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Décisions

CA Aix-en-Provence, 3e ch. B, 17 avril 2014, n° 12-11309

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Electrolux Home Products France (SAS)

Défendeur :

Arthur Martin Electrolux, Axa France Iard (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Devalette

Conseillers :

Mme Tournier, M. Cabaret

Avocats :

Mes Vigneron, Wargnie, Robert, Selarl Boulan Cherfils Imperatore

TGI, Toulon du 9 mai 2012

9 mai 2012

Les Consorts Griffe Ordioni ont fait l'acquisition d'un lave vaisselle de marque Arthur Martin pour un prix de 571,12 euros TTC dans le magasin Darty à La Valette du Var.

Un bon de livraison et de garantie a été établi le 11 mai 2004, portant livraison dudit matériel à leur ancienne adresse, [...].

L'appareil a par la suite fait l'objet de plusieurs interventions du Service Après-Vente DARTY comme suit :

1. septembre 2005: pompe de vidange,

2. novembre 2005: interrupteur général au niveau de la façade,

3. décembre 2005 : touche de déverrouillage de la poignée d'ouverture et enjoliveur,

4. juin 2006 : joint sur la sonde de température,

5. octobre 2008 : durit de la pompe de la cuve.

En 2007, les Consorts Griffe Ordioni ont déménagé au [...] et ont procédé au branchement du lave-vaisselle dans leur cuisine nouvellement agencée.

Dans la nuit du 3 janvier 2011 au 4 janvier 2011, vers 4 heures du matin, un incendie s'est déclaré au niveau du lave-vaisselle en endommageant les caissons de cuisine adjacents et en provoquant un enfumage de l'ensemble des pièces de la villa.

Suite à la déclaration de sinistre, la Compagnie Axa France Iard, assureur Multirisque Habitation des Consorts Griffe Ordioni les a indemnisés après avoir fait procéder à des constatations sur les lieux par un expert.

Par assignation en date du 9 mai 2011, Axa France Iard, subrogée dans les droits de ses assurés, a saisi le tribunal de grande instance de Toulon au visa des articles 1386-1 et suivants du Code Civil et subsidiairement 1641 et suivants du Code Civil aux fins de voir condamner la Société Arthur Matin Electrolux à lui payer la somme de 27 386,22 euro avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation valant mise en demeure, outre 3 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile, le tout assorti de l'exécution provisoire.

La Société Electrolux Home Products France SAS, venant au lieu et place de la Société Arthur Matin Electrolux a conclu au débouté de ces demandes au motif qu'Axa ne rapportait pas la preuve d'un défaut du produit ou d'un vice antérieur à la vente.

Elle reprochait à Axa d'avoir fait l'économie d'une expertise judiciaire, qui seule constituerait une mesure d'investigation objective pour établir la cause du sinistre.

Par jugement, assorti de l'exécution provisoire, rendu le 9 mai 2012, le Tribunal de Grande Instance de Toulon a, au visa des articles 1386-1 et suivants du Code Civil :

- condamné la Société Electrolux venant au lieu et place de la Société Arthur Matin Electrolux à payer à Axa, subrogée dans les droits et actions des consorts Griffe et Ordioni, la somme de 27 386,22 euro ;

- dit que cette somme sera assortie d'intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent jugement ;

- débouté la Société Electrolux de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

- condamné la Société Electrolux à payer à Axa la somme de 1.500 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure Civile ;

- débouté la Société Electrolux de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- condamné la Société Electrolux aux dépens.

La Société Electrolux a interjeté appel de cette décision selon déclaration enregistrée le 21 juin 2012.

Au terme de ses conclusions d'appelante en date du 19 avril 2013, elle sollicite la réformation du jugement en demandant à la Cour de dire et juger qu'Axa ne rapporte pas la preuve d'un défaut du produit ou d'un vice antérieurs à la vente et de la responsabilité de la Société Electrolux dans la réalisation du sinistre.

Par conclusions du 14 novembre 2012, Axa France Iard sollicite la confirmation du jugement.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 25 février 2014.

Sur ce ;

Sur l'application des articles1386-1 et suivants du Code civil

Selon l'article 1386-1 du Code civil, le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit, qu'il soit ou non lié par un contrat avec la victime.

La société Electrolux Home Products France est producteur du lave-vaisselle litigieux de marque Arthur Martin.

Aux termes de l'article 1386-4 du Code civil, un produit est défectueux au sens du présent titre lorsqu'il n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre. Dans l'appréciation de la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre, il doit être tenu compte de toutes les circonstances et notamment de la présentation du produit, de l'usage qui peut en être raisonnablement attendu et du moment de sa mise en circulation. Un produit ne peut être considéré comme défectueux par le seul fait qu'un autre, plus perfectionné, a été mis postérieurement en circulation.

L'article 1386-9 du Code civil précise que le demandeur doit prouver le dommage, le défaut et le lien de causalité entre le défaut et le dommage.

En l'occurrence, la Compagnie Axa, subrogée dans les droits de ses assurés, démontre le dommage caractérisé par l'incendie survenu au niveau du bandeau haut du lave-vaisselle, qui a eu pour effet d'endommager les caissons de la cuisine adjacents, et provoqué un enfumage de l'ensemble des pièces de la villa des Consorts Griffe-Ordioni, ces dommages ayant donné lieu à une indemnisation de 27 386,22 euro.

S'agissant du défaut ou de l'absence de sécurité du produit en lien de causalité avec le dommage, dont la charge de la preuve pèse sur le demandeur, il convient de constater que les parties s'opposent en fait sur les constatations contradictoires du Cabinet Elex, commis par la SA Axa, qui a relevé dans un procès-verbal du 7 février 2011 :

" - qu'il n'y a pas d'échauffement au niveau de la fiche de la prise de raccordement, ni sur la prise de courant.

- que l'incendie a pris naissance dans le bandeau haut du lave-vaisselle où est logée la partie électrique et électronique de l'appareil.

- qu'il existe une zone d'échauffement importante dans la zone centrale du bandeau.

- une déformation de la plaque métallique couvrant le bandeau haut correspondant à la zone d'échauffement principale. Il ne peut être déterminé si cette déformation est antérieure ou postérieure au sinistre".

Le Bureau Cunningham Lindsey France chargé de représenter AB Electrolux France a refusé de signer le procès-verbal contradictoire établi le 7 février 2011 par le Cabinet Elex. Il a établi un rapport le 4 avril 2011, dans lequel il indique qu'il est incontestable que l'incendie a pris naissance au niveau de la cuisine et que Monsieur Griffe lui a indiqué avoir programmé un départ différé du lave-vaisselle. Ce Cabinet d'expertise a constaté que le lave-vaisselle encastrable est totalement détruit, les meubles de cuisine bas, ainsi que le plan de travail présent au voisinage de l'appareil sont dégradés. D'après les observations le départ de feu est localisé au niveau du lave-vaisselle. Après démontage de cet appareil électroménager, cet expert a indiqué que le départ de feu est situé en partie haute frontale de l'appareil, le bandeau de commande supérieur de la porte étant complètement détruit.

Il s'ensuit que le tribunal a très justement constaté que l'incendie s'est spontanément déclaré au sein de l'appareil, puisqu'il a pris naissance dans le bandeau haut du lave-vaisselle, le cabinet Elex ayant exclu que cet incendie ait pu provenir d'un élément extérieur, dans la mesure où aucun échauffement au niveau de la prise de raccordement ni sur la prise de courant n'a été relevé, l'incendie étant resté circonscrit au niveau du lave-vaisselle.

C'est donc à bon droit que le tribunal a jugé que le lave-vaisselle était défectueux et qu'il n'offrait pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre, étant relevé que la SA Axa n'a pas à établir la cause du défaut à l'origine du dommage, contrairement à ce que soutient la société Electrolux Home Products France.

Aux termes de l'article 1386-11 du Code civil, le producteur est responsable de plein droit dès lors que sont établis un dommage, un défaut et un lien de causalité entre les deux, à moins qu'il ne prouve que, compte tenu des circonstances, il y a lieu d'estimer que le défaut ayant causé le dommage n'existait pas au moment où le produit a été mis en circulation ou que ce défaut est né postérieurement.

La prétention de la société Electrolux Home Products France, concernant l'existence d'une déformation de la plaque métallique couvrant le bandeau, correspondant à la zone des échauffements relevés, qui proviendrait d'un événement extérieur, n'étant pas démontrée, le tribunal a très justement retenu, que la société Electrolux Home Products France, n'établissait pas que le défaut ayant causé le dommage n'existait pas au moment où le produit a été mis en circulation ou qu'il soit né postérieurement à sa mise en circulation.

En conséquence, c'est à bon droit que le tribunal a retenu la responsabilité de la société Electrolux Home Products France et qu'il l'a condamnée à indemniser la SA Axa.

Par ces motifs, La Cour, statuant par arrêt contradictoire, Confirme le jugement déféré, Dit n'y avoir lieu, en cause d'appel, à l'application de l'article 700 du Code de procédure civile ; Condamne la société Electrolux Home Products France aux dépens de la procédure, qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.