ces courriels étant réputée n'être jamais intervenue et ceux-ci étant contenus dans un fichier de messagerie alors que selon la jurisprudence, ils ne peuvent pas faire l'objet d'une restitution isolée, même postérieure, cette dernière étant insuffisante à rétablir la demanderesse dans ses droits puisque le fichier en question n'aurait jamais dû en l'état les locaux de la société Pixid.
Il est donc demandé d'ordonner la restitution, dans son entier, du fichier de messagerie électronique intitulé " outlook.ost " saisi à partir de l'ordinateur de M. 1 et qui contient des courriels couverts par la confidentialité de la correspondance échangée entre M. 2 et son avocat.
En l'occurrence, l'atteinte aux droits de la défense est d'autant plus manifeste dans le cas de la société Pixid que le conseil de cette dernière avait alerté les rapporteurs chargés d'effectuer les investigations informatiques de la présence certaine de documents couverts par la confidentialité de la correspondance échangée entre M. 2 et son avocat, au motif que la saisie de ce fichier a porté atteinte aux droits de la défense.
La société requérante indique joindre une liste des références des courriels contenus dans les fichiers de messageries électroniques saisis au cours de l'opération de visite et de saisie en question et qui sont couverts par la confidentialité de la correspondance avocat-client. Sur ces fichiers, il apparaît que 77 courriels ont été échangés entre M. 2, directeur de Pixid et un avocat, dont le dernier envoyé par l'un des conseils de la société au moment même où débutait ladite opération.
Il est reproché aux rapporteurs de l'Autorité de la concurrence ainsi qu'à l'officier de police judiciaire de ne pas avoir provoqué toutes mesures utiles pour que soit assuré le respect du secret professionnel et des droits de la défense en ne prenant pas contact notamment avec le juge des libertés et ne pas avoir à l'instar de la pratique de la Commission européenne, effectué le tri sur place en pratiquant une saisie ciblée ou procédé à la pratique des scellés fermés provisoires ou bien s'être inspirés des pratiques de l'article 56-1 du Code de procédure pénale (perquisitions dans un cabinet ou au domicile d'un avocat) où les documents saisis sont scellés et soumis ensuite au juge des libertés et de la détention qui statue sur la contestation.
La société requérante demande à nouveau l'annulation, dans son entier, du fichier de messagerie électronique intitulé 'outlook.ost' saisi à partir de l'ordinateur de M. 1 et qui contient des courriels couverts par la confidentialité de la correspondance échangée entre M. 2 et son avocat, au motif que la saisie de ce fichier a porté atteinte aux droits de la défense.
L'Autorité de la concurrence, en premier lieu, précise que la saisie alléguée de messages potentiellement couverts par le secret de la correspondance avocat/client n'est que la résultante de la présence de tels documents dans le fichier de messagerie électronique de M. 2 saisi globalement parce qu'il contenait avant tout des documents entrant dans le champ des investigations, ce que les rapporteurs ont dûment constaté et qui n'est nullement contesté par la requérante.
Dès lors, la saisie de correspondances couvertes par la confidentialité n'est qu'accidentelle et ne peut invalider la saisie du reste des documents appréhendés simultanément.
De surcroît, la jurisprudence de la Cour de cassation confirme constamment la saisie globale de messagerie électronique.
L'annulation des seules pièces bénéficiant de la protection prévue par l'article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971 suffit à rétablir l'entreprise dans ses droits car elle offre à la requérante une double garantie tenant à l'élimination physique des documents protégés contenus dans les fichiers placés sous scellés en sus du caractère inutilisable de toute copie détenue, prononcé par le juge.
En l'occurrence, Pixid fournit une liste à l'appui de sa demande de 77 documents qu'elle estime couvertes par l'article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971. Or, l'Autorité nie que ces messages se rattachent à la protection invoquée et affirme que cette protection n'est ni générale, ni absolue comme l'aurait précisé un arrêt de la CJCE du 18 mai 1982 n° 155-79.
A titre d'exemple ne devraient pas être regardées comme entrant dans le champ de la protection de la loi :
des correspondances permettant d'établir que l'avocat peut être regardé comme auteur, co-auteur ou complice des pratiques répréhensibles ;
des correspondances entre membres de l'entreprise se faisant écho, plus ou moins fidèles de consultations juridiques ;
des correspondances qui ne concernent pas les droits de la défense du client ;
des correspondances qui ne concernent pas les droits de la défense du client ;
des correspondances qui ne sont pas liées à un dossier.
Les correspondances produites par Pixid dans son annexe 9 sont sans aucun lien avec l'enquête en cours, ne relèvent même pas du droit de la concurrence et n'ont ainsi pas trait à l'exercice des droits de la défense.
Cependant, il appartiendra au Premier Président de rechercher si ces pièces bénéficient réellement de la protection des correspondances avocat/client et des droit de la défense, et le cas échéant d'en prononcer l'annulation.
En deuxième lieu, l'Autorité de la concurrence relève que si le conseil de l'entreprise a effectivement saisi l'officier de police judiciaire sur la potentielle présence de documents couverts par la confidentialité, il n'a pas fourni à ce dernier les éléments propres à établir la réalité de l'atteinte à la protection invoquée. Le rapport de l'officier de police judiciaire relate que le conseil de Pixid n'a fait qu'évoquer le risque d'une saisie de documents confidentiels et n'a pas été en mesure de déterminer si les saisies envisagées étaient concrètement concernées.
Par ailleurs, il n'appartient pas à une entreprise saisie faisant l'objet d'une visite domiciliaire de déterminer et d'agréer les modalités d'investigation dont elle est l'objet. Seule l'Autorité de la concurrence détermine en effet les méthodes qu'elle met en œuvre pour mener à bien sa mission, dans le respect des lois et règlements qui la régissent et sous le contrôle du juge.
Enfin, il est totalement inopérant de comparer les pouvoirs de visite et saisie des rapporteurs de l'Autorité de la concurrence agissant sur autorisation judiciaire, sous le contrôle d'un juge et d'officiers de police judiciaire et donnant lieu à un recours juridictionnel effectif, avec la pratique des inspections des agents de la Commission européenne qui agissent sur le fondement d'une décision administrative, sans contrôle d'un juge, hors la présence de tout officier de police judiciaire, qui n'ouvrent pas droit à un recours juridictionnel direct.
En troisième lieu, contrairement à ce que prétend la requérante, les rapporteurs n'étaient nullement tenus de placer sous scellés fermé provisoire les saisies informatiques pour éviter la saisie potentielle de correspondances avocat/client en application de l'article 56 alinéa 4 du Code de procédure pénal auquel renvoie l'article L. 450-4 du Code de commerce : en effet, cette procédure est prévue dans le cas où survient une difficulté liée à l'établissement sur place de l'inventaire des pièces saisies. Or, en l'espèce, aucune difficulté relative à l'inventaire des pièces n'a été constatée par les rapporteurs qui ont pu établir un inventaire de la totalité des documents et fichiers appréhendés, comme en attestent les pages 5 à 19 du procès-verbal et son annexe n° 2 comportant les inventaires informatiques.
Ces modalités d'inventaire pour les fichiers informatiques auraient été très largement confirmées par les juridictions saisies de recours.
Le moyen tendant à l'annulation de la messagerie électronique de M. 2 devrait donc être rejeté ; seules les pièces qui seront reconnues couvertes par le secret des correspondances avocat/client seront annulées et restituées à la requérante.
III) Sur le caractère manifestement incomplet et insincère du procès-verbal de déroulement et sur la violation du droit de la demanderesse à faire figurer toute irrégularité présumée
Sur le caractère manifestement incomplet et insincère du Procès-verbal de déroulement
Sur la violation du droit de la demanderesse à faire figurer toute irrégularité présumée
La société requérante fait valoir que la confrontation du contenu du procès-verbal de déroulement avec le rapport de l'officier de police judiciaire, fait apparaître que les rapporteurs ont occulté leur refus d'accepter les avocats laisser assister aux opérations de visite et de saisie et de la circonstance qu'ils avaient été informés de la présence sur certains supports informatiques de correspondances protégées par le secret de la correspondance avocat/client.
Or, la présence de telles correspondances aurait dû conduire les rapporteurs à prendre des mesures différentes de celles qu'ils ont finalement adoptées dans le cadre des opérations, l'absence d'une telle mention leur a permis de saisir les correspondances concernées.
Donc, le procès-verbal n'expose pas de façon complète et sincère, le déroulement des opérations de visite et de saisie.
La société Pixid énonce que les Autorités nationales mettant en œuvre le droit communautaire ont, certes la possibilité d'appliquer les dispositions procédurales prévues par le droit national, mais les Etats doivent exercer cette compétence dans le respect du droit de l'Union. Pour le droit de la concurrence, les Autorités nationales doivent veiller à ce que les règles qu'ils établissent ou appliquent ne portent pas atteinte à l'application effective des articles 101 TFUE et 102 TFUE.
Aussi, l'autonomie procédurale des Etats membres ne signifie pas que les Autorités nationales seraient autorisées à instituer un écran national par lequel l'Etat membre organiserait à sa guise la structure procédurale pour la mise en œuvre des articles 101 et 102 du TFUE. La CJUE a ainsi considéré que les Autorités nationales de concurrence devraient pouvoir présenter des arguments à l'occasion d'un recours judiciaire formé contre la décision qu'elles ont adoptée.
Quand une entreprise fait l'objet d'une mesure d'enquête aux fins de rechercher l'existence de preuve de nature à établir sa participation à une entente prohibée par l'article 101 du TFUE, le Tribunal de l'Union a reconnu à cette dernière le droit de faire enregistrer dans un procès-verbal toute irrégularité présumée survenue lors du déroulement de l'inspection ou tout grief qu'elles pourraient avoir.
En l'occurrence, en refusant de prendre les observations de l'entreprise portant sur une atteinte présumée aux droits de la défense de l'entreprise, les rapporteurs de l'Autorité de la concurrence ont privé celle-ci d'un moyen de preuve essentielle à la préservation ultérieure de ses droits, dans la mesure où ce refus la prive de pouvoir présenter au soutien de sa requête une preuve contraire ayant la même force probante que le procès-verbal de déroulement des opérations de visite et de saisie. Cette position serait confortée par la Cour de cassation.
En l'espèce, il ressort du rapport établi par l'officier de police judiciaire ayant assisté aux opérations de visite et de saisie que les rapporteurs ont refusé la demande du conseil de la société de mentionner dans le procès-verbal de déroulement des opérations ses observations.
D'ailleurs dans ses écritures, l'Autorité ne contredit pas directement l'argumentation de la requérante mais se contente de citer une jurisprudence selon laquelle, le procès-verbal de visite et de saisie n'est pas un acte contradictoire.
Cependant, la requérante soutient seulement qu'elle avait le droit à que ses observations soient reprises dans le procès-verbal et que malgré ses demandes, ce droit n'a pas été respecté par les agents de l'Autorité de la concurrence.
Ensuite, l'Autorité de la concurrence fait valoir que les dispositions des articles L. 450-4 et R. 450-2 du Code de commerce ne prévoient pas que les réserves formulées par l'occupant soient intégrées dans le procès-verbal.
Or, le silence de la loi ne peut pas être interprété comme une privation de l'entreprise de ses droits de la défense.
Dans le cas où l'Autorité de la concurrence contesterait l'existence même d'un droit à inscrire dans le corps d'un procès-verbal les éventuelles observations formulées par l'entreprise visitée, la requérante invite Monsieur le Premier Président de la Cour d'appel de Paris à saisir la Cour de justice de l'Union européenne à titre préjudiciel et à solliciter son interprétation du principe des droits de la défense, en tant qu'il s'agit d'un principe fondamental de l'ordre juridique de l'Union désormais contenu aux articles 47 et 48 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, notamment en ce qu'il donne la possibilité aux représentants des entreprises concernées par des inspections " de faire enregistrer dans un procès-verbal toute irrégularité présumée survenue lors du déroulement de l'inspection, ou tout grief qu'elles pourraient avoir ", y compris à l'occasion d'une inspection diligentée par une Autorité nationale de concurrence aux fins de recherche de la preuve d'une pratique contraire à l'article 101 du TFUE.
L'Autorité de la concurrence rappelle en premier lieu que le procès-verbal de visite et de saisie n'est pas un acte contradictoire, comme en attesterait la jurisprudence.
Les agents de l'Administration n'avaient aucune obligation d'inscrire dans le corps du procès-verbal les réserves ou observations de l'entreprise saisie dès lors qu'il lui était loisible de formaliser ses observations dans un document remis à l'officier de police judiciaire pour transmission au juge des libertés et de la détention.
En l'espèce, le conseil de Pixid a remis aux officiers de police judiciaire présents un courrier relatant les réserves qu'il entendait voir transmises au juge des libertés et de la détention et a complété celles-ci par un courriel adressé à l'un des officiers de police judiciaire le 12 juillet 2013 à 14h17, l'ensemble ayant été dûment transmis à Mme C., juge des libertés et de la détention au Tribunal de grande instance de Paris le 15 juillet 2013 comme le prouve le soit-transmis placé en pièce 7 annexée aux conclusions de la requérante.
En outre, s'il ne contient pas les observations elles-mêmes, transmises au juge dans les conditions décrites ci-dessus, le procès-verbal fait état en page 20 de ce que des observations ont été remises aux officiers de police judiciaire à l'attention du juge des libertés et de la détention, de telle sorte qu'il n'existait aucune dissimulation possible de l'existence de ces observations de la part des rapporteurs.
En second lieu, l'Autorité de la concurrence déplore le caractère " spécieux " des écritures de Pixid qui n'hésite pas à affirmer que " de façon délibérée, les rapporteurs ont occulté " certains éléments qu'elle souhaitait voir consignés et que " c'est donc sciemment et en connaissance de cause que les rapporteurs de l'Autorité de la concurrence ont omis de faire mention de ces circonstances ". Il s'agit d'une remise en question de la probité des officiers de police judiciaire présents par la requérante ainsi que d'une mise en lumière des propres " contradictions de la requérante " qui a elle-même signé une procès-verbal qu'elle prétend incomplet et insincère alors même que les dispositions de l'article R. 450-2 du Code de commerce lui permettaient, sans s'opposer aux pouvoirs de l'administration, d'exprimer sa désapprobation en y faisant porter la mention de son refus de signer l'acte de procédure.
Dans les conditions les allégations de Pixid ne démontrent nullement le caractère irrégulier du procès-verbal, et sa demande en nullité devrait être rejetée.
Madame l'Avocat général dans son avis du 28 novembre 2014 fait valoir que la société Pixid reconnaît avoir pu faire intervenir trois avocats qui ont pu ainsi l'assister auprès des équipes d'enquête. Ainsi, il peut être observé avec l'Autorité que dans la suite de la jurisprudence, le droit de la société Pixid à faire appel à un conseil de son choix conformément aux dispositions de l'article L. 450-4 du Code de commerce a bien été respecté.
Sur l'irrégularité des saisies, elle soutient que la nullité des documents bénéficiant de la protection du secret avocat/client est réservé aux seuls documents couverts par le secret professionnel et que celui-ci ne s'applique que pour autant qu'il s'agisse de correspondances échangées dans le cadre et aux fins du droit de la défense du client, que la présence dans la saisie informatique compte tenu du caractère insécable d'un fichier de messagerie ne peut avoir pour effet d'invalider la totalité de l'opération et demande en conséquence que les documents cités par la société Pixid soit vérifiés afin de savoir s'ils peuvent bénéficier de la protection des correspondances avocat/client avant d'en prononcer, le cas échéant, l'annulation.
Sur le caractère irrégulier du déroulement des opérations, elle fait valoir que le conseil de la société Pixid a remis aux officiers de police judiciaire présents un courrier relatant les réserves qu'il entendait voir transmises au juge des libertés et de la détention et a complété celles-ci par un courriel adressé à l'un des officiers de police judiciaire du 12 juillet 2013, l'ensemble ayant été transmis au juge des libertés et de la détention de Paris du 15 janvier 2013.
Ainsi, le refus de mentionner des réserves dans le document lui-même n'est pas contraire aux textes qui ne prévoient pas cette possibilité et ne porte pas atteinte aux droits de la défense, ces réserves ayant été portées à la connaissance du juge des libertés et de la détention.
Le Ministère public demande en conséquence de confirmer l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du 1er juillet 2013 et de rejeter la demande d'annulation des opérations, sauf en ce qui concerne la saisie des documents saisis dans la pièce n° 9, s'ils bénéficient de la protection de la correspondance avocat/client.
En conséquence la société Pixid demande :
- à ce qu'il soit constaté que les droits de la défense n'ont pas été respectés ; que l'article 56 du Code de procédure pénale n'a pas été respecté en ce qui concerne la saisie d'un fichier informatique contenant des éléments couverts par la confidentialité de la correspondance entre avocat et client et l'absence de mesure préalable utile pour que soit respecter le secret professionnel et les droits de la défense ; de constater l'irrégularité du procès-verbal du déroulement de la visite et saisie lequel ne consigne pas les constatations effectuées et que le principe fondamental des droits de la défense n'a pas été respecté en ce que la requérante n'a pas eu la possibilité de faire enregistrer toute irrégularité présumée survenu lors de l'inspection ou tout grief qu'elle pourrait avoir, et qu'en conséquence, surseoir à statuer avant dire droit : pour saisir en application de l'article 267 TFUE la CJUE afin de lui soumettre la question préjudicielle suivantes : " Le principe fondamental des droits de la défense, désormais contenu aux articles 47 et 48 de Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doit il être interprété en ce sens qu'il donne la possibilité aux représentants des entreprises concernées par des inspections de faire enregistrer dans un Procès-verbal toute irrégularité présumée survenu lors du déroulement de l'inspection ou tout grief qu'elle pourrait avoir lors d'une inspection diligentée par une Autorité nationale de concurrence aux fins de la recherche de la preuve d'une pratique contraire à l'article 101 TFUE " ;
En tout état de cause, constater l'annulation du procès-verbal du déroulement du 11 juillet 2013 et dire nulles les opérations de visite et de saisies des 10 et 11 juillet 2013 ; Et constater la nullité des saisies des documents couverts par la confidentialité avocat/client, ordonner la restitution du fichier de messagerie électronique outlook.ost de Monsieur Etienne C. contenu dans le scellé n 10 dans son entier en raison de son caractère indivisible et de sa saisie dans des conditions irrégulières parce qu'attentatoires aux droits de la défense.
Et condamner l'Autorité de la concurrence aux entiers dépens.
L'Autorité de la concurrence demande de rejeter le demande d'annulation de la saisie de la messagerie électronique de M. 2 (outlook.ost) dans le scellé n° 10 intervenue dans les locaux de la société Pixid les 10 et 13 juillet 2013, rejeter la demande d'annulation et d'irrégularité du procès-verbal de visite et saisie établi les 10 et 11 juillet dans les locaux de la société Pixid, de rechercher si les documents listés dans la pièce n° 9 annexée aux conclusions de Pixid bénéficient de la protection prévue à l'article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971 et le cas échéant de prononcer l'annulation et de condamner Pixid aux entiers dépens.
SUR CE
I) Sur l'atteinte aux droits de la défense de Pixid
En l'espèce, trois équipes de rapporteurs avaient été constituées ; que l'injonction qui aurait été faite au cabinet d'avocats de ne recourir à un seul avocat par équipe soit au total trois avocats n'a aucunement portée une atteinte aux droits de la défense ; aucun grief n'étant rapporté, les droits de la défense ayant été respectés par la présence des trois conseils (Cass. crim., du 30 novembre 2011, n° de pourvoi: 10-81.748, présidence M. L.).
En procédant de la sorte, les officiers de police judiciaire et les rapporteurs de l'Autorité n'ont pas méconnu les dispositions de l'article L. 450-4 du Code de commerce et retenu à bon droit qu'en la circonstance, le droit de la personne visitée à faire appel à un conseil de son choix avait été respecté.
Ce moyen sera rejeté.
II) Sur la saisie irrégulière de certains documents contenus sur des supports d'information
- Les règles applicables à la saisie de documents
- Les règles applicables au secret professionnel protégeant la correspondance avocat/client
- La saisie irrégulière des documents couverts par la confidentialité de la correspondance avocat/client et la restitution des fichiers de messageries dans leur entier
- Sur l'atteinte portée aux droits de la société Pixid par l'absence de mesure tendant à protéger le secret professionnel et les droits de la défense
La société requérante fait valoir qu'il a été procédé à la saisie irrégulière de 77 courriels couverts par la confidentialité de la correspondance avocats/clients et que cette saisie a porté atteinte à la confidentialité des échanges avocat/client et aurait pour conséquence l'annulation de l'ensemble de la saisie de la messagerie de Monsieur 2, cadre dirigeant de la société Pixid.
Il est produit en annexe 9 des conclusions à l'appui de cette affirmation un tableau excel de 77 lignes se décomposant ainsi qu'il suit :
Date du courriel - émetteur - destinataire - C.c (Carbon copy)
Par contre, n'y figure pas l'objet des courriels et la société requérante n'a pas produit les courriels contestés nous empêchant ainsi d'effectuer un contrôle in concreto sur chaque document litigieux saisi, de sorte que nous n'avons pas été mis en mesure de déterminer si ces courriels se rattachaient à la confidentialité des échanges avocat/client protégés par le secret professionnel tel qu'il résulte de l'article 66-5 du 31 décembre 1971.
Avec les minces informations portées à notre connaissance, il nous est possible de déduire que seul le dernier courriel en date du 10 juillet 2013 échangé lors des opérations entre Maître Frédéric P. présent lors des opérations et Monsieur Eric C. serait susceptible de bénéficier de la protection ci-dessus évoquée.
La pratique décrite par la société Pixid qui invoque l'article 56 du Code de procédure pénale, concernant les scellés provisoires n'est qu'une faculté pour l'Autorité lorsqu'une difficulté survient à l'occasion des opérations. Il convient encore une fois de rappeler que la société conserve l'original des documents saisis dont il est tiré que deux copies, l'une remise à la société et l'autre conservée par l'Autorité.
La comparaison avec les perquisitions effectuées au domicile, au cabinet d'un avocat qui est faite en présence du bâtonnier de l'ordre, est inopérante puisque dans cette situation la contestation s'effectuerait dans le cabinet du juge des libertés et de la détention qui serait susceptible d'être le signataire de l'ordonnance elle-même.
De même, la pratique des inspections des agents de la Commission européenne qui agissent sur le fondement d'une décision administrative, sans contrôle d'un juge, hors la présence de tout officier de police judiciaire, qui n'ouvre pas droit à un recours juridictionnel direct, ne peut pas être transposée avec celle des rapporteurs de l'Autorité de la concurrence agissant sur autorisation judiciaire, sous le contrôle d'un juge et d'officiers de police judiciaire et donnant lieu à un recours juridictionnel effectif et surtout pouvant saisir les supports informatiques (ordinateurs, etc.) contrairement à leurs homologues de la Commission européenne.
La société requérante invoque que certaines de ses observations n'auraient pas fait l'objet d'une retranscription sur le procès-verbal des opérations et qu'ils auraient transmis ces observations à la Juge des libertés et de la détention pour en faire état et ce par courriel en date du 12 juillet 2013.
La lecture de ces observations fait apparaître que le conseil de la société requérante mentionnait les moyens repris aux présentes écritures à savoir l'atteinte aux droits de la défense du fait de la présence d'un seul avocat par équipe, le fait que les agents de l'Autorité de Pixid aient connaissance des mots-clés pour les recherches informatiques et qu'ils n'avaient pas pu vérifier que les documents saisis entraient dans le champ de l'application de l'ordonnance.
Il y a lieu de rappeler que les avocats présents ont signé le procès-verbal de visite et de saisie en l'état.
S'agissant de la présence d'un seul avocat par équipe, il a déjà été répondu ci-dessus et que les rapporteurs de l'Autorité ne sont pas tenus de communiquer les mots-clés qu'ils utilisent et dont le juge des libertés et de la détention n'a pas connaissance.
Enfin, ayant une copie numérique de l'inventaire et des documents saisis, ils pouvaient à bon droit, en comparant avec les originaux laissés en leur possession, produire les pièces qui leur semblaient être hors du champ de l'ordonnance du juge, de même que les courriels protégés par le secret professionnel dans le cadre du contrôle juridictionnel effectif que nous exerçons.
Ces moyens seront rejetés à l'exception du courriel du 10 juillet 2013 échangé lors des opérations entre Maître Frédéric P. présent lors des opérations et Monsieur Eric 2.
III) Sur le caractère manifestement incomplet et insincère du procès-verbal de déroulement et sur la violation du droit de la demanderesse à faire figurer toute irrégularité présumée
Sur le caractère manifestement incomplet et insincère du Procès-verbal de déroulement
Sur la violation du droit de la demanderesse à faire figurer toute irrégularité présumée
Il a déjà été répondu partiellement à ces moyens.
La société requérante conteste la sincérité du déroulement des opérations de visite et de saisie et le fait qu'elle n'ait pas pu faire intégrer dans le corps du procès-verbal ses observations. Il convient de rappeler que le procès-verbal a été signé par toutes les personnes présentes y compris par le représentant de la société présent sur les lieux.
Par ailleurs, le ou les conseils de la société requérante avaient la possibilité de prendre attache le jour des opérations avec le Juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Paris pour lui signaler toute difficulté pendant les opérations, ce qu'ils n'ont pas fait.
Enfin, le fait que les observations soient intégrées dans le corps du procès-verbal ou dans une annexe ou transmises immédiatement après n'empêche pas qu'un contrôle juridictionnel soit effectué devant le Premier Président de la Cour d'appel, ce qui a été effectué en l'espèce par la société requérante.
S'agissant de la demande de transmission d'une question préjudicielle à l'attention de la Cour de justice de l'Union européenne, elle est laissée à l'appréciation de notre juridiction et ne sera pas transmise, les moyens ayant été développés sur l'exercice des droits de la défense ayant été déjà soumis auprès des hautes juridictions compétentes.
Ces moyens seront écartés.
Par ces motifs, Statuant contradictoirement et en dernier ressort, Annulons la saisie du courriel du 10 juillet 2013 échangé lors des opérations entre Maître Frédéric P. présent lors des opérations et Monsieur Eric 2 cité dans l'annexe 9 des conclusions de la société requérante, Rejetons les autres demandes, Confirmons l'ensemble des opérations de visite et de saisie effectuées les 10 et 11 juillet 2013, Disons n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile, Disons que la charge des dépens sera supportée par la société requérante.