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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 3 mars 2016, n° 14-19357

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Remorques Louault (SARL)

Défendeur :

ALM Trak Trans (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Dabosville

Conseillers :

Mme Schaller, M. Loos

Avocats :

Mes Denoulet, Radix, Grappotte-Benetreau, Dizier

T. com. Auxerre, du 19 mai 2014

19 mai 2014

Faits et procédure

La société Alm Trak Trans, société spécialisée dans le transport routier de fret de proximité et de convois exceptionnels est entrée en contact avec la société Remorques Louault courant 2009 en vue d'acquérir une semi-remorque porte-engins trois essieux.

Un devis a été établi par la société Remorques Louault le 21 juillet 2009 au prix HT de 72 500 euro suivi d'un bon de commande, auquel était joint un plan descriptif de la remorque, accepté le 29 juillet 2009, prévoyant un délai de livraison en décembre 2009.

Un bon de commande manuscrit confirmant la commande du 29 juillet 2009 a été signé entre les parties le 3 août 2009, mentionnant les options ou observations additionnelles convenues. Le 27 août 2009, la société Remorques Louault a confirmé la commande. La société Alm Trak Trans a versé un acompte de 8 600 euro.

Le 20 mars 2010, la société Alm Trak Trans a pris livraison de la semi-remorque. Une facture de 70 000 euro HT a été émise, avec une remise de 2 000 euro pour tenir compte du retard de livraison.

La société Alm Trak Trans a alors fait état de divers désordres relatifs au poids et à la hauteur de la semi-remorque, ainsi qu'à des désordres électriques, de treuil, de table élévatrice et de rampe donnant lieu à des échanges informels, puis, par lettre RAR en date du 10 mai 2010, elle a mis en demeure la société Remorques Louault de mettre en conformité la semi-remorque avec les spécifications contractuelles.

Par lettre RAR en date du 11 mai 2010, la société Remorques Louault a contesté les non-conformités alléguées, notamment celles relatives au poids de la remorque et à la hauteur du plateau, estimant que le poids n'avait jamais été indiqué comme étant un élément décisif de la commande et que la hauteur du plateau n'était pas mentionnée dans les documents contractuels.

La société Alm Trak Trans a fait établir des constats d'huissier les 24 et 30 juin 2010 et a saisi le Tribunal de commerce d'Auxerre le 9 août 2010 en référé, aux fins de voir ordonner une expertise.

Par ordonnance de référé en date du 8 décembre 2010, le Tribunal de commerce d'Auxerre a désigné M. Poirier comme expert.

Ce dernier a rendu son rapport le 29 janvier 2013.

La société Alm Trak Trans a assigné la société Remorques Louault devant le Tribunal de commerce d'Auxerre le 5 avril 2013. Par jugement en date du 19 mai 2014, le Tribunal de commerce d'Auxerre a :

- homologué le rapport de l'expert dans son ensemble,

- ordonné la résolution de la vente pour inexécution de l'obligation de délivrance conforme,

- condamné la société Remorques Louault à payer à la société Alm Trak Trans le prix de vente hors taxe de la semi-remorque soit la somme de 72 000 euro,

- dit que les intérêts prendront effet à compter de la signification de la présente décision,

- dit que la société ALM Trak Trans devra restituer la semi-remorque après avoir reçu paiement de la somme de 72 000 euro en la transportant à Saint-Fargeau à ses frais au siège de la société Remorques Louault et ce dans un délai de huit jours,

- débouté la société ALM Trak Trans de ses demandes d'indemnisation,

- débouté la société Remorques Louault de l'ensemble de ses demandes,

- débouté la société ALM Trak Trans de sa demande de capitalisation des intérêts,

- condamné la société Remorques Louault à payer à la société ALM Trak Trans la somme de 4 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

- condamné la société Alm Trak Trans aux dépens,

- débouté la société Alm Trak Trans de sa demande de remboursement des constats d'huissier,

- dit qu'il n'y avait lieu à exécution provisoire.

Vu l'appel interjeté par la société Remorques Louault le 23 septembre 2014 contre cette décision.

Vu les dernières conclusions signifiées par la société Remorques Louault le 6 avril 2015 par lesquelles il est demandé à la cour de :

A titre principal,

- déclarer la société Remorques Louault recevable et bien fondée en son appel, fins et prétentions,

- infirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce d'Auxerre en date du 19 mai 2014 et en conséquence,

Statuant à nouveau,

- rejeter toutes les demandes, fins et prétentions de la société ALM Trak Trans,

- dire n'y avoir lieu à résolution de la vente,

- dire n'y avoir lieu à prononcer la nullité de la vente,

- dire n'y avoir lieu à prononcer la résolution de la vente pour vice caché,

En conséquence,

- dire que les propositions et réparations suivantes seront partagées financièrement par moitié entre la société Remorques Louault et la société ALM Trak Trans à savoir :

Etablissement d'une nouvelle carte grise,

Ressoudage des brides de rampes,

Contrôle et réglage des essieux auto vireurs dans ses locaux,

Reprise des fixations du support des pièces (à titre commercial),

Réglage au titre de la fuite du réducteur de pression,

Réglage des barres anti-encastrement,

Vérin de table (garantie constructeur),

Soudure châssis (garantie),

Réparation du câble électrique (à titre commercial),

A titre subsidiaire :

- infirmer le jugement entrepris,

- dire et juger que la valeur de restitution de la remorque ne peut être supérieure à 15 000 euro,

En tout état de cause :

- débouter la société ALM Trak Trans de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions incidentes,

- condamner la société ALM Trak Trans au paiement de la somme de 10 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions signifiées par la société ALM Trak Trans le 5 mai 2015 par lesquelles il est demandé à la cour de :

- déclarer la société ALM Trak Trans recevable et bien fondée en son appel.

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

Homologué le rapport de l'expert dans son ensemble,

Ordonné la résolution de la vente du 27 août 2009 concernant la semi-remorque pour inexécution de l'obligation de délivrance conforme imputable à la société Remorques Louault,

Ordonné la restitution du prix de vente,

Condamné la société Remorques Louault à payer à la société ALM Trak Trans la somme de 4 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Réformer le jugement entrepris pour le surplus.

A titre principal,

Statuant à nouveau,

- prononcer la résolution de la vente pour inexécution aux torts de la société Remorques Louault,

En conséquence,

- condamner en suite de la résolution de la vente du 27 août 2009, la société Remorques Louault à rembourser l'entier prix d'achat TTC de la remorque à la société ALM Trak Trans, à savoir 86 112 euro, avec intérêts à compter de l'assignation en référé expertise, soit à compter du 9 août 2010, ou à défaut le 5 avril 2013, date de l'assignation au fond,

À titre subsidiaire,

Statuant à nouveau,

- dire et juger que la société ALM Trak Trans a commis une erreur sur les qualités substantielles de la semi-remorque vendue et que son consentement a été vicié.

En conséquence,

- prononcer la nullité de la vente,

- ordonner les restitutions réciproques,

- condamner la société Remorques Louault à rembourser l'entier prix d'achat TTC de la remorque à la société ALM Trak Trans, à savoir 86 112 euro TTC, avec intérêts à compter de l'assignation en référé expertise, soit à compter du 9 août 2010, ou à défaut le 5 avril 2013, date de l'assignation au fond.

A titre infiniment subsidiaire.

Statuant à nouveau,

- dire et juger que la remorque vendue par la société Remorques Louault est affectée de vices, tenant notamment à sa fragilité excessive, lesquels étaient cachés lors de la conclusion de la vente.

En conséquence,

- prononcer la résolution de la vente,

- ordonner les restitutions réciproques,

- condamner la société remorques Louault à rembourser l'entier prix d'achat de la remorque à la société ALM Trak Trans, à savoir 86 112 euro, avec intérêts à compter du 9 août 2010, ou à défaut le 5 avril 2013, date de l'assignation au fond.

En tout état de cause.

- dire et juger que la société ALM Trak Trans restituera la remorque, après avoir reçu paiement de la somme 86 112 euro, en la mettant à la disposition de la société Remorques Louault au sein de son établissement de Saint-Molf, à charge pour cette dernière d'en reprendre possession à ses frais dans le délai de 8 jours à compter de la signification de l'arrêt d'appel à intervenir,

- condamner la société Remorques Louault à payer la somme de 50 000 euro à la société ALM Trak Trans à titre de réparation des préjudices qu'elle a subis en rapport avec le surpoids de la semi-remorque litigieuse,

- condamner la société Remorques Louault à payer la somme de 75 000 euro à la société ALM Trak Trans à titre de réparation des préjudices qu'elle a subis en rapport avec les dysfonctionnements techniques ayant affecté la semi-remorque litigieuse, y compris trouble dans les conditions de fonctionnement de la société et perte d'exploitation résultant du bris de la rampe arrière le 30-10-2013,

- ordonner la capitalisation des intérêts dus par année entière pour toutes les condamnations pécuniaires mises à la charge de la société Remorques Louault,

- débouter la société Remorques Louault de toutes demandes fins et conclusions,

- condamner la société Remorques Louault à rembourser à la société ALM Trak Trans le coût des constats d'huissier en date des 24 juin 2010, 30 juin 2010, 19 novembre 2010, 25 novembre 2010, d'un coût total de 1 725,82 euro,

- condamner la société Remorques Louault au paiement de la somme de 8 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

L'appelante, la société Remorques Louault, s'oppose à la demande en résolution de la vente pour défaut de conformité. Elle indique que la société Alm Trak Trans, en tant que professionnelle, a pris possession de la semi-remorque le 20 mars 2010 sans formuler d'observations ni de réserves, qu'à défaut de réserves, la réception couvre les défauts de conformité apparents que l'acheteur aurait pu constater, qu'en tout état de cause la non-conformité du produit alléguée n'est pas avérée car le bon de commande ne viserait aucun poids à vide, que l'excès de poids serait dû aux demandes spécifiques de la société Alm Trak Trans qui aurait notamment souhaité faire installer un plateau métallique plutôt qu'un plateau en bois, que les autres défauts de conformité, notamment la hauteur, seraient eux aussi dus à des modifications demandées par la société Alm Trak Trans, qu'enfin, la société Alm Trak Trans n'aurait pas utilisé le matériel dans de bonnes conditions, que le véhicule aurait présenté, lors de l'expertise, des désordres qui n'ont pu en aucun cas être imputés à la société Remorques Louault, mais à une utilisation intensive et inappropriée du véhicule, doublés d'un manque d'entretien.

L'appelante indique encore que les propositions d'intervention qu'elle a formulées ne constituaient qu'un geste commercial et ne portaient en aucun cas reconnaissance de responsabilité, que ces propositions ont été refusées par l'intimée qui a continué à rouler avec la semi-remorque, qu'elle ne peut dès lors alléguer le moindre préjudice, qu'elle ne démontre pas qu'elle aurait perdu des commandes de prestations de transport de ce fait, ni que le véhicule aurait chômé, ni que les prix des prestations auraient été plus faibles en raison d'une capacité limitée à 17 260 kg. Elle a ainsi utilisé le véhicule de manière intensive pendant plus de 4 ans et ne peut obtenir la restitution du prix de vente avec intérêts depuis le 9 avril 2010, ce d'autant que le véhicule s'est déprécié en raison de l'utilisation que la société Alm Trak Trans en a faite et du défaut manifeste d'entretien.

L'intimée, la société Alm Trak Trans, maintient à titre principal sa demande en résolution de la vente pour défaut de délivrance conforme et restitution du prix TTC, outre les intérêts à compter du 9 avril 2010. A défaut, elle soutient que la vente doit être annulée pour erreur sur les qualités substantielles de la semi-remorque, et à tout le moins qu'elle doit être résolue sur le fondement d'un vice caché. Elle indique que le poids à vide et la charge utile faisaient bien partie des documents contractuels, que la non-conformité n'était pas apparente puisque les documents remis lors de la délivrance mentionnaient le poids attendu, que ce n'est qu'à la pesée qu'elle a pu s'en rendre compte et qu'elle a roulé en infraction à plusieurs reprises, que le poids à vide de la semi-remorque présentait une importance toute particulière pour elle car elle organise des convois exceptionnels, qu'elle n'aurait pas contracté si elle avait été informée de cet excès de poids. Elle indique que le vendeur est un professionnel et qu'il avait un devoir d'information quant à ce surpoids. Elle conteste que le surpoids soit dû à des options rajoutées après avoir passé le bon de commande, toutes les options choisies pour équiper la remorque ayant été notées dans le bon de commande qu'elle a émis en juillet 2009, en ce inclus le plancher en métal et le col de cygne. De plus, la confirmation de commande rédigée par l'appelante et qui reprend les équipements optionnels commandés, indiquerait expressément une charge utile de 20/40 tonnes, de sorte que celle-ci aurait été contractualisée lors de la confirmation de la commande. Aucune option " alourdissante " n'aurait été ajoutée par la suite.

La société Alm Trak Trans avance enfin avoir subi différents préjudices en lien avec la remorque qui lui a été vendue. L'intimée aurait notamment été contrainte de restreindre le nombre de marchés pour lesquels elle pouvait se positionner, ce qui constitue selon elle une perte de chance. Elle aurait également subi un trouble dans les conditions d'utilisation de la remorque. Enfin la remorque serait désormais inutilisable ce dont il découle selon elle une perte de chance d'exploiter cette remorque.

La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.

Sur ce la cour,

Sur la résolution de la vente

Considérant qu'aux termes de l'article 1603 du Code civil, le vendeur n'est tenu que de deux obligations principales, celle de délivrer une chose conforme aux spécifications promises et celle de la garantir.

Considérant qu'en l'espèce, les parties sont convenues, selon le devis établi par la société Remorques Louault le 21 juillet 2009, de la vente d'une semi-remorque porte-engins 3 essieux.

Que le bon de commande accepté le 29 juillet 2009 mentionne de façon spécifique le type de semi-remorque, à savoir : " type SR3 PE 22-45 PTC 34-54T CU 20-40T ", c'est à dire " PTC : poids total en charge de 34 à 54 tonnes " et " CU : charge utile de 20 à 40 tonnes ".

Que cette mention figure sur tous les documents contractuels, dans la référence de l'engin.

Que le poids faisait par conséquent partie des caractéristiques convenues contractuellement.

Qu'au demeurant la société Remorques Louault a remis à la société Alm Trak Trans lors de la livraison de la semi-remorque un document intitulé " constitution générale du véhicule " confirmant sa capacité d'assurer des transports exceptionnels, en mentionnant le poids à vide contractuel (13,8T) et la charge utile (40,2T) dans la colonne " Utilisation en TE possible ", et précisant que le véhicule peut circuler sous couvert d'une autorisation spéciale prévue à l'article R. 433-1 du Code de la route.

Qu'au moment de la livraison, il n'est pas indiqué que le poids de la semi-remorque diffère des conditions contractuelles.

Qu'au vu des déclarations du vendeur sur lesdits documents, la société Alm Trak Trans ne peut se voir reprocher, nonobstant sa qualité de professionnelle, de n'avoir pas vérifié, au moment de la remise du véhicule, le poids réel de la semi-remorque, puisque les documents permettant l'établissement du certificat d'immatriculation qui lui ont été remis mentionnaient un poids à vide et un poids maximum en charge qui correspondaient à la commande et que la pesée d'un tel engin ne peut se faire sans outils de pesage spéciaux.

Que le caractère apparent de l'écart de poids n'était dès lors pas établi au moment de la réception de la semi-remorque par la société Alm Trak Trans.

Que pour procéder à cette pesée, l'expert a fait déplacer l'engin dans les locaux des " Salines " puis, à la demande de la société Remorques Louault, à Montoir de Bretagne.

Qu'il a constaté que la remorque seule, déchargée de tous accessoires, pesait 16 540 kg au lieu de 13 800 kg, soit un surpoids de 2 740 kg.

Considérant que l'expert a relevé qu'en conséquence, le véhicule était affecté d'un excès de poids limitant sa charge utile à 17 260 kg au lieu de 20 000 kg tel que prévu par la désignation, le rendant non conforme à la commande, alors que sur les autres désordres, l'expert a relevé partiellement la responsabilité de la société Remorques Louault (concernant les hauteurs et les problèmes électriques) et celle de la société Alm Trak Trans qui a pu utiliser la remorque de façon non appropriée.

Qu'il résulte du rapport de l'expert que cette différence de poids était importante et avait pour conséquence de réduire sensiblement la capacité de transport en limitant de près de trois tonnes le poids total en charge réglementaire possible.

Que la possibilité de faire des transports exceptionnels, pour des convois ayant une masse totale roulante de 48 tonnes, était déterminante, que la spécialité de l'activité de la société Alm Trak Trans était connue du vendeur, ce dernier ayant remis lors de la livraison un document précisant que la semi-remorque était en capacité de faire ce type de transport, et que la société Alm Trak Trans verse aux débats des arrêtés justifiant qu'elle a été habilitée à effectuer des transports dits " exceptionnels ".

Qu'au regard de la spécificité de ce type de transport, seuls des engins adaptés peuvent être utilisés, et le poids total en charge par rapport au poids à vide permet de définir la charge utile transportée, ce qui en constitue un élément essentiel.

Considérant qu'il n'est pas établi que les modifications demandées par la société Alm Trak Trans aient été à l'origine du surpoids constaté par l'expert.

Qu'à supposer même qu'elles le fussent, il eût alors appartenu au vendeur d'en informer l'acquéreur, au moment de la confirmation de la commande, compte tenu de la surcharge qui serait occasionnée par ces modifications convenues contractuellement par rapport aux spécifications de base de son modèle.

Que le défaut de conformité aux caractéristiques convenues est dès lors établi au regard du surpoids.

Qu'il importe peu que pour les autres désordres, notamment les problèmes de hauteur ou les problèmes électriques la société Remorques Louault les ait résolus, ou qu'ils proviennent d'une mauvaise utilisation de la remorque par la société Alm Trak Trans, ces éléments étant sans incidence sur le défaut de conformité originel constaté relatif au poids du véhicule, suffisant pour caractériser le défaut de conformité.

Considérant qu'en sa qualité de vendeur professionnel, la société Remorques Louault a manqué à son obligation de délivrance conforme et qu'il y a lieu de prononcer la résolution de la vente à ses torts exclusifs.

Que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a prononcé la résolution de la vente litigieuse.

Sur la restitution du prix

Considérant qu'en raison de la résolution de la vente pour non-respect de l'obligation de délivrance conforme, la restitution du prix perçu par le vendeur est la contrepartie de la chose remise par l'acquéreur, sans qu'aucune faute ne puisse être imputée à ce dernier.

Qu'ainsi, la semi-remorque doit revenir à la société Remorques Louault, et le prix payé doit être restitué à l'acquéreur.

Que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a ordonné la restitution du prix.

Qu'il sera toutefois infirmé en ce qu'il a fixé le prix à restituer à la somme de 72 000 euro HT alors que le prix s'entend TVA incluse soit 86 112 euro TTC.

Qu'il sera également infirmé en ce qu'il a fixé le point de départ des intérêts au 9 août 2010 alors que c'est la première mise en demeure qui fait courir les intérêts, par application de l'article 1153-1 du Code civil, à savoir en l'espèce l'assignation en paiement, aucune mise en demeure n'ayant été délivrée auparavant.

Sur la diminution du prix à restituer

Considérant qu'aux termes des articles 1631 et suivants du Code civil, lorsqu'à l'époque de l'éviction, la chose vendue se trouve diminuée de valeur, ou considérablement détériorée, soit par la négligence de l'acheteur, soit par des accidents de force majeure, le vendeur n'en est pas moins tenu de restituer la totalité du prix.

Que toutefois si l'acquéreur a tiré profit des dégradations par lui faites, le vendeur a droit de retenir sur le prix une somme égale à ce profit.

Considérant qu'il résulte des pièces versées aux débats que nonobstant l'incidence du défaut de conformité relatif au poids sur l'usure de la semi-remorque, il est établi que la semi-remorque a été utilisée de façon intensive par la société Alm Trak Trans depuis 2010, même pour des transports de moindre calibrage, et que cette remorque s'avère avoir été au moins pour partie diminuée de valeur par la négligence de l'acheteur qui aurait dû cesser toute utilisation si celle-ci était impropre à sa destination.

Qu'en raison de l'usage intensif qui a été fait de la remorque depuis quatre ans il est démontré qu'elle a subi une détérioration majeure, distincte des effets du surpoids.

Que la restitution de la semi-remorque en l'état d'usage et de dégradations doit par conséquent donner lieu à la restitution du prix correspondant à cet état prenant en compte l'utilisation partielle de la remorque.

Qu'au vu des constatations de l'expert, des photos jointes au rapport, de l'absence de justification de l'entretien du véhicule, de l'existence de dégradations liées à l'usage et de la reconnaissance par l'acquéreur de l'utilisation de la remorque, il y a lieu de faire partiellement droit à la demande en diminution du prix à restituer, que la Cour peut évaluer à hauteur de 35 000 euro au regard de la durée d'utilisation.

Sur l'indemnisation demandée par la société Alm Trak Trans

Considérant que la société Alm Trak Trans sollicite une indemnité à hauteur de 50 000 euro pour le préjudice subi par le surpoids de la remorque, notamment pour la perte de chance de réaliser des transports exceptionnels, et de 75.000 euro à titre de réparation pour les nombreuses pannes ayant affecté le véhicule en raison des autres dysfonctionnements techniques.

Mais considérant qu'il résulte des propres déclarations de la société Alm Trak Trans et des arrêtés d'habilitation versés aux débats qu'elle a de fait utilisé la semi-remorque pour des transports de toute nature, y compris des transports exceptionnels en surpoids et ce pendant quatre ans.

Que si la perte de chance alléguée peut être considérée comme probable en raison du risque potentiel que l'écart de poids de 3 tonnes aurait pu occasionner en l'empêchant d'obtenir des marchés ou en lui faisant prendre un risque d'être en infraction, elle n'en rapporte toutefois pas la preuve, ni matérielle ni comptable.

Qu'il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Alm Trak Trans de sa demande d'indemnisation à ce titre.

Considérant que la demande indemnitaire pour les autres dysfonctionnements sur le fondement de l'article 1147 du Code civil suppose que soit établie la violation, par le vendeur, de ses obligations contractuelles, distinctes de l'obligation de délivrance conforme.

Qu'en l'espèce, il ne résulte pas des constatations de l'expert que la responsabilité de la société Remorques Louault soit établie pour l'ensemble des dysfonctionnements allégués.

Qu'en effet, l'expert retient que " le véhicule litigieux présentait en janvier 2011 de nombreux désordres sans que ceux-ci, hors la non-conformité indiquée au paragraphe 6.2 (relative au poids de la remorque) puissent être considérés comme directement liés aux caractéristiques contractuelles elles-mêmes ".

Qu'en outre, il relève que la société Alm Trak Trans " n'a pas présenté de préjudice matériel ['] et que son allégation de préjudice immatériel, ne concernant in fine que le client Sloma, est infondée ".

Qu'elle ne justifie pas plus devant la cour de la réalité d'un préjudice, ni d'un lien de causalité avec un manquement du vendeur.

Qu'il y a lieu par conséquent de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Alm Trak Trans de ces demandes.

Par ces motifs, Confirme le jugement déféré en ce qu'il a ordonné la résolution de la vente, ordonné la restitution du véhicule au siège de la société Remorques Louault aux frais de la société Alm Trak Trans et ordonné la restitution du prix de vente, Confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société Alm Trak Trans de ses demandes d'indemnisation, et de sa demande de capitalisation des intérêts, l'Infirmant pour le surplus, Statuant à nouveau, Condamne la société Remorques Louault à restituer à la société Alm Trak Trans la somme de 86 112 euro TTC avec intérêts au taux légal à compter du 5 avril 2013, Condamne la société Alm Trak Trans à payer à la société Remorques Louault une indemnité pour les dégradations du véhicule à hauteur de 35 000 euro, qui pourra venir en déduction des sommes restituées, Condamne la société Remorques Louault à payer à la société Alm Trak Trans la somme de 4 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la société Remorques Louault aux dépens y compris les frais d'expertise.