Livv
Décisions

Cass. com., 16 février 2016, n° 14-10.254

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Cocopak (Sté)

Défendeur :

Société Internationale d'importation et de vente en gros de fruits et légumes (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Le Bras

Avocat général :

M. Debacq

Conseiller :

Mme Riffault-Silk

Avocats :

SCP Gadiou, Chevallier, SCP Ortscheidt

Paris, pôle 5 ch.5, du 12 sept. 2013

12 septembre 2013

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 septembre 2013), que la société ivoirienne Cocopack, spécialisée dans l'exportation de noix de coco, et la société Internationale d'Importation et de vente en gros de fruits et légumes (la société SIIM), importatrice de fruits et légumes en provenance de Côte d'Ivoire, sont convenues de l'approvisionnement de la société SIIM et du préfinancement par celle-ci des conteneurs avant leur envoi ; que la société Cocopack ayant rencontré des difficultés, les parties ont conclu un protocole d'accord réglant la poursuite de leurs relations commerciales en permettant à la société Cocopack d'apurer sa dette ; que M. Debré, salarié de la société Cocopack, a créé et dirigé la société Seco, collecteur-fournisseur de noix de coco, de la société Cocopack et de la société SIIM, dans le même secteur géographique ; que reprochant à la société SIIM d'avoir commis des actes de concurrence déloyale à son détriment en participant aux agissements de son salarié, la société Cocopack l'a assignée en réparation de son préjudice ; que se plaignant de n'avoir pas obtenu les approvisionnements convenus, la société SIIM a assigné la société Cocopack en paiement d'une certaine somme ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche : - Attendu que la société Cocopack fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande alors, selon le moyen, que toute faute, même de simple imprudence, commise dans l'exercice de la concurrence engage la responsabilité de son auteur ; que, comme le soulignait la société Cocopack dans ses conclusions, la personne qui contracte directement avec un salarié encore lié à son employeur par son contrat de travail, et donc en violation de l'obligation de loyauté, ne peut ignorer que ce salarié commet des actes de concurrence déloyale, de sorte qu'en favorisant l'activité parallèle de ce salarié, le tiers commet une faute personnelle en prenant part à la concurrence déloyale ; qu'en énonçant, sans même rechercher si la société SIIM n'avait pas commis d'imprudence en contractant avec une société concurrente de la société Cocopack, dirigée par un salarié encore lié à cette dernière par un contrat de travail, que dès lors que la société SIIM ignorait jusqu'au mail de M. Debré, en date du 1er octobre 2008, l'existence de la société Seco et qu'elle n'avait aucune raison de suspecter une quelconque déloyauté de ce dernier, alors que la solution qu'il proposait permettait encore à la société Cocopack de poursuivre ses relations commerciales avec elle et à elle-même de continuer de bénéficier de l'envoi de marchandises en palliant la carence de la société Cocopack, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu qu'après avoir retenu que le protocole d'accord démontrait la volonté manifeste de la société SIIM de poursuivre ses relations avec la société Cocopack afin de permettre à celle-ci de résorber sa créance et mettait en évidence la confiance du dirigeant de la société Cocopack à l'égard de M. Debré, ainsi que le rôle essentiel de celui-ci dans les opérations d'approvisionnement de la société SIIM, l'arrêt retient que jusqu'au mail du 1er octobre 2008 dans lequel M. Debré proposait un double approvisionnement, à la fois de la part de la société Cocopack et de la société Seco, dont il était le dirigeant, la société SIIM ignorait l'existence de la société Seco et n'avait aucune raison de suspecter une quelconque déloyauté ; qu'il retient encore que la société Cocopack n'étant pas en mesure d'approvisionner la société SIIM comme il avait été convenu, celle-ci ne pouvait que se tourner vers d'autres fournisseurs ; qu'il retient enfin que la société SIIM n'avait aucune raison de ne pas faire confiance à M. Debré et de mettre en doute sa loyauté vis-à-vis de son employeur, dans la mesure où la solution proposée par celui-ci permettait à la société Cocopack de poursuivre ses relations commerciales avec elle et à elle-même de continuer de bénéficier de l'envoi de marchandises en palliant la carence de la société Cocopack ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'effectuer une recherche qui ne lui était pas demandée, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen, pris en ses première et deuxième branches : - Attendu que la société Cocopack fait grief à l'arrêt de la condamner à payer une certaine somme à la société SIIM alors, selon le moyen :

1 / qu'en application de l'article 624 du Code de procédure civile, la cassation à intervenir sur le premier moyen reprochant à la cour d'appel d'avoir débouté la société Cocopack de son action en concurrence déloyale contre la société SIIM ne pourra qu'entraîner la cassation par voie de conséquence du chef de dispositif de l'arrêt attaqué confirmant le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Cocopack à payer la somme de 35 608,89 euro en principal à la société SIIM au motif notamment que l'appelante n'a démontré aucune faute de l'intimée qui l'aurait mise dans l'impossibilité d'assurer le programme fixé lors du protocole d'accord du 2 janvier 2008 ;

2 / que la société Cocopack ne se prévalait nullement d'avoirs qui lui auraient été consentis mais tout au contraire d'avoirs qualité qui lui avaient été imposés unilatéralement par la société SIIM après livraison et qu'elle avait refusés ; que, bien que relevant exactement ce moyen de défense en page 7 de l'arrêt attaqué, la cour d'appel l'a rejeté en énonçant que, si la société Cocopack fait état d'avoirs qui lui auraient été consentis, elle n'en justifie pas, si bien que la créance de la société SIIM est certaine, liquide et exigible ; que, ce faisant, la cour d'appel a manifestement méconnu l'objet du litige tel que résultant des écritures de la société Cocopack et violé l'article 4 du Code de procédure civile ;

Mais attendu, d'une part, que le rejet du premier moyen rend le grief de la première branche sans portée ;

Et attendu, d'autre part, que sous le couvert d'un grief de violation de la loi, le grief de la seconde branche ne tend qu'à faire constater une erreur purement matérielle qui a fait écrire " avoirs qui lui auraient été consentis " au lieu de " avoirs qui lui auraient été imposés " et qui n'a pas eu d'incidence sur la solution du litige ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen, pris en ses deuxième, troisième et quatrième branches ni sur le second moyen, pris en sa troisième branche, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.