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Décisions

CA Poitiers, 1re ch. civ., 26 février 2016, n° 14-03795

POITIERS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Catinault (Epoux)

Défendeur :

Angibaud, Bonnin

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Potée

Conseillers :

Mmes Contal, Clément

Avocats :

Mes Lamouroux, Kierzkowski, Laurent, Chaveneau, Sainte Marie Pricot, Chisseau

TGI Saintes, du 5 sept. 2014

5 septembre 2014

Exposé du litige et de la procédure

Par jugement du 5 septembre 2014 auquel il est référé pour l'exposé du litige et de la procédure antérieure, statuant sur le litige opposant les époux Catinault à Patrick Angibaud, Johnny Bonnin, la SARL Contrôle Technique Royannais et la SARL Olivier Orsonneau au titre des vices affectant le camping-car vendu le 1er juillet 2011 par M. Angibaud à M. Bonnin puis revendu par ce dernier le 1er mars 2012 aux époux Catinault, le Tribunal de grande instance de Saintes a :

- Dit que le défaut du joint d'étanchéité affectant le camping-car litigieux était apparent lors de chaque transaction ;

- Débouté les époux Catinault de l'intégralité de leurs prétentions ;

- Rejeté les demandes de M. Bonnin ;

- Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision ;

- Rejeté les demandes plus amples ou contraires des parties ;

- Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du Code de procédure civile;

- Dit que chaque partie prendra en charge le coût de ses propres dépens.

Les époux Catinault ont régulièrement formé appel le 11 octobre 2014 de la décision dont ils sollicitent la réformation dans leurs dernières conclusions du 9 décembre 2014 par lesquelles il est demandé à la cour de :

Ordonner la résolution de la vente par M. Bonnin à M. & Mme Catinault du camping-car Fiat Ducato immatriculé BS-404-MZ, intervenue le 1er mars 2012 ;

Condamner in solidum M. Bonnin et M. Angibaud à leur payer la somme de 22 610 euro en remboursement du prix de vente des frais d'immatriculation, des frais d'expertise et à titre de dommages et intérêts, outre la somme de 6 000 euro au titre des frais non répétibles et tous les dépens qui comprendront les dépens réservés par les ordonnances de référé de Saintes et ceux de l'ordonnance du Juge de la mise en état de Saint-Nazaire du 22 juillet 2013, avec distraction au profit de la SCP Lefevre-Lamouroux-Minier-Meyrand, par application de l'article 699 du Code de procédure civile

Débouter les intimés de toutes leurs demandes contraires, reconventionnelles ou plus amples.

M. Bonnin demande à la cour, par conclusions du 2 janvier 2015, de :

Recevant les époux Catinault en leur appel, les y déclarer mal fondés.

En conséquence :

Les débouter de toutes leurs demandes, et confirmer le jugement dont appel

Y ajoutant, condamner solidairement les époux Catinault à payer à Mr Bonnin la somme de 3 500 euro d'indemnité fondée sur l'article 700 du Code de procédure civile et en tous les dépens de première instance et d'appel, en ceux compris les frais et honoraires d'expertises, et dont distraction au profit de la Selarl Acte Juris.

Subsidiairement et dans l'hypothèse où la cour estimerait y avoir lieu à prononcer la résolution de la vente Bonnin/Catinault :

Dire que M. Angibaud sera condamné à relever M. Bonnin indemne de toutes condamnations qui seraient, alors, prononcées à son encontre du chef de la résolution Bonnin/Catinault, celle-ci n'étant que la conséquence de sa faute (intervention non évoquée sur le toit du véhicule, et réalisée en ne respectant pas les règles de l'art).

Dire, en tout état de cause, que les époux Catinault ne peuvent prétendre qu'à la seule restitution du prix de vente et des seuls frais justifiés et rendus nécessaires par la dite vente, notamment, en raison du fait que M. Bonnin ignorait l'existence du vice qui justifierait la résolution de la cession.

Prononcer et ordonner la résolution de la vente Bonnin/Angibaud avec toutes conséquences de droit.

Dire que M. Angibaud sera tenu, outre la restitution du prix de vente à M. Bonnin, de payer à ce dernier de légitimes dommages intérêts.

En conséquence, condamner M. Angibaud à rembourser à M. Bonnin, la somme de 9 600 euro, en remboursement du prix de la vente intervenue entre eux, outre de légitimes dommages intérêts correspondant à la perte de l'avantages de la plus-value qu'il avait réalisée au moment de la revente du véhicule aux époux Catinault, soit la somme de 4 700 euro.

Dire que M. Bonnin ayant été victime des agissements déloyaux de M. Angibaud, et en conséquence, le condamner à payer à M. Bonnin la somme de 2 000 euro pour résistance abusive et déloyauté.

Dire que ces sommes ont produit et produiront intérêt au taux légal à compter de l'exploit introductif de première instance et ce jusqu'à parfait et complet règlement.

Condamner M. Angibaud à lui payer la somme de 3 500 euro d'indemnité fondée sur l'article 700 du Code de procédure civile et en tous les dépens de première instance et d'appel, en ceux compris les frais et honoraires d'expertises et dont distraction au profit de la Selarl Acte Juris.

M. Angibaud demande à la cour, par dernières conclusions du 10 février 2015, de :

Sur les demandes des époux Catinault :

A titre principal :

Constater que le Tribunal de grande instance de Saintes a statué sur la demande de résolution de la vente formulée par les époux Catinault

Constater l'erreur dans le fondement juridique invoqué par eux au soutien des demandes qu'ils formulent à l'encontre de M. Angibaud ;

Constater le caractère apparent du vice affectant le joint d'étanchéité faisant la jonction entre la partie avant et la partie arrière du camping-car ;

Constater la négligence de M. Bonnin et des époux Catinault lors des ventes successives du camping-car ;

En conséquence :

Confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

- Dit que le défaut du joint d'étanchéité affectant le camping-car litigieux était apparent lors de chaque transaction ;

- Débouté les époux Catinault de l'intégralité de leurs prétentions ;

- Rejeté les demandes de M. Bonnin ;

- Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;

- Rejeté les demandes plus amples ou contraires des parties.

A titre subsidiaire, si la cour reformait le jugement entrepris :

Dire que M. Angibaud doit voir sa responsabilité limitée au remboursement d'une somme maximale de 9 600 euro correspondant au prix de vente du camping-car le 1er juillet 2011 à M. Bonnin ;

Dire que M. Angibaud ne peut être condamné au remboursement des frais d'immatriculation (130 euro) et d'expertise amiable CETA (380 euro) ;

Sur les demandes de M. Bonnin, si la cour reformait le jugement entrepris :

Constater que les demandes formulées par M. Bonnin à l'encontre de M. Angibaud ne sont pas cumulatives mais alternatives ;

Dire n'y avoir lieu à garantie sur le fondement de la responsabilité délictuelle par M. Angibaud au titre des condamnations prononcées à l'encontre de M. Bonnin ;

A titre principal :

Constater le caractère apparent du vice affectant le joint d'étanchéité faisant la jonction entre la partie avant et la partie arrière du camping-car et dire en conséquence n'y avoir lieu à résolution de la vente intervenue entre MM. Angibaud et Bonnin ;

A titre subsidiaire, si la cour d'appel ordonnait la résolution de la vente Angibaud/Bonnin :

Dire que M. Angibaud sera uniquement tenu de restituer le prix de vente du camping-car savoir la somme de 9 600 euro et débouter M. Bonnin de sa demande de dommages et intérêts d'un montant de 4 700 euro au titre de la perte de plus-value ;

Débouter M. Bonnin de sa demande en condamnation de M. Angibaud à lui verser la somme de 2 000 euro pour résistance abusive et déloyauté ;

En tout état de cause :

Reformer le jugement entrepris en ce qui concerne les frais irrépétibles ;

Statuant à Nouveau, Condamner solidairement M et Mme Catinault à verser à M. Angibaud une somme de 5 000 euro au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile outre leur condamnation aux entiers dépens ;

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 22 décembre 2015.

Motifs de la décision

Sur la procédure

M. et Mme Catinault soutiennent que le premier juge aurait statué ultra petita en ne prononçant pas l'annulation de la vente Bonnin-Catinault alors que les époux Bonnin ne s'opposaient plus, dans leurs dernières conclusions, à la résolution de la vente.

Cependant si le juge, aux termes des articles 4 alinéa 1er et 5 du Code de procédure civile, doit statuer sur le litige dans les limites qui lui sont soumises, il n'est tenu de faire droit aux demandes que si elles sont fondées en droit et en fait.

Ainsi, même si deux des parties s'étaient accordées sur l'acceptation de la résolution du contrat, le juge n'en était pas moins tenu de vérifier la validité de cette demande au regard des règles de droit, et ce, d'autant plus que M. Angibaud ne s'était, quant à lui, pas positionné en faveur du prononcé de la résolution.

Le tribunal n'a donc pas statué ultra petita en refusant de faire droit à la demande de résolution du contrat de vente Bonnin-Catinault. Au demeurant, les appelants ne tirent aucune conséquence du moyen qu'ils soulèvent, la cour n'étant pas saisie par eux d'une demande d'annulation du jugement.

Sur le fond

Sur la résolution du contrat de vente sur le fondement des articles 1641 et suivants

M. Catinault invoque l'existence d'un vice caché affectant le camping-car litigieux et sollicite l'annulation de la vente en application des dispositions de l'article 1644 du Code civil.

Aux termes de l'article 1641 du Code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

Il appartient à M. Catinault de démontrer l'existence d'un vice caché affectant le véhicule litigieux avant sa vente.

Il résulte des conclusions de l'expertise judiciaire que le vice s'attache au défaut d'étanchéité de la tôle du pavillon du camping-car au niveau du raccordement de jonction. Selon l'expert, le véhicule était déjà affecté des désordres lors de la vente Bonnin-Cantinault.

L'expert indique que des " précautions élémentaires " telles que l'inspection de l'extérieur et de l'intérieur du camping-car avant l'achat du camping-car auraient permis de constater la mauvaise qualité du joint d'étanchéité ainsi que la déformation des tôles.

Le caractère apparent de ces vices pour une personne raisonnable, même profane, n'est pas contestable au seul vu des clichés photographiques annexés au rapport de l'expert qui démontrent que M. Catinault n'a pas procédé à un examen d'usage élémentaire avant l'achat du camping-car d'occasion.

En conséquence, c'est à bon droit que le premier juge a retenu que l'action en garantie des vices cachés sur le fondement de l'article 1641 du Code civil ne pouvait prospérer, l'acheteur ayant pu se convaincre lui-même des vices invoqués.

Sur la demande de condamnation in solidum

M. Catinault soutient que le tribunal a omis de statuer sur sa demande tendant à engager la responsabilité délictuelle de M. Angibaud, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil.

La garantie des vices cachés de l'article 1641 du Code civil est une garantie légale et si, en cas de ventes successives, comme c'est le cas en l'espèce, le sous-acquéreur est recevable à exercer l'action en garantie des vices cachés contre le vendeur originaire (Civ. 3e, 7 mars 1990), en revanche, il ne peut à la fois rechercher la garantie légale pour vices cachés de son vendeur, et la responsabilité délictuelle du vendeur initial puisque la garantie des vices cachés constitue l'unique fondement de l'action exercée pour défaut de la chose vendue la rendant impropre à sa destination, ce qui prohibe le cumul d'une action en garantie et d'une action en responsabilité délictuelle.

Il en résulte qu'indépendamment du rejet de l'action en garantie des vice cachés, il ne saurait être fait droit à la demande des époux Catinault tendant à la condamnation in solidum des acquéreurs intermédiaires, au titre de cette garantie et du vendeur initial, sur le fondement de la responsabilité délictuelle de droit commun.

Le jugement qui n'a pas omis de statuer sur cette demande qui a été rejetée comme conséquence du rejet de l'action en garantie des vices cachés, sera ainsi également confirmé.

L'équité ne commande pas l'octroi d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs, Confirme le jugement déféré, Dit n'y avoir lieu à indemnité au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne les appelants aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.